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Décisions

CA Paris, ch. 2, 21 janvier 2022, n° 21/02180

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

FRANCE AUTOPARTAGE (Sa)

Défendeur :

CAR SHARING AND MOBILITY SERVICES FRANCE (Sas)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme CHOKRON

Conseillers :

Mme LEHMANN, Mme MARCADE

TGI de Paris, du 14 janv. 2021, n° n°20/…

14 janvier 2021

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Brigitte CHOKRON, Présidente, et par Mme Véronique COUVET, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu l'ordonnance de référé rendue le 14 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Paris.

Vu l'appel interjeté le 2 février 2021 par la société France Autopartage.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 20 octobre 2021 par la société France Autopartage, appelante.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 13 octobre 2021 par la société Car Sharing And Mobility Services France, intimée.

Vu l'ordonnance de clôture du 4 novembre 2021.

SUR CE, LA COUR,

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

La société Auto'trement, créée en 1999 à l'origine sous la forme d'une association par des habitants de Strasbourg, met des véhicules à la disposition de ses abonnés.

Cette société a déposé la marque verbale française « citiZ » le 27 novembre 2008, cédée à la société France Autopartage le 6 septembre 2013.

La marque « citiZ » n'est plus en vigueur faute de renouvellement.

La société anonyme coopérative France Autopartage, ayant son siège à Strasbourg, offre un service de location de véhicules en libre service 24 h / 24 au moyen d'un service de réservation en ligne, qu'elle exploite et développe sous le nom de CITIZ.

Elle revendique un réseau de 1500 véhicules, disponibles dans 300 stations, réparties dans 130 villes françaises. Elle est en particulier implantée à Montreuil (93) depuis le mois de mars 2020.

La sociéte France Autopartage est la titulaire inscrite des marques françaises suivantes :

- la marque verbale « Je n'ai plus de voiture, j'ai Citiz! », déposée le 3 février 2016 sous le n°4246022 en classes 12 et 39, désignant notamment les véhicules et la location de véhicules ;

- la marque verbale « J'ai changé pour une Citiz », déposée le 3 février 2016 sous le n°4246030 pour désigner en classes 12 et 39, notamment les véhicules et la location de véhicules ;

- la marque verbale « Citiz, la liberté au bout de la rue », déposée le 3 février 2016 sous le n°4246038 pour désigner en classes 12 et 39, notamment les véhicules et la location de véhicules ;

- la marque verbale « CITIZ » déposée le 23 décembre 2019 sous le n°4609920 pour désigner en classes 9, 12, 35 et 39, notamment les logiciels de gestion de flottes de véhicules, les véhicules, la réservation pour le transport à bord de véhicules en autopartage.

La société Car Sharing And Mobility Services France, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre le 5 mars 2020, a pour associé unique la société de droit espagnol Car Sharing And Mobility Services SL, qui est elle-même une entreprise jointe (joint-venture) entre le constructeur automobile français Renault et le groupe espagnol Ferrovial, spécialisé notamment dans la gestion des infrastructures de transport.

La société Car Sharing And Mobility Services SL a lancé à Madrid en 2017 le service d'autopartage dénommé ZITY, qu'elle présente comme la contraction de ZOÉ, du nom du véhicule électrique commercialisé par la société RENAULT et principalement utilisé pour ce service, et de CITY.

Sous le signe ZITY, la société Car Sharing And Mobility Services SL propose un service de véhicules en flotte libre (free floating) qui dispense l'utilisateur de ramener le véhicule loué à une borne.

La société Car Sharing And Mobility Services France a mis en place le même service à Paris, Clichy, et Boulogne le 22 mai 2020, déployant une flotte de 500 véhicules.

La société de droit espagnol Car Sharing And Mobility Services SL est la titulaire inscrite des marques de l'Union européenne suivantes :

- marque semi-figurative déposée le 24 octobre 2018 sous le n°17972538 pour désigner en classes 9, 39 et 42, notamment les logiciels pour location de véhicules et la location de véhicules ;

- marque semi-figurative déposée le 24 octobre 2018 sous le n° 17972539 pour désigner en classes 9, 39 et 42, notamment les logiciels pour location de véhicules et la location de véhicules ;

- marque semi-figurative déposée le 6 mars 2020 sous le n° 18206157 pour désigner en classes 9, 39 et 42, notamment les logiciels pour location de véhicules et la location de véhicules.

Estimant que le signe ZITY, sous lequel est exploité le service de la société Car Sharing And Mobility Services France, portait atteinte à ses marques et créait un risque de confusion dans l'esprit du public, la société France Autopartage a, par une lettre du 16 mars 2020, mis en demeure cette société de cesser tout usage de ce signe.

Cette mise en demeure, renouvelée le 12 mai 2020, étant restée vaine, la société France Autopartage a, par acte du 25 août 2020, fait assigner en référé la société Car Sharing And Mobility Services France devant le délégataire du président du tribunal judiciaire de Paris, afin d'obtenir qu'il lui soit fait interdiction d'utiliser le signe ZITY et l'allocation de sommes provisionnelles.

L'ordonnance entreprise a :

- dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes ;

- condamné la société France Autopartage aux dépens ;

- condamné la société France Autopartage à payer à la société Car Sharing And Mobility Services France la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société France Autopartage a relevé appel de ladite ordonnance et par ses dernières conclusions sollicite de la cour de :

- infirmer l'ordonnance de référé du 14 janvier 2021 en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

- juger qu'elle a qualité pour agir en contrefaçon ;

- juger qu'elle apporte des éléments de preuve rendant vraisemblable qu'il est porté atteinte à ses droits et qu'une telle atteinte est imminente ;

- juger que l'existence de son préjudice n'est pas sérieusement contestable ;

- juger l'existence d'un trouble manifestement illicite ;

- juger vraisemblable la contrefaçon des marques verbales française n°4609920, n°4246030, n° 4246038 et n° 4246022 dont elle est titulaire ;

- juger la société Car Sharing And Mobility Services France seule responsable des agissements retenus au titre de la contrefaçon ;

En conséquence,

- ordonner la cessation immédiate de l'usage, sous quelque support que ce soit, physique ou immatériel par la société Car Sharing And Mobility Services France des signes ZITY ou tout autre signe imitant sa marque sous astreinte de 5.000 euros par infraction constatée après l'expiration d'un délai de 24 heures suivant la signification de la décision à intervenir ;

À titre principal

- condamner la société Car Sharing And Mobility Services France à lui verser la somme de 150.000 euros à titre de provision du fait des actes de contrefaçon de marque ;

- condamner la société Car Sharing And Mobility Services France à lui verser la somme de 20.000 euros à titre de provision pour son préjudice moral, du fait des actes de contrefaçon de marque ;

- constater que la société Car Sharing And Mobility Services France a commis des actes de concurrence déloyale à son préjudice ;

- condamner la société Car Sharing And Mobility Services France à lui verser la somme de 150.000 euros de dommages- intérêts à titre de provision du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire ;

- rejeter l'intégralité des demandes, fins et prétentions de la société Car Sharing And Mobility Services France ;

À titre subsidiaire

- ordonner que soit diligentée une expertise comptable afin de fixer le montant des dommages et intérêts dus par la société Car Sharing And Mobility Services France ;

En tout état de cause

- condamner la société Car Sharing And Mobility Services France à supporter le coût de la publication de la décision à intervenir dans 3 journaux ou magazines de son choix ;

- condamner la société Car Sharing And Mobility Services France à lui verser la somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions, la société Car Sharing And Mobility Services France demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

- débouter la société France Autopartage de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la société France Autopartage à lui verser la somme de 30.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société France Autopartage aux entiers dépens.

Sur l'atteinte vraisemblable à la marque

Selon les dispositions de l'article L 716-4-6, premier alinéa, du code de la propriété intellectuelle, Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l'encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d'actes argués de contrefaçon . Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu'il est porté atteinte à ses droits ou qu'une telle atteinte est imminente.

La société France Autopartage critique l'ordonnance de référé entreprise qui n'a pas acceuilli ses demandes et maintient l'ensemble des moyens développés devant la juridiction des référés sauf à invoquer en cause d'appel, non plus la renommée de sa marque antérieure CITIZ, mais le bénéfice de la protection de la marque notoire non enregistrée en application des dispositions de l'article 6 bis de la Convention d'Union de Paris, la marque française verbale CITIZ déposée le 27 novembre 2008 pour désigner des produits et services relevant des classes 12 et 39 n'ayant pas été renouvelée et ayant été à nouveau déposée le 23 décembre 2019. Elle considère que le signe CITIZ jouissait avant son dépôt en 2019 d'une protection depuis au moins 2013 de par sa notoriété, renforcée depuis 2016 par les dépôts des signes dont l'élément dominant et distinctif est CITIZ.

Elle reproche à la société Car Sharing and Mobility services France d'exploiter sur le territoire français pour désigner des services d'autopartage, depuis le mois de mai 2020, la marque semi figurative de l'Union européenne n° 18206151 :

dont la société de droit espagnol Car Sharing and Mobility services SL est titulaire pour l'avoir déposée le 6 mars 2020.

Selon les dispositions de l'article L 713-5 du code de la propriété intellectuelle issues de l'ordonnance 2019-1169 du 13 novembre 2019 applicables en l'espèce, l'atteinte à la marque notoire non enregistrée étant reprochée à compter du mois de mai 2020, l'usage dans la vie des affaires, pour des produits et services, non autorisé par le titulaire d'une marque notoirement connue au sens de l'article 6 bis de la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle ne constitue pas une contrefaçon mais engage la responsabilité civile de son auteur.

En outre, pour justifier de la notoriété de la marque CITIZ et, partant, du bénéfice de la protection de la marque notoire non enregistrée entre le terme du premier dépôt de la marque verbale CITIZ intervenu le 27 novembre 2018 et le nouveau dépôt de cette marque effectué le 23 décembre 2019, la société France Autopartage fournit au débat un extrait du site internet Wikipédia traitant du réseau coopératif CITIZ, trois articles de presse dont l'un n'est pas daté et les deux autres publiés en 2019 et 2020 (pièces 8 à 11 France Autopartage), un document traitant de la visibilité de la marque CITIZ depuis sa création (2013-2020) apparemment établi par l'appelante (pièce 54 France Autopartage), une étude de notoriété fondée sur une enquête en ligne du 6 au 9 novembre 2019 auprès de 1 000 habitants de Lyon, Villeurbanne et des communes de la 1ère couronne (pièce 55 France Autopartage), aucun renseignement sur l'auteur de cette étude n'apparaissant du document fourni au débat, et une attestation de son expert-comptable du 30 novembre 2020 témoignant qu'a été engagé sur les années 2013 à 2019 un volume de dépenses pour le développement de la marque CITIZ de 881.850 euros.

Ces éléments sont insuffisants à démontrer que la marque CITIZ est connue d'une large fraction du public, les quelques articles produits évoquant l'implantation historique du service d'autopartage dans la ville de Strasbourg ou son arrivée récente dans la ville d'Angers, l'étude de notoriété se cantonnant à la ville de Lyon et son agglomération et la somme des investissements financiers dans le développement de la marque sur 6 ans ne témoignant pas des retombées de ceux-ci sur la connaissance de la marque parmi le public concerné.

La société France Autopartage ne peut donc invoquer la protection de la marque CITIZ sur le fondement de l'article 6 bis de la Convention de Paris pour fonder ses demandes en référé d'interdiction et d'allocation de sommes provisionnelles, faute de démonstration de la notoriété de cette dernière, l'usage sans autorisation d'une marque notoire non enregistrée ne constituant par ailleurs, pas une contrefaçon de marque et ne relevant donc pas des dispositions de l'article L 716-4-6 du code de la propriété intellectuelle.

La société France Autopartage invoque également à l'appui de ses demandes au titre de la contrefaçon de marque, un ensemble de marques dont la marque verbale française « CITIZ » déposée le 23 décembre 2019 sous le n°4609920 pour désigner en classes 9, 12, 35 et 39, notamment les logiciels de gestion de flottes de véhicules, les véhicules et la réservation pour le transport à bord de véhicules en autopartage.

Cette marque est antérieure à la marque semi-figurative « ZITY » déposée le 6 mars 2020 sous le n°18206157 pour désigner en classes 9, 39 et 42, notamment les logiciels pour location de véhicules et la location de véhicule, réservation pour le transport à bord de véhicules en autopartage, dont l'usage est reproché à la société intimée.

La société Car Sharing And Mobility Services France se prévaut en vain pour considérer que l'usage du signe ZITY n'est pas contrefaisant, des deux marques complexes de l'Union européenne ZITY, ci-avant reproduites, déposées antérieurement à la marque verbale CITIZ n°4609920 , l'intimée n'étant pas titulaire de ces marques de l'Union européenne déposées par la société de droit espagnol Car Sharing And Mobility Services SL et n'étant pas recevable à les opposer.

Il ressort des éléments fournis au débat que la société Car Sharing and Mobility services France utilise depuis 2020 le signe ZITY ci-dessus reproduit sur des véhicules électriques qu'elle offre en location au moyen d'une application dédiée dans le cadre d'un service d'autopartage.

Ces services entrent dans la catégorie des services de location de véhicules et de réservation pour le transport à bord de véhicules en autopartage revendiqués dans la marque antérieure, la circonstance que les services offerts aux conducteurs par l'appelante et l'intimée diffèrent par les modalités de restitution du véhicule, à une borne dédiée pour l'appelante, restitution en tout lieu ou 'free floating' pour l'intimée, est indifférente.

Les services doivent en conséquence être considérés comme identiques.

Les signes en présence CITIZ, pour la marque antérieure, ZITY, pour la marque dont l'usage est jugé contrefaisant, n'étant pas identiques, il convient de rechercher s'il existe entre les signes en présence un risque de confusion, incluant le risque d'association, qui doit être apprécié globalement à la lumière de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce. Cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par les marques en tenant compte notamment des éléments distinctifs de celles-ci.

Le public pertinent à prendre en considération au regard du service d'autopartage offert sous les deux marques en présence, services spécifiques destinés à être principalement proposés dans les agglomérations, n'est pas un public de spécialistes mais le grand public à la recherche d'un service spécifique et donc raisonnablement attentif.

Ces signes ont en commun, sur le plan visuel, d'être composés d'un seul mot court composé de cinq lettres pour le signe antérieur et 4 pour le signe contesté, les lettres I et T occupant la deuxième et troisième position de chaque mot, et sur le plan phonétique, d'être constitués de deux syllabes, comportant chacune le son I, la seconde débutant par le son T.

Néanmoins, à la différence du signe antérieur, le signe ZITY a pour particularité de comporter en attaque la lettre Z, peu usitée, qui lui confère un aspect et une prononciatiton particulière, et de se terminer par la lettre Y, également peu usuelle, qui lui donne une sonorité différente de la marque antérieure qui se termine par le son Z, ces différences étant d'autant plus perceptibles que les signes en présence sont constitués de termes courts. En outre, conceptuellement, la marque contestée ne reprend pas l'évocation évidente de la marque antérieure qui fait directement référence au caractère urbain des services offerts, cette signification ne venant pas directement à l'esprit s'agissant du signe contesté.

Aussi, il ne ressort pas avec l'évidence requise en référé, que les ressemblances visuelles et phonétiques précédemment relevées sont suffisantes à caractériser un risque de confusion ou d'association dans l'esprit du public entre les signes en présence, ce malgré l'identité des services en cause. A cet égard, à supposer démontrée que l'identité visuelle des véhicules de la société France Autopartage est reprise par ceux de la société intimée de sorte que certaines personnes attribuent à l'appelante des véhicules de l'intimée, cette circonstance est totalement inopérante à caractériser l'atteinte vraissemblable à la marque CITIZ, l'identité visuelle des véhicules n'étant pas protégée à titre de marque.

Le raisonnement qui précède vaut également pour les marques déposées le 3 février 2016, « Je n'ai plus de voiture, j'ai Citiz ! », « J'ai changé pour une Citiz », « Citiz, la liberté au bout de la rue », dont est également titulaire l'appelante.

L'atteinte portée à la marque antérieure CITIZ n'étant pas vraisemblable, c'est à raison que le premier juge, statuant en référé, n'a pas accueilli les demandes de la société France Autopartage fondées sur la contrefaçon de marques.

L'ordonnance entreprise sera confirmée de ce chef.

Sur les actes de concurrence déloyal et parasitaire.

La société France Autopartage invoque à nouveau bénéficier de la protection des marques notoires non enregistrées de l'article 6 bis de la Convention de Paris et les dispositions de l'article L 713-5 du code de la propriété intellectuelle précitées.

Néanmoins, ainsi qu'il a été précédemment relevé, la notoriété de la marque CITIZ n'est nullement établie par les pièces fournies au débat et la société France Autopartage ne caractérise pas que l'usage du terme ZITY par la société intimée constitue à ce titre un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser.

La société appelante reproche également à la société Car Sharing and Mobility Services France de reprendre les caractéristiques de sa flotte de véhicules soit une voiture bicolore, blanche au toit de couleur verte, avec un logo présent sur la portière avant rédigé en lettres sombres, ce sur plusieurs modèles de véhicules dont des Renault Zoé alors que les autres entités partageant le marché de l'autopartage ont choisi des identités visuelles totalement différentes, ce qui caractérise un comportement déloyal et parasitaire de la part de l'intimée. Elle ajoute que le code couleur qu'elle utilise sur ses véhicules est repris sur chaque document contractuel et sur les pages du site internet zity.com.

Le principe de la liberté du commerce implique qu'un produit qui n'est pas l'objet de droits privatifs peut être librement reproduit et commercialisé à moindre prix à moins que la reproduction ou l'imitation du produit ait pour objet ou pour effet de créer un risque de confusion entre les produits dans l'esprit du public, comportement déloyal constitutif d'une faute au sens de l'article 1240 du code civil.

Le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.

La différence entre les services offerts par chacune des parties, autopartage en boucle pour l'appelante, et service de flotte libre pour l'intimée, est indifférent pour écarter tout comportement fautif de la part de la société Car Sharing and Mobility Services France, les actes de concurrence déloyale pouvant être caractérisés en l'absence d'une situation de concurrence entre les parties.

Néanmoins, l'utilisation d'un véhicule de couleur blanche dont l'intimée démontre que cette couleur neutre est couramment utilisée dans le domaine de l'autopartage et constitue la couleur privilégiée des conducteurs, la présence d'un toit coloré, étant relevé que les véhicules de l'intimée ne reprennent pas le toit de couleur bleue turquoise caractéristique des véhicules de l'appelante, mais utilisent une couleur verte, synonyme de respect de l'environnement, répartie sur tout le haut du véhicule (toit, montants autour du pare-brise, haut du capot et rétroviseurs), ou le flocage des portes avant avec le nom du service écrit de couleur sombre étant constaté que le nom de CITIZ est écrit en plus petit et accompagné d'un logo de couleur bleue représentant le signe usuel de repère sur une carte, ne caractérisent nullement avec l'évidence requise en référé des actes fautifs constitutifs de concurrence déloyale en l'absence de recherche d'un risque de confusion avec les services offerts par la société France Autopartage, les attestations versées au débat rapportant en majorité des propos de tiers étant à cet égard insuffisantes. De même, les quelques signes de couleur bleue apparaissant sur le site internert de l'intimée ne caractérisent pas plus des agissements déloyaux.

Enfin, si le réseau coopératif France Autopartage rejoint par l'associaiton Auto'trement en 2002 apparaît être un pionnier de l'autopartage, il ressort de ce qui précède que la notoriété du service CITIZ n'est pas démontrée et il n'est pas plus établi que la société intimée a voulu profiter des investissements de l'appelante en reprenant son identité visuelle alors que la société Car Sharing and Mobility Services France n'a fait que décliner les présentations des véhicules de son partenaire espagnol qui ont fait leur preuve à Madrid.

Aucun trouble manifestement illicite n'étant caractérisé, c'est à raison que le premier juge n'a pas accueilli les demandes de la société France Autopartage au titre de la concurrence déloyale et parasitaire.

L'ordonnance sera également confirmée de ce chef.

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer les dispositions de l'ordonnance concernant les dépens et les frais irrépétibles

Partie perdante, la société France Autopartage est condamnée aux dépens d'appel et à payer à la société Car Sharing and Mobility Services France, en application de l'article 700 du code de procédure civile, une indemnité complémentaire qui sera, en équité, fixée à la somme de 5.000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme l'ordonnance de référé entreprise en toutes ses dispositions,

Condamne la société France Autopartage à payer à la société Car Sharing and Mobility Services France la somme de 5 000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société France Autopartage aux dépens d'appel.