Cass. com., 6 novembre 1990, n° 88-15.927
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Defontaine
Rapporteur :
M. Le Tallec
Avocat général :
M. Jéol
Avocats :
Me Barbey, Me Boullez
Sur le moyen unique, pris en ses diverses branches :
Attendu que selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 27 avril 1988) M. X a demandé la condamnation de la société Metraplan au paiement du solde d'un compte crédité par cette société par des redevances qu'il estimait dues en contrepartie de la cession d'un brevet d'invention ;
Attendu que la société Metraplan fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande après avoir refusé de surseoir à statuer dans l'attente du règlement de l'action en nullité du brevet introduite devant le Tribunal compétent et de n'avoir pas constaté la nullité de la cession de ce brevet pour fraude alors que selon le pourvoi, d'une part, la compétence exclusive du Tribunal saisi de l'action en nullité du brevet interdisait à la cour d'appel de condamner le cessionnaire à en verser le prix sans attendre l'issue de l'action en nullité ; que la cour d'appel a violé l'article 68 de la loi du 2 janvier 1968, alors que, d'autre part, le simple fait qu'une partie ait participé à une opération fictive ou entachée de fraude ne lui interdit pas d'en poursuivre la nullité, sauf dans le cas où peut jouer la règle nemo auditur dont les conditions d'application n'étaient pas réunies en l'espèce ; que la cour d'appel a donc violé les articles 6 et 1133 du Code civil ainsi que le principe fraus omnia corrumpit ; alors, qu'en outre, l'arrêt rendu en matière pénale le 23 mai 1985 fondait expressément sa décision sur la constatation que la validité du contrat de cession n'avait " jamais été contestée en justice " ; que cet arrêt n'avait donc pas eu à apprécier la validité du contrat ni à plus forte raison du brevet lui-même, de sorte que l'autorité qui lui était attachée ne faisait obstacle ni à l'action en nullité du brevet, ni à l'action en nullité de la cession ; que la cour d'appel a ainsi violé par fausse application le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal, et alors qu'enfin, à supposer que cet arrêt du 23 mai 1985 ait dû être pris en compte, il devait l'être totalement ; qu'il énonce " qu'il est établi qu'X a fait abandon de sa créance qui, par compensation, a financé une augmentation de capital, cette opération ayant donné lieu à émission d'actions au porteur " ; qu'ainsi si l'on admet que l'existence de la créance résulte de l'arrêt, il en résulte également la constatation de son extinction ; que la cour d'appel ne pouvait donc condamner la société Metraplan à son paiement sans méconnaître le principe de l'autorité au civil de la chose jugée au pénal ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que le contrat avait été exécuté pendant des années et en énonçant que la société Metraplan avait elle-même participé à l'opération dans laquelle M. X n'avait été qu'un prête-nom, qu'elle en avait " bénéficié largement " et avoir retenu que cette société était " donc malvenue à invoquer la nullité de la cession ", la cour d'appel, a, par ces seuls motifs, justifié légalement sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.