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Décisions

CA Paris, 4e ch. B, 30 juin 2006, n° 02/06782

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

NORMALU (Sté)

Défendeur :

NEWMAT (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Pezard

Conseillers :

Mme Regnier, M. Marcus

TGI Paris, du 5 oct. 2004, n° 05/01554

5 octobre 2004

Il sera rappelé que :

- la société NEWMAT est titulaire d'un brevet d'invention relatif à 'une pièce profilée pour l'accrochage d'un plafond tendu', déposé en France le 27 novembre 1998, publié le 2 juin 2000 et délivré le 2 février 2001.

- elle a fait procéder à des saisies-contrefaçon, les 27 mars et 2 avril 2002, dans les locaux de la société NORMALU et de M. D... sur des lisses à cornières référencées B 312 et B 313 commercialisées sous la marque BARRISOL,

- soutenant que ces produits seraient la contrefaçon des revendications 1 à 6 de son brevet, la société NEWMAT les a fait assigner, par acte des 10 et 11 avril 2002 en contrefaçon ainsi qu'en concurrence déloyale, invoquant sur ce dernier point que des produits authentiques NEWMAT étaient présentés sous des références erronées et mensongères, pour obtenir, outre des mesures d'interdiction et de publication, paiement de dommages et intérêts et d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- la société NORMALU et M. D... avaient conclu à la nullité des revendications pour non brevetabilité de son objet et, pour défaut d'activité inventive et insuffisance de description des revendications 3 et 6 et avaient également conclu au débouté sur la contrefaçon et la concurrence déloyale.

Par le jugement entrepris, le tribunal de grande instance de Paris a :

- rejeté la demande d'annulation des revendications 1 à 6 du brevet FR 98 15 151 dont la société NEWMAT est propriétaire,

- dit qu'en fabriquant ou faisant fabriquer, en détenant ou utilisant, et en mettant dans le commerce les produits décrits aux procès-verbaux de saisie des 27 mars et 2 avril 2002, la société NORMALU et Monsieur B... D... ont commis des actes de contrefaçon des revendications 1 à 6 du brevet FR 98 15 151,

- dit que la société NORMALU et Monsieur D... ont commis des actes de concurrence déloyale distinct de ceux fondant la contrefaçon à l'encontre de la société NEWMAT,

- interdit à la société NORMALU et Monsieur D... la poursuite des actes précités sous astreinte de 1500 euros par infraction constatée et ce, dès la signification de la décision,

- condamné in solidum M. D... et la société NORMALU à payer une provision de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- ordonné une expertise,

- ordonné la publication du dispositif de la décision, dans trois journaux ou périodiques au choix de la société NEWMAT aux frais in solidum de la société NORMALU et de Monsieur D... à concurrence de 3500 euros HT par insertion,

- ordonné l'exécution provisoire,

- rejeté le surplus des demandes,

- condamné in solidum la société NORMALU et M. D... à payer la somme de 7 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par leurs écritures du 4 mai 2006, la société NORMALU et M. D... prient la cour de:

- les déclarer recevables et bien fondés en leur appel,

- en conséquence, infirmer le jugement en toutes ses dispositions et jugeant à nouveau,

- prononcer la nullité des revendications 1 à 6 pour défaut de nouveauté ou à tout le moins d'activité inventive,

- dire que l'arrêt sera, par les soins du greffe de la cour, transmis au Registre National des Brevets,

- déclarer, en conséquence, la société NEWMAT irrecevable et mal fondée en son action en contrefaçon,

- déclarer la société NEWMAT irrecevable et mal fondée en sa demande de concurrence déloyale formée à l'encontre de la société NORMALU,

- la débouter de toutes ses demandes, fins et prétentions,

- condamner la société NEWMAT à payer à la société NORMALU et à Monsieur D..., à chacun, la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- condamner la société NEWMAT aux entiers dépens et autoriser la SCP MOREAU, avoué à la cour, à les recouvrer directement en application des dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

Par écritures du 11 mai 2006, la société NEWMAT invite la cour à :

- écarter des débats les conclusions notifiées par les appelants le 4 mai 2006 et les pièces visées à ces écritures et toutes autres écritures et pièces postérieures, ces pièces et conclusions étant tardives et le principe du contradictoire n'étant pas respecté, au sens des articles 15 et suivants du nouveau Code de procédure civile,

- subsidiairement sur ce point, admettre les observations complémentaires sur le fond présenté par les présentes écritures,

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

- dire et juger irrecevable et mal fondé l'appel de la société NORMALU et de Monsieur D... à l'encontre du jugement,

- débouter la société NORMALU et Monsieur D... de toutes leurs demandes reconventionnelles,

- condamner in solidum la société NORMALU et Monsieur D... à payer à la société NEWMAT une somme de 40 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La clôture ayant été reportée à l'audience des plaidoiries du 12 mai 2006, les appelants ont, par écritures du 12 mai 2006, répliqué non seulement en réponse à la demande de rejet des débats mais au fond.

SUR CE, LA COUR :

Sur la procédure

Considérant que par application des dispositions des articles 15 et 16 du nouveau Code de procédure civile, les parties doivent être en mesure de prendre connaissance des pièces et écritures de manière à pouvoir y répliquer utilement ; qu'ainsi, la société NEWMAT qui a répliqué le 11 mai 2006 à des écritures communiquées le 4 mai 2006 a bénéficié d'un temps suffisant pour prendre connaissance de l'argumentation et y répliquer ; qu'elle soutient encore que c'est seulement le 11 mai 2006 que lui a été transmise la notice comportant la date du fax, le précédent document transmis ne comportant alors aucune date ; que cette communication tardive l'a empêchée de faire toute recherche dans ses services ;

Considérant que s'il est exact que la communication du document avait été effectuée sans indication de la date, cette date était mentionnée dans les écritures des appelants du 23 mars 2006 ; que la société NEWMAT a été, en conséquence, en mesure, contrairement à ce qu'elle affirme, de procéder à des vérifications auprès de son client sur la date à laquelle le document en cause aurait été imprimé ; qu'en l'espèce, la transmission d'une photocopie datée, la veille des plaidoiries, ne porte pas atteinte aux droits de la défense ; que sa demande tendant aux fins d'écarter des débats ces écritures et documents sera rejetée ;

Considérant qu'en revanche, les écritures prises par la société NORMALU et Monsieur D... le jour de la clôture et des plaidoiries ne sauraient être admises, étant souligné que les écritures de la société NEWMAT du 11 mai 2006 ne comportent pas de demande nouvelle et ne sont que des répliques à des écritures prises le 4 mai 2006 par les appelants ;

Sur la demande en nullité des revendications 1 à 6 du brevet n° 98-15151

Considérant que les appelants ont modifié leur moyen de défense ; qu'en effet, alors qu'en première instance, ils avaient argumenté sur le défaut d'objet et subsidiairement le défaut d'activité inventive et insuffisance de description, ils soutiennent en appel que le brevet est dénué de nouveauté, au regard d'une notice émanant de la société NEWMAT qui divulguerait l'invention, et, à tout le moins, dénué d'activité inventive, au regard des antériorités NOVELUM et PEILLEX ;

Considérant que la société NEWMAT soutient que la notice invoquée n'a pas de date certaine et ne saurait en conséquence lui être opposée et que les antériorités produites en appel pour démontrer le défaut d'activité inventive ne sont pas pertinentes ;

Considérant, cela étant exposé, qu'il sera rappelé que, comme l'ont dit exactement les premiers juges, il est indiqué dans la partie descriptive du brevet que :

- les pièces profilées, de l'état de la technique, pour fixer et tendre les plafonds entre des parois sont réalisés en matériau synthétique extrudé comprenant généralement deux ailes rigides dont l'une sert de moyen d'appui sur une surface réceptive et l'autre comporte un dispositif d'ancrage pour l'accrochage de la nappe destinée à constituer un faux-plafond, et que, par leur structure et du fait de leur rigidité, l'usage de ces pièces profilées induit un défaut d'aspect au droit de la surface réceptive, ce qui va à l'encontre des qualités esthétiques recherchées par l'usage d'un plafond tendu,

- pour remédier à cet inconvénient, l'invention vise à obtenir une pièce profilée du type précité qui tout en présentant les qualités précitées est économique à réaliser,

- que ce résultat est obtenu par une pièce profilée caractérisée en ce que la pièce profilée comprend au moins une lèvre longitudinale qui, disposée pour s'appuyer sur la surface réceptrice du moyen d'appui de la pièce profilée et sensiblement à l'aplomb de ce moyen d'appui, est, d'une part, constituée par coextrusion et, d'autre part, réalisée en matériau synthétique élastiquement déformable ;

Considérant que le problème à résoudre selon l'invention consiste donc à rendre esthétique et de façon économique, la pose du profilé ; qu'il n'est pas davantage, dans le brevet, exposé de difficultés à surmonter ;

Considérant que la revendication 1 dont il est demandé la nullité est ainsi rédigée et sera mieux comprise par la reproduction de la figure unique ci-dessous reproduite :

revendication 1 : pièce profilée (1) pour l'accrochage d'un faux plafond (2) à des parois (3) qui délimitent un local, cette pièce étant réalisée en matériau synthétique extrudé et comprenant:

- une première aile rigide (1A) dont une face constitue un moyen d'appui sur une surface réceptrice (3A), telle une face d'une paroi (3), contre laquelle la pièce profilée (1) doit être fixée, et

- reliée à la première aile (1A) par une deuxième aile rigide (1B), au moins une portée d'ancrage (1C) d'un élément d'accrochage (2A) fixé à l'une des rives (2B) d'une nappe (2) de matériau destinée à constituer un faux plafond (2), ladite pièce profilée étant caractérisée en ce qu'elle comprend une lèvre longitudinale (4) qui, disposée pour s'appuyer sur la surface réceptrice (3A) du moyen d'appui (1B) de la pièce profilée (1) et sensiblement à l'aplomb de ce moyen d'appui (1B) est, d'une part, constituée par coextrusion et, d'autre part, réalisée en matériau synthétique élastiquement déformable ;

Considérant qu'il est ainsi constant que l'invention selon la revendication 1 porte sur une lèvre longitudinale qui s'applique sur une pièce profilée d'un type connu , obtenue par coextrusion et dans un matériau synthétique élastiquement déformable ;

Considérant que les appelantes invoquent pour démontrer le défaut de nouveauté de cette revendication une note d'information 'Nouvelles lisses NEWMAT' dont la société NORMALU soutient avoir eu connaissance le 26 avril 1998 ; qu'ils versent aux débats une télécopie portant mention du jour, du numéro de fax 04 67 60 95 05, et de la date 15 h 48 ;

Considérant qu'il est répliqué que ce document n'est pas certain quant à sa date, dès lors que la notice elle-même ne comporte aucune date et qu'une date de fax ne peut suffire à établir de manière certaine la date de l'antériorité opposée, étant, en outre, observé qu'il est curieux que la société NORMALU ne fasse état de ce document qu'au cours de la procédure d'appel, alors que selon ses propres dires, elle avait connaissance de ce document, depuis le 26 avril 1998, soit avant l'introduction de l'instance ;

Considérant, cela exposé, que le document invoqué comporte quatre pages numérotées 2 à 5, et est composé de deux pages relatives à une note d'information 'Nouvelles Lisses NEWMAT' signée par Monsieur A... directeur commercial, et de deux pages de dessins représentant des lisses ;

Considérant que la cour observe, d'une part, que les dessins ne représentent nullement la lèvre objet de la revendication 1, d'autre part, que la note se réfère à une lisse CORNICHE 'alliant esthétique et la maîtrise technique de la coextrusion PVC souple et rigide' et à des lisses 'BIO PRUF et CORNICHE' dont il est dit : 'adéquation de la rigueur technique et du pratique, sa forme sans creux et sa lèvre souple permettent une parfaite étanchéité évitant tout foyer de contamination' , sans toutefois définir plus précisément la structure et plus particulièrement sans préciser la position de la lèvre souple, qu'enfin, la première page de ce fax n'est pas versée aux débats, ce qui laisse planer un doute sur l'authenticité de ce document et à tout le moins sur sa date ;

Considérant que, pour détruire la nouveauté d'une revendication, le document doit non seulement présenter toute certitude quant à sa date mais également divulguer l'invention dans toutes ses caractéristiques ; qu'en l'espèce, tel n'est pas le cas, tant sur la certitude de la date d'envoi du fax, que sur les documents qui y sont visés qui ne permettent pas de conclure à l'existence d'une lèvre co-extrudée et réalisée dans un matériau souple ; que le moyen de nullité pour défaut de nouveauté au regard de ce document sera rejeté ;

Considérant que les appelants se réfèrent à la combinaison de deux documents (NOVELUM et PEILLEX) pour conclure au défaut d'activité inventive, soutenant que :

- la structure de la lisse décrite dans le brevet était parfaitement connue,

- l'homme du métier s'était déjà posé le problème tenant à l'aspect esthétique pouvant résulter du caractère visible de la lisse,

- la solution préconisée par le brevet tenant à la présence d'une lèvre souple était évidente au regard du document PEILLEX qui enseignait des congés d'angle utilisant une lèvre souple avec un corps rigide coextrudé pour assurer la liaison entre la surface d'appui et le mur ;

Considérant que la société NEWMAT fait observer que l'attestation du 10 mars 2006 qui accompagne le document PEILLEX ne contient aucun élément pertinent, dans la mesure où est seulement rappelée l'existence de dispositif dit 'congé d'angle' ; qu'elle expose que ce type de dispositif a déjà été débattu devant les premiers juges, les appelants ayant alors invoqué le brevet POWNALL qui est très similaire au document PEILLEX invoqué en appel ;

Considérant qu'elle fait valoir que les appelants s'efforcent de démontrer comment l'homme du métier aurait pu parvenir à l'invention alors que le problème juridique de l'activité inventive n'est pas de savoir comment l'homme du métier pouvait arriver au brevet, mais, au contraire comment il était conduit de façon évidente à réaliser l'invention ;

Qu'elle estime que le postulat du raisonnement des appelants selon lequel l'homme du métier était conduit à résoudre le problème des défauts esthétiques pouvant résulter du caractère irrégulier ou bosselé de la surface réceptrice est une première affirmation sans démonstration, qu'en effet, si l'homme du métier des plafonds tendus s'est parfois préoccupé du caractère inesthétique des lisses d'accrochage en essayant de masquer ou de faire disparaître la lisse, rien ne démontre que l'homme du métier avait conscience du problème différent soulevé par l'irrégularité des murs de support et était à la recherche de solutions à ce problème esthétique particulier ;

Que, par ailleurs, les appelants partent, selon l'intimée, d'un autre postulat selon lequel 'les lisses constituées par coextrusion réalisées en matériau synthétique élastiquement déformable étaient couramment utilisées dans la technique des plafonds tendus' alors qu'aucun des documents invoqués ne va au soutien de cette affirmation, le dispositif PEILLEX ne concernant pas des lisses destinées à l'accrochage de plafonds tendus ; qu'elle ajoute que le principe de l'invention n'avait a priori rien d'évident, d'autres solutions pouvant être adoptées pour résoudre le problème ;

Qu'elle expose encore que l'affirmation selon laquelle l'homme du métier était conduit à l'invention brevetée par la simple connaissance du 'congé' d'angle de la société PEILLEX est une vue de l'esprit, le 'congé d'angle' étant un dispositif conçu et utilisé pour assurer l'étanchéité de deux parois formant un angle droit, pour les chambres froides, salles blanches, laboratoires ; que l'homme du métier n'est donc pas celui qui fabrique des plafonds tendus et que rien ne le poussait à consulter un document relevant d'une technique qui lui était étrangère ;

Qu'elle explique enfin que le descriptif appelé 'congé d'angle' est totalement différent sur le plan fonctionnel, de celui du dispositif breveté, le premier visant à assurer une protection hygiénique à la liaison de deux parois perpendiculaires alors que le second consiste à assurer l'adaptabilité d'une lisse rigide à un mur irrégulier, de telle sorte que les problèmes ne sont pas les mêmes et qu'on ne voit pas pourquoi l'homme du métier aurait déduit des fonctions d'étanchéité du 'congé d'angle' PEILLEX la fonction esthétique qu'il recherchait pour résoudre le problème d'aspect des lisses de plafonds et qu'en outre, la mise en oeuvre des deux dispositifs est très différente (pour l'antériorité, nécessité de murs sans aspérité pour assurer l'étanchéité pour le brevet, cela n'est pas nécessaire) ;

Qu'elle en déduit qu'aucun document ne démontre que l'homme du métier pressentait l'intérêt supposé d'utiliser un profilé coextrudé et élastiquement déformable pour régler le caractère disgracieux de la pose d'un plafond tendu sur un mur irrégulier ;

Considérant, cela exposé, que le document NOVELUM porte à sa dernière page de couverture la date de janvier 1998 ; qu'en conséquence, ce document étant antérieur au dépôt de la demande de brevet est justement opposé pour démontrer le défaut d'activité inventive ;

Considérant que ce document reproduit un profilé pour plafond tendu dans une structure identique à celle décrite dans le préambule du brevet mais en diffère par l'absence de lèvre souple ; que par ailleurs, il est constant (en raison de brevets antérieurs, notamment BOUTHIER, cités par les parties) qu'un des problèmes soulevés par les plafonds tendus consistait dans l'aspect esthétique, l'homme du métier s'étant plusieurs fois interrogé et y ayant apporté une solution dans des structures autres que celle de NOVELUM ;

Considérant que l'homme du métier qui connaissait l'existence du document NOVELUM se posait ainsi avec évidence la question d'un perfectionnement afin de masquer la fixation de la partie supérieure de la lisse ; que l'intimée soutient qu'il ne convenait pas de résoudre seulement ce problème mais également la question de l'aspect du mur qui peut être inégal ; que, la cour observe que la description du brevet de la société NEWMAT ne se réfère pas à ce problème, ne parlant que de l'aspect , mais que quand bien même la revendication 1 aurait eu pour résultat non seulement de rendre plus esthétique la lisse mais également de tenir compte des aspérités de la paroi, il subsiste que le problème posé à l'homme du métier était identique dans la mesure où il s'agissait d'assurer la plus grande proximité possible avec la paroi ;

Considérant que le document PEILLEX, dont l'antériorité n'est pas contestée, ne s'applique pas directement à des plafonds tendus ; que néanmoins, étant relatif à des liaisons entre murs et plafonds permettant d'assurer une étanchéité, ce qui signifie que par là-même, ces liaisons ont pour but de ne pas laisser d'interstice entre les autres éléments, l'homme du métier, c'est à dire celui des faux plafonds ne pouvait pas ignorer les différentes structures existant prévues pour assurer des liaisons entre murs et plafonds ; que dès lors l'argumentation selon laquelle, il n'est pas possible de se référer à l'enseignement du document PEILLEX n'est pas fondée ;

Considérant que ce document divulgue que pour assurer l'étanchéité, il convient d'utiliser un corps rigide se terminant par une lèvre souple, obtenu par coextrusion ;

Considérant qu'en conséquence, l'homme du métier qui se posait le problème ci-dessus mentionné et qui connaissait la structure NOVELUM, était conduit avec évidence à terminer la structure rigide par un appendice souple venant masquer la structure supérieure et prenant appui sur le mur (appui qui s'adapte en raison de son élasticité aux aspérités du mur), au regard du document PEILLEX, qui divulguait la lèvre souple coextrudée ; qu'aucune difficulté technique ne pouvait le dissuader de se référer à cette antériorité pour l'adapter à la structure NOVELUM ;

Considérant qu'il s'ensuit que la revendication 1 qui découle avec évidence de l'état de la technique sera annulée pour défaut d'activité inventive ; que le jugement sera réformé de ce chef ;

Sur les revendications 2 à 6

Considérant que ces revendications sont ci-dessous reproduites :

Revendication 2 -pièce profilée selon la revendication 1 caractérisée en ce que la lèvre élastique (4) est portée par un bord inférieur (1E) d'une lame (1F) qui constitue une troisième aile (1F) et présente un bord supérieur (1G) quant à lui raccordé à la deuxième aile rigide (1B),

Revendication 3- pièce profilée selon la revendication 2 caractérisée en ce que la troisième aile (1F) est raccordée à la deuxième aile (1B) sensiblement à l'aplomb d'une partie (1H) qui supporte la portée d'ancrage (1C),

Revendication 4- pièce profilée selon la revendication 3 caractérisée en ce que la troisième aile (1F) est de section transversale courbe et raccordée sensiblement tangentiellement à la deuxième aile (1B)

Revendication 5- pièce profilée selon la revendication 4 caractérisée en ce que, dans sa partie (1H) qui présente la portée d'ancrage (1C), la deuxième aile (1B) est sensiblement courbe, de manière à présenter une face convexe (1I) sous le niveau du faux plafond (2),

Revendication 6- pièce profilée selon la revendication 5 caractérisée en ce que la section transversale courbe de la troisième aile (1F) est orientée de manière telle que ladite aile (1F) présente une face concave (1J) sous le niveau du faux plafond.

Considérant que la société NEWMAT soutient que les appelants ne développent aucune argumentation pour apporter la preuve d'un défaut de nouveauté ou à tout le moins d'activité inventive de chacune de ces revendications ;

Considérant, toutefois, que le document NOVELUM mis aux débats divulgue à l'exception de la lèvre souple dont il a été dit ci-dessus qu'elle était évidente compte tenu de l'état de la technique la structure des revendications 2 à 6 ; qu'en effet, comme le montre la photographie ci-dessous reproduite, elle comporte :

- un bord inférieur d'une lame qui constitue une troisième aile et un bord supérieur raccordé à la deuxième aile rigide (revendication 2),

- la troisième aile étant raccordée à la deuxième aile sensiblement à l'aplomb d'une partie qui supporte la portée d'ancrage (revendication 3),

- la troisième aile, étant de section transversale courbe, et raccordée sensiblement tangentiellement à la deuxième aile (revendication 4),

- la section transversale courbe de la troisième aile (1F) étant orientée de manière telle que ladite aile présente une face concave sous le niveau du faux plafond (revendication 6) ;

Qu'enfin si le document NOVELUM présente une structure dont la deuxième aile, dans sa partie qui présente la portée d'ancrage n'est pas aussi sensiblement courbe et convexe que dans la revendication 5, elle comporte, toutefois, une différence de courbure par rapport à la partie concave de la troisième aile ;

Considérant, en conséquence, que la structure des revendications 2 à 6 étant divulguée par le document NOVELUM, il en résulte qu'elles sont également dénuées d'activité inventive l'adjonction de la lèvre longitudinale étant comme il a été dit ci-dessus évidente au regard de l'antériorité PEILLEX ; que le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté les moyens de nullité; que les revendications 1 à 6 du brevet seront déclarées nulles pour défaut d'activité inventive ;

Qu'il s'ensuit que la demande en contrefaçon n'a plus d'objet ;

Sur la concurrence déloyale

Considérant que les appelants font valoir que ni les constatations faites par Maître C..., huissier de justice, dans les locaux des établissements de M. D... le 2 avril 2002 ni aucune des pièces versées aux débats ne permettent d'établir qu'ils auraient créé un risque de confusion entre les produits BARRISOL et ceux de la société NEWMAT et trompé le public sur l'origine des produits vendus ;

Considérant toutefois que comme l'expose exactement la société NEWMAT, lors des opérations de saisie contrefaçon en date du 2 avril 2002, l'huissier a relevé l'existence d'un paquet de trente lisses emballé sous les références 'NORMALU SA 68680 KEMBS FRANCE tel :03 89 83 20 20, fax 03 89 48 43 44 BARRISOL LE PLAFOND TENDU' dont un dessin est annexé au procès-verbal de saisie contrefaçon ; que ce dessin correspond à la structure des lisses qu'elle commercialise et non pas à celles qui étaient arguées de contrefaçon sous les références B 312 et B 313 comme cela peut être vu à partir des catalogues qui ont également été saisis ;

Considérant que de ces constatations, il résulte que les appelants ont placé dans des emballages portant le nom de la société NORMALU des lisses fabriqués par son concurrent sans indication sur l'origine de ces produits ; que c'est donc par des motifs pertinents que la cour fait siens que les premiers juges ont retenu qu'en pratiquant de cette sorte, la société NORMALU et M. D... avaient commis des actes de concurrence déloyale ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Considérant que compte tenu du nombre limité de lisses concerné par les actes de concurrence déloyale, le préjudice subi pas la société sera fixé, sans qu'il soit nécessaire de recourir à une mesure d'expertise, à la somme de 10 000 euros ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux mesures d'interdiction et de publication sollicitées ;

Considérant que l'équité commande d'allouer aux appelants la somme de 7500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la décision de première instance devant être infirmée également sur ce point ;

Considérant que les dépens seront en revanche laissés à la charge de chacune des parties qui succombent pour partie dans leurs demandes ;

PAR CES MOTIFS :

Ecarte des débats les écritures signifiées le 12 mai 2006 par les appelants le jour des plaidoiries;

Confirme le jugement sur la concurrence déloyale ;

Le réforme pour le surplus ;

Dit que les revendications 1 à 6 du brevet FR 98-15151 sont nulles pour défaut d'activité inventive ;

Ordonne la transmission du présent arrêt aux fins d'inscription au Registre National des Brevets;

Condamne in solidum la société NORMALU et M. D... à payer à la société NEWMAT la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour les actes de concurrence déloyale ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne la société NEWMAT à payer à M. D... et à la société NORMALU la somme globale de 7500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Dit que chacune des parties supportera ses dépens tant de première instance que d'appel.