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Décisions

Cass. com., 20 juin 1995, n° 92-16.647

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Tricot

Avocat général :

M. De Gouttes

Avocats :

Me Choucroy, SCP Nicolaý et de Lanouvelle

Metz, du 10 mars 1992

10 mars 1992

Attendu, selon l'arrêt déféré (Metz, 10 mars 1992), qu'à la suite de pourparlers engagés depuis le début de l'année 1990, la société Guilbert France (société Guilbert) a conclu, le 31 mai 1990, avec la société Paplor, qui exerçait la même activité, un protocole dont il résultait que la première société achèterait le fonds de commerce de la seconde au prix de 1 000 000 francs payable pour les trois quarts dès la conclusion du contrat et pour le solde à l'expiration du délai d'opposition en matière de vente de fonds de commerce ; que, le 5 juin 1990, le gérant de la société Paplor s'est engagé, tant pour lui-même que pour la société Paplor, à ne pas exercer directement ou indirectement une activité concurrente de celle de la société Guilbert pendant une durée de 3 ans ; que l'acte de vente a été passé le même jour ; que la société Guilbert a alors déposé la somme de 750 000 francs dans une banque désignée en qualité de séquestre ; qu'invoquant des actes de concurrence de la part d'une société Buropap, créée en septembre 1989, dont le siège était proche de celui de la société Paplor, la société Guilbert a demandé l'annulation de la vente ; qu'en cours de procédure, la société Paplor a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires, Mme X... étant désignée aux fonctions de liquidateur ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches : (sans intérêt) ;

Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la société Paplor, en liquidation judiciaire, reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamnée, selon le pourvoi, " à restituer à l'acheteur de son fonds de commerce qu'elle lui avait vendu avant sa mise en liquidation judiciaire la somme de 750 000 francs, correspondant aux trois quarts du prix de vente déjà payé, en conséquence de l'annulation de la vente pour dol ", alors, d'une part, que si une action en nullité d'une convention n'est pas soumise à l'arrêt des poursuites individuelles, le jugement qui statue sur elle n'a pas le pouvoir de condamner le débiteur à des restitutions financières même s'il doit en fixer le montant et qu'en condamnant le débiteur en liquidation judiciaire à restituer le prix, la cour d'appel a violé l'article 47 de la loi du 25 janvier 1985 ; et alors, d'autre part, que la consignation vaut paiement et libère le débiteur ; que la consignation de la somme de 750 000 francs par l'acheteur avait nécessairement pour effet de la transférer au créancier, en l'espèce, le vendeur en liquidation judiciaire ; que l'arrêt qui a ordonné dans son dispositif à ce vendeur de restituer la somme à l'acheteur n'a pu, sans se contredire, juger que la même somme appartenait encore au vendeur ; qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que le séquestre conventionnel ou judiciaire fait obstacle à ce que la somme d'argent déposée soit transférée dans le patrimoine du créancier de cette somme ; que l'arrêt qui a prononcé l'annulation de la vente du fonds de commerce a relevé que le dépôt effectué dans une banque par la société Guilbert en vue du paiement n'entraînait pas règlement à la société Paplor ; qu'il a constaté qu'à la suite d'une ordonnance de référé rendue à la requête d'un créancier de la société Paplor, en liquidation judiciaire, les fonds ainsi déposés avaient ensuite été mis sous séquestre à la Caisse des dépôts et consignations ; qu'il en a exactement déduit que le créancier de la société Paplor ne pouvait prétendre se faire payer sur une somme qui ne revenait pas à son débiteur dès lors que le transfert du patrimoine de l'acheteur au patrimoine du vendeur ne s'était pas effectué ; qu'ainsi la cour d'appel, qui n'a pas condamné la société en liquidation judiciaire à des restitutions financières, n'a pas violé les dispositions de l'article 47 de la loi du 25 janvier 1985, inapplicables en l'espèce, et ne s'est pas contredite en décidant que le prix de vente devait être restitué, dans son intégralité, à la société Guilbert et que la somme de 750 000 francs, mise sous séquestre, devait être restituée à cette société ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.