Décisions
Cass. crim., 20 juin 1973, n° 72-92.270
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Costa CDFF
Rapporteur :
M. Pucheus
Avocat général :
M. Aymond
Avocats :
Me Goutet, Me Lemaitre
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
REJET ET AMNISTIE SUR LES POURVOIS DE :
X... (ROBERT) ;
DE Y... (ANDRE), CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, 11E CHAMBRE, DU 13 JUIN 1972 QUI, POUR REVELATION DE SECRETS DE FABRIQUE ET COMPLICITE, LES A CONDAMNES CHACUN A 800 FRANCS D'AMENDE ET, SOLIDAIREMENT, A DES DOMMAGES-INTERETS ENVERS LA SOCIETE ULMIC, PARTIE CIVILE. LA COUR, VU LA CONNEXITE,JOIGNANT LES POURVOIS ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS ;
SUR LE MOYEN DE CASSATION COMMUN AUX DEUX DEMANDEURS, PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 418 DU CODE PENAL, ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, ARTICLE 102 DU DECRET DU 20 JUILLET 1972 POUR DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE, TOUT EN CONSTATANT QUE LES DISPOSITIFS LITIGIEUX AVAIENT ETE COMMUNIQUES A LA FIRME DIETZE ET A TROIS AUTRES FIRMES ETRANGERES CLIENTES DE CETTE FIRME, A DECLARE QUE CES DISPOSITIFS AVAIENT ETE TENUS SECRETS PAR ULMIC ;
" ALORS QUE LA CONNAISSANCE DES DISPOSITIFS DONNES A LA FIRME DIETZE, DONT L'ARRET NE DIT PAS QU'ELLE ETAIT TENUE AU SECRET, ET PAR DIETZE A TROIS SOCIETES ETRANGERES SES CLIENTES, QUI N'AVAIENT AUCUN LIEN AVEC ULMIC ET QUI N'ETAIENT PAS DAVANTAGE TENUS AU SECRET, IMPLIQUAIT QUE CES DISPOSITIFS AVAIT ETE DIVULGES ;
" ET ALORS QUE L'EXPERTISE A LAQUELLE L'ARRET SE REFERE CONFIRMAIT L'ABSENCE DE TOUTES PRECAUTIONS ET DE TOUTES CONSIGNES DE SECRET ;
" ET EN CE QUE L'ARRET AFFIRME QUE C'EST VOLONTAIREMENT ET EN CONNAISSANCE DE CAUSE QUE X... A COMMUNIQUE LES SECRETS DE FABRICATION A CACERMET ;
" ALORS QUE L'ABSENCE DE SECRET QUI RESSORT DES CONSTATATIONS DE L'ARRET EST EXCLUSIVE DE TOUTE INTENTION COUPABLE ;
" ET ALORS QUE, D'AILLEURS, L'EXPERTISE REPROCHAIT SEULEMENT A X... UNE GRANDE INSUFFISANCE D'APPRECIATION DANS SES POSSIBILITES LEGALES D'UTILISATION DES CONNAISSANCES TECHNIQUES REVENDIQUEES COMME DES SECRETS PERSONNELS PAR LA SOCIETE ULMIC ET NE LUI IMPUTAIT PAS LA VOLONTE DELIBEREE DE REVELER CES SECRETS ";
REUNI AUX DEUX MOYENS DE CASSATION DE Y..., EUX-MEMES JOINTS ET PRIS : LE PREMIER MOYEN, DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 418 DU CODE PENAL ET DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810 POUR DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, " EN CE QUE L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE, QUI A DECLARE LE DEMANDEUR COMPLICE DE X... POURSUIVI COMME AUTEUR PRINCIPAL DU DELIT DE DIVULGATION DE SECRET DE FABRIQUE, A CRU POUVOIR DEDUIRE L'INTENTION FRAUDULEUSE DE CE DERNIER DE CE QUE LE DEMANDEUR, AYANT PRETENDUMENT FAIT PROCEDER A LA REPRODUCTION DES PLANS CLANDESTINEMENT DANS LES LOCAUX D'UN BUREAU D'ETUDES D'UNE AUTRE SOCIETE, CES PRECAUTIONS NE POUVAIENT MANQUER D'EVEILLER LA MEFIANCE DE X... QUI NE POUVAIT IGNORER QUE LES PROCEDES DE FABRICATION QU'IL COMMUNIQUAIT APRES LES AVOIR CREES POUR LE COMPTE DE LA SOCIETE ULMIC, PRESENTAIENT DES AVANTAGES POUR CETTE DERNIERE QUI LES AVAIT TENUS CACHES A SES CONCURRENTS ;
" ALORS QUE L'INTENTION FRAUDULEUSE EST UN ELEMENT ESSENTIEL DU DELIT DE DIVULGATION DE SECRET DE FABRIQUE ET QUE LA COUR NE POUVAIT EN JUSTIFIER L'EXISTENCE NI PAR REFERENCE A UN PRETENDU TIRAGE CLANDESTIN DES PLANS PAR UN TIERS DES LORS QUE CETTE OPERATION ETAIT POSTERIEURE A LEUR COMMUNICATION, NI EN SE BORNANT A AFFIRMER, PUREMENT ET SIMPLEMENT ET CONTRAIREMENT A L'APPRECIATION CIRCONSTANCIEE DES PREMIERS JUGES, QUE X... NE POUVAIT IGNORER QUE LES PROCEDES DE FABRICATION COMMUNIQUES AVAIENT ETE TENUS CACHES AUX CONCURRENTS ";
LE SECOND MOYEN, DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 418 DU CODE PENAL, DE L'ARTICLE 60 DU MEME CODE ET DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810 POUR DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A CRU POUVOIR RETENIR LA MAUVAISE FOI DU DEMANDEUR POURSUIVI COMME COMPLICE AU MOTIF QU'IL N'AVAIT PAS VERIFIE SI LES PLANS QUI LUI AVAIENT ETE COMMUNIQUES NE CONTENAIENT PAS DES DISPOSITIFS AYANT LE CARACTERE DE SECRETS DE FABRIQUE ET QUE LE FAIT QUE CES PLANS AVAIENT ETE REPRODUITS CLANDESTINEMENT PUIS DETRUITS DEMONTRAIT QU'IL " SE DOUTAIT DE L'ORIGINE DELICTUEUSE" DES INFORMATIONS QUI LUI ETAIENT TRANSMISES ;
" ALORS QU'UN TEL MOTIF, LOIN DE CONSTATER QUE LE DEMANDEUR A AGI EN CONNAISSANCE DE CAUSE, IMPLIQUE AU CONTRAIRE QUE, FAUTE DE VERIFICATIONS, IL IGNORAIT SI DES SECRETS DE FABRIQUE LUI ETAIENT TRANSMIS, ET EXPRIME UN DOUTE SUR LE CARACTERE INTENTIONNEL DE LA PARTICIPATION DU DEMANDEUR, DE SORTE QUE L'ARRET, DONT LES PROPRES MOTIFS MANIFESTENT UNE INCERTITUDE SUR UN ELEMENT CONSTITUTIF DU DELIT DE COMPLICITE, MANQUE DE BASE LEGALE ";
ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE X..., INGENIEUR AU SERVICE DE LA SOCIETE ULMIC, A QUITTE CETTE SOCIETE EN MAI 1965 ET EST ENTRE AU MOIS D'OCTOBRE SUIVANT, EN QUALITE DE DIRECTEUR TECHNIQUE, AU SERVICE DE LA SOCIETE CACERMET QUI AVAIT DECIDE DE FABRIQUER DES ELEMENTS DESTINES A L'INDUSTRIE ELECTRIQUE IDENTIQUES A CEUX QUE PRODUISAIT LA SOCIETE ULMIC ;
QUE, JUSQU'AU MOIS D'OCTOBRE 1966, Y..., PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL DE LA SOCIETE CACERMET, A FAIT PROCEDER AU MONTAGE ET A L'INSTALLATION DANS SES ATELIERS DE MACHINES QUI, FABRIQUEES SUR LES PLANS FOURNIS PAR X..., CONTENAIENT TROIS DISPOSITIFS PRESENTANT UNE SIMILITUDE ABSOLUE AVEC CEUX DES MACHINES UTILISEES PAR LA SOCIETE ULMIC ;
ATTENDU QUE LES JUGES D'APPEL PRECISENT QUE, SELON LES CONCLUSIONS DES EXPERTS JUDICIAIRES COMMIS, CES DISPOSITIFS CONSTITUAIENT DES PROCEDES DE FABRICATION D'UNE CERTAINE ORIGINALITE, PRESENTANT UN INTERET PRATIQUE ET COMMERCIAL POUR LA SOCIETE ULMIC EN CE QU'ILS PERMETTAIENT UNE AMELIORATION DE LA PRODUCTION ET UNE DIMINUTION DES PRIX DE REVIENT ;
QU'ILS ETAIENT RESTES INCONNUS DES AUTRES INDUSTRIELS, LA SOCIETE ULMIC LES AYANT TENUS CACHES A SES CONCURRENTS A L'EXCEPTION DE LA FIRME ALLEMANDE DIETZE AVEC LAQUELLE ELLE ETAIT LIEE PAR UN ACCORD D'ECHANGE D'INFORMATIONS TECHNIQUES ET COMMERCIALES ET DE TROIS AUTRES FIRMES ETRANGERES CLIENTES DE DIETZE ;
ENFIN, QUE LES CONDITIONS DANS LESQUELLES LA REPRODUCTION DES PLANS FOURNIS PAR X... A Y... AVAIT ETE OPEREE CLANDESTINEMENT PAR UN DESSINATEUR, LUI-MEME TRANSFUGE DE LA SOCIETE ULMIC ET DANS LES LOCAUX D'UN BUREAU D'ETUDES DONT LE DIRECTEUR ETAIT UN AMI PERSONNEL DE Y..., ETABLISSAIENT QUE C'ETAIT VOLONTAIREMENT ET EN CONNAISSANCE DE CAUSE QUE X... AVAIT COMMUNIQUE A LA SOCIETE CACERMET DES PROCEDES DE FABRICATION DONT IL NE POUVAIT IGNORER LE CARACTERE SECRET ;
ATTENDU QU'EN CE QUI CONCERNE Y..., LES JUGES ENONCENT QUE CE PREVENU A SCIEMMENT AIDE ET ASSISTE X... DANS LES FAITS QUI ONT PREPARE, FACILITE OU CONSOMME LE DELIT COMMIS PAR CE DERNIER ;
QU'IL EST CONSTANT, EN EFFET, QU'IL S'EST ADRESSE A X..., QU'IL SAVAIT ETRE LE CREATEUR DES MACHINES DE LA SOCIETE ULMIC, POUR LUI FAIRE REALISER DES MACHINES SUSCEPTIBLES D'ASSURER A LA SOCIETE CACERMET UNE PRODUCTION EQUIVALENTE A CELLE DE LA SOCIETE ULMIC ET QU'IL A MIS A SA DISPOSITION LE PERSONNEL ET LES LOCAUX NECESSAIRES DANS DES CONDITIONS QUI ONT PERMIS LA REPRODUCTION PUIS LA DESTRUCTION CLANDESTINES DES DOCUMENTS FOURNIS ;
ATTENDU QUE PAR CES ENONCIATIONS QUI RELEVENT DE LEUR POUVOIR SOUVERAIN D'APPRECIATION DES ELEMENTS DE PREUVE CONTRADICTOIREMENT DEBATTUS DEVANT EUX, LES JUGES DU FOND ONT CARACTERISE EN TOUS LEURS ELEMENTS CONSTITUTIFS LES DELITS DE REVELATION DE SECRETS DE FABRIQUE ET DE COMPLICITE DONT ILS ONT DECLARE LES PREVENUS COUPABLES ET ONT DONNE UNE BASE LEGALE A LEUR DECISION ;
QUE, DES LORS, LES MOYENS NE SAURAIENT ETRE ACCUEILLIS ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LES POURVOIS ;
ET ATTENDU
QUE PAR L'EFFET DU PRESENT ARRET LES CONDAMNATIONS PENALES SONT DEVENUES DEFINITIVES ;
QUE LES FAITS AYANT ETE COMMIS ANTERIEUREMENT AU 20 JUIN 1969, CES CONDAMNATIONS ENTRENT DANS LES PREVISIONS DE L'ARTICLE 8 DE LA LOI DU 30 JUIN 1969 ;
DECLARE LES INFRACTIONS AMNISTIEES.