Livv
Décisions

CA Grenoble, 1re ch. corr., 9 février 2000, n° 99/00539

GRENOBLE

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Avocats :

Me Salgues, Me Bret

CA Grenoble n° 99/00539

8 février 2000

LA COUR,

Statuant publiquement, par défaut pour la Banque X, contradictoirement pour les autres parties,

Par jugement du 25 septembre 1998, le tribunal correctionnel de <localité> a prononcé la relaxe de M. A? de M. B et de M. C, poursuivis pour les deux premiers du chef de violation de secret professionnel et pour le 3e du chef de recel de violation de secret professionnel.

Appel a successivement été relevé par les parties civiles et le Ministère Public.

Les parties civiles demandent la condamnation des prévenus, y compris X civilement responsable de MM. A et B, à leur payer la somme de 500.000 francs à titre de dommages intérêts ainsi que celle de 30.000 francs en application de l’article 475-1 du code de procédure pénale.

Les appelants font valoir que courant janvier 1997, M. C a sollicité auprès de X un historique des comptes de son frère D et de son épouse (périodes du 1er janvier 1993 au 30 décembre 1994 et du 10 décembre 1989 au 10 janvier 1993). Les appelants soutiennent que ces communications ont été effectuées au mépris des dispositions de l’article 57 de la loi du 24 janvier 1984 qui consacrent l’obligation au secret professionnel des banques sanctionnée par l’article 226-13 du code pénal. Ils observent que Le délit existe dès que la révélation a été faite avec connaissance, indépendamment de toute intention spéciale de nuire,

Monsieur l’Avocat Général s’en remet à l’appréciation de la Cour.

MM. A et B, X civilement responsable, demandent à la Cour, au principal, de confirmer le jugement, subsidiairement, de débouter M. D de sa demande de dommages intérêts, et plus subsidiairement de condamner M. C à relever et garantir la X et d’ordonner l’exclusion du bulletin n° 2 du casier judiciaire de MM. A et B.

Ils relèvent que s’il n’y a ni volonté, ni conscience de révéler le secret, le délit n’est pas constitué et qu’en l’espèce, il n’y a qu’une méprise de la part des employés de X.

M. C conclut à la confirmation du jugement et sollicite 100.000 francs sur le fondement de l’article 472 du code de procédure pénale et 30.000 francs en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale.

Il estime que le délit de violation du secret professionnel n’est pas constitué et que lui-même en tout état de cause n’a pas agi de mauvaise foi. Il soutient qu’aucune des conditions visées par la jurisprudence sur l’existence de l’élément intentionnel n’est remplie.

MOTIFS DE L’ARRET :

Le 24 janvier 1994 est décédée Mme E. Elle a laissé pour recueillir sa succession ses trois enfants issus de sa première union avec M. F, à savoir, Mme G, M. D et M. C. Ce dernier soupçonnant son frère D de recel successoral à demandé à X, agence de <localité>, par plusieurs courriers expédiés en janvier et février 1997, l’historique du compte de son frère D. La banque s’est exécutée en procédant à divers envois.

Les courriers par lesquels le prévenu a sollicité la délivrance de l’historique du compte de son frère ne comportaient pas tous systématiquement l’identification complète du demandeur avec notamment son prénom. Ils comportaient cependant le n° du compte concerné. Un courrier, le premier dans l’ordre chronologique, ne comporte aucune identification en ce qui concerne l’exemplaire détenu par la banque, il comporte les coordonnées complètes du demandeur en ce qui concerne du courrier produit par le prévenu. Malgré la demande de la Cour, il n’a pas été possible d’éclaircir ce point.

En observant ces courriers, il est manifeste, compte tenu de l’identification partielle du demandeur qui y figure, que la vigilance des préposés de la banque a été trompée. De surcroît la lettre du 27 février 1997 par laquelle l’établissement bancaire adresse à M. C les relevés de compte pour la période du 10 décembre 1989 au 10 janvier 1993, indique à son destinataire qu’il s’agit des relevés de «votre compte» et non du compte. Cet élément de fait révèle la conviction qu’avait l’expéditeur d’adresser les relevés au véritable titulaire du compte. De la même manière, le courrier du 17 février 1997 par lequel la banque sollicitait le paiement des frais afférents à la délivrance demandée, notait que la demande visait «les copies de votre compte» et non les copies du compte portant le n° 00067170186. Cet élément permet de retenir que dans l’esprit des préposés de la banque, il y avait bien, lors de la lecture des demandes adressées par M. C et l’envoi de correspondance en réponse pour satisfaire sa demande, identité entre l’auteur des demandes, le destinataire des envois de relevés de compte et le titulaire réel du compte.

S’il n’est pas douteux que les préposés de l’établissement bancaire ont matériellement expédié à M. C des relevés concernant le compte de son frère D, les éléments de fait examinés supra montrent que MM. A et B se sont mépris et n’ont eu aucune conscience de révéler des informations couvertes par le secret. La révélation ayant été faite sans connaissance par MM. A et B de son caractère illicite, l’infraction objet de la prévention n’est pas caractérisée. En conséquence, c’est à bon droit que les premiers juges ont relaxé MM. A et B. Le délit de révélation d’information à caractère secret n’étant pas constitué, le délit de recel imputé à M. C n’est pas caractérisé, ainsi qu’en ont justement décidé les premiers juges.

M. C ne caractérisant pas l’abus de constitution de partie civile des appelants, sa demande fondée sur l’article 472 du code de procédure pénale sera rejetée.

L’article 475-1 du code de procédure pénale ne permettant qu’à la partie civile de demander la condamnation du prévenu aux frais exposés, la demande de M. C sera également rejetée.

PAR CES MOTIFS : Reçoit les appels en la forme, Au fond confirme le jugement en toutes ses dispositions, Rejette les demandes de M. C fondées sur les articles 472 et 475-1 du code de procédure pénale.