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Décisions

Cass. crim., 23 mars 1977, n° 75-92.170

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Mongin

Rapporteur :

M. Larocque

Avocat général :

M. Aymond

Avocat :

Me Lyon-Caen

Cass. crim. n° 75-92.170

22 mars 1977

REJET DU POURVOI FORME PAR LA SOCIETE ANONYME GEORGES MAURER, TIERS INTERVENANT, CONTRE UN ARRET DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, 2E SECTION, EN DATE DU 4 JUILLET 1975, QUI A CONFIRME L'ORDONNANCE DU JUGE D'INSTRUCTION REJETANT LA REQUETE PRESENTEE PAR LADITE SOCIETE A L'EFFET D'OBTENIR LA RESTITUTION DE PIECES SAISIES DANS UNE INFORMATION SUIVIE CONTRE X DES CHEFS D'ABUS DE CONFIANCE ET D'ESCROQUERIES.

LA COUR, VU LE MEMOIRE PRODUIT ;

SUR LA RECEVABILITE DU POURVOI ;

ATTENDU QUE L'ARTICLE 99 DU CODE DE PROCEDURE PENALE INSTITUE EN FAVEUR DE TOUT TIERS QUI PRETEND AVOIR DROIT SUR UN OBJET PLACE SOUS LA MAIN DE LA JUSTICE UNE PROCEDURE PARTICULIERE LUI PERMETTANT D'EN RECLAMER LA RESTITUTION AU JUGE D'INSTRUCTION ;

QUE LE POURVOI DU TIERS INTERVENANT EN VERTU DUDIT ARTICLE, DIRIGE CONTRE L'ARRET DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION CONFIRMANT L'ORDONNANCE QUI A REJETE LA REQUETE, N'ENTRE PAS DANS LA CLASSE DES ARRETS D'INSTRUCTION VISES PAR LES ARTICLES 570 ET 571 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;

QUE TEL EST LE CAS DE L'ESPECE ET QUE LE POURVOI DOIT ETRE IMMEDIATEMENT EXAMINE ;

AU FOND ;

SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 96, 97, 99, 172 ET 173 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, ENSEMBLE 593 DU MEME CODE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A REJETE LA DEMANDE FORMEE PAR LA SOCIETE GEORGES MAURER, TIERS SAISI, EN RESTITUTION DES PIECES AYANT FAIT L'OBJET D'UNE SAISIE DU JUGE D'INSTRUCTION, EN DATE DU 12 MARS 1975 ;

AUX MOTIFS QUE, SI UN PRECEDENT ARRET DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION DU 15 FEVRIER 1975 A ANNULE CERTAINES PIECES DE LA PROCEDURE ET ORDONNE LA RESTITUTION DES PIECES SAISIES CHEZ LA SOCIETE MAURER, LE PROCES-VERBAL DE PERQUISITION ET DE SAISIE DU 12 MARS 1975 NE SE REFERE EN AUCUNE FACON AUX PIECES ANNULEES ET DEPOSEES AU GREFFE ;

QU'IL NE SAURAIT ETRE SOUTENU QUE LE FAIT PAR LE JUGE D'INSTRUCTION D'AVOIR CONSERVE LA NUMEROTATION DES PIECES TELLE QU'ELLE EXISTAIT DANS LES PRECEDENTS SCELLES CONSTITUE UNE REFERENCE A LA SAISIE ANNULEE, S'AGISSANT EN L'ESPECE D'UN SIMPLE PROCEDE DE CLASSIFICATION MATERIELLE, SANS AUCUNE INCIDENCE JURIDIQUE ;

ALORS D'UNE PART QU'IL RESSORT DU PROCES-VERBAL DE SAISIE DU 12 MARS 1975 (CF PRODUCTION) QUE LE JUGE D'INSTRUCTION A UTILISE LA NUMEROTATION DES PIECES TELLE QU'ELLE EXISTAIT DANS LES PRECEDENTS SCELLES POUR VERIFIER LA CONSISTANCE DE LA NOUVELLE SAISIE PAR RAPPORT A L'ANCIENNE (CF PV, P 2 ET MENTION, P 8), QU'IL A DONC BIEN UTILISE CETTE NUMEROTATION DANS UN BUT AUTRE QUE DE SIMPLE CLASSIFICATION MATERIELLE ET A AINSI VIOLE LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 173 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;

ALORS D'AUTRE PART QUE LA DEMANDERESSE SOUTENAIT DANS SA REQUETE D'APPEL QUE LA NOUVELLE SAISIE PROCEDAIT DE L'ANCIENNE ET S'Y RATTACHAIT DE FACON INDIVISIBLE, AINSI QU'IL RESULTAIT DU FAIT QUE LE JUGE D'INSTRUCTION AVAIT PRIS SOIN DE SE PRESENTER DANS LES LOCAUX DE LA SOCIETE GEORGES MAURER LE 12 MARS 1975 A UNE DEMI-HEURE PRES EN MEME TEMPS QUE LE SUBSTITUT DE M LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE VENANT RESTITUER LES DOCUMENTS SAISIS LE 4 OCTOBRE 1974, QUE LE JUGE D'INSTRUCTION S'ETAIT AUSSITOT OPPOSE A CE QUE CES DOCUMENTS SOIENT MANIES OU DEPLACES ET QU'IL LES A RESSAISIS SUR-LE-CHAMP EN SE RAPPORTANT A LA NUMEROTATION QUI EN AVAIT ETE FAITE LE 4 OCTOBRE PRECEDENT ;

ET QUE LA CHAMBRE D'ACCUSATION A LAISSE SANS REPONSE CE MOYEN DE DEFENSE DONT LE BIEN-FONDE RESSORT CEPENDANT DU PROCES-VERBAL DE SAISIE DU 12 MARS 1975 ;

ATTENDU QU'IL APPERT DE L'ARRET ATTAQUE QUE, AU COURS D'UNE INFORMATION OUVERTE CONTRE X DES CHEFS D'ESCROQUERIES ET ABUS DE CONFIANCE SUR PLAINTES DE DIVERSES PARTIES CIVILES, LE JUGE D'INSTRUCTION A ETE AMENE A PROCEDER A UNE PERQUISITION DANS LES LOCAUX DE LA SOCIETE ANONYME GEORGES MAURER, COMMISSIONNAIRE AGREE PRES LA BOURSE DE COMMERCE DE PARIS, ET A LA SAISIE DE NOMBREUX DOCUMENTS, TELS QUE REPERTOIRES, JOURNAUX DE COMPENSATION ET FEUILLES DE JOURNEES, QU'EN EXECUTION D'UN PRECEDENT ARRET DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, EN DATE DU 15 FEVRIER 1975, ANNULANT CERTAINS ACTES DE LA PROCEDURE, LES PIECES SAISIES ONT ETE RESTITUEES A LA SOCIETE DEMANDERESSE, LE 12 MARS 1975, MAIS ONT FAIT L'OBJET D'UNE NOUVELLE SAISIE ORDONNEE PAR LE MAGISTRAT INSTRUCTEUR, SUIVANT PROCES-VERBAL DU MEME JOUR ;

QU'ENFIN, ET PAR ORDONNANCE DU 22 AVRIL 1975, CE MAGISTRAT A REJETE LA DEMANDE DE RESTITUTION PRESENTEE PAR LA SOCIETE GEORGES MAURER ;

ATTENDU QUE, POUR CONFIRMER CETTE DERNIERE DECISION ET DECLARER LA SAISIE REGULIERE, LA CHAMBRE D'ACCUSATION, STATUANT DANS LES CONDITIONS PREVUES PAR L'ARTICLE 99 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, ENONCE NOTAMMENT QUE LE PROCES-VERBAL DE PERQUISITION ET DE SAISIE NE SE REFERE EN AUCUNE FACON AUX PIECES DE PROCEDURE DONT L'ARRET DE LA CHAMBRE EN DATE DU 15 FEVRIER 1975 AVAIT ORDONNE L'ANNULATION ET LE DEPOT AU GREFFE, ET QU'IL NE SAURAIT ETRE SOUTENU QUE LE FAIT PAR LE JUGE D'INSTRUCTION D'AVOIR CONSERVE LA NUMEROTATION DES PIECES TELLE QU'ELLE EXISTAIT DANS LES PRECEDENTS SCELLES CONSTITUE UNE REFERENCE A LA SAISIE ANNULEE ;

QU'EN EFFET IL S'AGIT, EN L'ESPECE, D'UN SIMPLE PROCEDE DE CLASSIFICATION MATERIELLE, SANS AUCUNE INCIDENCE JURIDIQUE ;

ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES CONSTATATIONS, D'OU IL RESULTE QU'IL N'Y A EU EN L'ESPECE AUCUNE VIOLATION DES TEXTES VISES AU MOYEN, LA CHAMBRE D'ACCUSATION A, SANS INSUFFISANCE, REPONDU AUX ARTICULATIONS ESSENTIELLES DES MEMOIRES DE LA DEMANDERESSE ET JUSTIFIE SA DECISION ;

QU'AINSI LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;

SUR LE SECOND MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 378 DU CODE PENAL, 96, 97 ET 99 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, ENSEMBLE 593 DU MEME CODE, DEFAUT DE REPONSE A REQUETE D'APPEL, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A REJETE LA DEMANDE DE RESTITUTION DE PARTIE DES PIECES SAISIES COUVERTES PAR LE SECRET PROFESSIONNEL ;

AUX MOTIFS QUE, S'IL N'EST PAS DOUTEUX QUE LES SCELLES CONSTITUES PAR LES REPERTOIRES, JOURNAUX DE COMPENSATION ET FEUILLES DE JOURNEES CONTIENNENT DE TRES NOMBREUSES MENTIONS CONCERNANT DES PERSONNES ETRANGERES A L'INFORMATION, IL N'EN DEMEURE PAS MOINS QUE L'EXAMEN DES CONDITIONS DANS LESQUELLES ONT ETE EFFECTUEES LES OPERATIONS POUR LE COMPTE DES PLAIGNANTS CONDUIT NECESSAIREMENT A UN EXAMEN APPROFONDI ET GENERAL DES PRATIQUES SUIVIES A LA CHARGE MAURER ET QUE L'ETENDUE DES SAISIES EFFECTUEES EST JUSTIFIEE PAR LA NATURE MEME DES INFRACTIONS DENONCEES ET SUR LESQUELLES LE JUGE D'INSTRUCTION EST CHARGE D'INFORMER ;

QU'AINSI LES PIECES SUSVISEES RELATIVES A L'ENSEMBLE DES OPERATIONS FAITES PAR LA CHARGE CONSTITUENT DES PIECES A CONVICTION LIEES A L'EXISTENCE DES INFRACTIONS ;

ET QUE LE SECRET PROFESSIONNEL DU COMMISSIONNAIRE AGREE NE SAURAIT FAIRE ECHEC AU MAINTIEN SOUS MAIN DE JUSTICE DES PIECES SAISIES, UTILES A LA MANIFESTATION DE LA VERITE, ALORS QUE, LE RESPECT DU SECRET PROFESSIONNEL S'IMPOSE, EN VERTU DES ARTICLES 96 ET 97 PARAGRAPHE 1ER DU CODE DE PROCEDURE PENAL, AU COURS DE LA PROCEDURE DE PERQUISITION ET DE SAISIE ;

ET QUE, AUX TERMES DE L'ARTICLE 97 PARAGRAPHE 4, LE JUGE D'INSTRUCTION NE MAINTIENT QUE LA SAISIE DES OBJETS ET DOCUMENTS UTILES A LA MANIFESTATION DE LA VERITE OU DONT LA COMMUNICATION SERAIT DE NATURE A NUIRE A L'INSTRUCTION ;

ET ALORS QUE, EN L'ESPECE, LA REQUETE D'APPEL SOUTENAIT QUE LES PIECES SAISIES ET PLACEES SOUS SCELLES N° 1 A 104 ET 107 A 115 RELATAIENT LES OPERATIONS EFFECTUEES SUR LES MARCHES REGLEMENTES DE LA BOURSE DE COMMERCE DE PARIS PAR TOUS LES CLIENTS DE LA SOCIETE GEORGES MAURER, QUELS QU'ILS SOIENT, DEPUIS LE 15 MARS 1963, ET QU'IL Y AURAIT VIOLATION DIRECTE DE LA LOI SI LES REPERTOIRES, JOURNAUX DE COMPENSATION OU FEUILLES DE JOURNEE SAISIS, ETAIENT COMMUNIQUES TELS QUELS AUX PARTIES CIVILES, A LEURS CONSEILS, AUX EXPERTS EVENTUELLEMENT COMMIS, PUISQUE CELA SE TRADUIRAIT PAR LA DIVULGATION DU SECRET PROFESSIONNEL PRESCRIT PAR LA LOI D'OPERATIONS N'AYANT AUCUN RAPPORT AVEC CELLES DES PLAIGNANTS ET PARFOIS ANTERIEURES A CELLES-CI DE PLUSIEURS ANNEES ;

ET QUE LES MOTIFS D'ORDRE VAGUE ET GENERAL DEDUITS PAR L'ARRET ATTAQUE SONT INSUFFISANTS POUR REPONDRE AU MOYEN PRECIS D'APRES LEQUEL LES SAISIES PORTAIENT SUR DES DOCUMENTS RELATIFS NON SEULEMENT A DES PERSONNES ETRANGERES A L'INFORMATION MAIS ENCORE A DES OPERATIONS ANTERIEURES DE PLUSIEURS ANNEES A CELLES DENONCEES PAR LES PARTIES CIVILES ;

ATTENDU QUE, POUR REPONDRE AU MEMOIRE DE LA DEMANDERESSE QUI SOUTENAIT QUE LE MAINTIEN SOUS SCELLES DE DIVERS DOCUMENTS AYANT TRAIT A DES OPERATIONS TRAITEES PAR DES CLIENTS ETRANGERS AU PROCES PENAL EN COURS CONSTITUERAIT UNE VIOLATION DU SECRET PROFESSIONNEL AUQUEL SONT ASTREINTS LES COMMISSIONNAIRES AGREES PRES LA BOURSE DE COMMERCE, L'ARRET ATTAQUE ENONCE QUE L'EXAMEN DES CONDITIONS DANS LESQUELLES ONT ETE EFFECTUEES LES OPERATIONS POUR LE COMPTE DES PLAIGNANTS CONDUIT NECESSAIREMENT A UN EXAMEN APPROFONDI ET GENERAL DES PRATIQUES SUIVIES A LA CHARGE MAURER ET QUE L'ETENDUE DES SAISIES EFFECTUEES EST JUSTIFIEE PAR LA NATURE MEME DES INFRACTIONS DENONCEES ET SUR LESQUELLES LE JUGE D'INSTRUCTION EST CHARGE D'INFORMER ;

QUE LES PIECES SAISIES SONT UTILES A LA MANIFESTATION DE LA VERITE ET QUE SEULE LA POURSUITE DE L'INFORMATION PERMETTRA DE DIRE SI LEUR SAISIE SERA ENCORE, OU NON, NECESSAIRE ;

ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI, LA CHAMBRE D'ACCUSATION, LOIN D'AVOIR VIOLE LES TEXTES VISES AU MOYEN, EN A FAIT L'EXACTE APPLICATION ;

QU'EN EFFET, ET D'UNE PART, L'OBLIGATION IMPOSEE AU COMMISSIONNAIRE AGREE DE GARDER LE SECRET DES FAITS DONT IL A EU CONNAISSANCE DANS L'EXERCICE DE SA PROFESSION, NE METTAIT PAS OBSTACLE A CE QUE LE JUGE D'INSTRUCTION PROCEDAT A LA SAISIE DE TOUS DOCUMENTS, PIECES OU OBJETS UTILES A LA MANIFESTATION DE LA VERITE, LES POUVOIRS QUE CE MAGISTRAT TIENT DE L'ARTICLE 81 DU CODE DE PROCEDURE PENALE NE SOUFFRANT, EN PRINCIPE, AUCUNE RESTRICTION ;

QU'IL APPARTENAIT, D'AUTRE PART, A LA JURIDICTION D'INSTRUCTION SAISIE D'UNE REQUETE AUX FINS DE RESTITUTION DE DOCUMENTS PLACES SOUS MAIN DE JUSTICE, D'EXAMINER LES ELEMENTS FOURNIS PAR L'INFORMATION ET D'APPRECIER SOUVERAINEMENT SI LE MAINTIEN DE LA SAISIE ETAIT UTILE A LA MANIFESTATION DE LA VERITE ;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;

ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME : REJETTE LE POURVOI.