Cass. com., 13 juin 1995, n° 93-19.443
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Rapporteur :
M. Gomez
Avocat général :
M. Mourier
Avocats :
Me Blondel, SCP Boré et Xavier
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon les énonciations de l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 13 mai 1993), que la société Radiall a déposé, le 29 avril 1993, une demande de brevet, enregistrée sous le numéro 83-07149, ayant pour objet un "procédé pour préparer l'extrémité d'un câble co-axial souple à très haute fréquence" en vue de la mise en place d'un élément connecteur ; qu'elle a assigné pour contrefaçon des revendications 1 à 5 la société Alpen industries, qui a, reconventionnellement, demandé que soit constatée la nullité desdites revendications pour défaut d'activité inventive ;
Attendu que la société Alpen industries fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en nullité des revendications 1 à 5 du brevet litigieux et de l'avoir condamnée pour contrefaçon, alors, selon le pourvoi, d'une part, que c'est aux juges du fond de rechercher de façon objective si l'invention, ensemble les revendications prises isolément ou en combinaison impliquent une activité inventive et, ce faisant, ne découlaient pas de manière évidente de l'état de la technique ; qu'en ne procédant pas à cette recherche et en lui reprochant de n'avoir pas apporté la preuve que le brevet 83-07149 ne perfectionnait pas le brevet 79-02468 que par un moyen déjà enseigné par le dispositif ATI à l'homme "de" métier, et dont, par conséquent, la mise en oeuvre n'a nécessité aucune activité inventive, la cour d'appel méconnaît son office au regard de l'article 12 du nouveau Code de procédure civile et prive son arrêt de base légale au regard des articles L. 116-11 et L. 116-14 du Code de la propriété intellectuelle, faisant une fausse application de l'article 1315 du Code civil ; alors, d'autre part, que la cour d'appel, pour se prononcer au regard de l'activité inventive, se réfère à l'homme "de" métier et non à l'homme " du " métier comme elle se le devait, eu égard notamment au secteur concerné de haute technologie, d'où une violation des articles L. 116-11 et L. 116-14 du Code de la propriété intellectuelle, la Cour de Cassation n'étant pas à même d'exercer son contrôle de légalité ; et alors, enfin, que la cour d'appel se devait, s'agissant de l'activité inventive, de se placer à la date du dépôt du brevet n 83-07149 et examiner à cette date l'état de la technique au regard du moyen divulgué par la société ATI par rapport au dispositif déjà divulgué par le brevet 79-02468 pour décider si oui ou non pour l'homme du métier l'invention ne découlait pas de manière évidente de l'état de la technique ; qu'en raisonnant différemment à partir de motifs inopérants, la cour d'appel viole derechef les articles L. 116-11 et L. 116-14 du Code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel, qui, après avoir relevé que la société Alpen industries soutenait que le brevet litigieux ne faisait qu'apporter des perfectionnements au brevet 79-02468 de la société ATI et ne procédait pas d'une activité inventive, le moyen, tel que caractérisé par sa forme et sa position étant divulgué par le brevet de la société ATI, procède à la comparaison des deux brevets pour en déduire, par motifs propres et adoptés, et en procédant à la recherche prétendument omise, que le manchon breveté par la société Radiall n'avait pas une fonction identique à celui du brevet de la société ATI ;
Attendu, d'autre part, que, pour comparer les deux brevets et rechercher si les revendications du brevet de la société Radiall découlaient ou non d'une manière évidente de l'état de la technique, la cour d'appel, après avoir procédé à une analyse précise, basée sur des éléments de la spécialité technologique dans laquelle se situaient les deux brevets comparés, s'est référée implicitement à l'homme du métier, et a pu rejeter la demande fondée sur la nullité du brevet litigieux ;
Attendu, enfin, que la cour d'appel, qui a procédé à l'examen de l'antériorité invoquée à l'appui de la demande de nullité du brevet litigieux, s'est donc placée à la date du dépôt de ce dernier et, après avoir retenu que l'invention n'était pas contenue de manière évidente pour l'homme du métier dans l'état de la technique, a pu rejeter cette demande ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Alpen industries, envers la société Radiall, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt.