Cass. com., 17 septembre 2013, n° 12-18.293
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Avocats :
SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP de Chaisemartin et Courjon
Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu en matière des référés, que, le 25 mai 1994, les consorts X..., venant aux droits de Jeanne Y..., décédée, ont donné à bail à M. Z..., avocat, un local ; que, le 3 juin 2009, les consorts X... lui ont fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire contenue dans le bail, au titre d'un arriéré de loyers impayés à concurrence de 3 297,14 euros et de 329,71 euros au titre de la clause pénale ; que, les 16 juin et 25 août 2009, M. Z..., avocat démissionnaire à la retraite à compter du 30 juin 2008, a été mis en redressement puis liquidation judiciaires, la société Mauras-Jouin étant désignée liquidateur (le liquidateur) que, le 17 septembre 2009, le liquidateur a informé les consorts X... de sa décision de procéder à la résiliation du bail ; que, le 13 octobre 2009, ces derniers ont assigné en référé M. Z... et le liquidateur en constat de la résiliation du bail, en expulsion du débiteur et condamnation in solidum à leur payer à titre provisionnel une indemnité d'occupation mensuelle ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée in solidum avec M. Z... à payer à titre provisionnel aux consorts X... une indemnité d'occupation mensuelle d'un montant de 1 031,28 euros du 17 septembre 2009 jusqu'à la complète libération des lieux et la remise des clés, et une somme de 9 485,83 euros, alors, selon le moyen que la nécessité de déclarer une créance au passif du débiteur en procédure collective constitue une contestation sérieuse faisant obstacle à la condamnation au paiement d'une provision à ce titre ; que le liquidateur judiciaire contestait le droit à paiement préférentiel de la créance d'indemnité d'occupation résultant du maintien dans les lieux du débiteur après la résiliation du bail par le mandataire judiciaire le 17 septembre 2009, en faisant valoir qu'elle n'était pas née pour les besoins du déroulement de la procédure ou le maintien provisoire de l'activité, laquelle avait cessé le 30 juin 2008 quand M. Z... avait fait valoir ses droits à la retraite et démissionné du barreau, et qui n'avait en toute hypothèse pas été autorisée, ceci d'autant moins que M. Z... a été sanctionné pour exercice illégal de sa profession ; qu'en se bornant à relever que cette créance du bailleur est née régulièrement en contrepartie d'une prestation fournie à M. Jacques Z..., telle que l'utilisation du local professionnel, sans préciser en quoi cette prestation aurait été fournie pour les besoins ou pendant le maintien autorisé de l'activité professionnelle du débiteur, de sorte que l'obligation du liquidateur de régler l'indemnité d'occupation malgré la procédure collective du débiteur ne serait pas sérieusement contestable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 809 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 641-13 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 ;
Mais attendu qu'ayant relevé que, même si le fait générateur de l'indemnité était l'occupation sans droit ni titre des locaux par M. Z..., elle trouvait son fondement juridique dans la décision judiciaire qui l'avait condamné à la payer en contrepartie d'une occupation des lieux pour laquelle une décision d'expulsion avait été ordonnée, tandis que le liquidateur avait fait savoir par courrier du 17 septembre 2009 adressé aux consorts X... sa décision de résilier le bail du 25 mai 1994 dont elle n'entendait pas en poursuivre le cours, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ; que le moyen, pris en sa première branche, n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 809, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt condamne in solidum le liquidateur et M. Z... à payer aux consorts X..., à titre provisionnel, une indemnité d'occupation mensuelle d'un montant de 1 031,28 euros du 17 septembre 2009 jusqu'à la complète libération des lieux et la remise des clés, ainsi qu'à titre complémentaire à leur payer la somme de 9 485,83 euros correspondant au montant de l'indemnité d'occupation due à compter du 17 septembre 2009 jusqu'à la remise effective des clefs le 9 mars 2010 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le montant de la provision allouée en référé n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée, la cour d'appel, en octroyant une indemnité complémentaire, a excédé ces pouvoirs et violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt fixe à la somme de 1 031,28 euros l'indemnité d'occupation mensuelle du 17 septembre 2009 jusqu'à la complète libération des lieux, tandis qu'il arrête en complément à la somme de 9 485,83 euros le montant de l'indemnité d'occupation due à compter du 17 septembre 2009 jusqu'à la remise effective des clés le 9 mars 2010 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, par des motifs contradictoires, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevable l'appel diligenté par la société Mauras-Jouin, ès qualités, l'arrêt rendu le 24 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur les autres points la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée.