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Décisions

TUE, 10e ch., 4 mai 2022, n° T-30/19

TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

China Rubber Industry Association (CRIA), China Chamber of Commerce of Metals, Minerals & Chemicals Importers & Exporters (CCCMC)

Défendeur :

Commission européenne, Marangoni SpA

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Kornezov

Juges :

M. Buttigieg, Mme Kowalik Bańczyk (rapporteure) , M. Hesse , M. Petrlík

Avocats :

Me Antonini, Me Maniatis , Me Monard , Me Bouvarel, Me Coelho Dias , Me Prost

TUE n° T-30/19

4 mai 2022

LE TRIBUNAL (dixième chambre élargie),

1 Le 11 août et le 14 octobre 2017, à la suite de deux plaintes déposées par la coalition contre les importations non équitables de pneumatiques, la Commission européenne a ouvert, respectivement, une procédure antidumping et une procédure antisubventions concernant, chacune, les importations dans l’Union européenne de certains pneumatiques neufs ou rechapés, en caoutchouc, du type utilisé pour les autobus ou camions, ayant un indice de charge supérieur à 121 (ci-après le « produit concerné ») et originaires de la République populaire de Chine. Ces procédures ont été ouvertes sur le fondement, respectivement, de l’article 5 du règlement (UE) 2016/1036 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de l’Union européenne (JO 2016, L 176, p. 21, ci-après le « règlement de base antidumping »), et de l’article 10 du règlement (UE) 2016/1037 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de l’Union européenne (JO 2016, L 176, p. 55, ci-après le « règlement de base antisubventions »).

2 Les enquêtes relatives au dumping, aux subventions et au préjudice lié ont porté sur la période comprise entre le 1er juillet 2016 et le 30 juin 2017 (ci-après la « période d’enquête »). L’examen des tendances pertinentes pour l’évaluation du préjudice a couvert la période comprise entre le 1er janvier 2014 et la fin de la période d’enquête (ci-après la « période considérée »).

3 Les parties intéressées, dont les producteurs-exportateurs chinois concernés par les procédures antidumping et antisubventions ainsi que leurs associations représentatives, ont été invitées à participer à ces enquêtes. Plusieurs parties intéressées, dont les requérantes, China Rubber Industry Association (CRIA) et China Chamber of Commerce of Metals, Minerals & Chemicals Importers & Exporters (CCCMC), ont présenté des observations écrites aux différentes étapes des procédures antidumping et antisubventions. Certaines parties intéressées, dont les requérantes, ont également participé à des auditions organisées par la Commission.

4 Le 1er février 2018, la Commission a adopté le règlement d’exécution (UE) 2018/163, soumettant à enregistrement les importations de pneumatiques neufs et rechapés pour autobus ou camions originaires de la République populaire de Chine (JO 2018, L 30, p. 12), entré en vigueur le 3 février 2018. Ce règlement soumet à enregistrement les importations du produit concerné originaires de Chine.

5 Le 4 mai 2018, la Commission a adopté le règlement (UE) 2018/683 instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de certains pneumatiques neufs ou rechapés, en caoutchouc, du type utilisé pour les autobus ou camions, ayant un indice de charge supérieur à 121, originaires de la République populaire de Chine et modifiant le règlement d’exécution 2018/163 (JO 2018, L 116, p. 8, ci-après le « règlement antidumping provisoire »). Ce règlement institue un droit antidumping provisoire sur les importations du produit concerné originaires de Chine.

6 En revanche, la Commission a décidé de ne pas instaurer de mesures provisoires dans la procédure antisubventions.

7 Le 18 octobre 2018, la Commission a adopté le règlement d’exécution (UE) 2018/1579 instituant un droit antidumping définitif, portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations de certains pneumatiques neufs ou rechapés, en caoutchouc, du type utilisé pour les autobus ou camions, ayant un indice de charge supérieur à 121 et originaires de la République populaire de Chine, et abrogeant le règlement d’exécution 2018/163 (JO 2018, L 263, p. 3, ci-après le « règlement antidumping définitif »).

8 L’article 1er, paragraphe 1, du règlement antidumping définitif institue un droit antidumping définitif sur les importations du produit concerné originaires de Chine. En application de l’article 1er, paragraphe 2, du même règlement, dans sa version initiale, le montant de ce droit antidumping avait été fixé à des valeurs comprises, selon les sociétés fabriquant ce produit, entre 42,73 et 61,76 euros par unité du produit concerné.

9 Le 9 novembre 2018, la Commission a adopté le règlement d’exécution (UE) 2018/1690, instituant un droit compensateur définitif sur les importations de certains pneumatiques neufs ou rechapés, en caoutchouc, du type utilisé pour les autobus ou camions, ayant un indice de charge supérieur à 121 et originaires de la République populaire de Chine et modifiant le règlement antidumping définitif (JO 2018, L 283, p. 1, ci-après le « règlement antisubventions »).

10 L’article 1er, paragraphe 1, du règlement antisubventions institue un droit compensateur définitif sur les importations du produit concerné. En application de l’article 1er, paragraphe 2, du même règlement, le montant de ce droit compensateur a été fixé à des valeurs comprises, selon les sociétés fabriquant ce produit, entre 3,75 et 57,28 euros par unité du produit concerné.

11 L’article 2, point 1, du règlement antisubventions modifie l’article 1er, paragraphes 2 et 3, du règlement antidumping définitif. À la suite de cette modification, le montant du droit antidumping définitif a été réduit et ramené à des valeurs comprises, selon les sociétés fabriquant le produit concerné, entre 0 et 38,98 euros par unité de ce produit.

12 En résumé, dans le règlement antidumping définitif, tel que modifié, et dans le règlement antisubventions (ci-après, pris ensemble, les « règlements attaqués »), les droits antidumping et compensateurs définitifs applicables, exprimés en euros par unité du produit concerné fabriqué par les producteurs-exportateurs chinois, ont été, en dernier lieu, établis comme suit :

II. Procédure et conclusions des parties

13 Par requêtes déposées au greffe du Tribunal le 15 janvier 2019 dans l’affaire T 30/19 et le 5 février 2019 dans l’affaire T 72/19, les requérantes, agissant pour le compte de certains de leurs membres énumérés dans les annexes A.2 desdites requêtes (ci-après les « annexes A.2 ») et pour leur propre compte, ont introduit les présents recours aux fins d’obtenir l’annulation partielle des règlements attaqués.

14 Par lettres déposées au greffe du Tribunal le 8 février 2019, les requérantes ont demandé la jonction à toutes les étapes de la procédure des deux affaires. Par lettre du 14 mars 2019, la Commission s’en est remise à la sagesse du Tribunal pour décider s’il convenait de procéder à cette jonction. Par décision du 28 mars 2019, le président de la neuvième chambre du Tribunal a décidé de ne pas joindre les deux affaires à ce stade de la procédure.

15 La Commission a déposé les mémoires en défense le 30 avril 2019 dans l’affaire T 30/19 et le 7 mai 2019 dans l’affaire T 72/19.

16 Les requérantes ont déposé les répliques le 27 juin 2019 dans l’affaire T 30/19 et le 1er juillet 2019 dans l’affaire T 72/19, en précisant agir pour le compte de certains de leurs membres énumérés dans les annexes R.2 desdites répliques (ci-après les « annexes R.2 ») et pour leur propre compte.

17 La Commission a déposé les dupliques le 23 septembre 2019 dans les présentes affaires.

18 Entre-temps, par actes déposés au greffe du Tribunal le 24 avril 2019, Marangoni SpA a demandé à intervenir dans les présentes affaires au soutien des conclusions de la Commission. Par ordonnances du président de la neuvième chambre du Tribunal du 12 juillet 2019, Marangoni a été admise à intervenir dans chacune des affaires au soutien des conclusions de la Commission. Le 28 août 2019, elle a déposé les mémoires en intervention. Le 21 octobre 2019, la Commission a fait savoir qu’elle n’avait pas d’observations sur ces mémoires en intervention. Le 22 octobre 2019, les requérantes ont soumis leurs observations sur lesdits mémoires en intervention.

19 Par décision du 4 mai 2021, le président de la dixième chambre du Tribunal a décidé de joindre les affaires aux fins de la phase orale de la procédure, conformément à l’article 68 du règlement de procédure du Tribunal.

20 Par mesures d’organisation de la procédure adoptées au titre de l’article 89, paragraphe 3, sous a) à c), du règlement de procédure, le Tribunal a posé des questions aux parties principales, lesquelles y ont répondu dans le délai imparti.

21 Par décision du 12 mai 2021, le Tribunal a renvoyé l’affaire devant la dixième chambre élargie, conformément à l’article 28 du règlement de procédure.

22 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 9 juillet 2021. À cette occasion, d’une part, les requérantes ont précisé la portée de leurs conclusions s’agissant des droits antidumping et compensateurs définitifs mis à la charge des sociétés mentionnées dans les annexes R.2. D’autre part, la Commission a indiqué abandonner deux fins de non-recevoir soulevées dans ses écritures, tout en maintenant sa fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt des requérantes à invoquer des moyens tirés de la violation de droits procéduraux. Il en a été pris acte au procès-verbal de l’audience.

23 Dans l’affaire T 30/19, les requérantes concluent, en dernier lieu, à ce qu’il plaise au Tribunal :

– annuler le règlement antidumping définitif « dans la mesure où il concerne [les requérantes] et leurs membres [énumérés dans l’annexe R.2] » ;

– condamner la Commission et l’intervenante aux dépens.

24 Dans l’affaire T 72/19, les requérantes concluent, en dernier lieu, à ce qu’il plaise au Tribunal :

– annuler le règlement antisubventions « dans la mesure où il concerne [les requérantes] et leurs membres [énumérés dans l’annexe R.2] » ;

– condamner la Commission et l’intervenante aux dépens.

25 Dans chacune des deux affaires, la Commission, soutenue, en substance, par l’intervenante, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours comme irrecevable ou non fondé ;

– condamner les requérantes aux dépens.

III. En droit

A. Sur la jonction

26 En vertu de l’article 19, paragraphe 2, du règlement de procédure, le président de la dixième chambre élargie du Tribunal a déféré la décision sur la jonction des présentes affaires aux fins de la décision mettant fin à l’instance, qui relevait de sa compétence, à la dixième chambre élargie du Tribunal.

27 Les parties principales ayant été entendues sur la jonction des présentes affaires aux fins de la décision mettant fin à l’instance et n’ayant pas objecté à une telle jonction, le Tribunal estime qu’il y a lieu de procéder à ladite jonction pour cause de connexité, conformément à l’article 68 du règlement de procédure.

B. Sur l’objet des recours

28 Il résulte de l’ensemble des explications écrites et orales des requérantes que ces dernières demandent, en dernier lieu, l’annulation des règlements attaqués en tant que ceux-ci instituent, respectivement, un droit antidumping définitif et un droit compensateur définitif sur les importations des produits fabriqués par les 27 producteurs-exportateurs énumérés aux annexes R.2 dans la colonne intitulée « Company Names » (noms des sociétés), à savoir :

– Chaoyang Long March Tyre Co. Ltd ;

– Triangle Tyre Co. Ltd ;

– Shandong Wanda Boto Tyre Co. Ltd ;

– Qingdao Doublestar Tire Industrial Co. Ltd ;

– Ningxia Shenzhou Tire Co. Ltd ;

– Guizhou Tyre Co. Ltd ;

– Aeolus Tyre ;

– Shandong Huasheng Rubber Co. Ltd ;

– Chongqing Hankook Tire ;

– Prinx Chengshan (Shandong) Tire Co. Ltd ;

– Jiangsu Hankook Tire ;

– Shandong Linglong Tire Co. Ltd ;

– Shandong Jinyu Tire Co., Ltd ;

– Sailun Jinyu Group Co. Ltd ;

– Shandong Kaixuan Rubber Co. Ltd ;

– Weifang Yuelong Rubber Co. Ltd ;

– Weifang Shunfuchang Rubber And Plastic Products Co. Ltd ;

– Shandong Hengyu Science & Technology Co. Ltd ;

– Jiangsu General Science Technology Co. Ltd ;

– Double Coin Group (Jiang Su) Tyre Co. Ltd ;

– Zhongce Rubber Group Co., Ltd ;

– Hefei Wanli Tire Co. Ltd ;

– Giti Tire (Anhui) ;

– Giti Tire (Fujian) ;

– Giti Tire (Hualin) ;

– Giti Tire (Yinchuan) ;

– Qingdao GRT Rubber Co. Ltd.

C. Sur la recevabilité

1. Sur la recevabilité des recours

29 Il y a lieu de vérifier d’office la recevabilité des recours en tant qu’ils sont dirigés contre les droits antidumping et compensateurs définitifs institués sur les importations des produits fabriqués par certains des membres des requérantes mentionnés dans les annexes R.2. Les parties principales ont été interrogées à cet égard dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure et ont pris position dans leurs réponses écrites à ces mesures.

a) Sur la précision des requêtes

30 Dans sa réponse écrite aux mesures d’organisation de la procédure, la Commission soutient, en substance, que les recours ne sont recevables que pour autant que les producteurs-exportateurs concernés étaient précisément identifiés dans les annexes A.2. En revanche, les requérantes ne seraient pas autorisées à modifier l’objet des recours en corrigeant les noms de ces producteurs-exportateurs ou en ajoutant de nouveaux noms dans les annexes R.2.

31 Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 76, sous d) et e), du règlement de procédure, la requête contient, notamment, l’objet du litige ainsi que les conclusions du recours. Il s’ensuit que la requête introductive d’instance doit contenir des éléments suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse et au Tribunal de déterminer, sans risque d’erreur, la portée exacte du recours.

32 Dès lors, à défaut d’éléments de droit et de fait révélés pendant la procédure écrite, seules les conclusions exposées dans la requête introductive d’instance peuvent être prises en considération (voir, en ce sens, arrêt du 26 octobre 2010, Allemagne/Commission, T 236/07, EU:T:2010:451, points 27 et 28 et jurisprudence citée). En revanche, des conclusions précisant la portée des conclusions précédentes ne présentent pas le caractère d’une modification substantielle et sont, partant, recevables [voir arrêt du 2 décembre 2008, Ebro Puleva/OHMI – Berenguel (BRILLO’S), T 275/07, non publié, EU:T:2008:545, point 9 et jurisprudence citée].

33 En l’espèce, il y a lieu d’observer que les dénominations sociales de certaines sociétés mentionnées dans les annexes A.2 ont été modifiées dans les annexes R.2. Dans ces conditions, il convient d’examiner si, au regard des principes rappelés aux points 31 et 32 ci-dessus, les requérantes sont recevables à contester les règlements attaqués en tant que ceux-ci instituent des droits antidumping et compensateurs définitifs sur les importations des produits fabriqués par, premièrement, Triangle Tyre, deuxièmement, Hefei Wanli Tire et, troisièmement, les quatre sociétés du groupe Giti.

1) S’agissant de Triangle Tyre

34 Il y a lieu de relever que, si les annexes A.2 mentionnent une société dénommée Triangle Group Co. Ltd, les requérantes ont ensuite mentionné en lieu et place de celle-ci, dans les annexes R.2, une société dénommée Triangle Tyre Co. Ltd en précisant qu’elles avaient initialement mentionné par erreur une société affiliée.

35 À cet égard, compte tenu de la similitude évidente entre la dénomination sociale Triangle Tyre Co. Ltd figurant dans les règlements attaqués et la dénomination sociale Triangle Group Co. Ltd apparaissant dans les annexes A.2, les requêtes devaient être comprises comme visant en réalité les droits institués sur les produits fabriqués par Triangle Tyre. Il s’ensuit que les requêtes contenaient des éléments suffisamment clairs et précis permettant de déterminer, sans risque d’erreur, la portée exacte des recours en ce qui concerne cette société.

36 Partant, l’erreur de plume en cause pouvait être rectifiée dans les annexes R.2 sans que cela entraîne l’irrecevabilité des conclusions relatives aux droits antidumping et compensateurs définitifs institués sur les importations des produits fabriqués par Triangle Tyre.

2) S’agissant de Hefei Wanli Tire

37 Il y a lieu de relever que, si les annexes A.2 mentionnent une société dénommée Wanli Tire Corporation Limited, les requérantes ont ensuite mentionné en lieu et place de celle-ci, dans les annexes R.2, une société dénommée Hefei Wanli Tire Co. Ltd en précisant qu’elles avaient initialement mentionné par erreur une société affiliée.

38 À cet égard, en l’absence de mention dans les règlements attaqués d’une quelconque société Wanli et compte tenu de la similitude évidente entre la dénomination sociale Wanli Tire Corporation Limited, apparaissant dans les annexes A.2, et la dénomination sociale Hefei Wanli Tire Co. Ltd, les requêtes devaient être comprises comme visant en réalité les droits institués sur les produits fabriqués par Hefei Wanli Tire. Il s’ensuit que les requêtes contenaient des éléments suffisamment clairs et précis permettant de déterminer, sans risque d’erreur, la portée exacte des recours en ce qui concerne cette société.

39 Partant, l’erreur de plume en cause pouvait être rectifiée dans les annexes R.2 sans que cela entraîne l’irrecevabilité des conclusions relatives aux droits antidumping et compensateurs définitifs institués sur les importations des produits fabriqués par Hefei Wanli Tire.

3) S’agissant du groupe Giti

40 Il y a lieu de constater que, si les annexes A.2 mentionnent la société « Giti Tire Company Ltd », les requérantes ont ensuite mentionné en lieu et place de celle-ci, dans les annexes R.2, quatre sociétés distinctes, à savoir Giti Tire (Anhui) Company Ltd, Giti Tire (Hualin) Company Ltd, Giti Tire (Fujian) Company Ltd et Giti Tire (Yinchuan) Company Ltd, en précisant qu’elles avaient initialement mentionné par erreur le nom type d’une société affiliée.

41 À cet égard, compte tenu de la similitude évidente entre les dénominations sociales des quatre sociétés du groupe Giti figurant dans les règlements attaqués et la dénomination sociale Giti Tire Company Ltd apparaissant dans les annexes A.2, les requêtes devaient être comprises comme visant en réalité les droits institués sur les produits fabriqués par lesdites sociétés. Il s’ensuit que les requêtes contenaient des éléments suffisamment clairs et précis permettant de déterminer, sans risque d’erreur, la portée exacte des recours en ce qui concerne ces sociétés.

42 Partant, l’erreur de plume en cause pouvait être rectifiée dans les annexes R.2 sans que cela entraîne l’irrecevabilité des conclusions relatives aux droits antidumping et compensateurs définitifs institués sur les importations des produits fabriqués par le groupe Giti.

b) Sur la qualité pour agir des requérantes

43 Dans sa réponse écrite aux mesures d’organisation de la procédure, la Commission met en doute la qualité pour agir des requérantes au motif que certains de leurs membres mentionnés dans les annexes R.2 n’auraient eux-mêmes pas qualité pour agir à l’encontre des droits antidumping et compensateurs définitifs institués sur les importations des produits qu’ils fabriquent. Tel serait le cas, premièrement, de Triangle Tyre, deuxièmement, de Weifang Yuelong Rubber et de Hefei Wanli Tire et, troisièmement, dans la seule affaire T 72/19, de Zhongce Rubber Group.

44 D’une part, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, toute personne physique ou morale peut former, dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéas de cet article, un recours en annulation contre trois types d’actes, à savoir, premièrement, les actes dont elle est le destinataire, deuxièmement, les actes qui la concernent directement et individuellement et, troisièmement, les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution.

45 D’autre part, une association chargée de défendre des intérêts collectifs n’est en principe recevable à introduire un recours en annulation contre un acte que si les entreprises qu’elle représente ou certaines d’entre elles ont qualité pour agir à titre individuel ou si elle-même peut faire valoir un intérêt propre (voir, en ce sens, arrêt du 13 mars 2018, European Union Copper Task Force/Commission, C 384/16 P, EU:C:2018:176, point 87 et jurisprudence citée).

46 En l’espèce, il y a lieu d’examiner si, au regard des principes rappelés aux points 44 et 45 ci-dessus, les requérantes sont recevables à contester les règlements attaqués en tant que ceux-ci instituent des droits antidumping et compensateurs définitifs sur les importations des produits fabriqués par les sociétés mentionnées au point 43 ci-dessus.

1) S’agissant de Triangle Tyre

47 Dans sa réponse écrite aux mesures d’organisation de la procédure, la Commission fait valoir que Triangle Group Co. Ltd n’a pas coopéré aux procédures antidumping et antisubventions et, par suite, n’a pas qualité pour agir dans le cadre d’un recours en annulation sur le fondement de l’article 263 TFUE. Elle se réfère à la jurisprudence selon laquelle les actes portant institution de droits antidumping ou compensateurs sont de nature à concerner directement et individuellement les entreprises productrices et exportatrices du produit en cause auxquelles sont imputées les pratiques de dumping ou de subventions sur la base de données relatives à leur activité commerciale, notamment celles identifiées dans ces actes ou concernées par les enquêtes préparatoires (voir, en ce sens, arrêts du 21 février 1984, Allied Corporation e.a./Commission, 239/82 et 275/82, EU:C:1984:68, points 11 et 12, et du 28 février 2019, Conseil/Growth Energy et Renewable Fuels Association, C 465/16 P, EU:C:2019:155, point 73).

48 À cet égard, il convient de rappeler que les requérantes doivent être regardées comme ayant contesté, dès le stade des requêtes, les droits institués sur les importations des produits fabriqués par Triangle Tyre et que, dès lors, il n’y a pas lieu de tenir compte de l’erreur de plume figurant dans les annexes A.2 en ce qui concerne cette société (voir point 35 ci-dessus).

49 Par ailleurs, pour autant que la Commission conteste également l’affectation directe et individuelle de Triangle Tyre, il y a lieu de préciser que, conformément à la jurisprudence rappelée par la Commission (voir point 47 ci-dessus), un règlement antidumping ou antisubventions qui mentionne expressément un producteur-exportateur et qui institue à son égard un droit antidumping ou compensateur particulier dont il fixe le montant est, de ce seul fait, de nature à affecter non seulement directement, mais également individuellement, ce producteur-exportateur (voir, en ce sens, arrêt du 15 février 2001, Nachi Europe, C 239/99, EU:C:2001:101, point 22, et du 15 septembre 2016, Unitec Bio/Conseil, T 111/14, EU:T:2016:505, points 30 à 32).

50 Or, Triangle Tyre est visée dans les annexes I des règlements attaqués en qualité de producteur-exportateur ayant coopéré, mais n’ayant pas été retenu dans l’échantillon. À ce titre, les importations de ses produits ont été soumises à des droits antidumping et compensateur définitifs particuliers dont les règlements attaqués fixent les montants. Il s’ensuit que cette société est directement et individuellement concernée par les règlements attaqués.

51 Dans ces conditions, les requérantes, prises en tant qu’associations représentatives, ont qualité pour agir, sur le fondement de l’article 263, quatrième alinéa, deuxième membre de phrase, TFUE, à l’encontre des droits antidumping et compensateurs définitifs institués sur les importations des produits fabriqués par Triangle Tyre.

2) S’agissant de Weifang Yuelong Rubber et de Hefei Wanli Tire

52 La Commission estime, en substance, que Weifang Yuelong Rubber et Hefei Wanli Tire n’ont pas qualité pour agir sur le fondement de l’article 263, quatrième alinéa, deuxième et troisième membres de phrase, TFUE dans la mesure où, d’une part, elles ne sont pas individuellement concernées par les règlements attaqués et où, d’autre part, ces règlements comportent des mesures d’exécution à leur égard.

53 Les requérantes contestent l’argumentation de la Commission.

54 Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu d’examiner d’emblée si les requérantes ont qualité pour agir sur le fondement de l’article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE.

55 À cet égard, il convient de rappeler que, pour qu’un recours soit recevable en vertu de l’article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE, trois conditions cumulatives doivent être remplies. En effet, l’acte contesté doit, premièrement, présenter un caractère réglementaire, deuxièmement, affecter directement la partie requérante et, troisièmement, ne pas comporter de mesures d’exécution.

56 En premier lieu, s’agissant de la notion d’actes réglementaires au sens de l’article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE, il importe de rappeler qu’elle vise, en principe, tous les actes de portée générale à l’exclusion des actes législatifs (voir, en ce sens, arrêt du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci, C 622/16 P à C 624/16 P, EU:C:2018:873, points 23 et 28 et jurisprudence citée). La distinction entre un acte législatif et un acte non législatif repose, selon le traité FUE, sur le critère de la procédure, législative ou non, ayant mené à son adoption (voir, en ce sens, arrêt du 6 septembre 2017, Slovaquie et Hongrie/Conseil, C 643/15 et C 647/15, EU:C:2017:631, point 58, et ordonnance du 6 septembre 2011, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, T 18/10, EU:T:2011:419, point 65).

57 En l’espèce, d’une part, les règlements attaqués, en tant qu’ils instituent des droits antidumping et compensateurs définitifs sur les importations des produits fabriqués par toutes les sociétés autres que celles qu’ils identifient nommément, présentent une portée générale. D’autre part, ces règlements ne sont pas des actes législatifs, puisqu’ils n’ont pas été adoptés selon une procédure législative ordinaire ou spéciale. Dès lors, lesdits règlements, en tant qu’ils concernent Weifang Yuelong Rubber et Hefei Wanli Tire, sont des actes réglementaires au sens de l’article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE.

58 En deuxième lieu, s’agissant de l’affectation directe, il convient de relever que cette condition requiert que la mesure contestée produise directement des effets sur la situation juridique du particulier et ne laisse aucun pouvoir d’appréciation aux destinataires chargés de sa mise en œuvre, celle-ci ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation de l’Union, sans application d’autres règles intermédiaires (voir arrêt du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci, C 622/16 P à C 624/16 P, EU:C:2018:873, point 42 et jurisprudence citée).

59 Il ressort également de la jurisprudence que les actes portant institution de droits antidumping ou compensateurs sont de nature à concerner directement les entreprises qui sont à la fois productrices et exportatrices du produit en cause auxquelles sont imputées les pratiques de dumping ou de subventions, la qualité d’exportatrice étant essentielle à cet égard (voir, en ce sens, arrêts du 28 février 2019, Conseil/Growth Energy et Renewable Fuels Association, C 465/16 P, EU:C:2019:155, points 73 et 74 et jurisprudence citée, et du 28 février 2019, Conseil/Marquis Energy, C 466/16 P, EU:C:2019:156, points 48 et 49 et jurisprudence citée).

60 En l’espèce, d’une part, les règlements attaqués instituent des droits antidumping et compensateurs définitifs sur les importations des produits fabriqués par « toutes les autres sociétés » non identifiées nommément en leur sein, telles que Weifang Yuelong Rubber et Hefei Wanli Tire.

61 D’autre part, les requérantes indiquent que Weifang Yuelong Rubber et Hefei Wanli Tire sont des producteurs-exportateurs. La Commission ne conteste pas leur qualité d’exportateurs. En effet, elle les qualifie de producteurs-exportateurs dans ses réponses aux mesures d’organisation de la procédure.

62 Il s’ensuit que les règlements attaqués produisent directement des effets sur la situation juridique de Weifang Yuelong Rubber et de Hefei Wanli Tire en modifiant le régime commercial applicable aux importations dans l’Union de leurs produits.

63 Par ailleurs, les règlements attaqués obligent les autorités douanières des États membres à percevoir les droits institués sans leur laisser une quelconque marge d’appréciation (voir, en ce sens, arrêt du 25 septembre 1997, Shanghai Bicycle/Conseil, T 170/94, EU:T:1997:134, point 41 et jurisprudence citée).

64 Dans ces conditions, les règlements attaqués affectent directement Weifang Yuelong Rubber et Hefei Wanli Tire.

65 En troisième lieu, s’agissant de l’absence de mesures d’exécution, il convient de rappeler que, aux fins d’apprécier la question de savoir si un acte réglementaire comporte des mesures d’exécution, il y a lieu de s’attacher à la position de la personne invoquant le droit de recours au titre de l’article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE. Il est donc sans pertinence de savoir si l’acte en question comporte des mesures d’exécution à l’égard d’autres justiciables (voir arrêt du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci, C 622/16 P à C 624/16 P, EU:C:2018:873, point 61 et jurisprudence citée).

66 À cet égard, il est vrai que le système douanier, tel qu’instauré par le règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union (JO 2013, L 269, p. 1, ci-après le « code des douanes »), et dans lequel s’inscrivent les règlements attaqués, prévoit que la perception des droits fixés par ces derniers se fait, dans tous les cas de figure, sur la base de mesures adoptées par les autorités nationales (arrêt du 10 décembre 2015, Kyocera Mita Europe/Commission, C 553/14 P, non publié, EU:C:2015:805, point 49). En effet, la notification de la dette douanière au débiteur, prévue par l’article 102 du code des douanes, constitue, à l’égard du débiteur, une mesure d’exécution des règlements attaqués prise par les autorités nationales (voir, en ce sens, ordonnances du 21 janvier 2014, Bricmate/Conseil, T 596/11, non publiée, EU:T:2014:53, point 71, et du 14 septembre 2021, Far Polymers e.a./Commission, T 722/20, non publiée, EU:T:2021:598, point 66 et jurisprudence citée).

67 Cependant, il est constant que les droits antidumping et compensateurs sont acquittés par les importateurs du produit concerné dans l’Union, et non par les producteurs-exportateurs (voir, en ce sens, arrêt du 3 mai 2018, Distillerie Bonollo e.a./Conseil, T 431/12, EU:T:2018:251, point 62, et conclusions de l’avocat général Tanchev dans l’affaire Changmao Biochemical Engineering/Distillerie Bonollo e.a., C 461/18 P, EU:C:2020:298, point 88).

68 Dès lors, faute d’être débiteurs de la dette douanière et d’être ainsi destinataires de la notification de cette dette, les producteurs-exportateurs ne sont normalement pas informés de ladite dette. Par suite, à l’inverse des importateurs, ils ne peuvent pas effectivement exercer les voies de droit prévues par l’article 44 du code des douanes à l’encontre des décisions prises par les autorités douanières nationales. Par conséquent, les producteurs-exportateurs risqueraient d’être dépourvus d’une protection juridictionnelle effective s’ils ne disposaient pas d’une voie de recours devant le juge de l’Union aux fins de mettre en cause la légalité des règlements attaqués.

69 Il s’ensuit que, s’il existe des mesures d’exécution à l’égard des importateurs, prenant la forme d’actes des autorités nationales fixant le montant des droits antidumping et compensateurs en vue de leur recouvrement (arrêts du 18 octobre 2018, Rotho Blaas, C 207/17, EU:C:2018:840, points 16, 17, 38 et 39, et du 19 septembre 2019, Trace Sport, C 251/18, EU:C:2019:766, points 18 et 31), il n’existe pas, en revanche, de mesures d’exécution à l’égard des producteurs-exportateurs.

70 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que les règlements attaqués ne comportent pas de mesures d’exécution à l’encontre de Weifang Yuelong Rubber et de Hefei Wanli Tire.

71 Partant, les requérantes, prises en tant qu’associations représentatives, ont qualité pour agir, sur le fondement de l’article 263, quatrième alinéa, troisième membre de phrase, TFUE, à l’encontre des droits antidumping et compensateurs définitifs institués sur les produits fabriqués par Weifang Yuelong Rubber et Hefei Wanli Tire.

3) S’agissant des droits compensateurs définitifs de Zhongce Rubber Group

72 Dans sa réponse écrite aux mesures d’organisation de la procédure, la Commission fait valoir que Zhongce Rubber Group n’a pas coopéré à la procédure antisubventions et, par suite, n’a pas qualité pour agir dans l’affaire T 72/19.

73 Par cette argumentation, et à l’instar de celle qu’elle a soulevée dans les deux affaires à propos de Triangle Tyre (voir point 47 ci-dessus), la Commission conteste, en réalité, l’affectation directe et individuelle de Zhongce Rubber Group dans l’affaire T 72/19.

74 À cet égard, il y a lieu de constater que Zhongce Rubber Group est visée à l’annexe II du règlement antisubventions en tant que producteur-exportateur ne figurant pas dans l’échantillon et ayant coopéré lors de l’enquête antidumping, mais non lors de l’enquête antisubventions. Il s’ensuit que cette société a été identifiée nommément dans ce règlement et qu’une pratique de subventions lui a été personnellement imputée. De plus, ledit règlement a modifié le régime commercial applicable aux importations dans l’Union de ses produits en les soumettant à un droit compensateur de 57,28 euros par unité du produit concerné. Par conséquent, et alors même qu’elle n’a pas coopéré à la procédure antisubventions, Zhongce Rubber Group doit être regardée comme directement et individuellement concernée par le règlement antisubventions en application de la jurisprudence mentionnée aux points 47, 49 et 59 ci-dessus.

75 Dans ces conditions, les requérantes, prises en tant qu’associations représentatives, ont qualité pour agir, sur le fondement de l’article 263, quatrième alinéa, deuxième membre de phrase, TFUE, à l’encontre des droits compensateurs définitifs institués sur les importations des produits fabriqués par Zhongce Rubber Group.

c) Sur l’intérêt à agir des requérantes s’agissant des droits antidumping définitifs de Zhongce Rubber Group

76 Selon une jurisprudence constante, un recours en annulation intenté par une personne physique ou morale n’est recevable que dans la mesure où cette dernière a un intérêt à voir annuler l’acte attaqué. Un tel intérêt suppose que l’annulation de cet acte soit susceptible, par elle-même, d’avoir des conséquences juridiques et que le recours puisse ainsi, par son résultat, procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (voir arrêt du 17 septembre 2015, Mory e.a./Commission, C 33/14 P, EU:C:2015:609, point 55 et jurisprudence citée).

77 L’intérêt à agir d’un requérant doit être né et actuel. Il ne peut concerner une situation future et hypothétique (voir arrêt du 17 septembre 2015, Mory e.a./Commission, C 33/14 P, EU:C:2015:609, point 56 et jurisprudence citée).

78 En l’espèce, il y a lieu de rappeler que Zhongce Rubber Group est visée à l’annexe II du règlement antidumping définitif. Or, les importations des produits fabriqués par les sociétés énumérées à l’annexe II de ce règlement ont, en dernier lieu, été soumises à un droit antidumping de 0 euro par unité du produit concerné.

79 Il importe d’observer que, en instituant un droit antidumping définitif d’un montant nul applicable aux importations des produits fabriqués par certaines sociétés dont Zhongce Rubber Group, la Commission a, en pratique, entièrement exempté de droits antidumping ces importations. Ainsi, ces sociétés ont bénéficié d’un régime commercial plus favorable que celui applicable aux autres producteurs-exportateurs chinois, les importations des produits fabriqués par ces derniers ayant été soumises à des droits antidumping dont le montant est toujours positif.

80 Il s’ensuit que l’annulation du règlement antidumping définitif n’est pas susceptible d’avoir des conséquences juridiques favorables pour Zhongce Rubber Group, de sorte que le recours T 30/19 ne peut procurer un bénéfice à cette société. Il en va de même, par voie de conséquence, pour les requérantes elles-mêmes, lesquelles ne font valoir aucun intérêt propre à obtenir l’annulation du règlement antidumping définitif en tant qu’il concerne ladite société.

81 Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument des requérantes tiré de ce que, en cas d’annulation du droit compensateur définitif institué sur les importations des produits fabriqués par Zhongce Rubber Group, la Commission pourrait alors instituer un droit antidumping sur ces mêmes importations. En effet, il s’agit là d’un événement futur et hypothétique, qui dépend de l’adoption d’un acte juridique distinct et qui demeure sans incidence sur l’absence d’intérêt à agir né et actuel des requérantes.

82 Dans ces conditions, les requérantes ne justifient pas de leur intérêt à agir à l’encontre du droit antidumping définitif institué sur les importations des produits fabriqués par Zhongce Rubber Group. Partant, leurs conclusions relatives à ce droit sont irrecevables.

2. Sur la recevabilité des moyens tirés de la violation de droits procéduraux

83 Ainsi qu’il a été relevé au point 22 ci-dessus, la Commission a soulevé dans ses écritures et maintenu lors de l’audience une fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt des requérantes à invoquer des moyens tirés de la violation de droits procéduraux. Selon elle, d’une part, les requérantes n’ont pas personnellement intérêt à se prévaloir de la violation des droits procéduraux de leurs membres, lesquels ne leur auraient d’ailleurs pas expressément transféré de tels droits. D’autre part, l’éventuelle violation des droits procéduraux des requérantes elles-mêmes ne serait pas susceptible d’avoir une incidence sur le résultat des enquêtes, de sorte que les requérantes n’auraient pas davantage intérêt à invoquer une telle violation. En conséquence, certains moyens seraient irrecevables.

84 Les requérantes contestent l’argumentation de la Commission.

85 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler qu’un moyen d’annulation est irrecevable au motif que l’intérêt à agir fait défaut lorsque, à supposer même qu’il soit fondé, l’annulation de l’acte attaqué sur la base de ce moyen ne serait pas de nature à donner satisfaction à la partie requérante (voir arrêt du 9 juin 2011, Evropaïki Dynamiki/BCE, C 401/09 P, EU:C:2011:370, point 49 et jurisprudence citée).

86 En d’autres termes, un moyen d’annulation n’est recevable que s’il est susceptible de fonder une annulation dont la partie requérante puisse tirer profit, c’est-à-dire à laquelle elle ait personnellement intérêt (arrêt du 11 juillet 2007, Wils/Parlement, F 105/05, EU:F:2007:128, point 38).

87 En particulier, la violation des droits de la défense constitue une illégalité subjective par sa nature, laquelle doit donc être invoquée par la personne concernée elle-même (voir, en ce sens, arrêts du 9 septembre 2009, Diputación Foral de Álava e.a./Commission, T 30/01 à T 32/01 et T 86/02 à T 88/02, EU:T:2009:314, point 238, et du 16 mars 2016, Frucona Košice/Commission, T 103/14, EU:T:2016:152, point 81).

88 Ainsi, la violation d’un droit subjectif ne peut être invoquée que par la personne dont le droit a prétendument été violé, mais non par des tiers (arrêt du 19 septembre 2019, Zhejiang Jndia Pipeline Industry/Commission, T 228/17, EU:T:2019:619, point 31).

89 C’est au regard de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner la fin de non-recevoir soulevée par la Commission et tirée du défaut d’intérêt des requérantes à invoquer des moyens tirés de la violation de droits procéduraux.

90 En premier lieu, force est de constater, d’emblée, que, dans le cadre notamment des cinquièmes moyens, les requérantes font état de leur propre participation à la procédure administrative, en qualité de parties intéressées et d’associations représentatives, et soutiennent que, lors de cette procédure, la Commission a méconnu leurs propres droits procéduraux en ne faisant pas droit à leur demande d’accès à certaines informations. En revanche, les requérantes ne font pas état de la participation directe de leurs membres à la procédure administrative et n’évoquent aucune violation des droits procéduraux propres à ceux-ci. Il s’ensuit que l’argumentation de la Commission tirée de l’absence d’intérêt des requérantes à invoquer des moyens tirés de la violation de droits procéduraux de leurs membres est, en l’espèce, dépourvue de toute pertinence.

91 En second lieu, s’agissant de l’intérêt des requérantes à invoquer des moyens tirés de la violation de leurs propres droits procéduraux, il convient de noter que la Commission semble subordonner la recevabilité de ces moyens à leur caractère opérant.

92 Or, il convient de rappeler que, dans le cadre d’un recours en annulation, le caractère inopérant d’un moyen soulevé renvoie à son aptitude, dans l’hypothèse où il serait fondé, à entraîner l’annulation que poursuit la partie requérante, et non à l’intérêt que celle-ci peut avoir à soulever un moyen déterminé, cette question relevant de la recevabilité du moyen (arrêt du 21 septembre 2000, EFMA/Conseil, C 46/98 P, EU:C:2000:474, point 38). Dès lors, la recevabilité d’un moyen ne saurait dépendre de son caractère opérant.

93 Par ailleurs, les requérantes ont un intérêt propre à voir annuler les règlements attaqués, au motif que ceux-ci ont été adoptés en violation de leurs droits de la défense.

94 En effet, d’une part, dans la mesure où les requérantes ont elles-mêmes participé aux enquêtes antidumping et antisubventions en qualité de parties intéressées et d’associations représentatives, elles disposent de droits procéduraux dont elles peuvent rechercher la protection dans le cadre des présents recours.

95 D’autre part, l’annulation des règlements attaqués pour un motif tiré de la violation des droits procéduraux propres aux requérantes imposerait à la Commission de rouvrir les procédures antidumping et antisubventions, de recueillir les observations des requérantes en leur qualité de parties intéressées et d’associations représentatives et de leur permettre ainsi d’exercer une influence sur la prise de décision de cette institution. Une telle annulation pourrait ainsi avoir des conséquences juridiques favorables pour les requérantes.

96 Dans ces conditions, la fin de non-recevoir soulevée par la Commission et tirée du défaut d’intérêt des requérantes à invoquer des moyens tirés de la violation de droits procéduraux doit être écartée.

97 Partant, les moyens des requérantes tirés de la violation de droits procéduraux sont recevables.

D. Sur le bien-fondé des moyens

98 À l’appui des recours, les requérantes soulèvent, dans chaque affaire, six moyens.

99 Les cinq premiers moyens sont tirés, les premiers, d’une mauvaise analyse des indicateurs de préjudice, les deuxièmes, de différences existant entre les pneumatiques neufs et les pneumatiques rechapés, les troisièmes, d’erreurs dans la détermination des effets sur les prix et du niveau d’élimination du préjudice subi par l’industrie de l’Union, les quatrièmes, d’une analyse incorrecte du lien de causalité entre les importations du produit concerné et ce préjudice et, les cinquièmes, de la violation des droits de la défense.

100 Le sixième moyen est tiré, dans l’affaire T 30/19, de l’illégalité d’un ajustement au titre des impôts indirects opéré lors de la détermination de la marge de dumping et, dans l’affaire T 72/19, de la violation du règlement de base antidumping.

101 Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu d’examiner successivement :

– d’abord, le second grief de la seconde branche des troisièmes moyens, tiré de l’absence de comparaison équitable des prix lors du calcul de la sous-cotation des prix ;

– ensuite, certains griefs tirés, en substance, d’incohérences ainsi que d’une violation des droits de la défense en ce qui concerne les indicateurs de préjudice et la pondération des données de l’échantillon des producteurs de l’Union ;

– enfin, le cas échéant, les autres moyens et griefs.

102 À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans le domaine de la politique commerciale commune, et tout particulièrement en matière de mesures de défense commerciale, les institutions de l’Union disposent d’un large pouvoir d’appréciation en raison de la complexité des situations économiques, politiques et juridiques qu’elles doivent examiner. Quant au contrôle juridictionnel d’une telle appréciation, il doit ainsi être limité à la vérification du respect des règles de procédure, de l’exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou de l’absence de détournement de pouvoir (voir arrêts du 16 février 2012, Conseil et Commission/Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP, C 191/09 P et C 200/09 P, EU:C:2012:78, point 63 et jurisprudence citée, et du 19 septembre 2019, Trace Sport, C 251/18, EU:C:2019:766, point 47 et jurisprudence citée).

103 Dans ce contexte, il appartient au Tribunal, d’une part, de vérifier l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence et, d’autre part, de contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (voir arrêt du 26 janvier 2017, Maxcom/City Cycle Industries, C 248/15 P, C 254/15 P et C 260/15 P, EU:C:2017:62, point 89 et jurisprudence citée).

1. Sur le second grief de la seconde branche des troisièmes moyens, tiré de l’absence de comparaison équitable des prix lors du calcul de la sous-cotation des prix

104 Par les troisièmes moyens, les requérantes soutiennent que, lors de la détermination des effets des importations faisant l’objet d’un dumping ou de subventions sur les prix ainsi que du niveau d’élimination du préjudice, la Commission a violé, dans l’affaire T 30/19, l’article 3, paragraphe 2, sous a), et paragraphe 3, et l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base antidumping et, dans l’affaire T 72/19, l’article 8, paragraphe 1, sous a), et paragraphe 2, et l’article 15, paragraphe 1, du règlement de base antisubventions.

105 En particulier, dans le cadre de la seconde branche des troisièmes moyens, les requérantes estiment, en substance, que la Commission s’est fondée à tort sur des prix à l’importation construits pour calculer la sous-cotation des prix.

106 Par un premier grief, les requérantes soutiennent que, aux fins du calcul de la sous-cotation des prix, l’utilisation de prix à l’importation construits, c’est-à-dire de prix à l’exportation construits conformément aux dispositions de l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base antidumping, est, par principe, proscrite, car elle repose sur des prix théoriques, et non sur des prix réels observés et perçus par les clients dans l’Union.

107 Par un second grief, les requérantes font valoir que, en l’espèce, l’utilisation de prix à l’importation construits n’a pas permis à la Commission de procéder à une comparaison équitable, c’est-à-dire au même stade commercial, entre le prix des importations du produit concerné, d’une part, et le prix du produit similaire de l’industrie de l’Union, d’autre part.

108 Selon les requérantes, s’agissant des ventes des producteurs de l’Union réalisées dans l’Union par l’intermédiaire d’entités de vente liées, la Commission a pris en compte les prix facturés par ces entités aux premiers acheteurs indépendants en incluant les frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux (ci-après les « frais VGA ») ainsi que le bénéfice desdites entités. En revanche, s’agissant des ventes des producteurs-exportateurs chinois réalisées dans l’Union par l’intermédiaire d’entités de vente liées, la Commission aurait refusé de prendre en compte les prix facturés par ces entités aux premiers acheteurs indépendants et se serait fondée sur des prix à l’importation construits en déduisant, et donc en excluant, les frais VGA et le bénéfice desdites entités. Dès lors, en présence du même modèle de commercialisation, la Commission aurait calculé différemment le prix des importations du produit concerné et le prix du produit similaire de l’industrie de l’Union et n’aurait, par suite, pas procédé à une comparaison équitable de ces prix. Ce faisant, la Commission aurait indûment majoré la marge de préjudice et vicié l’analyse du préjudice et du lien de causalité.

109 La Commission conteste l’argumentation des requérantes. L’intervenante ne présente, quant à elle, aucune observation en ce qui concerne cette argumentation.

110 Il convient d’examiner d’emblée le second grief de la seconde branche des troisièmes moyens.

a) Considérations liminaires

111 Il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base antidumping et à l’article 8, paragraphe 1, du règlement de base antisubventions, la détermination de l’existence d’un préjudice de l’industrie de l’Union se fonde sur des éléments de preuve positifs et comporte un examen objectif, d’une part, du volume des importations faisant l’objet d’un dumping ou de subventions et de l’effet de ces importations sur les prix des produits similaires sur le marché de l’Union et, d’autre part, de l’incidence de ces importations sur ladite industrie.

112 En ce qui concerne plus particulièrement l’effet des importations faisant l’objet d’un dumping ou de subventions sur les prix, l’article 3, paragraphe 3, du règlement de base antidumping et l’article 8, paragraphe 2, du règlement de base antisubventions prévoient l’obligation d’examiner s’il y a eu, pour ces importations, sous-cotation notable du prix par rapport au prix d’un produit similaire de l’industrie de l’Union ou si ces importations ont, d’une autre manière, pour effet de déprimer sensiblement les prix ou d’empêcher dans une mesure notable des hausses de prix qui, sans cela, se seraient produites.

113 Le règlement de base antidumping et le règlement de base antisubventions ne contiennent pas de définition de la notion de sous-cotation du prix et ne prévoient pas de méthode pour le calcul de cette dernière (arrêts du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 301/16, EU:T:2019:234, point 175, et du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 300/16, EU:T:2019:235, point 238).

114 Le calcul de la sous-cotation du prix des importations en cause est réalisé, conformément à l’article 3, paragraphes 2 et 3, du règlement de base antidumping et à l’article 8, paragraphes 1 et 2, du règlement de base antisubventions, aux fins de la détermination de l’existence d’un préjudice subi par l’industrie de l’Union du fait de ces importations. Il est utilisé, plus largement, en vue d’évaluer ce préjudice et de déterminer la marge de préjudice, à savoir le niveau d’élimination dudit préjudice. L’obligation de procéder à un examen objectif de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping ou de subventions, inscrite à l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base antidumping et à l’article 8, paragraphe 1, du règlement de base antisubventions, impose de procéder à une comparaison équitable entre le prix du produit concerné et le prix du produit similaire de l’industrie de l’Union lors des ventes effectuées sur le territoire de l’Union. Afin de garantir le caractère équitable de cette comparaison, les prix doivent être comparés au même stade commercial. En effet, une comparaison effectuée entre des prix obtenus à des stades commerciaux différents, c’est-à-dire sans inclure l’ensemble des coûts afférents au stade commercial dont il y a lieu de tenir compte, donnera nécessairement lieu à des résultats artificiels ne permettant pas une appréciation correcte du préjudice de l’industrie de l’Union. Une telle comparaison équitable constitue une condition de la légalité du calcul du préjudice de cette industrie (arrêts du 17 février 2011, Zhejiang Xinshiji Foods et Hubei Xinshiji Foods/Conseil, T 122/09, non publié, EU:T:2011:46, points 79 et 85 ; du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 301/16, EU:T:2019:234, point 176, et du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 300/16, EU:T:2019:235, point 239).

115 Par ailleurs, il importe de rappeler que la détermination de l’existence et du montant d’un préjudice causé à l’industrie de l’Union ainsi que de l’existence d’un lien de causalité suppose l’appréciation de situations économiques complexes dans le cadre desquelles les institutions de l’Union disposent d’un large pouvoir d’appréciation (voir, en ce sens, arrêt du 10 septembre 2015, Bricmate, C 569/13, EU:C:2015:572, point 46 et jurisprudence citée), de sorte que, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 102 et 103 ci-dessus, le contrôle juridictionnel d’une telle appréciation doit être limité. Ce large pouvoir d’appréciation et ce contrôle juridictionnel limité portent, en principe, également sur le choix de la méthode de calcul de la marge de sous-cotation (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 16 décembre 2011, Dashiqiao Sanqiang Refractory Materials/Conseil, T 423/09, EU:T:2011:764, point 41).

b) Méthode de calcul de la sous-cotation des prix utilisée par la Commission

116 Au considérant 149 du règlement antidumping provisoire et au considérant 658 du règlement antisubventions, la Commission a indiqué avoir déterminé la sous-cotation des prix pendant la période d’enquête en comparant :

– d’une part, les « prix de vente moyens pondérés, par segment et type de produit, des producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon, pratiqués à l’égard des acheteurs indépendants sur le marché de l’Union, ajustés au niveau départ usine » ;

– d’autre part, les « prix moyens pondérés correspondants, par segment et type de produit, des importations en provenance des producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon, facturés au premier acheteur indépendant sur le marché de l’Union, établis sur une base coût, assurance, fret [CAF] et dûment ajustés pour tenir compte des droits de douane et des coûts postérieurs à l’importation ».

117 S’agissant du premier terme de la comparaison, à savoir les prix des producteurs de l’Union, la Commission a précisé, au considérant 178 du règlement antidumping définitif et au considérant 685 du règlement antisubventions, la nature des frais déduits des prix facturés aux premiers acheteurs indépendants afin de les ajuster au niveau départ usine. Elle a expliqué qu’elle avait déduit les frais correspondant aux éléments suivants : « le transport, l’assurance, la manutention, le chargement et les coûts accessoires, l’emballage, le crédit, les rabais et les commissions ». Elle a également indiqué que, en revanche, elle n’avait pas déduit « les frais de vente indirects, les frais de R & D, de financement et de marketing, ni le bénéfice ».

118 De plus, dans sa réponse écrite aux mesures d’organisation de la procédure, la Commission a confirmé que, en cas de commercialisation du produit similaire par l’intermédiaire d’entités de vente liées aux producteurs de l’Union, elle avait pris en considération les prix de revente aux premiers acheteurs indépendants pratiqués par ces entités de vente liées et qu’elle n’avait pas déduit les frais VGA et le bénéfice desdites entités.

119 S’agissant du second terme de la comparaison, à savoir les prix des producteurs-exportateurs chinois, la Commission a justifié, aux considérants 166 à 171 du règlement antidumping définitif et aux considérants 673 à 678 du règlement antisubventions, l’utilisation de prix à l’importation construits dans les cas où le producteur-exportateur chinois et l’importateur sont liés. Elle a donc construit les prix à l’importation en prenant comme point de départ les prix de revente aux premiers acheteurs indépendants pratiqués par les importateurs liés.

120 En particulier, au considérant 171 du règlement antidumping définitif et au considérant 678 du règlement antisubventions, la Commission a expliqué que, « afin de permettre une comparaison équitable, il [étai]t justifié, pour obtenir un prix [au niveau frontière de l’Union] fiable, de déduire les frais [VGA] et le bénéfice du prix de revente à des acheteurs indépendants pratiqué par l’importateur lié ».

121 En résumé, il résulte de l’ensemble des éléments rappelés aux points 116 à 120 ci-dessus, d’une part, que, s’agissant des prix des producteurs de l’Union, la Commission s’est fondée sur les prix de vente ou de revente aux premiers acheteurs indépendants pratiqués soit directement par les producteurs de l’Union, soit par l’intermédiaire d’entités de vente liées à ces derniers. Dans cette dernière hypothèse, les prix du produit similaire pris en compte dans le calcul de la sous-cotation incluent les frais VGA ainsi que le bénéfice des entités de vente liées aux producteurs de l’Union.

122 D’autre part, s’agissant des prix des producteurs-exportateurs chinois, la Commission s’est fondée sur des prix à l’importation, réels ou construits, au niveau frontière de l’Union. Ces prix peuvent être soit des prix réels facturés par les producteurs-exportateurs chinois à des premiers acheteurs indépendants, soit des prix de vente théoriques à des importateurs liés construits par la Commission. Dans cette dernière hypothèse, les prix du produit concerné pris en compte dans le calcul de la sous-cotation n’incluent ni les frais VGA ni le bénéfice des entités de vente liées aux producteurs-exportateurs chinois.

123 Sur le fondement de la méthode de calcul décrite aux points 116 à 122 ci-dessus et ainsi qu’il ressort des considérants 160 et 162 du règlement antidumping définitif et des considérants 659 et 667 du règlement antisubventions, la Commission a constaté un niveau de sous-cotation global des prix d’environ 21 %. Elle a également constaté que la marge moyenne pondérée de sous-cotation variait entre 18 et 24 % en fonction des trois catégories de pneumatiques définies par les règlements attaqués selon leur niveau de qualité (18 à 20 % pour la catégorie 1 et 22 à 24 % pour les catégories 2 et 3).

124 Par ailleurs, s’agissant des producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon, la Commission a précisé, pour la première fois devant le Tribunal, que les marges de sous-cotation s’élevaient respectivement à 30,0 % pour les produits fabriqués par le groupe Xingyuan, à 19,3 % pour ceux fabriqués par le groupe Giti, à 22,2 % pour ceux fabriqués par le groupe Aeolus et à 17,6 % pour ceux fabriqués par le groupe Hankook.

c) Sur l’existence d’une violation de l’obligation de procéder à une comparaison équitable des prix

125 En l’espèce, et compte tenu de ce qui a été relevé aux points 116 à 122 ci-dessus, force est de constater que, lors du calcul de la sous-cotation des prix, la Commission a systématiquement pris en compte les prix de vente facturés aux premiers acheteurs indépendants, indépendamment des canaux de distribution utilisés, en ce qui concerne l’industrie de l’Union, mais non en ce qui concerne les producteurs-exportateurs chinois.

126 En effet, lorsque les producteurs de l’Union ou les producteurs-exportateurs chinois vendent leurs produits par l’intermédiaire d’entités de vente liées, la Commission s’est fondée sur les prix pratiqués par les entités de vente liées aux producteurs de l’Union et a, en revanche, écarté les prix pratiqués par les entités de vente liées aux producteurs-exportateurs chinois au profit de prix à l’importation construits au niveau frontière de l’Union.

127 Dès lors, et ainsi que le relèvent les requérantes, en présence du même modèle de commercialisation caractérisé par le recours à des entités de vente liées, la Commission a traité différemment les ventes des producteurs de l’Union et celles des producteurs-exportateurs chinois en retenant, pour les premiers, des prix de revente aux premiers acheteurs indépendants et, pour les seconds, des prix de vente construits au niveau frontière de l’Union.

128 Or, en présence d’un tel modèle de distribution, il a été jugé que, lorsque la Commission utilisait les prix de vente aux premiers acheteurs indépendants pour le produit similaire de l’industrie de l’Union, l’exigence de comparer des prix se situant au même stade commercial lui imposait de comparer ces prix avec les prix de vente du produit concerné aux premiers acheteurs indépendants (voir, en ce sens, arrêts du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 301/16, EU:T:2019:234, point 183, et du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 300/16, EU:T:2019:235, point 247).

129 En effet, il convient d’observer que la commercialisation de produits effectuée non pas directement par le producteur, mais par l’intermédiaire d’entités de vente, implique l’existence de coûts et d’une marge de bénéfice propres à ces entités, de sorte que les prix pratiqués par celles-ci envers des acheteurs indépendants sont généralement supérieurs aux prix pratiqués par les producteurs dans leurs ventes directes à de tels acheteurs et ne peuvent donc pas être assimilés à ces derniers prix (arrêts du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 301/16, EU:T:2019:234, point 184, et du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 300/16, EU:T:2019:235, point 248).

130 Or, en l’espèce, la Commission a inclus dans le prix du produit similaire les frais VGA et le bénéfice des entités de vente liées aux producteurs de l’Union, tout en excluant du prix du produit concerné les frais et le bénéfice correspondants des entités de vente liées aux producteurs-exportateurs chinois. Il s’ensuit que la Commission a pris en considération pour le produit similaire un prix majoré par rapport à celui du produit concerné et, par conséquent, défavorable aux producteurs-exportateurs chinois effectuant tout ou partie de leurs ventes dans l’Union par l’intermédiaire d’entités de vente (voir, par analogie, arrêts du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 301/16, EU:T:2019:234, point 185, et du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 300/16, EU:T:2019:235, point 249).

131 Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que, en présence de ventes réalisées par l’intermédiaire d’entités de vente liées, le calcul de la sous-cotation des prix n’a manifestement pas été effectué en procédant à une comparaison équitable entre des prix situés au même stade commercial (voir, par analogie, arrêts du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 301/16, EU:T:2019:234, point 188, et du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 300/16, EU:T:2019:235, point 252).

132 Cette conclusion n’est pas remise en cause par les objections formulées par la Commission.

133 En premier lieu, la Commission soutient, en substance, que la manière dont les producteurs-exportateurs organisent la vente de leurs produits dans l’Union, à savoir soit directement à des acheteurs indépendants, soit par l’intermédiaire d’entités de vente liées, et le type de clients auxquels ils vendent leurs produits, à savoir soit des importateurs, soit des utilisateurs finaux, n’ont pas d’incidence sur la manière dont la concurrence par les prix s’exerce sur le marché. Elle explique que, quel que soit le canal de distribution utilisé par les producteurs-exportateurs et le type de clients, le produit concerné entre en concurrence avec le produit similaire de l’industrie de l’Union dès le franchissement de la frontière. Par conséquent, les prix à l’importation au niveau frontière de l’Union seraient toujours pertinents et pourraient être comparés aux prix des ventes de l’industrie de l’Union réalisées, au même stade commercial, soit directement (prix « départ usine »), soit par l’intermédiaire d’entités de vente liées (prix « départ succursale »). Selon la Commission, cette approche permettrait de traiter de façon identique les ventes directes (à des acheteurs indépendants) et indirectes (à des entités de vente liées) d’un même producteur-exportateur ou de différents producteurs-exportateurs ayant organisé différemment leurs canaux de distribution.

134 À cet égard, il convient, à titre préalable, de rappeler que le présent grief porte uniquement sur la question de savoir si, en l’espèce, la Commission a procédé à une comparaison équitable entre des prix se situant au même stade commercial. Aux fins de l’examen de ce grief, il n’y a pas nécessairement lieu de déterminer le stade commercial auquel la comparaison des prix pouvait ou devait être effectuée, ni d’apprécier, d’une façon générale, la pertinence des prix à l’importation au niveau frontière de l’Union et la légalité, dans l’absolu, d’une construction de certains prix aux fins du calcul de la sous-cotation des prix. En effet, d’une part, ces questions se rattachent à un grief distinct, à savoir le premier grief de la seconde branche des troisièmes moyens (voir point 106 ci-dessus). D’autre part, indépendamment de la légalité et de la pertinence du stade commercial choisi par la Commission du côté des producteurs-exportateurs ou du côté des producteurs de l’Union, la comparaison des prix effectuée par cette institution doit toujours présenter un caractère équitable et, pour cela, porter sur des prix se situant tous au même stade commercial.

135 Cela étant, la Commission soutient, en substance, que, s’agissant des prix des producteurs-exportateurs chinois, les prix à l’importation au niveau frontière de l’Union sont toujours pertinents, qu’il s’agisse de prix réels facturés à des acheteurs indépendants ou de prix construits censés être facturés à des entités de vente liées.

136 À cet égard, l’approche retenue et défendue par la Commission implique que les prix facturés par les producteurs-exportateurs chinois à des acheteurs indépendants, d’une part, et les prix facturés par les mêmes producteurs-exportateurs chinois à leurs entités de vente liées, d’autre part, se situent au même stade commercial. En outre, de façon plus générale, cette approche a implicitement mais nécessairement pour conséquence que les prix de vente facturés par ces producteurs-exportateurs à des acheteurs indépendants, d’une part, et les prix de revente facturés à de tels acheteurs par des entités de vente liées auxdits producteurs-exportateurs, d’autre part, ne se situent pas au même stade commercial.

137 En admettant que l’approche en cause soit appropriée, elle permettrait, certes, de justifier le recours à des prix à l’importation construits lorsque ces producteurs-exportateurs commercialisent tout ou partie de leurs produits par l’intermédiaire d’entités de vente liées.

138 En revanche, l’approche en cause ne permettrait pas, en principe, de justifier que les prix à l’importation des producteurs-exportateurs chinois, qui seraient tantôt des prix réels en cas de vente à des acheteurs indépendants et tantôt des prix construits en cas de vente à des entités de vente liées à ces producteurs-exportateurs (prix excluant les frais VGA et le bénéfice de ces entités), soient, comme en l’espèce, notamment comparés avec des prix de revente facturés à des acheteurs indépendants par des entités de vente liées aux producteurs de l’Union (prix incluant les frais VGA et le bénéfice de ces dernières entités). En effet, ces derniers prix se situeraient normalement à un stade commercial postérieur au stade commercial commun aux autres prix retenus tant du côté des producteurs-exportateurs chinois que du côté des producteurs de l’Union.

139 En définitive, l’approche en cause aurait dû logiquement conduire la Commission à retenir également, comme unique stade commercial du côté des producteurs de l’Union, celui des ventes des producteurs de l’Union à l’ensemble de leurs clients, qu’il s’agisse d’acheteurs indépendants ou d’entités de vente liées à ces derniers producteurs. Cela aurait impliqué que la Commission construise les prix de vente des producteurs de l’Union lorsque ceux-ci vendent leurs produits à des entités de vente liées et, par conséquent, qu’elle déduise et donc exclue les frais VGA et le bénéfice des entités de vente liées aux producteurs de l’Union.

140 Il ne pourrait en aller autrement que s’il était démontré que les entités de vente liées respectivement aux producteurs-exportateurs chinois et aux producteurs de l’Union jouent des rôles économiques différents.

141 Or, en l’espèce, la Commission se borne à suggérer que les prix de vente facturés directement aux premiers acheteurs indépendants par les producteurs de l’Union (prix « départ usine »), d’une part, et les prix de revente facturés à des tels acheteurs par les entités de vente liées à ces producteurs (prix « départ succursale »), d’autre part, se situent au même stade commercial. Elle n’explique pas comment il pourrait en être ainsi, alors que, dans le même temps, elle considère, implicitement mais nécessairement, que les prix de vente directement facturés aux premiers acheteurs indépendants par les producteurs-exportateurs chinois, d’une part, et les prix de revente facturés à de tels acheteurs par les entités de vente liées à ces producteurs-exportateurs, d’autre part, ne se situent pas, eux, au même stade commercial (voir point 136 ci-dessus).

142 Interrogée lors de l’audience, la Commission a indiqué que les producteurs de l’Union et leurs entités de vente liées pourraient être assimilés à des entités économiques uniques, ces entités de vente liées exerçant des tâches relevant normalement d’un département interne des ventes.

143 Cependant, il convient d’observer que, au considérant 105 du règlement antidumping définitif et dans ses écritures, la Commission a également indiqué, d’une part, que les producteurs-exportateurs chinois et leurs entités de vente liées, notamment dans le cas du groupe Hankook, constituaient des entités économiques uniques et, d’autre part, que l’existence de telles entités économiques uniques ne l’empêchait pas de construire les prix à l’importation.

144 Dans ces conditions, la Commission n’établit pas, ni même n’allègue, que les entités de vente liées, respectivement, aux producteurs de l’Union et aux producteurs-exportateurs chinois jouent des rôles économiques différents, de sorte que les frais VGA et le bénéfice de ces entités de vente liées devraient être inclus dans le prix du produit similaire, mais non dans le prix du produit concerné.

145 Il s’ensuit que, à la supposer appropriée, l’approche de la Commission consistant à prendre en considération uniquement des prix à l’importation, réels ou construits, au niveau frontière de l’Union ne permet pas d’établir, en l’espèce, le caractère équitable de la comparaison de ces prix avec les prix de revente facturés à des premiers acheteurs indépendants par des entités de vente liées aux producteurs de l’Union.

146 En deuxième lieu, pour justifier le recours à des prix à l’importation construits au niveau frontière de l’Union, la Commission invoque, d’une part, le règlement d’exécution (UE) no 217/2013 du Conseil, du 11 mars 2013, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations de certaines feuilles d’aluminium en rouleaux originaires de la République populaire de Chine (JO 2013, L 69, p. 11) (considérants 51 à 59 dudit règlement d’exécution), et, d’autre part, le rapport d’un groupe spécial de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) relatif au différend « Chine – Mesures antidumping et compensatoires visant les produits à base de poulet de chair en provenance des États-Unis », adopté le 25 septembre 2013 (WT/DS 427/R) (points 7.485 à 7.489 dudit rapport).

147 À cet égard, il suffit de constater que, tant dans le règlement d’exécution que dans le rapport mentionnés au point 146 ci-dessus, les prix des importations construits au niveau frontière de l’Union avaient été comparés à des prix de vente facturés par les producteurs de l’Union, et non à des prix de revente facturés par des entités de vente liées à ces derniers. Ainsi, les exemples cités par la Commission sont dénués de pertinence pour la solution des présents litiges.

148 En troisième lieu, la Commission soutient que la situation dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission (T 301/16, EU:T:2019:234), et du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission (T 300/16, EU:T:2019:235), était très particulière, dans la mesure où seuls deux producteurs-exportateurs avaient coopéré à l’enquête et où la « grande majorité » des ventes du producteur-exportateur en cause étaient réalisées par l’intermédiaire d’entités de vente liées. Dès lors, cette solution ne serait pas automatiquement transposable dans les présentes affaires, dans lesquelles la part des ventes réalisées par l’intermédiaire d’entités de vente liées aux producteurs-exportateurs chinois serait nettement plus faible.

149 À cet égard, il convient de relever, d’une part, que l’obligation de comparer les prix au même stade commercial s’impose indépendamment du nombre de producteurs-exportateurs ayant coopéré et, d’autre part, qu’elle ne s’applique pas uniquement lorsque les producteurs-exportateurs réalisent la « grande majorité » de leurs ventes par l’intermédiaire d’entités de vente liées. Il s’ensuit que les principes énoncés dans les arrêts cités aux points 114 et 148 ci-dessus demeurent pleinement applicables dans le cas d’espèce.

150 Au demeurant, il y a lieu d’observer que, selon les données de la Commission, la proportion des ventes des producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon réalisées par l’intermédiaire d’entités de vente liées s’élève à 0 % pour le groupe Xingyuan, à 34 % pour le groupe Giti, à 19 % pour le groupe Aeolus et à 98,6 % pour le groupe Hankook. En outre, en réponse à une mesure d’organisation de la procédure, le Commission a précisé que la proportion de ventes effectuées par l’intermédiaire d’entités de vente liées s’établit à 46,9 % pour l’échantillon des producteurs-exportateurs chinois pris dans son ensemble et à 87 % pour l’échantillon des producteurs de l’Union pris dans son ensemble. Il s’ensuit que la proportion de ventes effectuées par l’intermédiaire d’entités de vente liées est élevée, voire très élevée, en ce qui concerne chacun des deux échantillons pris dans leur ensemble.

151 Cette situation n’apparaît pas fondamentalement différente de celle constatée dans les affaires mentionnées au point 148 ci-dessus. En effet, dans ces affaires, le Tribunal a relevé, d’une part, que le producteur-exportateur en cause effectuait « la majorité » de ses ventes dans l’Union par l’intermédiaire d’entités de vente liées et, d’autre part, que « la plupart » des ventes dans l’Union de l’industrie de l’Union avaient été réalisées par les entités de vente liées aux deux producteurs de l’Union ayant coopéré à l’enquête (arrêts du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 301/16, EU:T:2019:234, points 184 et 185, et du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 300/16, EU:T:2019:235, point 249).

152 Dans ces conditions, l’objection de la Commission résumée au point 148 ci-dessus doit être écartée.

153 En conséquence, il y a lieu de confirmer la conclusion selon laquelle la Commission n’a manifestement pas procédé à une comparaison équitable entre des prix se situant au même stade commercial, et ce, à tout le moins, lorsque le produit concerné et le produit similaire sont tous deux vendus par l’intermédiaire d’entités de vente liées (voir point 131 ci-dessus).

154 Partant, il y a lieu de considérer que le calcul de la sous-cotation du prix du produit concerné réalisé par la Commission dans le cadre des règlements attaqués est entaché d’une erreur de droit ainsi que d’une erreur manifeste d’appréciation et que, par conséquent, ce calcul viole l’article 3, paragraphes 2 et 3, du règlement de base antidumping et l’article 8, paragraphes 1 et 2, du règlement de base antisubventions.

d) Sur l’incidence de la violation de l’obligation de procéder à une comparaison équitable des prix

155 Il ne suffit pas, pour entraîner l’annulation des règlements attaqués, que la Commission ait commis une erreur quant à la méthode de calcul de la marge de sous-cotation des prix, encore faut-il que cette erreur ait eu une incidence sur la détermination de l’existence et du montant du préjudice ou sur l’analyse du lien de causalité et qu’elle ait ainsi affecté le contenu des règlements attaqués eux-mêmes (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 28 octobre 2004, Shanghai Teraoka Electronic/Conseil, T 35/01, EU:T:2004:317, point 167, et du 25 octobre 2011, Transnational Company « Kazchrome » et ENRC Marketing/Conseil, T 192/08, EU:T:2011:619, point 119).

156 Dès lors, il y a lieu d’examiner, en l’espèce, si l’erreur commise par la Commission a eu une incidence sur le contenu des règlements attaqués. Aux fins de cet examen, il convient de distinguer l’incidence éventuelle de cette erreur, premièrement, sur le niveau de la sous-cotation des prix ainsi que sur l’analyse du préjudice et du lien de causalité et, deuxièmement, sur les marges de préjudice ainsi que sur le montant des droits antidumping et compensateurs définitifs litigieux.

1) Sur l’incidence sur le niveau de la sous-cotation des prix et sur l’analyse du préjudice et du lien de causalité

i) S’agissant du niveau de la sous-cotation des prix

157 Dans ses écritures et lors de l’audience, la Commission a fait valoir que, à la supposer établie, l’erreur qui lui est reprochée n’avait pas eu d’incidence significative sur le niveau de la sous-cotation des prix. Cette sous-cotation resterait importante pour une large majorité des importations.

158 En premier lieu, au stade de la duplique, la Commission a produit des calculs alternatifs de la sous-cotation des prix pour chacun des quatre groupes de producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon. Dans le cadre de ces calculs alternatifs, elle a rajouté les frais VGA et le bénéfice des entités de vente liées à ces producteurs-exportateurs. Elle a ensuite comparé chaque transaction avec un code de numéro de contrôle des produits (NCP) plus détaillé distinguant désormais quatre types de clients, à savoir, premièrement, les grossistes, distributeurs ou négociants, deuxièmement, les détaillants, troisièmement, les utilisateurs et, quatrièmement, les autres clients (tels que, par exemple, les fabricants d’équipements d’origine, les organismes de transport public et l’armée). Selon les calculs alternatifs de la Commission, la sous-cotation des prix serait en réalité légèrement supérieure à celle constatée dans les règlements attaqués pour chacun des quatre groupes de producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon. En effet, la sous-cotation des prix passerait de 30,0 à 32,4 % pour le groupe Xingyuan, de 19,3 à 23,1 % pour le groupe Giti, de 22,2 à 22,4 % pour le groupe Aeolus et de 17,6 à 19,2 % pour le groupe Hankook.

159 À cet égard, il convient de relever que, dans le cadre de ses calculs alternatifs, la Commission ne s’est pas limitée à rajouter les frais VGA et le bénéfice des entités de vente liées aux producteurs-exportateurs chinois. En effet, elle a également modifié un autre paramètre en utilisant un code NCP plus détaillé incluant désormais également le type de client. Il s’ensuit que la Commission a modifié la méthode de calcul de la sous-cotation des prix qui est au fondement des règlements attaqués. Dès lors, en prenant en compte les calculs alternatifs de la Commission, le Tribunal procéderait à une substitution de motifs.

160 Or, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre d’un recours en annulation, le Tribunal ne peut substituer sa propre motivation à celle de l’auteur de l’acte attaqué (voir arrêt du 26 octobre 2016, PT Musim Mas/Conseil, C 468/15 P, EU:C:2016:803, point 64 et jurisprudence citée). Il s’ensuit que la Commission ne saurait invoquer valablement à l’appui des règlements attaqués des motifs qui ne sont pas contenus dans ceux-ci et dont elle n’a fait état que postérieurement à l’introduction du recours (voir, en ce sens, arrêt du 21 mars 1996, Farrugia/Commission, T 230/94, EU:T:1996:40, point 36 et jurisprudence citée).

161 Partant, les calculs alternatifs relatifs à la sous-cotation des prix produits par la Commission au stade de la duplique ne peuvent être pris en considération par le Tribunal pour apprécier l’incidence de l’erreur commise sur le niveau de la sous-cotation des prix.

162 En deuxième lieu, à la suite d’une mesure d’organisation de la procédure, la Commission a produit de nouveaux calculs alternatifs relatifs à la sous-cotation des prix se limitant à rajouter les frais VGA et le bénéfice des entités de vente liées aux producteurs-exportateurs chinois et ne modifiant pas le code NCP utilisé dans les règlements attaqués. Selon elle, à l’issue de ces nouveaux calculs alternatifs, la sous-cotation des prix resterait stable à 30,0 % pour le groupe Xingyuan et passerait de 19,3 à 18,5 % pour le groupe Giti, de 22,2 à 16,8 % pour le groupe Aeolus et de 17,6 à 7,3 % pour le groupe Hankook.

163 À supposer qu’ils soient exacts (ce dont il appartiendrait à la Commission de s’assurer dans l’hypothèse où les recours seraient accueillis), les nouveaux calculs alternatifs en cause permettent d’évaluer les niveaux de sous-cotation des prix retenus qui auraient résulté de la méthode préconisée par les requérantes et consistant à intégrer les frais VGA et le bénéfice des entités de vente liées tant du côté des producteurs-importateurs chinois que du côté des producteurs de l’Union. Une telle méthode aurait permis de procéder à une comparaison équitable des prix dans les cas où le produit concerné et le produit similaire sont tous deux vendus par l’intermédiaire d’entités de vente liées.

164 Il résulte des nouveaux calculs alternatifs en cause que, si la Commission avait suivi la méthode préconisée par les requérantes, la sous-cotation des prix aurait été moins élevée pour trois des quatre groupes de producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon, à savoir les groupes Giti, Aeolus et Hankook. Or, d’après les chiffres fournis par la Commission quant au poids relatif de chacun des groupes de producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon dans les ventes totales à l’exportation réalisées par ces derniers (17 % pour le groupe Xingyuan, 30 % pour le groupe Giti, 17 % pour le groupe Aeolus et 36 % pour le groupe Hankook), les groupes Giti, Aeolus et Hankook représentent ensemble 83 % des ventes totales à l’exportation au regard de l’échantillon. De plus, la différence constatée est importante pour au moins deux de ces groupes, à savoir les groupes Aeolus et Hankook, lesquels représentent à eux deux 53 % desdites ventes.

165 Dans ces conditions, et compte tenu notamment du poids relatif des différents groupes de producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon, il apparaît que le niveau global de la sous-cotation des prix eu égard à l’échantillon pris dans son ensemble aurait, lui aussi, été significativement moins élevé si la Commission avait suivi la méthode préconisée par les requérantes. Par suite, la marge moyenne pondérée de sous-cotation aurait été sensiblement inférieure à celle de 21 % retenue dans les règlements attaqués (point 123 ci-dessus).

166 Dès lors, les nouveaux calculs alternatifs en cause montrent que l’erreur commise par la Commission a pu avoir une incidence sur le niveau de la sous-cotation des prix et a entraîné, en l’espèce, une surestimation sensible de cette sous-cotation.

167 Certes, il apparaît que, comme le relève la Commission, même après les nouveaux calculs alternatifs en cause, la marge de sous-cotation des prix demeure inchangée pour le groupe Xingyuan et reste significative pour les quatre groupes de producteurs-exportateurs chinois.

168 Toutefois, il y a lieu d’observer que la Commission a conclu à l’existence d’un préjudice important pour l’industrie de l’Union et d’un lien de causalité en se fondant sur le seul niveau global de sous-cotation de 21 %, et non sur les niveaux de sous-cotation individuels des quatre producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon (voir point 123 ci-dessus). Or, ce niveau global de sous-cotation aurait été significativement moins élevé si la Commission n’avait pas commis l’erreur qui lui est reprochée (voir point 165 ci-dessus).

169 En troisième lieu, la Commission invoque des statistiques relatives aux importations, à savoir des statistiques d’Eurostat (office statistique de l’Union européenne) et des statistiques chinoises, ainsi qu’à la production de l’Union, à savoir des données fournies par les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon. Il résulterait de ces statistiques que les différences entre les prix des importations et les prix de l’industrie de l’Union sont très significatives, puisque, au cours de la période considérée, le prix moyen à l’unité des importations chinoises n’aurait représenté qu’entre 59,08 et 64,13 % du prix des produits de l’Union.

170 Toutefois, force est de constater que, s’agissant des importations en provenance de Chine, la Commission invoque désormais des statistiques macroéconomiques, et non des statistiques issues des producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon. De plus, elle se prévaut, tant du côté des importations que de la production de l’Union, de statistiques brutes, globales et non pondérées, ne tenant pas compte des types de produits et de la segmentation du produit concerné en trois catégories. Dès lors, les différentes statistiques invoquées par la Commission ne permettent pas de justifier le montant de la marge de sous-cotation, calculée à partir des prix de vente moyens pondérés, par segment et type de produit, selon la méthode décrite aux points 116 à 122 ci-dessus.

171 Il résulte de ce qui précède que la violation par la Commission de son obligation de procéder à une comparaison équitable des prix a eu une incidence, au demeurant significative, sur la détermination du niveau de la sous-cotation des prix.

ii) S’agissant de l’analyse du préjudice et du lien de causalité

172 La Commission fait valoir qu’il n’est pas démontré que la conclusion relative à l’existence d’un dumping préjudiciable ou de subventions préjudiciables aurait été différente en l’absence de l’erreur alléguée par les requérantes dans le calcul de la sous-cotation des prix.

173 À cet égard, il ressort des considérants 150, 217, 219 et 230 du règlement antidumping provisoire et des considérants 258 et 265 du règlement antidumping définitif, d’une part, et des considérants 659, 830, 837, 839, 842 et 868 du règlement antisubventions, d’autre part, que, pour établir l’existence d’un préjudice subi par l’industrie de l’Union et d’un lien de causalité entre les importations faisant l’objet de dumping ou de subventions et ce préjudice, la Commission s’est notamment fondée sur la sous-cotation des prix. À plusieurs reprises, elle a relevé le niveau « important » ou « significatif » de cette sous-cotation. En particulier, au considérant 219 du règlement antidumping provisoire et au considérant 839 du règlement antisubventions, elle a indiqué que cette sous-cotation importante des prix était, avec la forte augmentation des importations, l’un des deux principaux facteurs à prendre en considération pour apprécier les effets des importations faisant l’objet d’un dumping ou de subventions.

174 Il s’ensuit que la Commission a accordé une importance déterminante à la sous-cotation des prix telle que calculée dans les règlements attaqués et que cette sous-cotation donne lieu à la conclusion selon laquelle les importations du produit concerné sont à l’origine du préjudice de l’industrie de l’Union. Ce constat n’est pas remis en cause par la circonstance, alléguée par la Commission, selon laquelle cette dernière a également pris en compte d’autres facteurs.

175 Il convient d’ajouter que, dans le cadre du contrôle de légalité prévu à l’article 263 TFUE, il n’appartient pas au Tribunal d’apprécier si la Commission aurait également pu conclure à l’existence d’un dumping préjudiciable ou de subventions préjudiciables en se fondant sur un niveau de sous-cotation des prix inférieur à celui, sensiblement surestimé, retenu dans les règlements attaqués.

176 Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que l’erreur commise par la Commission lors du calcul de la sous-cotation des prix a eu une incidence sur le constat, par la Commission, de l’existence d’un préjudice et d’un lien de causalité.

2) Sur l’incidence sur les marges de préjudice et sur le montant des droits antidumping et compensateurs définitifs litigieux

i) S’agissant des marges de préjudice

177 Dans ses écritures et lors de l’audience, la Commission a fait valoir, en substance, qu’il n’était pas démontré que les marges de préjudice auraient été moins élevées si les prix à l’importation avaient inclus les frais VGA et le bénéfice des entités de vente liées.

178 En premier lieu, la Commission insiste sur la différence entre la sous-cotation des prix (undercutting) et la sous-cotation des prix indicatifs ou marge de préjudice (underselling), laquelle n’aurait pas été abordée dans les arrêts du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission (T 301/16, EU:T:2019:234), et du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission (T 300/16, EU:T:2019:235).

179 À cet égard, il y a lieu de relever que le choix du stade commercial et l’inclusion ou non des frais VGA et du bénéfice des entités de vente liées aux producteurs-exportateurs chinois et aux producteurs de l’Union affectent le niveau des prix des importations ainsi que le niveau des prix de l’industrie de l’Union. Or, ainsi que cela ressort notamment des considérants 254 à 256 du règlement antidumping provisoire, le calcul de la marge de préjudice consiste à comparer les prix à l’importation utilisés lors du calcul de la sous-cotation des prix, d’une part, avec les prix non préjudiciables du produit similaire incluant un bénéfice-cible reflétant les conditions normales du marché, d’autre part. Dès lors, une erreur relative au stade commercial auquel est effectuée la comparaison des prix est susceptible d’avoir une incidence tant sur le calcul de la sous-cotation des prix que sur le calcul de la marge de préjudice.

180 Par ailleurs, contrairement à ce que prétend la Commission, le Tribunal a bien abordé la question de la marge de préjudice dans les arrêts cités au point 178 ci-dessus en indiquant qu’il ne saurait être exclu que, si la sous-cotation du prix avait été calculée correctement, la marge de préjudice de l’industrie de l’Union aurait été établie à un niveau inférieur à celui de la marge de dumping (arrêts du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 301/16, EU:T:2019:234, point 194, et du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T 300/16, EU:T:2019:235, point 258).

181 En deuxième lieu, au stade de la duplique, la Commission a recalculé les marges de préjudice selon les mêmes modalités que celles utilisées pour recalculer la sous-cotation des prix (point 158 ci-dessus). Selon ces calculs alternatifs, les marges de préjudice seraient en réalité encore plus élevées que celles retenues dans les règlements attaqués pour chacun des groupes de producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon. En effet, à la suite desdits calculs alternatifs, les marges de préjudice passeraient de 55,1 à 60,8 % pour le groupe Xingyuan, de 29,6 à 36,8 % pour le groupe Giti, de 37,3 à 40,2 % pour le groupe Aeolus et de 23,4 à 29,6 % pour le groupe Hankook.

182 À cet égard, il suffit de relever que, pour les mêmes raisons que celles mentionnées aux points 159 à 161 ci-dessus à propos des calculs alternatifs relatifs à la sous-cotation des prix, les calculs alternatifs relatifs à la marge de préjudice produits par la Commission au stade de la duplique ne peuvent être pris en considération par le Tribunal sans procéder à une substitution de motifs.

183 En troisième lieu, à la suite d’une mesure d’organisation de la procédure, la Commission a effectué de nouveaux calculs alternatifs relatifs à la marge de préjudice selon les mêmes modalités que celles utilisées pour les nouveaux calculs alternatifs relatifs à la sous-cotation des prix, c’est-à-dire sans modifier le code NCP utilisé dans les règlements attaqués (point 162 ci-dessus). À l’issue de ces nouveaux calculs alternatifs, la marge de préjudice resterait stable à 55,1 % pour le groupe Xingyuan et passerait de 29,6 à 28,5 % pour le groupe Giti, de 37,3 à 29,8 % pour le groupe Aeolus et de 23,4 à 10,3 % pour le groupe Hankook.

184 À supposer qu’ils soient exacts (ce dont il appartiendrait à la Commission de s’assurer dans l’hypothèse où les recours seraient accueillis), les nouveaux calculs alternatifs en cause permettent d’évaluer les marges de préjudice qui auraient été retenues par la Commission si elle avait suivi la méthode préconisée par les requérantes et pris en compte les frais VGA et le bénéfice des entités de vente liées aux producteurs-exportateurs chinois.

185 À cet égard, il convient de distinguer trois situations.

186 Premièrement, la marge de préjudice aurait été moins élevée pour trois des quatre groupes de producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon, à savoir les groupes Giti, Aeolus et Hankook. De plus, la différence constatée aurait été importante pour au moins deux de ces groupes, à savoir les groupes Aeolus et Hankook.

187 Deuxièmement, compte tenu notamment du poids relatif des différents groupes de producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon, il apparaît que la marge de préjudice eu égard à l’échantillon pris dans son ensemble aurait, elle aussi, été significativement moins élevée si la Commission avait suivi la méthode préconisée par les requérantes. Par suite, la marge de préjudice moyenne pondérée aurait été sensiblement inférieure à celle de 32,39 % retenue dans les règlements attaqués. Or, ainsi qu’il ressort du tableau 11 du règlement antidumping définitif et du tableau figurant au considérant 933 du règlement antisubventions, c’est cette dernière marge de préjudice qui a été retenue pour les producteurs-exportateurs chinois énumérés aux annexes I et II des règlements attaqués et ayant coopéré, selon le cas, à l’enquête antidumping ou à l’enquête antisubventions.

188 Dans ces conditions, les nouveaux calculs alternatifs en cause montrent que l’erreur commise par la Commission l’a conduite à surestimer les marges de préjudice retenues pour tous les producteurs-exportateurs énumérés au point 28 ci-dessus qui soit appartiennent aux groupes Giti, Aeolus et Hankook, soit sont énumérées aux annexes I et II des règlements attaqués. Ce constat n’est pas remis en cause par la circonstance, relevée par la Commission, que, même après ces nouveaux calculs alternatifs, la marge de préjudice demeurerait significative en ce qui concerne chacun des groupes de producteurs-exportateurs chinois.

189 Troisièmement, selon les nouveaux calculs alternatifs en cause, la marge de préjudice demeurerait inchangée à 55,1 % pour le groupe Xingyuan. Or, ainsi qu’il ressort du tableau 11 du règlement antidumping définitif et du tableau figurant au considérant 933 du règlement antisubventions, c’est cette marge de préjudice, la plus élevée constatée parmi les producteurs-exportateurs chinois retenus dans l’échantillon, qui a été appliquée pour les producteurs-exportateurs chinois n’ayant pas coopéré, selon le cas, à l’enquête antidumping ou à l’enquête antisubventions. En pratique, cette marge de préjudice résiduelle de 55,07 % exactement est applicable à « toutes les autres sociétés » non identifiées nommément dans les règlements attaqués et, notamment, à Weifang Yuelong Rubber et à Hefei Wanli Tire. Elle est également applicable à Zhongce Rubber Group dans la seule procédure antisubventions, cette société étant visée à l’annexe II du règlement antisubventions.

190 Toutefois, il y a lieu d’observer que les nouveaux calculs alternatifs en cause permettent seulement de neutraliser les effets de l’erreur consistant à comparer des prix de vente à l’importation construits au niveau frontière de l’Union, d’une part, avec des prix de revente facturés par des entités de vente liées aux producteurs de l’Union, d’autre part. En revanche, ils ne permettent pas de neutraliser les effets éventuels de l’erreur consistant à comparer des prix de vente réels facturés directement à des clients de l’Union par les producteurs-exportateurs chinois, d’une part, et des prix de revente pratiqués par des entités de vente liées aux producteurs de l’Union, d’autre part. Or, cette dernière comparaison est également un des éléments constitutifs de l’absence de comparaison équitable entre des prix se situant au même stade commercial (voir points 138 et 145 ci-dessus).

191 Dans ces conditions, il ne peut être entièrement exclu que, si la Commission avait procédé à une comparaison équitable entre des prix se situant au même stade commercial, elle aurait retenu, pour le groupe Xingyuan et, par suite, pour les trois sociétés mentionnées au point 189 ci-dessus, une marge de préjudice inférieure à celle de 55,07 % retenue dans les règlements attaqués.

192 Partant, il y a lieu de considérer que la violation par la Commission de son obligation de procéder à une comparaison équitable des prix a eu, ou a pu avoir, une incidence sur la détermination des marges de préjudice pour tous les producteurs-exportateurs chinois, identifiés ou non dans les règlements attaqués.

ii) S’agissant du montant des droits antidumping et compensateurs définitifs litigieux

193 Dans ses écritures, la Commission mentionne la « règle du droit moindre ». En particulier, dans l’affaire T 72/19, elle fait valoir que l’argumentation des requérantes est entièrement inopérante dans la mesure où, en application de cette règle, le niveau des droits compensateurs définitifs a été établi par référence au montant des subventions constatées, et non par référence à la marge de préjudice.

194 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 9, paragraphe 4, second alinéa, du règlement de base antidumping, le montant d’un droit antidumping définitif n’excède pas la marge de dumping établie et doit être inférieur à cette marge, si ce droit moindre suffit à éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union. De même, en vertu de l’article 15, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement de base antisubventions, le montant d’un droit compensateur définitif ne doit pas excéder le montant total de la subvention passible de mesures compensatoires et doit être inférieur à ce montant, si ce droit moindre suffit à éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union.

195 Il en résulte que, lorsque la Commission établit à la fois un droit antidumping et un droit compensateur, ces deux droits ne peuvent, alternativement ou cumulativement, dépasser le niveau de la marge de préjudice (voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2014, Gold East Paper et Gold Huasheng Paper/Conseil, T 444/11, EU:T:2014:773, point 217).

196 En l’espèce, il ressort du tableau 11 du règlement antidumping définitif et du tableau figurant au considérant 933 du règlement antisubventions que, pour l’ensemble des producteurs-exportateurs chinois, la marge de préjudice (qui varie entre 23,41 et 55,07 %) a été établie à un niveau inférieur à la marge de dumping (qui varie entre 56,8 et 106,7 %), mais supérieur à la marge de subvention (qui varie entre 2,06 et 51,08 %). Dans ces conditions, et ainsi que cela résulte du considérant 929 du règlement antisubventions, la Commission a décidé d’instituer, d’une part, un droit compensateur définitif fixé au niveau des montants définitifs des subventions passibles de mesures compensatoires et, d’autre part, un droit antidumping définitif permettant d’atteindre le niveau d’élimination du préjudice sans dépasser celui-ci. Cependant, aucun droit antidumping définitif n’a été établi en ce qui concerne les producteurs-exportateurs énumérés aux annexes II des règlements attaqués, tels que Zhongce Rubber Group (point 78 ci-dessus), pour lesquels la marge de préjudice retenue est moins élevée dans la procédure antidumping (32,39 %) que dans la procédure antisubventions (55,07 %).

197 Premièrement, il s’ensuit que, pour les producteurs-exportateurs chinois, identifiés ou non dans les règlements attaqués, à l’exception de ceux énumérés aux annexes II de ces règlements, le taux cumulé du droit antidumping définitif et du droit compensateur définitif est égal à la marge de préjudice. Par conséquent, conformément à la « règle du droit moindre » consacrée dans les dispositions rappelées au point 194 ci-dessus et à la jurisprudence rappelée au point 195 ci-dessus, toute erreur affectant le calcul de la marge de préjudice a une incidence sur la légalité du montant total cumulé des droits antidumping et compensateurs définitifs institués sur les produits fabriqués par lesdits producteurs-exportateurs. Or, ainsi qu’il a été relevé au point 192 ci-dessus, la méthode de comparaison des prix utilisée par la Commission a faussé le calcul de la marge de préjudice pour tous les producteurs-exportateurs chinois, identifiés ou non dans lesdits règlements.

198 Deuxièmement, s’agissant des producteurs-exportateurs énumérés aux annexes II des règlements attaqués, tels que Zhongce Rubber Group, il est vrai qu’ils ont été assujettis uniquement à un droit compensateur définitif dont le taux (51,08 %) est inférieur à leur marge de préjudice dans la procédure antisubventions (55,07 %). Cependant, eu égard notamment au faible écart existant entre le taux de ce droit compensateur définitif et cette marge de préjudice, il ne saurait être exclu que, si ladite marge de préjudice avait été calculée correctement, elle aurait été établie à un niveau inférieur à celui de la marge de subvention.

199 Dès lors, il y a lieu de conclure que la violation par la Commission de son obligation de procéder à une comparaison équitable des prix a eu une incidence sur le montant total cumulé des droits antidumping et compensateurs définitifs pour tous les producteurs-exportateurs chinois, identifiés ou non dans les règlements attaqués.

200 Il résulte de ce qui précède que l’erreur constatée dans le calcul de la sous-cotation des prix a eu une incidence, d’une part, sur l’analyse de la Commission relative à l’existence d’un préjudice et d’un lien de causalité et, d’autre part, sur ses calculs relatifs au montant des droits antidumping et compensateurs définitifs. Il s’ensuit que cette erreur est de nature à affecter la légalité des règlements attaqués.

201 Par conséquent, le second grief de la seconde branche des troisièmes moyens est fondé et doit être accueilli.

e) Sur le principe et l’étendue de l’annulation résultant de la violation de l’obligation de comparaison équitable des prix

202 L’accueil du second grief de la seconde branche des troisièmes moyens est, à lui seul, de nature à fonder l’annulation des règlements attaqués en tant que ceux-ci instituent des droits antidumping et compensateurs définitifs sur les importations des produits fabriqués par les producteurs-exportateurs énumérés au point 28 ci-dessus, sous réserve de l’irrecevabilité constatée au point 82 ci-dessus.

203 Cependant, la Commission demande au Tribunal, dans l’hypothèse où il accueillerait le présent grief, d’annuler les règlements attaqués uniquement dans la mesure où les droits antidumping et compensateurs définitifs litigieux ont été établis à un niveau plus élevé que la marge de préjudice résultant des nouveaux calculs alternatifs qu’elle a effectués.

204 À cet égard, premièrement, il y a lieu de relever que l’erreur commise par la Commission dans le calcul de la sous-cotation des prix a eu une incidence sur son analyse relative à l’existence même du préjudice ainsi qu’au lien de causalité (voir points 176 et 200 ci-dessus), de sorte qu’elle doit être sanctionnée par l’annulation totale des droits antidumping et compensateurs définitifs litigieux.

205 Deuxièmement, il n’est pas établi, en l’état des dossiers, que les nouveaux calculs alternatifs effectués par la Commission suffisent à neutraliser entièrement l’erreur commise (voir points 190 et 191 ci-dessus). Il s’ensuit que ces calculs ne permettent pas de déterminer avec précision dans quelle mesure les droits antidumping et compensateurs définitifs litigieux demeureraient en partie fondés.

206 Troisièmement, le choix du stade commercial pertinent pour procéder à une comparaison équitable des prix constitue une étape préalable indispensable pour calculer la sous-cotation des prix, la marge de préjudice ainsi que le taux du droit antidumping ou compensateur applicable. Il s’ensuit que la modification du stade commercial sur lequel la Commission s’est fondée afin de procéder à une comparaison équitable des prix s’apparenterait à une substitution de motifs et affecterait la substance même des règlements attaqués. Par conséquent, les droits antidumping et compensateurs définitifs litigieux ne peuvent pas être maintenus, même partiellement, au motif qu’ils seraient fondés pour une partie de leur montant (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 15 septembre 2016, Unitec Bio/Conseil, T 111/14, EU:T:2016:505, point 76).

207 Partant, l’accueil du second grief de la seconde branche des troisièmes moyens est de nature à entraîner l’annulation des droits antidumping et compensateurs définitifs litigieux pour la totalité de leur montant, pour autant que ces droits sont contestés par des conclusions recevables (voir point 202 ci-dessus).

2. Sur certains griefs tirés d’incohérences ainsi que d’une violation des droits de la défense en ce qui concerne les indicateurs de préjudice et la pondération des données de l’échantillon des producteurs de l’Union

208 Le Tribunal considère opportun d’examiner certains griefs tirés, en substance, d’incohérences ainsi que d’une violation des droits de la défense en ce qui concerne les indicateurs de préjudice et la pondération des données de l’échantillon des producteurs de l’Union.

209 À cet égard, et au préalable, il y a lieu de rappeler que, lors de la détermination du préjudice subi par l’industrie de l’Union, la Commission a apprécié l’incidence des importations sur l’industrie de l’Union au regard de différents indicateurs macro-économiques et microéconomiques. S’agissant des indicateurs microéconomiques, cette institution s’est fondée sur des données issues de l’échantillonnage des producteurs de l’Union. Au cours des enquêtes antidumping et antisubventions ainsi qu’au stade du règlement antidumping provisoire, ces données ont été pondérées au moyen de deux ajustements, liés, le premier, à la taille des entreprises (ci-après le « premier ajustement de pondération ») et, le second, à la qualité des pneumatiques produits (ci-après le « second ajustement de pondération »). Le premier ajustement de pondération était fondé sur une clé de répartition des ventes effectuées par les grandes entreprises, d’une part, et par les petites et moyennes entreprises (PME), d’autre part (ci-après la « clé de répartition »). Au stade des règlements attaqués, la Commission a maintenu le premier ajustement de pondération, mais a renoncé au second ajustement de pondération.

210 Relativement à l’analyse du préjudice subi par l’industrie de l’Union, les requérantes invoquent notamment trois griefs dans chacune des deux affaires.

211 Premièrement, par le premier grief de la deuxième branche des premiers moyens, les requérantes reprochent à la Commission d’avoir utilisé, pour l’ensemble de la période considérée, une clé de répartition « fixe » fondée sur les seules données de l’année 2016.

212 Deuxièmement, par la troisième branche des premiers moyens, les requérantes reprochent à la Commission de ne pas avoir corrigé les données pondérées pour tous les indicateurs et pour toutes les catégories à la suite de l’abandon du second ajustement de pondération.

213 Troisièmement, par la seconde branche des cinquièmes moyens, les requérantes reprochent, en substance, à la Commission de ne pas leur avoir donné accès à certaines données non confidentielles et d’avoir ainsi violé leurs droits de la défense.

214 Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu d’examiner, d’abord et de façon conjointe, les griefs résumés aux points 211 et 212 ci-dessus, lesquels sont relatifs au bien-fondé des règlements attaqués, puis le grief résumé au point 213 ci-dessus, lequel est relatif au respect des formes substantielles.

a) Sur l’utilisation d’une clé de répartition fixe et l’absence de correction des données pondérées

215 Il est constant que, au stade des enquêtes antidumping et antisubventions et au stade du règlement antidumping provisoire, la Commission a fait application, lors du calcul de l’ensemble des indicateurs microéconomiques, des deux ajustements de pondération mentionnés au point 209 ci-dessus. S’agissant du premier ajustement de pondération, elle a calculé une clé de répartition entre les grandes entreprises et les PME (84,4 % – 14,6 %) en se fondant sur des données relatives à l’année 2016, dont il ressortait que la part des ventes effectuées par des PME était de 14,6 %. Elle a ensuite appliqué cette clé de répartition « fixe » pour l’ensemble de la période considérée lors du calcul des indicateurs microéconomiques des années 2014 à 2016 et de la période d’enquête.

216 Au stade des règlements attaqués, la Commission a partiellement modifié sa méthode de pondération des données de l’échantillon des producteurs de l’Union.

217 D’une part, ainsi que cela ressort des considérants 188 à 192 et du tableau 4 du règlement antidumping définitif et des considérants 707 à 711 et du tableau 5 du règlement antisubventions, la Commission a recalculé la clé de répartition sur une base annuelle et en tenant compte de certaines remarques des requérantes relatives aux procédés de rechapage « à chaud » et « à froid ». Elle a ainsi réévalué la part des ventes des PME dans le total des ventes réalisées dans l’Union par les producteurs de l’Union, cette part s’élevant désormais à 16,9 % en 2014, 15,3 % en 2015, 13,7 % en 2016 et 13,2 % au cours de la période d’enquête.

218 D’autre part, ainsi que cela ressort des considérants 194 et 195 du règlement antidumping définitif et des considérants 713 et 714 du règlement antisubventions, la Commission a décidé de renoncer au second ajustement de pondération en raison de l’absence de données permettant de calculer la pondération des catégories de pneumatiques tout au long de la période considérée.

219 À la suite de ces modifications de la méthode de pondération, la Commission a recalculé, dans les règlements attaqués, la rentabilité des ventes réalisées dans l’Union au niveau de l’ensemble de l’industrie de l’Union (tableau 5 du règlement antidumping définitif et tableau 16 du règlement antisubventions) et au niveau de la catégorie 3 (tableau 6 du règlement antidumping définitif et tableau 20 du règlement antisubventions). Il résulte des explications données par la Commission dans sa réponse écrite aux mesures d’organisation de la procédure que ces nouveaux calculs relatifs à la rentabilité de l’industrie de l’Union tiennent compte tant de la révision de la clé de répartition que de l’abandon du second ajustement de pondération.

220 En revanche, force est de constater que la Commission n’a recalculé, dans les règlements attaqués, ni la rentabilité des catégories 1 et 2 ni les autres indicateurs microéconomiques, à savoir, premièrement, les prix de vente et les facteurs affectant les coûts de production, deuxièmement, les coûts de la main-d’œuvre, troisièmement, les stocks et, quatrièmement, les flux de liquidités, les investissements et le rendement des investissements.

221 En effet, la Commission s’est bornée à indiquer, en substance, aux considérants 193, 196 et 197 du règlement antidumping définitif et aux considérants 712, 777 et 786 du règlement antisubventions, que, au vu des calculs révisés de la clé de répartition, de la rentabilité globale et de la rentabilité de la catégorie 3, les conclusions fondées sur les tendances examinées au stade des enquêtes antidumping et antisubventions et au stade du règlement antidumping provisoire restaient valables pour tous les indicateurs microéconomiques analysés au niveau de l’ensemble de l’industrie de l’Union et au niveau de ladite catégorie.

222 Par ailleurs, lors de l’audience, la Commission a indiqué que, à la suite de la révision de la pondération, elle avait recalculé, en interne, les indicateurs microéconomiques autres que la rentabilité globale et la rentabilité de la catégorie 3, sans toutefois divulguer les indicateurs révisés dans les règlements attaqués.

223 Ainsi, s’agissant des indicateurs microéconomiques autres que la rentabilité globale et la rentabilité de la catégorie 3, la Commission ne s’est pas fondée, dans les règlements attaqués, sur de nouveaux calculs de chacun de ces indicateurs tenant compte de la révision de la méthode de pondération. En effet, cette institution a continué de se fonder sur ses calculs initiaux, lesquels sont reproduits dans le règlement antidumping provisoire (tableaux 7 à 16) ainsi que dans le règlement antisubventions (tableaux 9 à 15 et 17 à 19).

224 Dans ces conditions, les règlements attaqués sont entachés d’une incohérence manifeste, la Commission ayant modifié sa méthode de pondération sans en apprécier l’impact sur les indicateurs microéconomiques autres que la rentabilité globale et la rentabilité de la catégorie 3.

225 Cependant, la Commission conteste la nécessité même de réviser les indicateurs microéconomiques autres que la rentabilité globale et la rentabilité de la catégorie 3.

226 S’agissant de l’absence de révision de la rentabilité des catégories 1 et 2, la Commission relève, à juste titre, que les PME étaient présentes uniquement dans la catégorie 3. Il s’ensuit que la révision de la clé de répartition n’était pas susceptible d’avoir une incidence sur la rentabilité des catégories 1 et 2. Il convient d’ajouter que l’abandon du second ajustement de pondération, qui visait à donner plus de poids aux ventes de la catégorie 3, ne pouvait pas modifier la rentabilité propre à chaque catégorie, mais seulement la rentabilité globale de l’industrie de l’Union. Dès lors, la Commission est fondée à soutenir qu’il n’était pas nécessaire de recalculer la rentabilité des catégories 1 et 2 à la suite de la modification de la méthode de pondération.

227 S’agissant de l’absence de révision des indicateurs microéconomiques autres que la rentabilité, la Commission fait valoir que ces indicateurs ont été calculés uniquement de façon globale. Toutefois, d’une part, il y a lieu d’observer que la révision de la clé de répartition a une incidence sur l’ensemble des indicateurs microéconomiques, même calculés uniquement au niveau de l’ensemble de l’industrie de l’Union. D’autre part, il résulte des tableaux 8 à 10 et 14 à 16 du règlement antidumping provisoire et des tableaux 10 à 12 et 17 à 19 du règlement antisubventions que certains des indicateurs microéconomiques autres que la rentabilité, à savoir les prix de vente et les facteurs affectant les coûts de production ainsi que les flux des liquidités, les investissements et les rendements des investissements, ont fait l’objet d’une analyse segmentée pour chacune des trois catégories. Dès lors, il était, en principe, nécessaire de recalculer tous les indicateurs microéconomiques autres que la rentabilité à la suite de la modification de la méthode de pondération.

228 De plus, la Commission ne conteste pas qu’elle disposait de toutes les données pertinentes pour recalculer l’ensemble des indicateurs microéconomiques autres que la rentabilité. En particulier, elle disposait de données annuelles sur la part des ventes des PME et, par suite, d’une clé de répartition sur une base annuelle (voir point 217 ci-dessus). D’ailleurs, elle a indiqué lors de l’audience qu’elle avait recalculé en interne les indicateurs microéconomiques autres que la rentabilité (voir point 222 ci-dessus).

229 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la Commission n’a pas utilisé l’ensemble des données pertinentes à sa disposition et devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe, ainsi que l’exige la jurisprudence citée au point 103 ci-dessus. Dès lors, il ne peut être considéré qu’elle a procédé à un examen objectif de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping ou de subventions, conformément à l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base antidumping et à l’article 8, paragraphe 1, du règlement de base antisubventions. Par conséquent, il y a lieu de conclure que l’analyse des indicateurs microéconomiques autres que la rentabilité et, par suite, la détermination du préjudice réalisées par la Commission dans le cadre des règlements attaqués sont entachées d’une erreur de droit ainsi que d’une erreur manifeste d’appréciation.

230 En application de la jurisprudence rappelée au point 155 ci-dessus, il y a lieu d’examiner, en l’espèce, si l’erreur commise par la Commission a eu une incidence sur le contenu des règlements attaqués.

231 À cet égard, la Commission fait valoir, en substance, que la modification de la méthode de pondération, et en particulier la révision de la clé de répartition, n’a eu, en pratique, qu’un impact marginal sur les indicateurs microéconomiques, notamment en raison du poids des grandes entreprises. Dès lors, l’absence de correction des données pondérées n’aurait pas eu d’incidence sur l’analyse globale du préjudice.

232 Cependant, d’abord, il y a lieu de relever que la Commission n’a divulgué ni dans les règlements attaqués ni devant le Tribunal les indicateurs microéconomiques révisés autres que la rentabilité. Ainsi, lors de l’audience, elle s’est contentée d’affirmer, sans le démontrer, que, à l’instar de la rentabilité globale et de la rentabilité de la catégorie 3, les autres indicateurs microéconomiques n’avaient pas été affectés par la révision de la méthode de pondération.

233 Ensuite, il convient de rappeler que la révision de la pondération résulte à la fois de la modification de la clé de répartition et de l’abandon du second ajustement de pondération.

234 Enfin, il importe de noter que l’incohérence entachant le calcul des indicateurs microéconomiques autres que la rentabilité n’est pas la seule erreur affectant l’analyse du préjudice. Elle vient s’ajouter à une autre erreur relative au calcul de la sous-cotation du prix du produit concerné, laquelle est déjà, à elle seule, de nature à remettre en cause la légalité des règlements attaqués (voir point 201 ci-dessus).

235 Partant, le premier grief de la deuxième branche des premiers moyens et la troisième branche desdits moyens, pris conjointement, doivent être accueillis.

b) Sur la violation des droits de la défense

236 Il ressort d’une jurisprudence constante que le respect des droits de la défense revêt une importance capitale dans les procédures d’enquêtes antidumping et antisubventions. Ainsi, les entreprises intéressées et leurs associations représentatives doivent avoir été mises en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement leur point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances allégués et sur les éléments de preuve retenus par la Commission à l’appui de son allégation de l’existence d’une pratique de dumping ou de subvention et du préjudice qui en résulterait (voir arrêt du 16 février 2012, Conseil et Commission/Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP, C 191/09 P et C 200/09 P, EU:C:2012:78, points 76 et 77 et jurisprudence citée).

237 L’obligation d’information qui incombe aux institutions de l’Union en matière d’antidumping et d’antisubventions doit, toutefois, le cas échéant, se concilier avec l’obligation de respecter les informations confidentielles (arrêts du 20 mars 1985, Timex/Conseil et Commission, 264/82, EU:C:1985:119, point 24, et du 1er juin 2017, Changmao Biochemical Engineering/Conseil, T 442/12, EU:T:2017:372, point 142).

238 Ces principes sont mis en œuvre dans le règlement de base antidumping et dans le règlement de base antisubventions, lesquels prévoient un système de garanties poursuivant deux objectifs, à savoir, d’une part, permettre aux parties intéressées de défendre utilement leurs intérêts et, d’autre part, préserver la confidentialité des informations recueillies au cours de l’enquête antidumping ou antisubventions (voir, en ce sens, arrêt du 30 juin 2016, Jinan Meide Casting/Conseil, T 424/13, EU:T:2016:378, point 96).

239 En particulier, l’article 6, paragraphe 7, premier alinéa, du règlement de base antidumping et l’article 11, paragraphe 7, du règlement de base antisubventions prévoient que les parties intéressées, y compris les exportateurs et leurs associations représentatives, peuvent, sur demande écrite, prendre connaissance de tous les renseignements fournis par toute partie concernée par l’enquête, mis à part les documents internes établis par les autorités de l’Union ou celles des États membres, pour autant que ces renseignements soient pertinents pour la défense de leurs intérêts, qu’ils ne soient pas confidentiels et qu’ils soient utilisés dans l’enquête.

240 De même, l’article 20 du règlement de base antidumping et l’article 30 du règlement de base antisubventions prévoient la communication aux parties intéressées, y compris les exportateurs et leurs associations représentatives, d’une information spécifique sur les faits et les considérations essentiels sur lesquels les mesures antidumping et antisubventions sont susceptibles d’être fondées.

241 L’article 19 du règlement de base antidumping et l’article 29 du règlement de base antisubventions limitent, quant à eux, la divulgation des informations de nature confidentielle ou fournies à titre confidentiel par les parties intéressées ainsi que des documents internes préparés par les autorités de l’Union ou les États membres.

242 Par ailleurs, il convient de rappeler qu’il ne saurait être imposé à la partie requérante de démontrer que la décision de la Commission aurait été différente, mais uniquement qu’une telle hypothèse n’est pas entièrement exclue dès lors que cette partie aurait pu mieux assurer sa défense en l’absence de l’irrégularité procédurale (voir arrêt du 16 février 2012, Conseil et Commission/Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP, C 191/09 P et C 200/09 P, EU:C:2012:78, point 78 et jurisprudence citée).

243 Toutefois, l’existence d’une irrégularité se rapportant aux droits de la défense ne saurait conduire à l’annulation des règlements attaqués que dans la mesure où il existe une possibilité que, en raison de cette irrégularité, la procédure administrative ait abouti à un résultat différent, affectant ainsi concrètement les droits de la défense de la partie requérante (voir arrêt du 16 février 2012, Conseil et Commission/Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP, C 191/09 P et C 200/09 P, EU:C:2012:78, point 79 et jurisprudence citée).

244 En l’espèce, il est constant que, au cours des enquêtes antidumping et antisubventions, les requérantes ont demandé, à plusieurs reprises, à la Commission de leur communiquer les données suivantes :

– les indicateurs de préjudice bruts, avant application des ajustements de pondération, ainsi que les données relatives aux PME, d’une part, et aux grandes entreprises, d’autre part ;

– les indicateurs de préjudice, autres que la rentabilité, après révision de la pondération ;

– certaines informations relatives aux sources des données macroéconomiques relatives au préjudice ainsi que la liste des PME de l’industrie de l’Union ayant arrêté leur production ;

– le volume cumulé exact des ventes des PME de l’industrie de l’Union ayant coopéré aux enquêtes ainsi que des renseignements relatifs à la proportion de PME dans l’industrie de l’Union.

245 Selon les requérantes, les données visées au point 244 ci-dessus ne sont pas confidentielles.

246 La Commission ne conteste pas qu’elle n’a pas communiqué les données visées au point 244 ci-dessus, mais soutient qu’elle n’était pas tenue, à peine d’irrégularité, de les communiquer.

247 Les explications de la Commission relatives à la non-communication des données visées au point 244 ci-dessus ont varié au cours de la procédure devant le Tribunal. En effet, d’abord, dans le mémoire en défense et dans la duplique, elle s’est bornée à indiquer, de façon globale et non circonstanciée, que ces données présentaient un caractère confidentiel ou interne. Ensuite, dans sa réponse écrite aux mesures d’organisation de la procédure, elle a précisé que certaines informations liées auxdites données avaient été communiquées et que, pour le reste, les données en cause soit n’existaient pas, soit présentaient un caractère interne, soit présentaient un caractère confidentiel. Enfin, lors de l’audience, elle a encore précisé et modifié sa position, notamment quant à l’existence et au caractère confidentiel de certaines des données en cause.

248 Dans ces conditions, il convient d’examiner si les différents motifs invoqués par la Commission étaient de nature à faire obstacle à la communication aux requérantes des données visées au point 244 ci-dessus.

249 En premier lieu, en ce qui concerne le motif tiré de l’inexistence des données visées au point 244 ci-dessus, la Commission ne l’avait soulevé, dans sa réponse écrite aux mesures d’organisation de la procédure, qu’à propos des indicateurs de préjudice, autres que la rentabilité, après révision de la pondération. Or, lors de l’audience, elle a admis, pour la première fois, que les données relatives à ces indicateurs révisés existaient. Partant, il doit être considéré qu’elle a complètement abandonné ce motif de non-communication.

250 En deuxième lieu, en ce qui concerne le motif tiré du caractère confidentiel des données visées au point 244 ci-dessus, il y a lieu de distinguer selon le type de données.

251 Premièrement, s’agissant, d’une part, des indicateurs de préjudice bruts, avant application des ajustements de pondération, et, d’autre part, des indicateurs de préjudice, autres que la rentabilité, après révision de la pondération, la Commission a admis, pour la première fois lors de l’audience, que, eu égard à leur caractère agrégé, les données relatives à ces indicateurs ne présentaient pas un caractère confidentiel.

252 Deuxièmement, s’agissant de la liste des PME de l’industrie de l’Union ayant arrêté leur production, la Commission a estimé, tant au cours des enquêtes antidumping et antisubventions qu’au cours des procédures écrite et orale devant le Tribunal, que cette liste présentait un caractère confidentiel dans la mesure où elle contenait les noms des clients des fournisseurs de bandes de roulement.

253 À cet égard, les requérantes ont fait valoir, à juste titre, lors de l’audience, que la communication des noms des 85 PME ayant arrêté leur production, tels que fournis par huit fournisseurs différents, ne permettait pas d’identifier des relations commerciales individuelles entre un fournisseur et un client et que, par suite, elle n’entraînait la divulgation d’aucune donnée susceptible de présenter un caractère confidentiel. Dans ces conditions, la Commission ne démontre pas que la liste des PME de l’industrie de l’Union ayant arrêté leur production présente un caractère confidentiel.

254 Troisièmement, s’agissant du volume cumulé exact des ventes des PME de l’industrie de l’Union ayant coopéré aux enquêtes, la Commission a indiqué au cours de la procédure écrite que cette donnée présentait un caractère confidentiel et que, par suite, elle n’avait révélé qu’une fourchette approximative. En outre, elle a déclaré lors de l’audience que cette donnée était susceptible de révéler l’identité des plaignants.

255 À cet égard, il est constant que, au cours des enquêtes antidumping et antisubventions, la Commission n’a pas révélé le volume exact des ventes réalisées par les PME ayant coopéré auxdites enquêtes, mais a seulement indiqué, dans une note au dossier, que la proportion des ventes desdites PME au sein du total des ventes des producteurs de l’Union ayant coopéré se situait dans une fourchette de 7 à 10 %. Elle a également indiqué, au considérant 30 et à la note en bas de page no 13 du règlement antidumping définitif, qu’elle avait procédé ainsi en raison de son obligation de préserver la confidentialité de l’identité de certains producteurs de l’Union.

256 Toutefois, la Commission n’explique pas concrètement comment la communication d’une donnée agrégée serait de nature à révéler l’identité de certains plaignants. En particulier, elle ne soutient pas que le nombre de PME ayant coopéré serait si faible que la communication d’une telle donnée permettrait d’identifier ces dernières. D’ailleurs, au considérant 157 du règlement antidumping provisoire, elle a précisé que les données des ventes des PME incluses dans l’échantillon représentaient environ 4 % des ventes totales réalisées dans l’Union par les producteurs de l’Union retenus dans l’échantillon, alors pourtant que le nombre de PME retenues dans l’échantillon est nécessairement inférieur ou égal au nombre de PME ayant coopéré. Dans ces conditions, elle ne démontre pas que les données exactes relatives au volume cumulé ou à la proportion des ventes des PME de l’industrie de l’Union ayant coopéré aux enquêtes présentent un caractère confidentiel.

257 Quatrièmement, s’agissant des autres données visées au point 244 ci-dessus, la Commission ne se prévaut plus, en dernier lieu, de leur caractère confidentiel. En tout état de cause, elle n’a jamais fourni d’explication spécifique et circonstanciée de nature à établir que ces données présenteraient un tel caractère.

258 En troisième lieu, en ce qui concerne le motif tiré du caractère interne des données visées au point 244 ci-dessus, la Commission ne l’invoque qu’à l’égard des indicateurs de préjudice mentionnés au point 251 ci-dessus. En effet, elle a déclaré lors de l’audience que les données relatives à ces indicateurs se rattachaient à une étape intermédiaire de calcul, qu’elles n’avaient pas été utilisées pour la détermination du préjudice et que, dès lors, elles présentaient un caractère interne et ne constituaient pas des faits et des considérations essentiels.

259 À cet égard, il convient d’observer que la circonstance que des données ou des calculs figurent dans des documents internes ou concernent des étapes intermédiaires des calculs de la Commission ne suffit pas à faire obstacle à leur divulgation, la divulgation de documents internes et de calculs intermédiaires étant prévue par le règlement de base antidumping lorsque ceux-ci contiennent des faits et des considérations essentiels (voir, en ce sens, arrêt du 30 juin 2016, Jinan Meide Casting/Conseil, T 424/13, EU:T:2016:378, point 198).

260 Dans ces conditions, il y a lieu d’examiner si les indicateurs de préjudice mentionnés au point 251 ci-dessus ainsi que les autres données visées au point 244 ci-dessus constituent des faits et des considérations essentiels.

261 À cet égard, premièrement, il y a lieu de relever que les indicateurs de préjudice bruts, avant application des ajustements de pondération, constituent une étape intermédiaire importante des calculs de la Commission relatifs aux indicateurs de préjudice.

262 Deuxièmement, les indicateurs de préjudice, autres que la rentabilité, après révision de la pondération constituent des données particulièrement pertinentes que la Commission aurait dû prendre en considération avant d’adopter les règlements attaqués (voir points 223 à 229 ci-dessus).

263 Troisièmement, les autres données visées au point 244 ci-dessus sont liées à des constatations de fait figurant dans les règlements attaqués, telles que la proportion et le poids des PME dans l’industrie de l’Union, le nombre de ces PME ayant arrêté leur production ou encore les données macroéconomiques relatives au préjudice.

264 Ainsi, il apparaît que les différentes données visées au point 244 ci-dessus se rapportent toutes à la façon dont la Commission a calculé la clé de répartition et fait application des deux ajustements de pondération lors du calcul des indicateurs de préjudice.

265 Dès lors, les données visées au point 244 ci-dessus, et notamment les indicateurs de préjudice mentionnés au point 251 ci-dessus, doivent être qualifiées de faits et de considérations essentiels qui fondent ou qui auraient dû fonder les règlements attaqués.

266 Il s’ensuit que la Commission a méconnu les droits de la défense des requérantes en ne leur communiquant aucune des données visées au point 244 ci-dessus.

267 Il convient encore de déterminer si l’irrégularité commise par la Commission est susceptible d’entraîner l’annulation des règlements attaqués en application de la jurisprudence citée aux points 242 et 243 ci-dessus.

268 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence du Tribunal, le fait de disposer des calculs détaillés effectués par la Commission et des données utilisées pour ces calculs est, de manière générale, de nature à permettre aux parties intéressées de fournir des observations plus utiles pour leur défense. En effet, elles peuvent alors vérifier précisément la manière dont la Commission a utilisé ces données et les comparer à leurs propres calculs, ce qui est de nature à leur permettre d’identifier d’éventuelles erreurs de la part de la Commission qui seraient autrement indétectables (arrêts du 30 juin 2016, Jinan Meide Casting/Conseil, T 424/13, EU:T:2016:378, point 208, et du 1er juin 2017, Changmao Biochemical Engineering/Conseil, T 442/12, EU:T:2017:372, point 156).

269 Or, en l’espèce, la Commission ne conteste pas sérieusement que, si elle avait communiqué aux requérantes les différentes données visées au point 244 ci-dessus, et notamment les indicateurs de préjudice mentionnés au point 251 ci-dessus, elles auraient bénéficié d’un gain substantiel d’information et auraient ainsi été mieux à même de contrôler la façon dont elle a calculé la clé de répartition et les indicateurs de préjudice, de sorte que les requérantes auraient, le cas échéant, pu présenter des observations plus pertinentes que celles qu’elles ont présentées.

270 Ce constat s’impose d’autant plus en ce qui concerne les indicateurs de préjudice, autres que la rentabilité, après révision de la pondération. En effet, il ne peut être exclu que ces indicateurs de préjudice révisés soient différents de ceux initialement calculés et reproduits dans les règlements attaqués (voir, en ce sens, point 232 ci-dessus).

271 Dans ces conditions, il ne peut être entièrement exclu que, en l’absence de l’irrégularité commise par la Commission, les parties auraient pu mieux assurer leur défense, de sorte que les règlements attaqués auraient pu être différents. Par conséquent, cette irrégularité est de nature à entraîner l’annulation de ces règlements, pour autant qu’ils sont contestés par des conclusions recevables.

272 Partant, la seconde branche des cinquièmes moyens est fondée et doit être accueillie.

273 Il s’ensuit que les griefs résumés aux points 211 à 213 ci-dessus sont de nature à conforter l’annulation des droits antidumping et compensateurs définitifs litigieux, telle qu’elle résulte déjà du second grief de la seconde branche des troisièmes moyens (voir point 207 ci-dessus).

3. Sur les autres moyens et griefs

274 Les requérantes invitent le Tribunal à statuer sur tous les moyens, même s’il devait estimer qu’un seul d’entre eux suffit à entraîner l’annulation des règlements attaqués. Elles expliquent que, en cas d’annulation fondée sur un seul moyen, la Commission pourrait remédier à l’illégalité constatée par le Tribunal et instituer de nouveaux droits antidumping et compensateurs définitifs, ce qui les forcerait à introduire de nouveaux recours en annulation afin que le Tribunal statue sur les autres moyens non examinés dans l’arrêt d’annulation. Dès lors, en vertu du principe de protection juridictionnelle effective, il serait judicieux que le Tribunal statue sur tous les moyens.

275 À cet égard, il convient de rappeler que le principe de protection juridictionnelle effective n’implique nullement que le Tribunal examine l’ensemble des moyens du recours, même s’il accueille l’un d’entre eux. En effet, conformément au principe de l’économie des moyens qui régit le contentieux de la légalité, lorsque le juge de l’Union décide d’accueillir un moyen et de prononcer l’annulation de l’acte attaqué, il n’est pas tenu d’examiner les autres moyens [voir arrêt du 20 septembre 2019, Jinan Meide Casting/Commission, T 650/17, EU:T:2019:644, point 135 (non publié) et jurisprudence citée ; conclusions de l’avocat général Léger dans l’affaire Acerinox/Commission, C 57/02 P, EU:C:2004:666, points 91 et 92].

276 Néanmoins, il appartient au juge de l’Union d’apprécier souverainement si, dans un souci de bonne administration de la justice, il y a lieu d’examiner l’ensemble des moyens et des griefs du recours [voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2019, Jinan Meide Casting/Commission, T 650/17, EU:T:2019:644, point 136 (non publié), et conclusions de l’avocat général Léger dans l’affaire Acerinox/Commission, C 57/02 P, EU:C:2004:666, point 93].

277 En l’espèce, le Tribunal estime que ni le principe de bonne administration de la justice ni le principe de protection juridictionnelle effective n’impliquent qu’il examine les autres moyens et griefs soulevés par les requérantes.

E. Conclusion

278 Il résulte de tout ce qui précède que :

– premièrement, le règlement antidumping définitif doit être annulé, en tant qu’il institue des droits antidumping définitifs sur les importations des produits fabriqués par les producteurs-exportateurs énumérés au point 28 ci-dessus, à l’exception de Zhongce Rubber Group ;

– deuxièmement, le règlement antisubventions doit être annulé, en tant qu’il institue des droits compensateurs définitifs sur les importations des produits fabriqués par les producteurs-exportateurs énumérés au point 28 ci-dessus ;

– troisièmement, le surplus des conclusions des recours doit être rejeté.

IV. Sur les dépens

279 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Aux termes de l’article 134, paragraphe 2, du même règlement, si plusieurs parties succombent, le Tribunal décide du partage des dépens.

280 Dans chacune des deux affaires, la Commission et l’intervenante ont succombé pour l’essentiel et les requérantes ont conclu à leur condamnation aux dépens. Dans ces conditions, il y a lieu, d’une part, de condamner la Commission à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par les requérantes, à l’exception de ceux afférents aux interventions, et, d’autre part, de condamner l’intervenante à supporter, outre ses propres dépens, ceux que les requérantes ont exposés en raison des interventions.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (dixième chambre élargie)

déclare et arrête :

1) Les affaires T 30/19 et T 72/19 sont jointes aux fins de l’arrêt.

2) Le règlement d’exécution (UE) 2018/1579 de la Commission, du 18 octobre 2018, instituant un droit antidumping définitif, portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations de certains pneumatiques neufs ou rechapés, en caoutchouc, du type utilisé pour les autobus ou camions, ayant un indice de charge supérieur à 121 et originaires de la République populaire de Chine, et abrogeant le règlement d’exécution (UE) 2018/163, est annulé, en tant qu’il institue des droits antidumping définitifs sur les importations des produits fabriqués par les producteurs-exportateurs suivants :

– Chaoyang Long March Tyre Co. Ltd ;

– Triangle Tyre Co. Ltd ;

– Shandong Wanda Boto Tyre Co. Ltd ;

– Qingdao Doublestar Tire Industrial Co. Ltd ;

– Ningxia Shenzhou Tire Co. Ltd ;

– Guizhou Tyre Co. Ltd ;

– Aeolus Tyre Co. Ltd ;

– Shandong Huasheng Rubber Co. Ltd ;

– Chongqing Hankook Tire Co. Ltd ;

– Prinx Chengshan (Shandong) Tire Co. Ltd ;

– Jiangsu Hankook Tire Co. Ltd ;

– Shandong Linglong Tire Co. Ltd ;

– Shandong Jinyu Tire Co., Ltd ;

– Sailun Jinyu Group Co. Ltd ;

– Shandong Kaixuan Rubber Co. Ltd ;

– Weifang Yuelong Rubber Co. Ltd ;

– Weifang Shunfuchang Rubber And Plastic Products Co. Ltd ;

– Shandong Hengyu Science & Technology Co. Ltd ;

– Jiangsu General Science Technology Co. Ltd ;

– Double Coin Group (Jiang Su) Tyre Co. Ltd ;

– Hefei Wanli Tire Co. Ltd ;

– Giti Tire (Anhui) Company Ltd ;

– Giti Tire (Fujian) Company Ltd ;

– Giti Tire (Hualin) Company Ltd ;

– Giti Tire (Yinchuan) Company Ltd ;

– Qingdao GRT Rubber Co. Ltd.

3) Le règlement d’exécution (UE) 2018/1690 de la Commission, du 9 novembre 2018, instituant un droit compensateur définitif sur les importations de certains pneumatiques neufs ou rechapés, en caoutchouc, du type utilisé pour les autobus ou camions, ayant un indice de charge supérieur à 121 et originaires de la République populaire de Chine et modifiant le règlement d’exécution 2018/1579, est annulé, en tant qu’il institue des droits compensateurs définitifs sur les importations des produits fabriqués par les producteurs-exportateurs énumérés au point 2 du dispositif du présent arrêt, d’une part, et par Zhongce Rubber Group Co., Ltd, d’autre part.

4) Le surplus des conclusions des recours est rejeté.

5) La Commission européenne est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par China Rubber Industry Association (CRIA) et China Chamber of Commerce of Metals, Minerals & Chemicals Importers & Exporters (CCCMC), à l’exception de ceux afférents aux interventions.

6) Marangoni SpA est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par CRIA et CCCMC en raison des interventions.