Cass. com., 14 janvier 2014, n° 12-13.270
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Avocats :
Me Bouthors, SCP Lyon-Caen et Thiriez
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable l'exception de nullité du contrat de prêt du 11 février 2005 et confirmé le jugement en ce qu'il l'a condamné à payer à la banque la somme de 45 213,40 euros au titre du prêt, avec intérêts au taux de 5,40 % à compter du 5 juin 2008, alors, selon le moyen :
1°) que l'action engagée en vue de contester l'existence du consentement donné à la souscription d'un emprunt s'analyse en une action en contestation de l'existence même d'une convention soumise, en tant que telle, à la prescription de droit commun ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1108, 1304 et 2262 ancien du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 janvier 2008 ;
2°) que c'est seulement en cas de nullité relative que l'exécution de l'obligation découlant d'une convention rend inopposable l'exception de nullité ; qu'ayant jugé à tort que la nullité invoquée par M. X... était une nullité relative, la cour d'appel, qui a rejeté la demande de nullité d'une convention au motif que cette convention avait reçu un commencement d'exécution et que l'exception de nullité pouvait seulement faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas encore été exécuté, a violé les articles 1304 et 2262 ancien du code civil, ensemble les articles 1131 et 1321-1 du même code ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que M. X... avait reçu sur son compte la somme prêtée en février 2005 et retenu qu'il avait payé les onze premières mensualités, la cour d'appel a exactement retenu que l'action en nullité du prêt litigieux était soumise à la prescription quinquennale de l'article 1304 du code civil ;
Attendu, d'autre part, que la réponse apportée à la première branche, dont résulte le caractère relatif de la nullité, rend inopérant le grief de la seconde ;
D'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de dommages-intérêts pour manquement de la banque à son devoir de mise en garde, alors, selon le moyen :
1°) qu'il incombe à la banque tenue d'une obligation particulière d'information d'établir qu'elle a effectivement éclairé le client, compte tenu de sa situation personnelle, sur les risques inhérents au crédit octroyé ; qu'en se fondant sur l'existence d'un protocole daté du 1er février 2005 portant les noms de la banque et de MM. Jean-Michel, Fabien, Laurent X... et de Mme Laurence X..., qui détaillait la situation financière déséquilibrée de la société et les moyens pour y remédier et rappelait la cause et le mécanisme du prêt relais de 40 000 euros consenti à M. X... pour en déduire que la banque avait loyalement exécuté son obligation de mise en garde, cependant que ce document avait pour objet d'informer les futurs cautions sur la teneur de l'endettement de la société et non d'alerter M. X... sur les risques de non remboursement de l'opération de crédit, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1147 du code civil ;
2°) que la banque est tenue d'une obligation de mise en garde dont elle doit rapporter la preuve dès lors qu'elle se trouve en face d'un emprunteur non averti ; que pour dire que la banque avait rempli son devoir de mise en garde, la cour d'appel a rappelé que par une lettre du 27 janvier 2005, M. X... avait indiqué qu' « en tant qu'actionnaire de la société, je suis informé de la situation délicate de cette dernière ; j'accepte en connaissance de cause de contracter en mon nom un prêt de 40 000 euros que l'apporterai en compte courant de la société ; d'autre part, je m'engage à vendre le bien que je possède dans le cadre de la SCI à hauteur de 49 % ; dès réalisation de la vente, je m'engage à rembourser le prêt dans son intégralité » ; qu'en se fondant sur cette lettre pour considérer que la banque avait satisfait à son obligation de mise en garde cependant que cette lettre ne démontrait pas que la banque avait effectivement mis en garde M. X... lors de la conclusion du contrat de prêt et notamment qu'elle l'avait alerté sur les risques du non remboursement, la cour d'appel a violé les l'article 1147 du code civile ;
3°) que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en écartant le moyen de M. X... par lequel il niait avoir signé le courrier du 27 janvier 2005 et le protocole du 1er février suivant, ainsi que le prêt litigieux, aux motifs que les signatures sur ces documents étaient similaires à celle figurant sur l'acte de prêt pour lequel l'exception de nullité avait été déclarée irrecevable (et par suite acte de prêt réputé valide) sans même prendre en considération l'attestation de M. Jean-Michel X... ¿ père de l'exposant ¿ régulièrement produite aux débats par laquelle ce dernier attestait avoir sollicité le prêt litigieux et signé le courrier du 27 janvier 2005, le protocole du 1er février 2002 ainsi que le prêt litigieux à l'insu de son fils, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil et l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) que par des écritures demeurées sans réponse, M. X... faisait valoir que son père M. Jean-Michel X... avait signé le protocole d'accord du 1er février 2005, la lettre du 27 janvier 2005 ainsi que le prêt litigieux, qu'il n'était ni présent lors de la signature du protocole ni lors de la signature du prêt, et qu'il n'avait par conséquent jamais eu le moindre contact avec la banque concernant l'octroi du prêt relais ; que M. X... en déduisait que dans ces conditions la banque ne pouvait prétendre avoir rempli son devoir de mise en garde à son égard ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce moyen déterminant des écritures d'appel de M. X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé que les revenus de M. X... apparaissaient suffisants pour lui permettre de règler les onze premières mensualités, ce qu'il a d'ailleurs fait, et que le solde devait être payé grâce à la vente de l'immeuble de la SCI mis en vente à 640 000 euros, de sorte que l'emprunteur pouvait espérer récupérer largement plus que les 40 189,20 euros restant dûs, que la banque n'avait pas à se substituer à un agent immobilier, ni à vérifier si le prix de mise en vente correspondait au prix du marché et quelles étaient les probabilités de la vente qui était confiée à un agent immobilier, que M. X... n'établit d'ailleurs pas que l'immeuble n'était pas mis en vente à son juste prix et qu'il n'avait aucune chance d'être vendu sous un an ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir l'adaptation du prêt souscrit aux capacités financières de l'emprunteur et l'absence de risque d'endettement né de l'octroi du prêt, ce dont il résulte que la banque n'était pas tenue à un devoir de mise en garde, le moyen, qui invoque le défaut d'exécution de ce devoir, est inopérant ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille quatorze.