Livv
Décisions

Cass. crim., 8 février 1995, n° 94-80.960

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Gunehec

Rapporteur :

Mme Ferrari

Avocat général :

M. Galand

Avocat :

Me Capron

Paris, du 25 janv. 1994

25 janvier 1994

LA COUR,

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles L. 372 et L. 376 du Code de la santé publique, 405 de l'ancien Code pénal, 313-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale :

" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a condamné Monique X... à la peine de 2 années d'emprisonnement avec sursis et à 1 amende de 100 000 francs pour escroquerie ;

" aux motifs que " la prévenue ne conteste pas avoir pris la fausse qualité de docteur en médecine, alors qu'elle n'a pas fait d'études de médecine en France, et n'a jamais justifié des études de médecine qu'elle prétend avoir faites en Suède " (cf. arrêt attaqué, p. 5, 3e considérant) ; " qu'il résulte des éléments de l'enquête et de l'instruction qu'elle utilisait un papier professionnel (d 22) portant les mentions : Monique X..., docteur en médecine, diplômée de l'université d'Uppsala, psychiatre-psychanalyste, sophrologue, iridologue, et qu'elle utilisait celui-ci pour prescrire à ses clients des analyses de selles, ainsi que pour prescrire l'absorption d'un certain nombre de produits (avec indication de posologies) selon un " schéma thérapeutique " (d 15 à d 22) ; qu'elle remettait, également, à ses clients des " fiches-conseil " (d 14) expliquant les conditions dans lesquelles se déroulerait " le traitement " présenté comme étant " l'aboutissement thérapeutique d'un bilan effectué ", mais aussi le traitement de leurs causes et des terrains, étant précisé que chaque " prescription " était nécessaire, et qu'il ne fallait pas opérer un choix aveugle parmi " les prescriptions proposées " (cf. arrêt attaqué, p. 5, 4e considérant) ; " qu'il est également établi que Monique X... se présentait comme médecin lors d'émissions radiophoniques ou dans des publicités ou articles qui lui ont été consacrés dans divers magazines " (cf. arrêt attaqué, p. 6, 1er considérant) ; " que, dans l'annuaire des PTT de l'année 1981, la qualité de médecin figurait à côté de son nom, de son adresse et de son numéro de téléphone ; qu'enfin, elle se présentait, sur la liste des locataires apposée sur la porte du concierge de l'immeuble, sous la mention " Dr. X... " " (cf. arrêt attaqué, p. 6, 2e considérant) ; " que des plaintes déposées et des déclarations faites par Mme Y..., Mme Z... (au sujet de Mme A...) et Mme B... (au sujet de Mme C...), il résulte très clairement que Monique X... se présentait comme médecin, et que ces trois patientes l'ont consultée en cette qualité de médecin, pratiquant en outre l'iridologie " (cf. arrêt attaqué, p. 6, 3e considérant) ; " que Monique X... percevait la somme de 900 francs à l'occasion de chaque " consultation " ; que le délit d'escroquerie par la prise de la fausse qualité de médecin qui lui est reproché, est ainsi caractérisé " (cf. arrêt attaqué, p. 7, 4e considérant) ;

" alors que la qualification d'exercice illégal de la médecine est réservée au cas où une personne qui n'est pas médecin prend habituellement part, et contre rémunération, à l'établissement de diagnostics ou au traitement des maladies, et celle d'escroquerie au cas où une personne qui n'est pas médecin prend le titre de médecin afin, non plus d'accomplir contre rémunération d'un acte qui ressortit à l'art médical, mais de se faire remettre de l'argent par les tiers, pour obtenir l'octroi d'un prêt ou d'un crédit par exemple ; qu'en condamnant Monique X... pour escroquerie, quand il ressort de ces constatations que Monique X... a pris la qualité de médecin, non pour obtenir de ses clients l'octroi d'un avantage financier sans rapport objectif avec la pratique de l'art médical, mais pour procéder, de façon habituelle et contre rémunération, à l'établissement de diagnostics et au traitement des maladies, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;

Attendu que, sur la plainte de l'un de ses patients, Monique X... est poursuivie pour avoir, en faisant usage de la fausse qualité de médecin, escroqué la fortune d'autrui ;

Attendu que pour la déclarer coupable de ce délit, l'arrêt attaqué énonce que celle-ci, qui se présentait comme " docteur en médecine, diplômée de l'Université d'Uppsala, psychiatre, psychanalyste, sophrologue et iridologue ", a pris la fausse qualité de médecin pour prescrire, aux patients qui venaient la consulter en cette qualité, des analyses biologiques et traitements, moyennant paiement d'honoraires élevés ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir le grief allégué ;

Qu'en effet, l'usurpation du titre de docteur en médecine n'étant pas un élément constitutif du délit d'exercice illégal de la médecine, et cette infraction n'exigeant pas le versement d'une rémunération, l'usage par le prévenu de la fausse qualité de médecin, pour obtenir la remise de sommes d'argent à titre d'honoraires, caractérise le délit d'escroquerie ;

Que le moyen doit, dès lors, être écarté ;

Et sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 2. 1° de la loi n° 81-736 du 4 août 1981, L. 517 et L. 519 du Code de la santé publique, 591 et 593 du Code de procédure pénale :

" en ce que l'arrêt attaqué, qui déclare Monique X... coupable d'exercice illégal de la pharmacie, lui a refusé le bénéfice de l'amnistie ;

" aux motifs que " les premiers juges ont à bon droit rejeté (le) moyen tiré de l'amnistie en observant qu'outre la peine d'amende encourue en application des dispositions de l'article L. 517 du Code de la santé publique du chef du délit d'exercice illégal de la pharmacie, est également encourue la mesure de fermeture temporaire ou définitive de l'établissement aux termes de l'article L. 519, 1er alinéa, du Code de la santé publique, de sorte que les dispositions de l'article 2. 1° des lois du 4 août 1981 et du 20 juillet 1988, stipulant que sont amnistiés " les délits pour lesquels seule une peine d'amende est encourue ", ne sont pas applicables au délit d'exercice illégal de la pharmacie ; qu'il importe peu de savoir si cette mesure de fermeture pouvait être prononcée en l'espèce à l'encontre de la prévenue, le seul élément à prendre en compte au regard de l'application de l'article 2. 1° de ces deux lois d'amnistie étant la peine encourue du chef du délit visé par la prévention " (cf. arrêt attaqué, p. 4, 2e considérant) ;

" alors que la mesure de fermeture temporaire ou définitive qui est prévue par l'article L. 519, alinéa 1er, du Code de la santé publique constitue une mesure à caractère réel qui est destinée à faire cesser une situation illicite, et non pas une sanction pénale ; qu'en refusant, dès lors, à Monique X... le bénéfice de l'amnistie, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;

Attendu que le délit d'exercice illégal de la pharmacie reproché à la prévenue est puni non seulement d'une peine d'amende par l'article L. 517 du Code de la santé publique mais encore d'une peine complémentaire de fermeture de l'établissement par l'article L. 519 du même Code, celle-ci fût-elle facultative ;

Que la cour d'appel a dès lors énoncé à bon droit que le délit, commis avant le 22 mai 1988, n'était pas amnistié, l'article 2. 1° de la loi du 20 juillet 1988 portant amnistie étant applicable aux délits pour lesquels seule une peine d'amende est encourue ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.