Cass. com., 14 décembre 2004, n° 02-11.448
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
Mme Garnier
Avocats :
SCP Thomas-Raquin et Bénabent, SCP Choucroy-Gadiou-Chevallier
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Poulsen Roser APS que sur le pourvoi incident relevé par la société Nirp international et les consorts X... :
Attendu, selon l'arrêt déféré, que la société Poulsen Roser APS (société Poulsen) qui a pour objet la création et la production de variétés de roses a chargé M. Y... et la société Nirp international (société Nirp) d'assurer pour son compte la distribution de ses produits en France et leur protection ; que M. Y... ayant cédé son entreprise et ses droits à M. X..., la société Poulsen , par contrats du 12 septembre 1992, a consenti à la société Nirp le droit exclusif de tester, exploiter, vendre et distribuer des variétés de roses créées par elle ; qu'il était précisé qu'en cas de mise sur le marché d'un type de rose, la société Nirp devait obtenir au nom de la société Poulsen le certificat d'obtention végétale auprès du ministère de l'agriculture, et verser à celle-ci des redevances calculées en pourcentage sur le montant des commissions collectées au vu d'un décompte semestriel ; que n'ayant obtenu ni décompte ni paiement pour le premier semestre 1994, la société Poulsen a résilié les contrats le 22 décembre 1994 conformément aux conditions prévues ; qu'après résiliation, elle a découvert que M. Y... était devenu en fraude de ses droits titulaire de certains certificats d'obtention végétale et les avaient cédés à M. X... ; que la société Poulsen a assigné la société Nirp, M. Y..., aux droits duquel se trouvent les consorts Y..., et M. X... aux droits duquel se trouvent les consorts X..., notamment en revendication de ses droits sur vingt-deux certificats d'obtention végétale et en constatation de la résiliation des contrats du 12 septembre 1992 ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que la société Nirp et les consorts X... reprochent à l'arrêt d'avoir dit que la société Poulsen était fondée à notifier la résiliation des contrats du 12 septembre 1992 sur le fondement du manquement de la société Nirp à son obligation d'information sur le chiffre d'affaires réalisé et sur le montant des redevances, alors, selon le moyen, que dès lors qu'elle avait constaté elle-même que le contrat du 12 septembre 1992 ne faisait pas obligation à la société Nirp de produire un rapport sur les redevances à la société Poulsen, mais seulement de mettre à la disposition de cette dernière ses registres de ventes, obligation que la société Nirp n'avait jamais refusé d'exécuter et pour laquelle elle n'avait jamais été mise en demeure, la cour d'appel, hors toute constatation de l'existence de redevances impayées, ne pouvait déclarer justifier la résiliation brusque et unilatérale du contrat par la société Poulsen le 22 décembre 1994, sans méconnaître les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 1134 et 1184 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que la société Nirp avait laissé sans réponse divers courriers lui réclamant communication des chiffres de vente réalisés, la cour d'appel, a pu par une interprétation souveraine que les termes du contrat rendait nécessaire estimer que la société Poulsen n'avait fait qu'user de la faculté qui lui était offerte de résilier les contrats dès lors que la société Nirp n'avait pas fourni les éléments réclamés, destinés à établir le montant des redevances ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 623-24, L. 613-8 et L. 611-8 du Code de la propriété intellectuelle ;
Attendu qu'aux termes de l'article L. 623-24 du Code de la propriété intellectuelle, les dispositions de l'article L. 613-8 qui renvoient à l'article L. 611-8 du même Code, lequel dispose que l'action en revendication se prescrit par trois ans à compter de la publication de la délivrance du titre de propriété industrielle, mais qu'en cas de mauvaise foi au moment de la délivrance ou de l'acquisition du titre le délai de prescription est de trois ans à compter de l'expiration de ce titre, sont applicables aux demandes de certificats d'obtention végétale et aux certificats d'obtention ;
Attendu que pour déclarer prescrite l'action en revendication des certificats d'obtention végétale, l'arrêt retient que le Code de la propriété intellectuelle, qui n'a pas expressément prévu l'action en revendication d'un certificat d'obtention végétale, ne peut être soumis au régime de prescription prévu par l'article L. 611-8 de ce Code, qui n'est applicable qu'aux titres de propriété industrielle, catégorie à laquelle les certificats d'obtention végétale n'appartiennent pas, et qu'en raison de sa référence au chapitre III, l'article L. 623-29 du même Code qui ne peut être cantonné à l'exercice des actions nées d'une contrefaçon est applicable à l'action en revendication d'un tel certificat ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'article L. 623-29 du Code de la propriété industrielle ne concerne que les actions en contrefaçon, la cour d'appel, qui a constaté l'existence d'une fraude lors du dépôt de certains certificats d'obtention végétale, a méconnu les textes précités ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE mais en ses seules dispositions ayant déclaré prescrite l'action en revendication des certificats d'obtention végétale, l'arrêt rendu le 15 novembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne les défendeurs aux dépens.