CA Dijon, 2e ch. civ., 21 avril 2022, n° 20/01038
DIJON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
Solocal (Sa)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Vautrain
Conseillers :
Mme Wachter, Mme Brugere
Avocats :
Me Minel-Pernel, Me Laurent
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Françoise VAUTRAIN, Présidente de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par acte en date du 19 février 2014 la société Pages Jaunes a fait citer Monsieur [D] [P] devant le tribunal de Grande instance de Chalon-sur-Saône afin de l'entendre condamner au visa des articles 1134, 1147 et 1153 du Code civil à lui payer la somme de 10 350,19 euros en principal avec intérêts de retard égal à 3 fois le taux de l'intérêt légal à compter du 4 juin 2013, 1552,52 euros au titre de la clause pénale, avec exécution provisoire outre 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de sa demande la société Pages Jaunes expose que Monsieur [P] a souscrit auprès d'elle selon bon de commande du 9 septembre 2011 une prestation consistant dans le référencement de son activité individuelle de menuisier charpentier dans l'annuaire imprimé Pages blanches et en ligne Pages Jaunes édition 2012 pour un montant de 10 271,25 euros TTC, et que le 22 mai 2012, un second bon de commande a été émis pour une prestation complémentaire d'un montant de 78,94 euros TTC ;
Qu'en exécution de ces prestations commandées elle a établi deux factures en date des 11 et 14 juin 2012 pour un montant total de 10 350,19 euros.
Qu'en dépit d'une mise en demeure délivrée par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 juin 2013, ces factures sont restées impayées.
Opposant à la société Pages Jaunes, l'exception d'inexécution en raison de prétendus manquements à l'obligation de délivrance conforme, de conseil et de renseignement, Monsieur [P] concluait au débouté de cette demande à titre principal et reconventionnellement à la condamnation de la société Pages Jaunes au paiement de 1000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de l'atteinte à son image commerciale, et 1000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de la perte de résultat.
A titre subsidiaire, il sollicitait la suppression à défaut la réduction dans de plus justes proportions du montant de la clause pénale et l'octroi de délais de paiement, en tout état de cause, il demandait la condamnation de la société Pages Jaunes à lui verser 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par un jugement rendu le 21 août 2015, le tribunal de Grande instance de Chalon-sur-Saône condamnait Monsieur [P] à payer à la société Pages Jaunes la somme de 10'350,19 euros avec intérêts au taux légal à compter du 4 juin 2013, date de la mise en demeure outre 1552,52 euros au titre de la clause pénale, avec exécution provisoire, autorisait Monsieur [P] à s'acquitter des sommes dues en 23 mensualités de 150 euros chacune, la 24e mensualité correspondant au solde de la créance en principal et intérêt, payable à compter du 10 de chaque mois, déboutait les parties de toutes leurs autres demandes, disait n'y avoir lieu application de l'article 700 du code de procédure civile et condamnait Monsieur [P] aux dépens dont distraction au profit de Me Bourg conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
En vue de relever appel de ce jugement, Monsieur [P] sollicitait le bénéfice de l'aide juridictionnelle 19 octobre 2015, qui lui était accordé partiellement à hauteur de 55 % par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 14 janvier 2016.
Saisi d'un recours contre cette admission partielle, le 1er président de la cour d'appel lui accordait le bénéfice de l'aide juridictionnelle à hauteur de 70 % par une décision du 10 mai 2016.
Entre temps, par déclaration reçue au greffe le 3 mars 2016, Monsieur [P] relevait appel du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Chalon sur Saône.
Par ordonnance rendue le 18 octobre 2016 le magistrat chargé de la mise en état, statuant à la requête de la société Pages Jaunes déclarait irrecevable comme tardif l'appel interjeté par Monsieur [D] [P], le jugement entrepris produisant son plein et entier effet, condamnait Monsieur [P] à payer à la société Pages Jaunes la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles et le déboutait de sa demande présentée à ce titre, en le condamnant aux dépens.
Cette décision déférée à la cour était confirmée par un arrêt du 12 septembre 2017 en toutes ses dispositions, les parties étaient déboutées de leurs prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et Monsieur [P] condamné aux entiers dépens du déféré.
La Cour de cassation statuant sur le pourvoi formé par Monsieur [P] contre l'arrêt rendu le 12 septembre 2017, a par un arrêt rendu le 2 juillet 2020 :
- cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 12 septembre 2017 entre les parties par la courd'appel de Dijon,
- dit n'y avoir lieu à renvoi,
infirmé l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 18 octobre 2016,
- déclaré recevable l'appel de Monsieur [P],
dit que l'instance d'appel se poursuivra devant la cour d'appel de Dijon,
dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande d'indemnité formée en application de l'article 700 du code de procédure civile devant la cour d'appel,
en application de l'article 700 du code de procédure civile rejetée la demande formée par la société Page Jauneset l'a condamne à payer à la société SCP Oetscheid la somme de 3000 euros.
Par déclaration datée du 8 septembre 2020 Monsieur [D] [P] a saisi la cour à nouveau aux fins d'enrôlement de l'affaire devant la 2e chambre civile.
Par ses dernières conclusions transmises par R PVA du 19 octobre 2020 Monsieur [P] demande à la cour :
- d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de Grande instance de Chalon-sur-Saône le 21 août 2015 en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
- de dire et juger qu'il est recevable et bien-fondé en son appel et en ses demandes fins et prétentions,
- de dire et juger que la société Solocal exerçant sous l'enseigne Pages Jaunes a manqué à son obligation de conseil, de renseignements et d'informations, ainsi qu'à son obligation de livrer une chose conforme,
- de dire et juger que cette société engage sa responsabilité contractuelle,
- de dire et juger qu'il est bien fondé à ne pas poursuivre l'exécution du contrat en vertu de l'exception d'inexécution,
en conséquence, à titre principal Monsieur [P] demande à la cour
- de prononcer la résolution du contrat le liant à la société Solocal en vertu l'exception d'inexécution,
- de condamner cette dernière à lui payer la somme de 4000 euros à titre de responsabilité précontractuelle et contractuelle se décomposant comme suit :
2000 euros au titre du manquement à l'obligation de conseil, renseignements et d'informations,
2000 euros au titre du manquement à son obligation de livrer une chose conforme,
de débouter la société Solocal de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions. À titre subsidiaire
- de dire et juger que la société Solocal sera déchue du droit aux intérêts et qu'il ne sera tenu que du remboursement du seul capital initialement prévu,
- d'écarter l'application de la clause pénale,
- de lui accorder les plus larges délais de paiement en jugeant qu'il payera les sommes à la société Solocal à compter de la décision à intervenir,
En tout état de cause,
- de débouter la société Solocal de l'intégralité de ses demandes et de ses demandes reconventionnelles,
- de condamner la société Solocal à lui payer la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Marion Maragna conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Par ses conclusions transmises par RPVA le 18 décembre 2020 la société Solocal demande à la cour :
- de rejeter les prétentions de Monsieur [D] [P],
- de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a accordé des délais de paiement à Monsieur [P],
y ajoutant,
- de condamner Monsieur [P] à lui payer la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure ainsi qu'aux dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 janvier 2022
SUR CE
Vu les dernières conclusions échangées par les parties auxquelles la cour se réfère vu les pièces.
Monsieur [D] [P] a commandé à la société Solocal une prestation de référencement de son activité de travaux de charpente ramonage isolation intérieure dans les pages jaunes et blanches de l'annuaire imprimé et en ligne.
Un premier bon de commande a été signé le 9 septembre 2011 pour un montant de 10271,25 euros et mentionne l'adresse suivante : [Adresse 7].
Un second bon de commande a été signé le 25 mai 2012 pour un montant de 78,94 euros pour l'édition 2013 de l'annuaire en ligne et mentionne l'adresse [Adresse 2].
Les deux factures émises respectivement les 11 et 14 juin 2012 pour des montants conforme aux bons de commande, comportent toutes les deux comme adresse [Adresse 7].
1) Monsieur [P] reproche en premier lieu à la société Solocal de ne pas l'avoir informé de son droit de rétraction. Cet argument est toutefois inopérant, car les dispositions relatives au droit de rétraction insérées dans le code de la consommation ne s'appliquent pas au contrat litigieux conclu entre une société et un exploitant à titre individuel à des fins professionnelles.
2) Monsieur [P] prétend que la société Solocal a manqué à son obligation de délivrance conforme en ce que la société Pages Jaunes s'est engagée à lui fournir une prestation de référencement sur son site Internet d'entreprise individuelle les compagnons du traitement des charpentes, ainsi qu'une prestation de création d'hébergement d'un site Internet, la page de publicité devant renvoyer à son site internet.
L'examen des bons de commande permet de retenir contrairement à ce qui est soutenu par Monsieur [P] qu'il a conclu uniquement pour que son activité soit référencée sur l'annuaire des pages jaunes, à charge pour lui de demander que le lien soit fait avec son site internet, ce dont il ne rapporte pas la preuve.
Monsieur [P] soutient par ailleurs que la société Solocal lui a adressé par courrier du 15 septembre 2011 le détail de son plan de communication et qu'après vérification de celui-ci et de sa page de publicité telle qu'elle s'affichait sur le site Internet, il a constaté de multiples problèmes, notamment le fait d'indiquer pour son exploitation une adresse inexacte, [Adresse 7] au lieu de [Adresse 2], [Localité 9] et en a informé sa responsable clientèle Madame [Z] ; que malgré cela il n'a obtenu aucune rectification des erreurs qu'il a fait constater par huissier les 11 septembre et 16 septembre 2014.
Il affirme que ces nombreux dysfonctionnements privent la page de publicité de tous ses effets.
Il convient de relever les deux courriers adressés par la société Solocal à Monsieur [P] datés des 15 septembre 2011 et 12 juin 2012 dont le premier juge fait état, par lesquels, la société Solocal transmettait le plan de communication et lui demandait de vérifier son contenu ne sont pas versés aux débats à hauteur d'appel.
Monsieur [P] prétend dans ses conclusions avoir signalé l’erreur portant sur l'adresse de son exploitation mais n'en rapporte pas la preuve.
En tout état de cause, l'activité de Monsieur [P] est inscrite au répertoire de métiers à l'adresse suivante : [Adresse 7]. Cette adresse est bien celle qui figure sur l'un des deux bons de commande, signé sans réserve par Monsieur
[P] et sur les deux factures, ainsi que sur les annonces publicitaires. Monsieur [P] n'est donc pas fondé à reprocher à la société Solocal de ne pas avoir fait figurer sur celles-ci une adresse autre que celle correspondant au siège officiel de son activité.
Par ailleurs, Monsieur [P] ne verse aux débats aucune pièce de nature à établir que l'absence d'indication de la rue [Adresse 2] ou la localisation de l'exploitation 'rue chaude' sur le plan a eu un quelconque impact sur le niveau de son activité et serait à l'origine d'une perte de clientèle, le premier juge faisant ressortir justement que l'exploitation pouvait être contactée au moyen des références téléphoniques reproduites sans erreur sur l'annonce publicitaire.
3) Monsieur [P] soutient que le commercial de la société Solocal ne l'a à aucun moment informé de l'utilité pour lui développer cette visibilité sur Internet et lui a vendu des prestations pour un coût de 10 350,19 euros sans rapport avec la taille de son exploitation laquelle générait un faible chiffre d'affaires et en cela manqué à son obligation de conseil.
La fixation du prix de la prestation relève de la liberté de négociation des parties. En l'espèce, la grille tarifaire a été portée à la connaissance de Monsieur [P] lorsqu'il a signé les bons de commande qui détaillent les prestations fournies, de telle sorte qu’il disposait de tous les éléments lui permettant, en tant que professionnel, d'apprécier la charge financière que représentait son engagement par rapport au chiffre d’affaires généré par son activité, la société Solocal n'étant dès lors tenue d'aucune obligation de conseil sur ce point. En outre, Monsieur [P] ne démontre pas que le prix fixé ne correspond pas à la valeur de la prestation commandée.
Monsieur [P] ajoute que la société Solocal ne l'a pas non plus informé du champ d'application du référencement souscrit, et s'étonne que son entreprise soit référencée dans plus de 3 départements et plus de 18 communes. Il considère en cela que la société Solocal a manqué à son obligation de renseignement.
Le contrat de communication signé par Monsieur [P] était destiné à favoriser l'accroissement de son activité par l'insertion ou la mise en ligne d'encarts publicitaires. Monsieur [P] ne démontre pas en quoi la diffusion des encarts publicitaires qui, en l'espèce permettaient d'identifier clairement l'entreprise, élargie à des secteurs géographiques limitrophes comme [Localité 6], [Localité 4] ou [Localité 8] serait de nature à caractériser un manquement de la société Solocal à son obligation de renseignement, étant relevé en outre qu'il ne justifie d'aucun préjudice résultant de ce choix de diffusion.
Monsieur [P] fait enfin grief à la société Solocal de ne pas l'avoir informé du fonctionnement du référencement de son entreprise sur le site des pages jaunes et d'avoir inséré des photographies sans lien avec son activité, concernant d'autres commerces.
Il ne démontre pas que cette stratégie éditoriale a pu entraîner une confusion dans l'esprit de ses clients potentiels dans la mesure où les photographies concernent des entreprises qui interviennent dans un secteur d'activité différent et ne sont donc pas concurrentes. Par ailleurs, elles ne sont pas de nature à porter atteinte à l'image du commerce de Monsieur [P].
Ainsi, il ressort de ces éléments analysés dans leur ensemble que Monsieur [P] ne rapporte pas la preuve de manquements de la société Solocal à son obligation de délivrance conforme, ou à son obligation de conseil ou de
renseignement de nature à justifier la résolution des deux contrats litigieux.
Par conséquent le jugement mérite d'être confirmé en ce qu'il a condamné Monsieur [P] à payer à la société Solocal une somme de 10350,19 euros avec intérêt au taux légal à compter du 4 juin 2013 et l'a débouté de ses demandes reconventionnelles.
Les conditions générales du contrat acceptées par Monsieur [P] stipulent qu'une clause pénale de 15 % s'applique en cas d'impayés.
Aucun élément ne permet de considérer que cette clause est manifestement excessive, de sorte que le premier juge a à bon droit condamné Monsieur [P] au paiement de la somme de 1552,52 euros à ce titre.
La situation économique de Monsieur [P] commande de lui accorder la faculté de régler les sommes mises à sa charge en 24 mensualités dans les conditions prévues par le premier juge et de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Chalon sur Saône le 21 août 2015 en toutes ses dispositions
Déboute la société Solocal de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Monsieur [P] aux dépens de la procédure d'appel.
Le Greffier, Le Président.