Cass. 3e civ., 31 mars 2004, n° 02-15.754
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Weber
Rapporteur :
M. Cachelot
Avocat général :
M. Guérin
Avocats :
SCP Nicolay et de Lanouvelle, SCP Thouin-Palat et Urtin-Petit
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 13-13 du Code de l'expropriation, ensemble l'article L. 251-1 et L. 251-2 du Code de la construction et de l'habitation ;
Attendu que les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain, causé par l'expropriation ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 27 mars 2002), que la société civile immobilière Lemoine (la SCI) a consenti à la société Inter Coop un bail à construction sur des terrains lui appartenant, que cette dernière a, en application des clauses du bail, édifié sur ce terrain plusieurs constructions dont une partie a été détruite par un incendie ;
que les terrains et les baux à construction ayant été expropriés et le juge de l'expropriation ayant débouté la SCI de sa demande d'indemnité pour perte de la propriété des constructions devant lui revenir en fin de bail, celle-ci a assigné la société Inter Coop devant le juge de droit commun en réparation du préjudice subi du fait du défaut de reconstruction des bâtiments détruits par incendie ;
Attendu que pour débouter la SCI de cette demande, l'arrêt retient que, suivant la convention qui unissait les parties, les constructions édifiées restaient la propriété du preneur pendant toute la durée du bail à construction et devaient devenir la propriété du bailleur à l'expiration du bail, que le contrat ne contenait aucune clause particulière en cas d'expropriation, et que dans un tel cas l'expropriation a pour effet de transférer directement la propriété des constructions de la société locataire à l'autorité expropriante de sorte que c'est le preneur et lui seul qui est créancier de l'indemnité correspondante, qu'il s'ensuit que l'existence ou non de constructions où l'état de celles-ci n'a d'incidence que sur l'indemnité allouée au locataire sans que le bailleur puisse prétendre à quoi que ce soit à ce titre ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnisation du preneur pour perte, pendant la durée contractuelle du bail, de la propriété des constructions édifiées par lui sur le terrain loué n'exclut pas celle du bailleur pour perte de la propriété de ces biens lui revenant en fin de bail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 mars 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen.