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Décisions

CA Versailles, 13e ch., 22 mars 2022, n° 21/02631

VERSAILLES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Garage Auto + (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Valay-Brière

Conseillers :

Mme Baumann, Mme Bonnet

T. com. Nanterre, du 18 mars 2021, n° 20…

18 mars 2021

Par acte sous seing privé du 21 novembre 2017, la SARL Garage auto+ a conclu avec la société Assetlease un contrat de location portant sur un copieur de marque Olivetti fourni par la société Olicopie, d'une durée de 21 trimestres, moyennant le paiement d'un loyer trimestriel de 705 euros HT. Ce contrat de location a été cédé à la société Geolia leasing solution.

Le matériel a été livré le 15 décembre 2017 à la société Garage auto+.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 mai 2018, la société Garage auto+, après avoir précisé qu'elle n'avait pas eu l'exemplaire du contrat, a demandé à la société Olicopie l'annulation du contrat arguant de pratiques commerciales trompeuses et invoquant les dispositions du code de la consommation. Une nouvelle mise en demeure a été adressée par le conseil de la société Garage auto+ à la société Geolia leasing solutions le 5 octobre 2018, lui demandant d'une part la confirmation de l'annulation des contrats signés et d'autre part de venir récupérer le matériel.

Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 14 février 2019, la société Geolia leasing solutions a mis en demeure la société Garage auto+ de lui régler sous huit jours la somme de 3 975,83 euros TTC, majorée d’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement ainsi que des intérêts prévus au contrat, sous peine de résiliation de plein droit du contrat de financement.

Par courrier recommandé avec avis de réception du 17 juillet 2019, la société Geolia leasing solutions a notifié à la société Garage auto+ la résiliation de plein droit du contrat de location et l'a mise en demeure de lui régler la somme de 17 593,80 euros, correspondant aux loyers échus pour la somme de 5 961,30 euros TTC et aux loyers à échoir majorés de 10 % de pénalités, pour la somme de 11 632,50 euros HT.

Puis, par acte du 2 septembre 2019, la société Geolia leasing solutions a assigné la société Garage auto+ devant le tribunal de commerce de Nanterre. Cette dernière a appelé dans la cause la société Olicopie et son liquidateur judiciaire, la Selasu B.. Le tribunal, par jugement réputé contradictoire assorti de l'exécution provisoire du 18 mars 2021, a, après avoir joint les deux instances :

- Dit que le contrat liant la société Garage auto+ et la société Olicopie est nul ;

- Dit que le contrat liant la société Garage auto+, la société Asset lease et la société Geolia leasing solutions est nul ;

- Dit que le contrat liant la société Garage auto+ et la société Geolia leasing solutions est nul en raison de son interdépendance avec le contrat signé entre la société Garage auto+ et la société Olicopie ;

- Débouté la société Geolia leasing solutions de ses demandes ;

- Ordonné la reprise du matériel par la société Geolia leasing solutions ;

- Condamné la société Geolia leasing solutions à payer à la société Garage auto+ la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la société Geolia leasing solutions aux dépens.

Par deux déclarations du 22 avril 2021, la société Olinn Business solutions, anciennement société Geolia leasing solutions, a interjeté appel de ce jugement en intimant la société Garage auto+.

Dans ses conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 19 juillet 2021, la société Olinn business solutions demande à la cour de :

- Dire et juger l'appel recevable ;

- Réformer la décision dans son intégralité ;

- Déclarer le contrat entre la société Garage auto+ et la société Olicopie comme valide ;

- La recevoir dans l'ensemble de ses demandes ;

- Considérer l'objet du contrat de location de matériel bureautique comme entrant dans le champ de l'activité principale de la société Garage auto+ ;

- Considérer sa créance à l'encontre de la société Garage auto+ comme étant certaine, liquide et exigible ;

En conséquence,

- Condamner la société Garage auto+ à lui payer la somme de 5 961,30 euros TTC en règlement des loyers échus ;

- Condamner la société Garage auto+ à lui payer la somme de 13 959 euros TTC, en règlement des frais et indemnités de résiliation du contrat en vertu de l'article 9 du contrat de location ;

- Condamner la société Garage auto+ à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la société Garage auto+ aux dépens ;

- Assortir la présente décision de l'exécution provisoire.

L'appelante critique le jugement estimant que le tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation sur la sanction applicable au professionnel ne respectant pas les mentions légales relatives au droit de rétractation. Rappelant les dispositions de l'article L. 221-5 du code de la consommation, elle soutient que le non-respect des mentions obligatoires relatives au droit de rétractation n'est pas la nullité du contrat mais la prolongation du délai pour user de son droit de rétractation. Elle relève qu'en l'espèce la société Olicopie a prévu un encart de rétractation au bas de ses conditions générales de vente et que la société Garage auto+, qui avait jusqu'au 21 novembre 2018, n'a pas retourné le bordereau de rétractation prévu à cet effet dans ce délai, en sorte que la nullité du contrat ne peut être invoquée.

A titre subsidiaire, elle soutient que la location d'un copieur entre dans le champ d'activité principale de la société Garage auto+ ce qui exclut l'application d'un quelconque délai de rétractation.

Elle conteste par ailleurs le fait que le matériel livré ait été d'occasion, relevant que la société Garage auto+ a signé le procès-verbal de réception et de mise en service des équipements et a constaté que le matériel neuf livré fonctionnait parfaitement.

Elle prétend être titulaire d'une créance certaine, liquide et exigible dont elle demande le paiement.

La société Garage auto+, dans ses conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 18 octobre 2021, demande à la cour de :

À titre principal,

- Confirmer l'ensemble des dispositions du jugement ;

À titre subsidiaire,

- Constater la résiliation du contrat entre la société Olinn business solutions et elle par cette dernière le 28 mai 2018, et enjoindre la société Olinn business solutions à produire son décompte ;

En tout état de cause, et y ajoutant,

- Condamner la société Olinn business solutions à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

- Condamner la société Olinn business solutions aux entiers dépens d'appel.

La société Garage auto+ soutient, au visa de l'article L. 221-3 du code de la consommation, que les dispositions des articles L. 221-5, L. 111-1, L. 221-9, L. 242-1 et L. 121-23 de ce code qui lui sont applicables n'ont pas été respectées en sorte que les contrats qu'elle a signés sont nuls. Elle précise qu'elle relève de la catégorie des TPE de moins de cinq salariés et fait valoir que le contrat de location d'un photocopieur qu'elle a conclu hors établissement n'entre pas dans le champ de son activité principale.

A titre subsidiaire, elle prétend avoir exprimé sa volonté de rétractation et conclut en tout état de cause à l'interdépendance du contrat de financement.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 janvier 2022.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

Aucun moyen n'étant soulevé ou susceptible d'être relevé d'office, il convient de déclarer l'appel de la société Olinn business solutions recevable.

En préalable, la cour relève que, "nul ne plaidant pas procureur", et la société Olicopie n'ayant pas été intimée, la cour ne peut pas statuer sur la demande relative à la validité du contrat conclu entre cette dernière et la société Garage auto+ de sorte que la société Olinn business solutions, qui n'a pas qualité pour critiquer le jugement en ce qu'il a dit que le contrat liant la société Garage auto+ à la société Olicopie est nul, est irrecevable en sa demande tendant à voir déclarer ce contrat valide.

Il résulte de l'article L. 221-3 du code de la consommation, issu de la loi du 17 mars 2014, dite loi Hamon, que le professionnel employant cinq salariés au plus, qui souscrit, hors établissement, un contrat dont l'objet n'entre pas dans le champ de son activité principale, bénéficie de certaines des dispositions protectrices du consommateur parmi lesquelles figure le droit de rétractation.

Il est constant que le contrat de location de longue durée qui a pour objet la mise à la disposition de la société Garage auto+ d'un photocopieur en contrepartie du paiement d'un loyer a été conclu hors établissement au sens de l'article L. 221-3.

La loi Hamon a supprimé la notion de "rapport direct" avec l'activité professionnelle et lui a substitué celle de "champ d'activité principale du professionnel", le législateur ayant souhaité qu'un professionnel qui emploie cinq salariés au plus soit considéré comme un simple consommateur à partir du moment où il contracte dans un champ de compétence qui n'est pas le sien.

Il n'est pas contesté par l'appelante que la société Garage auto+ emploie cinq salariés au plus. Exerçant l'activité de garagiste, la société Garage auto+ ne dispose pas des compétences professionnelles pour apprécier les conditions financières d'un contrat de location portant sur un photocopieur, matériel de bureau indispensable à son activité principale.

Il doit, par conséquent, être considéré que le contrat de location de longue durée litigieux n'entre pas dans le champ de son activité principale.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont dit que, s'agissant d'un contrat conclu hors établissement, les dispositions protectrices du code de la consommation s'appliquent.

Et c'est par de justes motifs que la cour adopte que le tribunal a jugé que le contrat de location conclu entre la société Assetlease et la société Garage auto+ ne respecte pas les dispositions impératives du code de la consommation, ce qui au demeurant n'est pas discuté par l'appelante, a dit qu'il est nul et a débouté la société Geolia leasing solutions de toutes ses demandes.

Il convient donc de confirmer le jugement en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement,

- Déclare l'appel de la société Olinn business solutions recevable.

- Déclare la société Olinn business solutions irrecevable en sa demande relative au contrat liant la société Garage auto+ et la société Olicopie.

- Confirme le jugement en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

- Condamne la société Olinn business solutions aux dépens de la procédure d'appel.

- Condamne la société Olinn business solutions à payer à la société Garage auto+ la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente et par Madame Natacha BOURGUEIL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, La présidente,

Décision(s) antérieure(s)

• Tribunal de Commerce NANTERRE 18 mars 2021 2019F01422.