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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 15 avril 2022, n° 20/10821

PARIS

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

DSI Telecom (SAS), Martinat (ès qual.)

Défendeur :

Ericsson France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ardisson

Conseillers :

Mme L'Eleu de la Simone, Mme Primevert

Avocats :

Me Zeitoun, Me Domain, Me Rubinstein

T. com. Paris, du 6 juill. 2020, n° 2020…

6 juillet 2020

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties.  

Il sera succinctement rapporté que la sas DSI Telecom est spécialisée dans la conception, l'ingénierie et la maintenance des systèmes informatiques et de télécommunications. La sas Ericsson France est un fournisseur d'infrastructures de télécommunications.  

Les parties ont signé le 23 octobre 2011 un premier contrat cadre de prestations de services listées à l'annexe 1 du contrat, la grille tarifaire étant jointe en annexe 3, prenant effet rétroactivement au 1er janvier 2011 pour une durée d'un an renouvelable tacitement.  Les parties ont développé leur collaboration puis le 7 octobre 2016, elles ont conclu un nouveau contrat de prestations de services pour une durée de 3 ans tacitement renouvelable à l'échéance, par période de 12 mois.  Le contrat s'est ainsi renouvelé tacitement le 7 octobre 2019 pour une durée d'un an.  

Par lettre recommandée avec avis de réception du 21 novembre 2019, Ericsson France a unilatéralement résilié le contrat cadre MA2015-000208 à la date du 31 décembre 2019 invoquant que DSI Telecom n'entrait plus dans le cadre de sa politique de référencement de ses fournisseurs, l'article 16-3 du contrat cadre liant les parties enjoignant à DSI Telecom d'être en conformité avec la législation sociale et fiscales française, ainsi qu'avec le code d'éthique professionnelle figurant en annexe 4 du contrat (pièce 9 DSI).  

Par lettre recommandée avec avis de réception du 3 décembre 2019 DSI Telecom a demandé à Ericsson France le paiement de la somme de 1 812 527 € au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies en application de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce.  

Par jugement du 4 décembre 2019 le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de redressement judiciaire au profit de DSI Telecom, fixant la cessation des paiements au 30 novembre 2019.  

DSI Telecom représentée par son administrateur judiciaire a alors saisi le tribunal de commerce de Paris pour voir condamner Ericsson France à réparer différents préjudices.  

Par jugement du 26 novembre 2020 le tribunal de commerce de Nanterre a arrêté un plan de redressement d'une durée de 6 années en faveur de DSI Telecom, désignant la Selarl AJRS en la personne de Me Thibaut Martinat en qualité de commissaire à l'exécution du plan.  

Vu le jugement du tribunal de commerce de Paris du 6 juillet 2020 qui a :  

- débouté la sas DSI Telecom de sa demande au titre des dommages et intérêts en réparation de la privation de 9 mois de chiffres d'affaires,  

- débouté la sas DSI Telecom de sa demande à titre d'indemnité compensatrice de préavis,  

- débouté la sas DSI Telecom de sa demande au titre des dommages et intérêts pour abus de dépendance économique,  

- condamné la sas DSI Telecom à payer à la sas Ericsson France la somme de 8.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,  

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,  

- condamné la sas DSI Telecom aux dépens dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 95,62€ dont 15,72€ de TVA.  

Vu l'appel interjeté par la sas DSI Telecom le 27 juillet 2020,  

Vu l'article 455 du code de procédure civile,  

Vu les dernières conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 4 janvier 2022 pour la sas DSI Telecom, représentée par la Selarl AJRS en la personne de Me Thbaut Martinat, commissaire à l'exécution du plan, par lesquelles elle demande à la cour de :  

Vu les articles 1231-1, 1110 et 1171 du code civil,  vu les articles L. 442-6 I, 5°, L. 420-2, L. 442-6, L. 442-6, I, 2° du code de commerce,  

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce,  

- condamner la société Ericsson à lui verser 1.805.730 à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi en suite de la rupture brutale de leurs relations commerciales établies,  

- condamner la société Ericsson à lui verser 250.726,30€ en réparation du préjudice subi au titre de l'abus de dépendance économique,  

- condamner la société Ericsson à lui verser la somme de 50.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,  

- condamner la société Ericson aux dépens.  

Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 12 janvier 2022 pour la sas Ericsson France, par lesquelles elle demande à la cour de :  

Vu les dispositions de l'article 442-1 II du Code de Commerce,  Vu les dispositions de l'article L 420-2 alinéa 2nd du code de commerce,  Vu les dispositions des articles 1110 et 1171 du code civil,  

- Débouter la société DSI TELECOM et l'Etude AJRS, mission conduite par Maître Thibaud Martinat, es qualités, de l'intégralité de leurs demandes dirigées contre la société Ericsson France.  

En conséquence :  

- Confirmer le jugement déféré de la 13e Chambre du Tribunal de Commerce de Paris du 6 juillet 2020 en toutes ses dispositions.  

Y ajoutant :  

- Condamner solidairement la société DSI TELECOM et l'Etude AJRS, mission conduite par Maître Thibaud Martinat, es qualités, à payer à la société Ericsson France une somme de 20.000 €, en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.  

- Condamner solidairement la société DSI TELECOM et l'Etude AJRS, mission conduite par Maître Thibaud Martinat es qualités, au paiement des entiers dépens de la procédure.  

Vu l'ordonnance de clôture du 27 janvier 2022,  

SUR CE, LA COUR,  

Aux termes de l'article L. 626-25 du code de commerce, les actions introduites avant le jugement qui arrête le plan et auxquelles l'administrateur ou le mandataire judiciaire est partie sont poursuivies par le commissaire à l'exécution du plan, ce qui est le cas en l'espèce.  

Sur la rupture des relations contractuelles entre les parties  

En vertu de l'article 9 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, les contrats conclus avant le 1er octobre 2016 demeurent soumis à la loi ancienne. En l'espèce, le contrat litigieux a été renouvelé le 7 octobre 2019, si bien qu'il est ainsi soumis au code civil tel que postérieur à cette réforme.  

Aux termes de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. L'article 1104 ajoute que les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.  

L'article 1224 du même code prescrit que la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. L'article 1226 précise que le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable.  

L'article 1228 prévoit que le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l'exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts.  

En l'espèce, l'article 18.3 du contrat cadre MA2015-000208 stipule que « le prestataire devra se conformer à la législation fiscale et sociale, être à jour du paiement des cotisations sociales et être en mesure de fournir la preuve du respect des différentes obligations applicables en la matière à la demande d'Ericsson » (pièce 4 DSI).  

L'article 19.5 du même contrat prévoit quant à lui que « si l'une ou l'autre des Parties ne remplit pas tout ou partie de ses obligations, et si tout manquement notifié par la Partie plaignante par courrier recommandé avec accusé de réception n'est pas corrigé dans un délai de trente (30) jours après sa notification, tout ou partie du Contrat Cadre, du Contrat d'application ou tout ou partie des commandes seront résiliés de plein droit et sans formalité judiciaire. Cette résiliation s'effectuera sans préjudice des dommages et intérêts qui pourraient être réclamés à la Partie défaillante ».  

La lettre recommandée avec avis de réception adressée par Ericsson France le 21 novembre 2019 notifiant la rupture pour le 31 décembre 2019 au regard de l'inexécution d'une clause du contrat a à juste titre été considérée par les premiers juges comme entrant dans les stipulations de l'article 19.5 du contrat et les prescriptions de l'article 1224 du code civil en ce qu'elle exposait l'inexécution reprochée et laissait à DSI Telecom un délai de 40 jours avant la résiliation.  

Par ailleurs, en application de l'article R. 523-3 du code des procédures civiles d'exécution, à peine de caducité, la saisie conservatoire devant être dénoncée au débiteur par acte d'huissier de justice dans un délai de 8 jours, DSI Telecom était ainsi informée de la saisie conservatoire des créances entre les mains d'Ericsson France dans un délai laissant encore entier le préavis de 30 jours lui permettant d'apporter la preuve de sa conformité à ses obligations fiscales, ce qu'elle ne conteste pas ne pas avoir fait.  

Quant à l'inexécution invoquée par Ericsson France, l'huissier des finances publiques a signifié le 13 novembre 2019 entre les mains d'Ericsson France un procès-verbal de saisie conservatoire de créances à l'encontre de DSI Telecom, en application des dispositions de l'article 277 du Livre des Procédures fiscales sur le fondement d'une ordonnance rendue par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nanterre du 6 novembre 2019, ayant autorisé l'Administration fiscale à pratiquer différentes mesures conservatoires entre les mains de trois établissements bancaires et différents clients de DSI Telecom (pièce 8 DSI).  

Si DSI Telecom allègue que l'article 18.4 précise l'article 18.3, la cour relève qu'en réalité, l'article 18.4 concerne les seules obligations sociales de DSI et plus particulièrement les documents à produire en application de la loi 91-1383 du 31 décembre 1991 et de son décret d'application. Il ne réduit donc pas la portée de l'article 18.3 quant à ses obligations en matière fiscale, de telle sorte que la production de l'attestation de régularité fiscale délivrée le 3 décembre 2019 (pièce 10 DSI dernière page) au regard du dépôt des déclarations de résultats et de TVA, du paiement de la TVA et du paiement de l'impôt sur les sociétés ne pouvait suffire à régulariser la situation : en effet, l'attestation de régularité fiscale atteste que l'entreprise a rempli ses obligations déclaratives, soit qu'elle a déposé ses liasses fiscales et déclaré le reversement de la TVA et a payé les impôts correspondant aux éléments figurant dans ses déclarations, mais ne garantit pas la régularité des déclarations fiscales de l'entreprise que l'Administration fiscale conserve le droit de contrôler et rectifier dans le délai de prescription. Ainsi comme il résulte du Bulletin officiel des finances publiques ' Impôts à l'article Attestation de régularité fiscale, dispositions juridiques communes (BOI-DJC-ARF 20161207), comme du document de la Direction générale des finances publiques produit par DSI Telecom (pièce 29), « dans tous les cas, l'attestation de régularité fiscale ne saurait en aucun cas certifier que les déclarations ne comportent pas d'omission ou d'inexactitude, susceptible d'être relevée à l'occasion d'un contrôle fiscal ultérieur ».  

Le procès-verbal de saisie conservatoire faisait état d'une créance de l'administration fiscale d'un montant de 4 215 780 €, au titre de l'impôt sur les sociétés pour les années 2014 et 2015 et au titre de la TVA pour les années 2014 et 2015 (pièce 8 DSI). L'article L. 511-1 du code des procédures civiles d'exécution qui définit la saisie conservatoire prévoyant que « toute personne dont la créance paraît fondée en son principe » peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement, c'est à juste titre que le tribunal de commerce a considéré que la notification de cette saisie à Ericsson France traduisait par l'apparence de sa réalité, le bien fondé en son principe de la créance fiscale, à l'endroit de laquelle DSI Telecom n'a jamais apporté de preuve contraire, et partant l'inexécution de l'obligation souscrite à l'article 18.3 du contrat par DSI Telecom.  

Partant, n'ayant ni respecté les stipulations de l'article 18.3 du contrat, ni rapporté de preuve permettant de contrer l'apparence de réalité du bien fondé de la créance fiscale rapportée par la saisie conservatoire dans le délai d'un mois imparti, DSI Telecom s'est exposée à voir le contrat résilié à l'issue du préavis, et ce en application 19.5 du contrat.  

Et tandis que la saisie conservatoire de l'administration fiscale pratiquée sur les comptes d'Ericsson France pour la dette fiscale de DSI Telecom représentant près du double du chiffre d'affaires annuel qu'elle réalisait avec Ericsson est le résultat d'une violation particulièrement grave des obligations de la DSI Telecom, le contrat qui s'était renouvelé le 7 octobre 2019 a valablement pu être résilié par lettre recommandée avec avis de réception par Ericsson France et prendre fin le 31 décembre 2019 soit 40 jours après l'envoi de la lettre recommandée avec avis de réception soit le 21 novembre 2019.  

Sur le caractère brutal de la rupture des relations commerciales établies  

En application de l'article L. 442-1, II du code de commerce applicable à la rupture intervenue fin 2019, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, en l'absence d'un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels.  

Le champ d'application de ce texte requiert des relations commerciales établies, soit une relation commerciale entre les parties qui revêtait avant la rupture un caractère suivi, stable et habituel et dans laquelle la partie victime de la rupture pouvait raisonnablement anticiper pour l'avenir une certaine continuité du flux d'affaires avec son partenaire commercial.  

En revanche, cet article vise à sanctionner, non la rupture elle-même, mais sa brutalité caractérisée par l'absence de préavis écrit ou s'il a été délivré, l'insuffisance du préavis, lequel doit s'entendre du temps nécessaire à l'entreprise délaissée pour se réorganiser en fonction de la durée, de la nature et des spécificités de la relation commerciale établie, et des circonstances prévalant au moment de la notification de la rupture, susceptibles d'influencer le temps nécessaire pour le redéploiement de l'activité du partenaire victime de la rupture.  

Dans tous les cas, le dernier alinéa de l'article L. 442-1 prévoit toutefois que les dispositions du II ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations.  

En l'espèce, la lettre recommandée avec avis de réception du 21 novembre 2019 a respecté le préavis de 30 jours prévu au contrat. Par ailleurs, l'inexécution de son obligation contractuelle telle que prévue à l'article 18.3 par DSI Telecom, présente un caractère de gravité suffisant pour justifier de la rupture dans ce court délai, dès lors comme il a été dit plus haut que le procès-verbal de saisie conservatoire visait une créance au titre de l'impôt sur les sociétés pour les années 2014 et 2015 et au titre de la TVA, pour les années 2014 et 2015, pour un montant global de 4 215 780 €, le juge de l'exécution ayant considéré que l'Administration fiscale justifiait, à l'encontre de DSI Telecom, d'une créance fondée en son principe mais également d'un péril dans le recouvrement de la créance justifiant une mesure conservatoire.  

La rupture ne peut donc pas qualifiée de brutale, en raison de la faute commise par DSI Telecom, constituant un manquement suffisamment grave pour justifier de la rupture avec un court préavis, de sa relation commerciale avec Ericsson France.  

En conséquence, DSI Telecom doit être déboutée de sa demande au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies et le jugement confirmé sur ce point également.  

Sur la demande au titre de l'abus de dépendance économique  

Aux termes de l'article 420-2, 2e alinéa du code de commerce, est prohibée, dès lors qu'elle est susceptible d'affecter le fonctionnement ou la structure de la concurrence, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises de l'état de dépendance économique dans lequel se trouve à son égard une entreprise cliente ou fournisseur.  

Doivent à ce titre être rapportés, simultanément, l'existence d'une situation de dépendance économique qui ne se déduit pas sur le simple constat d'une différence de puissance économique entre les parties à un contrat, une exploitation abusive de cette situation et une affectation, réelle ou potentielle, du fonctionnement ou de la structure de la concurrence sur le marché. Par ailleurs si une entreprise s'est délibérément placée en situation de dépendance économique, elle ne peut revendiquer l'application de l'article L. 420-2.  

En l'espèce, les trois contrats cadre conclus entre DSI Telecom et Ericsson France ne comportaient aucune exclusivité interdisant à la première de diversifier son activité vers d'autres équipementiers télécoms ou d'autres clients non équipementiers ; d'ailleurs, il ressort de l'ordonnance du juge de l'exécution de Nanterre du 6 novembre 2019 (pièce 6 Ericsson) que DSI Telecom était à cette période en relations commerciales avec d'autres sociétés telles que Freelance.com, AFD Technologies, SFR, Alten et CGWorld (ordonnance du juge de l'exécution de Nanterre du 6 novembre 2019 - pièce 6 Ericsson) et invoquait début 2020 sur son site internet des relations commerciales avec Samsung, Total, BNP Paribas, Société Générale, Gras Savoye, EDF, SNCF, SFR, Point P, Air France, GDF Suez, FDJ, Thalès, CNES, Sanofi Aventis, Biomérieux, France telecom, Bouygues, Huawei' etc (pièce 21 Ericsson). Par ailleurs, la seule indication qu'Ericsson France a remporté des contrats avec Bouygues Télécom et Orange pour couvrir une partie du territoire français en 5G (pièce 30 DSI) ne permet pas de démontrer à elle seule, à défaut d'éléments complémentaires, que cette situation était de nature à créer l'état de dépendance économique allégué par DSI Telecom.  

Au demeurant, dès septembre 2016, le président de DSI Group, [V] [H], a adressé un mail à Ericsson ayant pour objet « analyse financière sur la dépendance économique » au regard de l'article L. 420-2 du code de commerce (pièce 13 Ericsson), dans lequel il exposait que le chiffre d'affaires du groupe DSI se répartissait autour d'une dizaine de clients dont certains avec un chiffre d'affaires supérieur à celui réalisé avec chacune des structures d'Ericsson (ITSS et France), que des solutions alternatives équivalentes existaient et que son éventuel état de dépendance économique auprès d'Ericsson était dans tous les cas la conséquence d'un choix délibéré et d'une stratégie commerciale qu'elle avait choisi de mettre en œuvre à ses risques et périls.  

Il résulte de ce qui précède que l'exploitation abusive d'un état de dépendance économique au sens de l'article 420-2 du code de commerce n'est pas rapportée, de sorte que le jugement du tribunal sera confirmé de ce chef.  

Sur la demande au titre d'un déséquilibre significatif  

Aux termes de l'article L. 442-1, I, 2° du même code, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, dans le cadre de la négociation commerciale, de la conclusion ou de l'exécution d'un contrat, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de soumettre ou de tenter de soumettre l'autre partie à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.  

En application de l'article 1171 du code civil, dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite. L'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation.  

Si DSI Telecom fait valoir pour la première fois en appel, qu'à travers les remises imposées de fin d'années, calculées à partir du chiffre d'affaires réalisé par tranches par DSI Telecom, Ericsson France l'a soumise à un déséquilibre significatif, la charge de la preuve d'une telle situation lui incombe.  

En l'espèce, si DSI Telecom indique avoir, depuis 2013, réalisé chaque année un chiffre d'affaires compris entre 1 144 757€ HT et 3 958 598€ HT (pièce 6 DSI) et avoir dû des remises de fin d'année sur la même période, chaque année, entre 19 905 € HT et 53 993€ HT (pièces 7 et suivantes DSI), il résulte des termes du contrat, en annexe 4, que les remises ont été négociées en fonction du volume des prestations commandées et sont donc directement reliées au chiffre d'affaires généré pour DSI Telecom par les commandes d'Ericsson France.  

Il n'est rapporté dans les pièces produites ni l'identification d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ni la démonstration d'une soumission ou d'une tentative de soumission de l'autre partie, DSI invoquant seulement les termes d'un arrêt de la cour d'appel de Paris relatif à une autre espèce concernant des remises de fin d'années, sans démontrer en quoi et comment elle se serait trouvée dans une situation répondant aux mêmes critères.  

Au demeurant, cette demande n'est pas reprise dans le dispositif de ses conclusions.  

Cette demande doit donc être rejetée.  

Sur les frais irrépétibles et les dépens  

DSI Telecom succombant à l'action, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.  

Statuant de ces chefs en cause d'appel, DSI Telecom, qui succombe, supportera la charge de ses propres dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile, et sera en conséquence condamnée à payer à Ericsson France la somme de 10 000 € au titre des frais irrépétibles, en application de l'article 700 du même code.  

PAR CES MOTIFS,  

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,  

Y ajoutant,  

DÉBOUTE la sas DSI Telecom, représentée par la Selarl AJRS en la personne de Me Thbaut Martinat, commissaire à l'exécution du plan de sa demande au titre du déséquilibre significatif,  

CONDAMNE la sas DSI Telecom, représentée par la Selarl AJRS en la personne de Me Thbaut Martinat, commissaire à l'exécution du plan aux dépens,  

CONDAMNE la sas DSI Telecom, représentée par la Selarl AJRS en la personne de Me Thbaut Martinat, commissaire à l'exécution du plan, à payer à la sas Ericsson France la somme de 10 000 € (dix mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.