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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 30 mars 2022, n° 20/08551

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Midas France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dallery

Conseillers :

Mme Depelley, Mme Lignières

Avocats :

Me Fertier , Me Hardouin

T. com. Evry, du 3 juin 2020, n° 2020F00…

3 juin 2020

Le 5 mai 2011, la société Draveil Echappement et M. Y, son gérant, ont conclu avec la SAS Midas France un contrat de franchise pour l'exploitation d'un centre Midas à Draveil (91210)   pour une durée de 10 ans.

Par lettre du 29 octobre 2019, signifiée par acte d'huissier du 31 octobre, la société Midas France a notifié à la société Draveil Echappement, représentée par M. Y, la résiliation immédiate et à ses torts exclusifs du contrat de franchise et a réclamé la somme de 267 498 euros, à parfaire, en application de l'article 20.3. Il était reproché à M. Y, également gérant de la société Brunoy Echappement, d'exploiter depuis le 1er octobre 2019 un commerce de garage réparations, vente, achat et location de voitures automobiles sous l'enseigne « Point S » <adresse>, anciennement exploité suivant un contrat de franchise Midas arrivé à son terme le 30 septembre 2019.

Par acte du 10 janvier 2020, la société Draveil Echappement a assigné la société Midas France devant le tribunal de commerce d'Evry aux fins d'obtenir des dommages intérêts pour rupture unilatérale du contrat de franchise de mauvaise foi.

Par jugement du 3 juin 2020, le tribunal de commerce d'Evry a :

- condamné la SAS Midas France à payer à la SARL Draveil Echappement la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts, outre les intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

- ordonné la transmission par la SAS Midas France à la SARL Draveil Echappement de son fichier d'exploitation concernant tous les clients qu'elle a servis dans un délai de huit jours à compter de la signification du jugement à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de huit jours après la date de signification du présent jugement et pour une durée maximum de trois mois ;

- s'est réservé la liquidation de l'astreinte,

- débouté la SAS Midas France de sa demande d'application envers la SARL Draveil Echappement d'une obligation de non-réaffiliation résultant de l'article 20.2 du contrat de franchise,

- condamné la SAS Midas France à payer à la SARL Draveil Echappement la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs autres demandes,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

- renvoyé au juge de l'exécution l'application des dispositions de l'article L. 111-8 du code des procédures d'exécution,

- condamné la SAS Midas France qui succombe aux entiers dépens, en ce compris les frais de greffe liquidés à la somme de 63,36 euros TTC.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 3 juillet 2020, la société Midas France a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 31 décembre 2021, la société Midas France, demande à la Cour de :

Infirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a caractérisé la violation par la société Draveil Echappement de son obligation de non-concurrence et en ce qu'il a jugé que la résiliation du contrat de franchise par la société Midas ne procédait d'aucune mauvaise foi ;

Et statuant à nouveau,

Vu l'article 1103 du Code civil,

Vu l'article 1104 du Code civil,

Vu le Contrat de franchise du 5 mai 2011,

Dire et juger que la société Draveil Echappement et son représentant Monsieur Y ont violé leur obligation de non-concurrence résultant de l'article 20.1 du contrat de franchise du 5 mai 2011 ;

Dire et juger que la clause de non-réaffiliation, telle que prévue à l'article 20.2 du contrat de franchise, est valable et opposable à la société Draveil Echappement ;

Dire et juger que la société Draveil Echappement et son représentant Monsieur Y ont violé leur obligation de non-réaffiliation résultant de l'article 20.2 du contrat de franchise ;

Par conséquent,

Condamner la société Draveil Echappement à payer à la société Midas France la somme de 282.498 € TTC en application de l'article 20.3 du contrat de franchise ;

Débouter la société Draveil Echappement de toutes ses demandes, fins et conclusions et à titre subsidiaire ramener le montant des dommages et intérêts qui lui seraient alloués à de plus justes proportions ;

Condamner la société Draveil Echappement à payer à la société Midas France la somme de 10.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamner la société Draveil Echappement aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Me Stéphane FERTIER, avocat au barreau de Paris, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 28 décembre 2021, la société Draveil Echappement demande à la Cour de :

Débouter la société Midas France de l'ensemble de ses demandes.

Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions en ce qu'il a :

- condamné à payer à la société Draveil Echappement la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts outre les intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

- ordonné la transmission par la SAS Midas France à la société Draveil Echappement de son fichier d'exploitation concernant tous les clients qu'elle a servis dans un délai de huit jours à compter de la signification du jugement à intervenir, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du huitième jour après la date de signification du présent jugement et pour une durée maximum de trois mois en se réservant la liquidation de l'astreinte,

- débouté la société Midas France de sa demande d'application d'une obligation de non-réaffiliation résultant de l'article 20. 2 du contrat de franchise,

- condamné la société Midas France à payer à la société Draveil Echappement la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner la société Midas France à payer à la société Draveil Echappement et à Monsieur Y la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner la société Midas France aux dépens dont le recouvrement sera poursuivi par la SELARL 2H Avocats, en la personne de Maître Patricia Hardouin, dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.

La cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur la demande de dommages intérêts de la société Midas France à hauteur de 282 498 euros TTC en première instance introduite par la société Draveil Echappement, le tribunal a retenu que M. Y, en ouvrant un centre Point S à Brunoy, en étant gérant de la société BTJ, unique associée de Brunoy Echappement et également gérant de Brunoy Echappement, tout en étant gérant du centre Midas à Draveil, a enfreint son engagement de ne pas s'intéresser à une entreprise exploitant tout ou partie des activités exploitées par le réseau Midas, selon l'article 20.1 de ses contrats de franchise. Le tribunal en a déduit que la société Midas n'avait pas rompu unilatéralement le contrat de franchise qui la liait à la société Draveil Echappement de mauvaise foi et que la société Draveil Echappement et son représentant M. Y ont violé les dispositions contractuelles relatives à l'obligation de non-concurrence résultant du contrat de franchise du 5 mai 2011 de la société Brunoy Echappement.

Le tribunal a débouté la société Midas France de ses demandes reconventionnelles et en particulier de sa demande de dommages intérêts à hauteur de 282 498 euros TTC, aux motifs que l'obligation de non-réaffiliation du contrat de franchise ne reposait sur aucun savoir-faire exclusif démontré et qu'une telle clause s'oppose à la liberté d'entreprendre dont la valeur est constitutionnelle.

A l'appui de son appel, la société Midas France sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu une violation de l'obligation contractuelle de non-concurrence prévue à l'article 20.1 du contrat de franchise mais son infirmation en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle de dommages intérêts de 282 498 euros. La société Midas France soutient que le tribunal a opéré une confusion sur le fondement de cette demande qui n'était pas fondée sur la violation de l'obligation de non ré affiliation prévue à l'article 20.2 du contrat, mais bien sur la violation de l'article 20.1 afférent à l'obligation de non-concurrence. Elle précise qu'elle ne revendiquait devant le tribunal le bénéfice des dispositions de l'article 20.3 qu'au regard de la violation de l'obligation de non-concurrence. A ce titre elle réclame, conformément à l'article 20.3 la somme de 282 498 € TTC correspondant à cinq fois le montant annuel moyen des redevances d'exploitation dont le franchisé s'est trouvé redevable au cours des trois derniers exercices et le mondant du droit d'entrée habituellement facturé par le franchiseur au moment de la violation.

La société Midas France ajoute que si elle faisait état, en première instance de l'obligation de non-réaffiliation, ce n'était qu'en considération de son application à venir, et ne formulait aucune demande indemnitaire à ce titre mais sollicitait au regard de « l'intention d'enfreindre » de M. Y du tribunal qu'il "dise que la société Draveil Echappement et M. Y, en sa qualité de gérant, sont tenus de respecter l'obligation de non-réaffiliation et les condamnera en cas de violation, à payer, à la société Midas la somme de 1 000 euros par jour d'infraction jusqu'à cessation de la violation des dispositions contractuelles."

A hauteur d'appel, la société Midas France relève cependant que M. Y a manifestement enfreint également son engagement de non-réaffiliation aussi bien pendant qu'à l'issue du contrat, puisqu'un Point S est désormais exploité par l'intermédiaire de sa société BTJ, tant à Draveil qu'à Brunoy. Partant, elle s'estime bien fondée à solliciter également à ce titre, l'application des dispositions de l'article 20.3 au regard de la violation de la clause de non-réaffiliation. A cet égard, elle soutient que la société Draveil Echappement n'a pas été victime de discrimination et que la société Midas France justifie d'un savoir-faire lui permettant de revendiquer le bénéficie de la clause de non-réaffiliation.

La société Draveil Echappement, à l'appui du rejet de la demande de dommages intérêts de la société Midas France, fait valoir dans ses écritures, que devant le tribunal la société Midas France fondait sa demande sur l'article 20.3 du contrat de franchise ; or les dispositions de cet article visent expressément la clause prévue à l'article 20.1 pour protéger le détournement du savoir-faire du franchiseur et les dispositions de l'article 20.2 ayant pour objet l'interdiction de réaffiliations afin de faciliter le rayonnement du franchiseur. Aussi, selon la société intimée, le tribunal n'a commis aucune méprise, dès lors que la sanction de l'interdiction de non-concurrence, du détournement de savoir-faire et de l'interdiction de réaffiliation étant toutes contenues dans les dispositions de l'article 20.3, sanction qui fixe l'indemnisation pouvant être réclamée par le franchiseur en cas de violation des dispositions du contrat de franchise. Elle précise que l'article 20.1 du contrat de franchise intitulé « Non-Concurrence » ne vise qu'à protéger : « les droits de propriété intellectuelle ainsi que le savoir-faire de la société Midas comprenant notamment les méthodes commerciales et de gestion destinée à optimiser la rentabilité de l'exploitation ».

A cet égard la société intimée soutient que la société Midas France ne justifie pas d'un savoir-faire différent de Point S ni exclusif justifiant une protection et que la clause de non-réaffiliation est abusive en application de l'article L. 442 du code de commerce. Elle relève en outre une rupture d'égalité avec d'autres franchisés et que la société Midas France ne peut soutenir qu'elle souhaite à tout prix protéger son savoir-faire alors qu'elle est membre d'un groupe dans lequel se trouvent des sociétés concurrentes qui pratiquent la même activité que la sienne et qui connaissent donc parfaitement son savoir-faire. En toute hypothèse, elle souligne que la société Midas France ne justifie pas d'un préjudice à l'appui de sa demande de dommages intérêts.

Sur ce,

La société Draveil Echappement et M. Y en sa qualité de gérant de cette société et de « partenaire » ont signé le 5 mai 2011 avec la société Midas France un contrat de franchise d'une durée de 10 années pour l'exploitation, sous l'enseigne Midas, d'un centre de réparation rapide automobile à Y Draveil Echappement.

Ce contrat (pièce n°1 Midas) prévoyait en son article 20 intitulé « Non-concurrence / non-affiliation » les stipulations suivantes :

20.1  Non concurrence

Il est essentiel pour le Franchiseur de protéger ses droits de propriété intellectuelle, ainsi que le savoir-faire Midas, comprenant notamment les méthodes commerciales et de gestion destinées à optimiser la rentabilité de l'exploitation.

Il est également de l'intérêt des parties de veiller au maintien de l'identité commune et de la réputation du réseau franchisé, en pérennisant les investissements réalisés et notamment les services rendus par le Franchiseur afin de soutenir chaque exploitation franchisée, la communication réalisée sur la marque Midas, et le choix des implantations par rapport à la cible de clientèle.

C'est pourquoi le Franchisé et le Partenaire s'engagent, pendant toute la durée du contrat, à ne pas s'intéresser directement ou indirectement à une entreprise exploitant tout ou partie des activités exploitées par le réseau Midas sous une enseigne de renommée nationale ou régionale.

Cette interdiction est valable sur l'ensemble du territoire français.

Cette interdiction s'appliquera également en cas de résiliation du présent contrat aux torts du Franchisé pour une période d'un an suivant la résiliation du contrat ou à compter de la dépose des enseignes et de la suppression de tout signe distinctif Midas si elle est postérieure et dans un rayon de dix minutes de transport en voiture.

Cette interdiction ne fait pas obstacle à l'exploitation par le Franchisé de tout ou partie des activités du réseau Midas, de manière strictement indépendante.

Le Franchiseur pourra renoncer à l'application de cette interdiction en le notifiant au Franchisé ou au Partenaire au plus tard à la date de résiliation.

20.2 (Non-réaffiliation)

20.3 Sanctions

Le Franchisé reconnaît :

- que l'interdiction stipulée à la clause 20.1 a pour objet notamment d'éviter un détournement du savoir-faire du Franchiseur et de l'apport fait par celui-ci à l'exploitation d'un centre Midas, lequel est habituellement concédé dans le cadre d'un contrat de franchise,

- que l'interdiction stipulée à la clause 20.2 a pour objet notamment de faciliter la réimplantation d'un centre Midas permettant au Franchiseur, au-delà de la redevance et des droits d'entrée, le rayonnement de l'enseigne Midas et la contribution d'un nouveau centre aux économies d'échelle du réseau.

En conséquence, en cas de violation des engagements visés ci-dessus, le Franchisé versera au Franchiseur, à titre de clause pénale, une indemnité forfaitaire égale à cinq (5) fois le montant annuel moyen des redevances d'exploitation dont il s'est trouvé redevable au cours des trois derniers exercices (réduit aux deux derniers ou au dernier exercice s'il existe moins de trois exercices clos) ayant précédé la violation, et le montant du droit d'entrée habituellement facturé par le Franchiseur au moment de la violation et ce, sans préjudice des autres actions qui pourraient être intentées à ce titre par le Franchiseur. ».

(...)

23.2. Résiliation de plein droit sans mise en demeure préalable

La résiliation judiciaire du présent contrat pourra être poursuivie par chacune des parties, aux torts de la partie défaillante.

En outre, la résiliation sera encourue de plein droit et sans mise en demeure préalable à réception d'une simple notification par le Franchiseur dans les cas suivants :

- en cas de manquements aux obligations du présent contrat non susceptibles de réparation et notamment dans les cas suivants :

* en cas d'atteinte grave à l'image de marque Midas, en cas de dénigrement public répété, tant à l'égard du Franchiseur qu'à l'égard du réseau Midas,  au cas où le Franchiseur aurait dissimulé au Franchisé son chiffre d'affaires en violation des dispositions de la clause 17.4,

* en cas de violation de l'une quelconque des dispositions de l'article 19 (Cessibilité), de l'article 20 (Non-concurrence) et de l'article 21 (Confidentialité),

* en cas de condamnation pour une infraction pénale, pour une infraction et une réglementation afférentes à la protection du consommateur ou à celle de l'environnement,

 en cas de non respect des règles de mise en œuvre de la garantie européenne Midas.

Il n'est pas contesté que M. Y, partenaire au contrat de franchise précité, exploitait également un commerce de garage, réparation, vente, achat et location de voitures automobiles suivant un contrat de franchise signé le 30 juin 2009 entre M. Y et la société Brunoy Echappement d'une part et la société Midas France d'autre part. Par lettre du 25 septembre 2019, M. Y a notifié à la société Midas France son intention de ne pas renouveler le contrat de franchise à son terme du 30 septembre 2019 (pièce Midas n° 2), ce dont la société Midas France a pris acte par lettre du 27 septembre 2019 (pièce Midas n° 3).

Il n'est pas non plus contesté que M. Y et la société Brunoy Echappement, dont l'associé unique est la société BTJ gérée par M. Y ont, dès la fin du contrat de franchise Midas, exploité leur activité sous l'enseigne Point S (pièces Midas n° 4).

En application de l'article 23 du contrat de franchise, la société Midas a signifié le 31 octobre 2019 à M. Y et la société Draveil Echappement la résiliation immédiate du contrat de franchise du 5 mai 2011 à leurs torts exclusifs pour exploiter depuis le 1er octobre 2019, auprès de la société Brunoy Echappement un commerce de garage, réparations, vente, achat et location de voitures automobiles sous "l'enseigne Point S" à Brunoy en infraction à l'article 20.1.

La société Draveil Echappement admet dans ses écritures avoir commis une erreur lorsque son gérant M. Y également gérant de la société Brunoy Echappement a contracté avec l'enseigne Point S sans prendre garde aux dispositions contractuelles la liant avec la société Midas France au sein de la société Draveil Echappement (conclusions page 6). Elle ne remet d'ailleurs pas en cause, à hauteur d'appel, le caractère justifié de la résiliation immédiate du contrat de franchise du 5 mai 2011 par la société Midas France.

Quand bien même il est allégué que M. Y n'avait pas conscience de commettre une faute, il résulte clairement de ces circonstances que la société Draveil Echappement a méconnu les dispositions de l'article 20.1, prévoyant une obligation de non-concurrence, pendant l'exécution du contrat, visant à ne pas s'intéresser directement ou indirectement, à une entreprise exploitant tout ou partie des activités exploitées par le réseau Midas sous une enseigne de renommée nationale ou régionale.

Si la société Draveil Echappement prétend que la société Midas France ne justifie pas d'un savoir-faire exclusif ou spécifique par rapport au réseau Point S, elle ne remet néanmoins pas en cause la validité ou l'opposabilité de l'article 20.1 en ce qu'il prévoit une clause de non-concurrence pendant l'exécution du contrat interdisant au franchisé de s'intéresser directement ou indirectement à des activités exploitées par le réseau Midas sous une enseigne de renommée nationale ou régionale. Cette clause vise à protéger le savoir-faire Midas, comprenant notamment les méthodes commerciales et de gestion destinées à optimiser la rentabilité de l'exploitation et dont l'existence même n'est pas contesté par la société Draveil Echappement. La société Midas peut dès lors s'en prévaloir pour se protéger d'une activité similaire exercée par son propre franchisé au travers d'un réseau concurrent pendant l'exécution même du contrat de franchise Midas, sans avoir à établir l'exclusivité de savoir-faire ni de sa spécificité par rapport à un réseau concurrent.

La société Draveil Echappement, à l'appui de ses allégations de discrimination, ne justifie pas non plus avoir sollicité, pendant l'exécution du contrat, un avenant auprès de Midas France lui permettant par l'intermédiaire de son gérant d'exploiter une activité similaire dans un autre réseau, directement concurrent à quelques dizaines de kilomètres du garage Draveil Echappement.

Aussi, la société Midas France est en droit d'obtenir, comme elle le demandait en première instance, l'application des dispositions de l'article 20.3 du contrat de franchise sanctionnant expressément la violation de l'obligation de non-concurrence pendant l'exécution du contrat par une indemnité forfaitaire égale à cinq fois le montant annuel moyen des redevances d'exploitation dont il s'est trouvé redevable au cours des trois derniers exercices ayant précédé la violation, et le montant du droit d'entrée habituellement facturé par le franchiseur au moment de la violation.

La société Midas France a calculé cette indemnité sur la base d'un droit d'entrée de 25 000 HT et d'une moyenne annuelle de redevances de 42 083 euros HT (pièce 13), soit la somme de 282 498 euros TTC. Si la société Draveil Echappement conteste le principe du paiement d'une indemnité forfaitaire, elle ne critique pas son calcul au regard des stipulations contractuelles, étant précisé que la clause pénale s'applique du seul fait d'un manquement contractuel sans avoir à justifier d'un préjudice.

Dès lors, la société Draveil Echappement sera condamnée à payer à la société Midas France la somme de 282 498 euros à titre d'indemnité, sans qu'il soit nécessaire de répondre au moyen tiré de la clause de non-réaffiliation, et le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages intérêts à hauteur de 100 000 euros de la société Draveil Echappement

La société Draveil Echappement sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société Midas France à lui verser la somme de 100 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice subi à la suite du transfert fichier client réalisé seulement trois mois après la résiliation du contrat et le fichier d'exploitation seulement neuf mois après, préjudice estimé à un quart de la valorisation de la clientèle.

La société Midas France réplique que non seulement la société Draveil Echappement ne démontre aucun manque à gagner mais encore que si elle a perdu des données, cette perte ne résulte que de sa propre négligence puisqu'elle n'a pas sauvegardé ses données mensuellement comme prévu par les conditions générales de vente.

Sur ce,

Si en application de l'article 25.4, dès la notification le 31 octobre 2019 de la résiliation immédiate du contrat de franchise, la société Midas France pouvait couper l'accès de Draveil Echappement aux programmes spécifiques du réseau Midas, elle devait aussi transférer au franchisé l'ensemble des données personnelles afférentes à l'exploitation du centre dans un format informatique courant. La société Midas France n'a transmis le fichier client que le 10 janvier 2020 (pièce Midas n° 18) et le fichier d'exploitation que le 3 juillet 2020 en exécution du jugement (courriel du 3 juillet 2020).

Aussi, le tribunal a justement évalué le préjudice résultant de la privation de ces données personnelles, à partir du temps de privation et de la valorisation de la clientèle (pièce Y n° 3) à la somme de 100 000 euros.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Midas France aux dépens de première instance et à payer à la société Draveil Echappement la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant en appel, la société Draveil Echappement sera condamnée aux dépens.

En application de l'article 700 du code de procédure civile en appel, la société Draveil Echappement sera déboutée de sa demande et condamnée à verser à la société Midas France la somme de 10 000 euros.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement sauf en ce qu'il a débouté la société Midas France de sa demande de dommages intérêts ;

Statuant de nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

CONDAMNE la société Draveil Echappement à payer à la société Midas France une indemnité de 282 498 euros en application de l'article 20.3 du contrat de franchise ;

CONDAMNE la société Draveil Echappement aux dépens d'appel ;

CONDAMNE la société Draveil Echappement à payer à la société Midas France la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toute autre demande.