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Décisions

Cass. com., 17 novembre 2021, n° 20-17.239

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rémery

Rapporteur :

Mme Vallansan

Avocat général :

Mme Henry

Avocat :

Me Le Prado

Bordeaux, du 7 avr. 2020

7 avril 2020

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 7 avril 2020), la société Vignobles Marengo père et fils (la société débitrice) a été mise en redressement judiciaire le 12 mai 2017, la société Silvestri-Baujet étant désignée mandataire judiciaire. La société CIC Sud-Ouest (la banque) a déclaré à la procédure collective deux créances de 35 000 euros et 53 090 euros, au titre d'un jugement du 29 mai 2012, devenu irrévocable, condamnant la société débitrice envers elle. Les créances ont été discutées.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deux branches

Enoncé du moyen

2. La banque fait grief à l'arrêt de rejeter ses créances, alors :

« 1°) que la créance déclarée résultant d'un titre doit être regardée comme justifiée, quand bien même le montant indiqué serait moindre que celui figurant dans ce titre, dès lors que ce titre est produit ; qu'en l'espèce, en rejetant les créances déclarées le 8 juin 2017 par le CIC Sud-Ouest à hauteur des sommes de 35 485,36 euros et de 53 090,93 euros, en ce qu'alors que ces montants étaient moindres que ceux mentionnés dans le titre produit, à savoir le jugement du 29 mai 2012, il n'avait pas fourni le détail des versements qui étaient venus en déduction, la cour d'appel a violé les articles L. 622-25 et R. 622-23 du code de commerce ;

2°) que c'est au débiteur qui prétend que la créance déclarée résultant d'un titre ne tient pas compte de certains paiements opérés ultérieurement à l'établissement de ce titre, à faire la preuve de ces paiements ; qu'en l'espèce, en rejetant les créances déclarées le 8 juin 2017 par le CIC Sud-Ouest à hauteur des sommes de 35 485,36 euros et de 53 090,93 euros, en ce qu'alors que ces montants étaient moindres que ceux mentionnés dans le titre produit, à savoir le jugement du 29 mai 2012, il n'avait pas fourni le détail des versements qui étaient venus en déduction, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1353, anciennement 1315, du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 622-25, R. 622-23 du code de commerce et 1315, devenu 1353, du code civil :

3. Il résulte de la combinaison de ces textes que, si une déclaration de créance fondée sur un titre exécutoire ne peut porter que sur les sommes restant dues par le débiteur en vertu de ce titre au jour de l'ouverture de sa procédure collective et doit donc tenir compte des paiements qu'il a effectués à cette date, c'est à lui qu'il incombe de justifier que leur montant est supérieur à celui pris en considération par le créancier à l'appui de sa déclaration.

4. Pour rejeter la créance de la banque, l'arrêt relève que celle-ci, qui ne conteste pas avoir conclu avec la société débitrice un plan amiable de paiement en octobre 2011, ni que des versements ont été effectués en exécution de cet échéancier, dont elle allègue avoir tenu compte dans sa déclaration de créance, ne fournit cependant pas devant la cour d'appel le détail des versements effectués, de sorte que les créances actualisées au jour du jugement d'ouverture ne sont pas justifiées.

5. En statuant ainsi, quand il appartenait à la société débitrice de démontrer avoir effectué avant le jugement d'ouverture du redressement judiciaire des règlements non mentionnés par la banque, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 avril 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse.