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Décisions

Cass. crim., 5 décembre 2001, n° 00-87.546

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Avocat général :

M. Di Guardia

Avocat :

SCP Waquet, Farge et Hazan

Nîmes, ch. d'accusation, du 2 nov. 1999

2 novembre 1999

Joignant les pourvois en raison de la connexité ; Vu le mémoire ampliatif et le mémoire complémentaire produits, communs aux demandeurs ;

I. - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 2 novembre 1999 : Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 80, 81, 151, 173, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale, excès de pouvoir ;

en ce que l'arrêt attaqué, rendu par la chambre d'accusation de la cour d'appel de Nîmes du 2 octobre 1999, a rejeté la demande d'annulation de la commission rogatoire du 4 février 1998 et les actes subséquents ;

 alors que, si au cours de l'information, les actes d'exécution des commissions rogatoires établissent que d'autres faits de trafic ont pu être commis, le juge d'instruction doit communiquer la procédure au procureur de la République qui peut étendre sa saisine par des réquisitoires supplétifs ; qu'en l'espèce, la commission rogatoire litigieuse a été délivrée le 4 février 1998 sur un réquisitoire introductif du 29 janvier 1998 ; que ce réquisitoire visait deux personnes dénommées, Linda A et Brahim B, et sous ces personnes nommément désignées, des infractions à la législation sur les stupéfiants et des infractions de recel ; qu'en délivrant, le 4 février 1998, une commission rogatoire à l'effet de caractériser les agissements d'une certain nombre de personnes dont les membres de la famille X par rapport à un trafic de stupéfiant auquel elle aurait participé, sans être saisi de ces faits, le juge d'instruction a outrepassé ses pouvoirs ; qu'en refusant d'annuler cet acte et les actes subséquents, la chambre d'accusation a elle-même commis un excès de pouvoir  ;

Attendu qu'Alain X a demandé à la chambre d'accusation l'annulation de la commission rogatoire du 4 février 1998 et des actes subséquents au motif que cette commission rogatoire portait sur la participation éventuelle des membres de la famille X à un trafic de stupéfiants, alors que le juge d'instruction n'était saisi que de faits constitutifs d'infractions à la législation sur les stupéfiants et recel susceptibles d'avoir été commis par Linda A et Brahim B ;

Attendu que, pour rejeter cette demande, la chambre d'accusation relève, notamment, que, par le réquisitoire introductif du 29 janvier 1998, le juge d'instruction a été saisi notamment de faits de recel relatifs à une somme d'argent provenant d'un trafic de stupéfiants ; que l'existence de cette infraction supposait que fût établie, à titre préalable, l'existence dudit trafic ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, et dès lors que le juge d'instruction avait le pouvoir d'instruire sur les faits d'infractions à la législation sur les stupéfiants dont il était saisi, quels qu'en fussent les auteurs, la chambre d'accusation a justifié sa décision ; Qu'il s'ensuit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le dixième moyen de cassation, pris de la violation des articles 63, 63-1, 63-2, 63-3, 91 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

en ce que l'arrêt attaqué rendu par la chambre d'accusation de la cour d'appel de Nîmes du 2 octobre 1999 a rejeté la demande d'annulation de la garde à vue d'Alain X et les actes subséquents ;

alors, d'une part, qu'il résulte de l'article 63-1 du Code de procédure pénale que l'officier de police judiciaire ou, sous son contrôle, l'agent de police judiciaire, a le devoir de notifier immédiatement les droits attachés au placement en garde à vue ; que tout retard dans la mise en oeuvre de cette obligation, non justifié par une circonstance insurmontable, porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée, qu'en l'espèce Alain X a été placé en garde à vue le 21 avril 1998 à 11 heures 45, ainsi que cela ressort du procès-verbal du 21 avril 1998 (D86) ; que ses droits ne lui ont été notifiés, ainsi que cela ressort du procès verbal du même jour (D259), que le 21 avril 1998 à 12 heures 50 ;

que le retard d'une heure cinq entre le placement en garde à vue et la notification a nécessairement porté atteinte à ses droits, ce qui justifiait la nullité de la garde à vue et des actes subséquents, qu'en rejetant la requête en nullité, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

alors, d'autre part, que le procès-verbal de notification des droits devant être rédigé immédiatement, le procès-verbal récapitulatif du 24 avril 1998, selon lequel les droits d'Alain X lui aurait été notifiés  dès le début de sa garde à vue  ne pouvait faire preuve contre le procès-verbal de notification du 21 avril 1998 mentionnant que ces droits avaient été notifiés le 21 avril 1998 à 12 heures 50 ; que la chambre d'accusation a privé sa décision de toute base légale  ;

Attendu que, pour écarter les conclusions par lesquelles Alain X prétendait que les droits découlant de la garde à vue lui avaient été notifiés tardivement, la chambre d'accusation énonce que, selon le procès-verbal D289 dressé le 24 avril 1998 et signé par l'intéressé, ce dernier a été informé de ses droits dès le début de sa garde à vue ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, et dès lors qu'il ressort des énonciations du procès-verbal D259, établi le 21 avril 1998, que le délai d'une heure qui s'est écoulé entre l'interpellation de l'intéressé et la notification de ses droits s'explique par les circonstances mouvementées de cette interpellation, qui concernait plusieurs personnes et au cours de laquelle deux d'entre elles ont été blessées, ainsi que par la nécessité de procéder à des palpations de sécurité, la chambre d'accusation a justifié sa décision ; Qu'ainsi le moyen ne peut être admis ;

Sur le onzième moyen de cassation, pris de la violation des articles 80, 81, 151, 153, 173, 06, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

en ce que l'arrêt attaqué rendu par la chambre d'accusation de la cour d'appel de Nîmes du 2 octobre 1999 a rejeté la demande d'annulation de la garde à vue et de tous les actes coercitifs réalisés au détriment de Christine, Aziza, Aïdi et Jean-Antoine X en vertu de la commission rogatoire du 8 octobre 1998 et les actes subséquents ;

alors qu'en accomplissant des actes coercitifs-perquisitions, blocage de compte, placements en garde à vue le 2 février 1999- dans le cadre de la commission rogatoire du 8 octobre 1999, qui ne portait que sur l'identification des véhicules des personnes mis en examen, l'évaluation du train de vie de ces personnes et l'investigation sur le financement de la boîte de nuit de Deaux, à l'exclusion de faits de recel du produit de la vente de stupéfiants, pour la poursuite desquels Ie juge mandant n'a été saisi que par réquisitoire supplétif postérieur du 4 février 1999, les officiers de police judiciaire ont excédé leurs pouvoirs, entachant la procédure d'une nullité absolue ; qu'ainsi l'arrêt attaqué, qui ne s'est pas expliqué sur cette irrégularité, d'une part, n'est pas suffisamment motivé, d'autre part, procède d'une violation des textes susvisés  ;

Attendu que Christine, Aziza, Aïdi et Jean-Antoine X ont demandé à la chambre d'accusation d'annuler tous les actes coercitifs (perquisitions, blocage de compte, placements en garde à vue) effectués, à leur encontre, en vertu de la commission rogatoire du 8 octobre 1998, au motif que, compte tenu de la saisine du juge d'instruction à cette époque, ladite commission rogatoire ne pouvait porter que sur l'identification des véhicules des personnes mises en examen, l'évaluation du train de vie de ces personnes et le fonctionnement de la boîte de nuit de Deaux, à l'exclusion de faits de recel du produit de la vente de stupéfiants, pour la poursuite desquels le juge mandant n'a été saisi que par un réquisitoire supplétif postérieur ;

Attendu que, pour rejeter cette demande, la chambre d'accusation relève qu'en étant saisi de faits de recel, d'infractions à la législation sur les stupéfiants et de participation à une association de malfaiteurs, le juge d'instruction pouvait procéder à des investigations tant sur l'origine des fonds destinés à financer ce trafic et susceptibles, de plus, de caractériser la résolution d'agir en commun et des actes préparatoires que sur les rapports financiers des uns et des autres ;

Attendu qu'en cet état, la chambre d'accusation a justifié sa décision ; Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

II. - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 18 octobre 2000 : Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 222-37, 222-41, 222-44, 222-45 et 222-47 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

en ce que l'arrêt attaqué de la cour d'appel de Nîmes du 18 octobre 2000 a déclaré Alain X coupable sur Ie fondement des faits prévus et réprimés par l'article 222-37 du Code pénal et l'a condamné à 9 ans d'emprisonnement ferme, à un million de francs d'amende, à la privation de ses droits civiques et de famille pendant cinq ans et à l'interdiction de séjour pour cinq ans dans le Gard et les départements limitrophes ;

alors que la condamnation pour trafic de stupéfiants doit reposer sur des faits matériels positifs dûment constatés d'acquisition, de détention et de cession de stupéfiants ; qu'en l'espèce la cour d'appel a relevé d'une part, que des voitures étaient précisément identifiées comme impliquées dans un trafic de stupéfiants sans que le nom d'Alain X figure parmi ceux de leurs propriétaires et d'autre part, que de nombreux échanges avaient été observés entre occupants de divers véhicules sans qu'Alain X ait été identifié comme occupant de ces véhicules ; qu'il s'évince de motifs adoptés des premiers juges que seuls avaient été constatés des contacts entre Alain X, dont il était constant que la présence sur le terrain était particulièrement rare, et d'autres prévenus d'infractions à la Iégislation sur les stupéfiants ; que dans ces conditions, la cour d'appel, qui n'a relevé aucun acte d'acquisition, de détention ou de cession de stupéfiants à l'encontre d'Alain X, n'a pas justifié sa décision  ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 450-1 et 450-3 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

 en ce que l'arrêt attaqué (rendu par la cour d'appel de Nîmes le 18 octobre 2000) a déclaré Alain X coupable d'avoir participé à une association de malfaiteurs formée pour organiser et assurer un trafic de stupéfiants et l'a condamné à 9 ans d'emprisonnement ferme à un million de francs d'amende, à la privation de ses droits civiques et de famille pendant cinq ans et à l'interdiction de séjour pour cinq ans dans le Gard et les départements limitrophes ;

alors que le seul fait pour une personne d'avoir des liens d'amitié avec une personne prévenue de trafic de stupéfiants ou d'appartenir à une famille dont certains membres jouissent d'une notoriété dans l'activité de trafic de stupéfiants ne caractérise pas la participation à une association de malfaiteurs, en l'absence de tout acte matériel révélant la participation effective de cette personne à une entente établie entre ces personnes dans le but d'organiser et d'assurer un trafic de stupéfiant ; qu'en I'espèce, la cour d'appel a seulement constaté, concernant Alain X l'existence de liens d'amitié et de famille avec des prévenus d'infractions à Ia législation sur les stupéfiants, si bien qu'il ne résulte pas de l'arrêt attaqué que celui-ci ait participé à une association de malfaiteurs  ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré Alain X coupable ; D'où il suit que le moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-39-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

en ce que l'arrêt attaqué (rendu par la cour d'appel de Nîmes le 18 octobre 2000) a déclaré Aïdi Y X coupable sur le fondement des faits punis par l'article 222-39-1 du Code pénal et l'a condamné à une peine de deux ans d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 100 000 francs, outre la privation des droits civiques civils et de famille pour une durée de cinq ans ;

alors, d'une part, qu'en adoptant les motifs des premiers juges ayant renvoyé Aïdi X des fins de la poursuites, son train de vie n'étant pas injustifié, la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire, le retenir dans les liens de la prévention aux motifs que ce même train de vie n'était pas justifié ; que l'arrêt est donc entaché d'une contradiction de motifs ;

alors, d'autre part, que l'article 222-39-1 du Code pénal punit le fait de ne pas pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie, tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se livrant à l'usage ou au trafic de stupéfiants ; qu'il appartient aux juges du fond de caractériser l'un et l'autre de ces éléments constitutifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel n'a relevé aucun élément susceptible de démontrer le caractère injustifié du train de vie du prévenu par rapport à ses ressources ; que pour retenir l'existence de relations litigieuses au sens du texte susvisé, la cour d'appel s'est bornée à relever qu'Aïdi X était présent lors de l'interpellation d'autres prévenus et lors d'une discussion entre ceux-ci ; que cependant la relation de ces deux événements ne suffit pas à caractériser une habitude de la part d'Aïdi X dans la fréquentation de ces personnes ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas justifié son arrêt  ;

Attendu que, pour déclarer Aïdi Y X coupable de l'infraction prévue à l'article 222-39-1 du Code pénal, la cour d'appel énonce que, bien qu'ayant déclaré être sans ressources, l'intéressé dispose de comptes bancaires dont le solde avoisine 700 000 francs et a versé environ 60 000 francs en espèces pour l'achat d'un véhicule ; que les juges du second degré relèvent, par ailleurs, qu'Aïdi Y X était présent lors de l'interpellation de plusieurs trafiquants effectuée le 21 avril 1998, ainsi que lors de l'épisode du 3 avril précédent, au cours duquel son frère Alain X fut surpris en grande discussion avec les membres de son équipe de revendeurs ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel, qui pouvait, sans se contredire, se référer à une partie des faits relatés par le tribunal tout en les interprétant de manière différente, a justifié sa décision ; Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

Sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 222-39-1, 321-1, 321-4 et 321-9 du Code pénal, 388, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et maque de base légale ;

en ce que l'arrêt attaqué (rendu par la cour d'appel de Nîmes le 18 octobre 2000) a renvoyé Christine X du chef de recel et l'a condamnée du chef de l'article 222-39-1 du Code pénal à 2 ans d'emprisonnement avec sursis, à une amende de 100 000 francs et à cinq ans de privation de ses droits civiques ;

alors, d'une part, que s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition de n'y rien ajouter, sauf acceptation expresse par le prévenu d'être jugé sur des faits ou circonstances aggravantes non compris dans la poursuite ; qu'il ne résulte d'aucune mention de l'arrêt attaqué ni des pièces de procédure que Christine X ait accepté d'être jugée du chef de faits prévus et réprimés par l'article 222-29-1 du Code pénal dont les éléments constitutifs sont différents de ceux du recel et n'étaient pas compris dans la poursuite ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

alors, d'autre part, que l'article 222-39-1 du Code pénal punit le fait de ne pas pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie, tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se livrant à l'usage ou au trafic de stupéfiants ; qu'il appartient aux juges du fond de caractériser l'un et l'autre de ces éléments constitutifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel n'a relevé aucun élément susceptible de démontrer le caractère injustifié du train de vie de la prévenue par rapport à ses ressources ; qu'elle n'a pas davantage relevé le caractère habituel de sa relation avec son frère Alain X ; qu'en statuant ainsi, a cour d'appel n'a pas justifié son arrêt  ;

Attendu que, pour confirmer le jugement ayant déclaré Christine X coupable de l'infraction prévue à l'article 222-39-1 du Code pénal, la cour d'appel relève que cette dernière, qui ne peut justifier d'autres ressources que celles provenant d'une allocation d'un montant variant de 74 à 101 francs par jour, dispose de 6 comptes faisant apparaître un solde de 196 085 francs, sur lesquels elle a déposé, en espèces, entre janvier et avril 1998, des sommes de 20 000, 16 000 et 13 000 francs et qu'elle verse 2 000 francs par mois en remboursement d'un emprunt contracté pour l'achat d'une maison à son nom ;

Attendu que la cour relève par ailleurs, par motifs adoptés des premiers juges, que Christine et Alain X vivaient sous le même toit ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel a justifié sa décision ; Qu'il s'ensuit que le moyen, nouveau et mélangé de fait et, comme tel, irrecevable en ce qu'il fait grief aux juges du fond d'avoir requalifié les faits reprochés à Christine X, ne saurait être accueilli ;

Sur le septième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européene des droits de l'homme, 222-39-1, 321-1, 321-4 et 321-9 du Code pénal, 388, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

en ce que l'arrêt attaqué (rendu par la cour d'appel de Nîmes le 18 octobre 2000) a renvoyé Jean-Antoine X du chef de recel et l'a condamné du chef de l'article 222-39-1 du Code pénal à 2 ans d'emprisonnement avec sursis, à une amende de 100 000 francs et à cinq ans de privation de ses droits civiques ;

alors d'une part que, s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition de n'y rien ajouter, sauf acceptation expresse par Ie prévenu d'être jugé sur des faits ou circonstances aggravantes non compris dans la poursuite ; qu'il ne résulte d'aucune mention de l'arrêt attaqué ni des pièces de procédure que le prévenu ait accepté d'être jugé du chef faits prévus et réprimés par l'article 222-29-1 du Code pénal dont les éléments constitutifs sont différents de ceux du recel et n'étaient pas compris dans la poursuite ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

alors, d'autre part, que l'article 222-39-1 du Code pénal punit le fait de ne pas pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie, tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se livrant à l'usage ou au trafic de stupéfiants ; qu'il appartient aux juges du fond de caractériser l'un et l'autre de ces éléments constitutifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel n'a relevé aucun élément susceptible de démonter le caractère injustifié du train de vie du prévenu par rapport à ses ressources ; qu'elle n'a pas davantage relevé le caractère habituel de sa relation avec des trafiquants de stupéfiants ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas justifié son arrêt  ;

Attendu que, pour confirmer le jugement ayant déclaré Jean-Antoine X coupable de l'infraction prévue à l'article 222-39-1 du Code pénal, la cour d'appel relève que ce dernier, qui ne déclare percevoir qu'une allocation de l'ASSEDIC d'un montant de 2 200 francs par mois, effectue régulièrement des dépenses importantes à la discothèque Club de Deaux et dispose de comptes bancaires dont le solde global s'élève à 445 914 francs ; que les juges ajoutent que l'intéressé mène une vie relativement confortable, avec, en particulier, l'achat d'un véhicule Renault Espace pour un prix de 60 000 francs, réglé en espèces, des séjours au ski, également réglés en espèces, des achats de mobiliers et des dépenses de transformation de bijoux, encore réglées en espèces ; Que la cour d'appel relève par ailleurs, par motifs adoptés des premiers juges, que Jean-Antoine X était en relation habituelle avec son frère Alain et les revendeurs de son équipe, ainsi que le font apparaître plusieurs clichés photographiques ;

Attendu qu'en cet état, la cour d'appel a justifié sa décision ; Qu'il s'ensuit que le moyen, nouveau et mélangé de fait et, comme tel, irrecevable en ce qu'il fait grief aux juges du fond d'avoir requalifié les faits reprochés à Jean-Antoine X, ne saurait être accueilli ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-19 et 132-24 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

 en ce que l'arrêt attaqué (rendu par la cour d'appel de Nîmes le 18 octobre 2000) a condamné Alain X à une peine de neuf ans d'emprisonnement ferme ;

 alors que la juridiction ne peut prononcer une peine d'emprisonnement sans sursis qu'après avoir spécialement motivé le choix de cette peine ; qu'en l'espèce la cour d'appel s'est contentée de se référer à la nature des faits et aux antécédents d'Alain X, dont l'arrêt ne porte cependant nulle mention ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, par la seule référence à la qualification de l'infraction poursuivie et sur des motifs inexistants, la cour d'appel a méconnu l'exigence de la motivation spéciale prescrite par le texte susvisé  ;

Attendu que, pour prononcer une peine d'emprisonnement sans sursis à l'encontre d'Alain X, la cour d'appel relève, par motifs en partie adoptés des premiers juges, qu'Alain X a déjà été condamné à 4 mois d'emprisonnement, le 25 mars 1993, pour des faits de trafic de stupéfiants et que les pièces du dossier démontrent que son activité de trafiquant n'a jamais cessé entre l'exécution de cette peine et son interpellation ; que les juges ajoutent qu'il est manifeste, à travers son comportement à l'audience, que le prévenu, qui a joué un rôle déterminant dans le présent trafic, dispose d'une intelligence supérieure et d'un charisme indéniable, qui lui permettaient de disposer tant sur son équipe de revendeurs que sur les membres de sa famille de l'autorité d'un chef de bande ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, qui répondent aux exigences de l'article 132-19 du Code pénal, la cour d'appel a justifié sa décision ; Qu'ainsi le moyen doit être écarté ;

Sur le neuvième moyen de cassation, en ce qu'il concerne Alain, Aïdi Y, Jean-Antoine et Christine X, pris de la violation des articles 131-21, 222-44, 222-39-1 et 222-49 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

 en ce que l'arrêt attaqué (rendu par la cour d'appel de Nîmes le 18 octobre 2000) a ordonné la confiscation des sommes figurant sur les compte bancaires, postaux et comptes d'épargnes ayant fait l'objet d'une mesure de blocage et appartenant à Aziza Z épouse X, MM. Aîdi Y, Alain, Jean-Antoine X et Christine X ;

 alors que ne peut faire l'objet d'une confiscation que la chose qui est le produit d'un trafic de stupéfiants ; qu'il appartient donc au juge du fond, pour justifier la confiscation de sommes figurant sur les comptes de prévenus d'infractions à la législation sur les stupéfiant, de caractériser que ces sommes proviennent de telles infractions et que les prévenus ont eu connaissance de leur provenance illicite ; qu'en l'espèce, Ia cour d'appel s'est contentée de se référer à la nature des faits, à leur ampleur et aux circonstances de leur commission sans caractériser par aucun de ces motifs l'origine illicite des sommes figurant sur leurs comptes, dont elle explique au contraire, au moins pour partie la provenance (dommages-intérêts, versements Assedic, rémunérations de travail au noir etc.) qu'ainsi l'arrêt attaqué n'est pas légalement justifié ;

 alors encore qu'il résulte des constatations de Ia cour d'appel que l'ensemble des comptes étaient gérés par Aziza X ; qu'en s'abstenant de rechercher si chacun des titulaires des comptes confisqués aurait eu connaissance de la prétendue origine illicite des sommes placées par le tiers, sur son compte, la cour d'appel a encore privé sa décision de toute base légale ;  alors enfin que les juges du fond ont requalifié la prévention initiale de recel de sommes provenant de cession de stupéfiant à autrui pour sa consommation personnelle en l'absence de justifications de ressources correspondant au train de vie, tout en étant en relation avec une ou plusieurs personnes se livrant à un trafic de stupéfiants ; qu'il ne résulte pas de la seule constatation de la réalité de l'infraction alléguée une absence de justification, la conséquence nécessaire que les sommes détenues seraient elles-mêmes le produit de l'infraction, ce qui doit faire l'objet d'une preuve distincte pour justifier une saisie ; qu'ainsi la cour d'appel a encore violé les textes susvisés  ;

Attendu que les demandeurs ne sauraient faire grief à l'arrêt d'avoir ordonné la confiscation des sommes figurant sur leurs comptes bancaires respectifs dès lors, d'une part, qu'il résulte des constatations des juges du fond que les sommes versées sur les comptes d'Alain X provenaient du trafic de stupéfiants auquel il se livrait et, d'autre part, que les autres prévenus ayant été déclarés coupables de ne pouvoir justifier de ressources correspondant à leur train de vie, tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se livrant à des opérations illicites portant sur les stupéfiants il s'ensuit nécessairement qu'ils ne pouvaient ignorer le caractère frauduleux de l'usage des fonds qui alimentaient leur train de vie ; Que le moyen ne peut donc être accueilli ;

Mais sur le huitième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 222-39-1, 321-1, 321-4 et 321-9 du Code pénal, 388, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

 en ce que l'arrêt attaqué (rendu par la cour d'appel de Nîmes le 18 octobre 2000) a renvoyé Aziza X du chef de recel et l'a condamnée du chef de l'article 222-39-1 du Code pénal à 3 ans d'emprisonnement avec sursis, à une amende de 200 000 francs et à cinq ans de privation de ses droits civiques ;

 alors, d'une part, que s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition de n'y rien ajouter, sauf acceptation expresse par le prévenu d'être jugé sur des faits ou circonstances aggravantes non compris dans la poursuite ; qu'il ne résulte d'aucune mention de l'arrêt attaqué ni des pièces de procédure que la prévenue ait accepté d'être jugée du chef de faits prévus et réprimés par l'article 222-39-1 du Code pénal dont les éléments constitutifs sont différents de ceux du recel et n'étaient pas compris dans la poursuite ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

 alors, d'autre part, que la contradiction entre les motifs et le dispositif d'un arrêt équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce l'arrêt attaqué ne pouvait sans se contredire fixer la peine d'emprisonnement à deux ans dans ses motifs et à trois ans dans son dispositif  ;

Vu l'article 388 du Code de procédure pénale ;

Attendu que, s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition de n'y rien ajouter et d'avoir mis le prévenu en mesure de s'en expliquer ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'Aziza X, poursuivie pour recel, a été condamnée de ce chef par les premiers juges ; que, requalifiant les faits, la cour d'appel l'a déclarée coupable de ne pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie, tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se livrant à des opérations illicites portant sur les stupéfiants ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne résulte d'aucune mention de l'arrêt attaqué ni des pièces de procédure qu'Aziza X ait accepté d'être jugée du chef de cette dernière infraction, dont les éléments constitutifs, distincts de ceux du recel, n'étaient pas compris dans la poursuite, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et du principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le neuvième moyen ; I-Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 2 novembre 1999 :

LE REJETTE ;

II. - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 18 octobre 2000 :

CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nîmes, en date du 18 octobre 2000, mais en ses seules dispositions ayant condamné Aziza X et ordonné la confiscation des sommes déposées sur ses comptes, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Montpellier, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.