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Décisions

Cass. crim., 21 octobre 1998, n° 98-84.361

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gomez

Versailles, ch. acc., du 19 juin 1998

19 juin 1998

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 226-13 du Code pénal, 221-1, 221-3, 132-72 du même Code, 81, 101 et suivants, 170, 171, 206, 215, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt portant mise en accusation du requérant du chef d'assassinat sur la personne de sa femme, a dit n'y avoir lieu à annulation de la lettre adressée au juge d'instruction, le 20 décembre 1997, par l'avocat des parties civiles ;

" aux motifs que le conseil du mis en examen a déposé un mémoire où il demande à la Cour de dire qu'une lettre adressée par Me X..., conseil de la partie civile, le 20 décembre 1997, au magistrat instructeur, comporte des informations protégées en violation de l'article 226-13 du Code pénal et en conséquence d'annuler les pièces en faisant état ; que le secret professionnel auquel est astreint un avocat ne saurait avoir pour effet de lui interdire de produire tous éléments utiles au soutien des intérêts de son client ; qu'en l'espèce, Me X... n'a fait que confirmer avoir reçu un courrier de son client sans en divulguer le contenu ; qu'ainsi, la procédure n'encourt pas l'irrégularité alléguée au regard des dispositions de l'article 226-13 du Code pénal ;

" alors que méconnaît les devoirs de sa charge et viole le secret professionnel attaché à son état, l'avocat qui accepte de prendre la qualité de témoin dans la cause qu'il défend, en attestant près d'un juge d'instruction avoir reçu à telle date une lettre de sa cliente dont le contenu supposé avait été saisi dans la mémoire de l'ordinateur de celle-ci ; qu'ainsi, l'attestation querellée équivaut au versement direct d'une lettre cependant couverte - du propre aveu de la chambre d'accusation - par le secret professionnel de l'avocat dont la portée, générale et absolue, ne pouvait être méconnu ni par l'avocat ni par le juge ; que pareille irrégularité entache la procédure de nullité et vicie l'arrêt de renvoi en son entier, l'attestation et la lettre litigieuse portant sur un élément essentiel du crime reproché à l'accusé " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, dans l'information suivie contre Philippe Z... pour l'assassinat de son épouse, les parties civiles ont produit la copie d'une lettre que, peu avant sa mort, Sylvie Z... aurait composée sur son ordinateur et sauvegardée ; que ce courrier, relatif à l'instance en divorce qui opposait les époux Z..., aurait été destiné à un avocat, Me Christiane Y... ; qu'interrogée par le magistrat instructeur, celle-ci a confirmé avoir reçu la lettre ;

Attendu que, pour refuser d'annuler la réponse de Me Y... au juge d'instruction, l'arrêt attaqué énonce qu'en se bornant à confirmer la réception du courrier, sans en divulguer le contenu, l'avocat n'a pas commis d'irrégularité au regard de l'article 226-13 du Code pénal ;

Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que l'avocat, questionné sur un simple fait matériel concernant une pièce déjà versée au dossier d'instruction, n'a révélé aucune information dont le secret serait dû au demandeur, la chambre d'accusation a justifié sa décision sans encourir le grief allégué ;

Que le moyen ne saurait, dès lors, être accueilli ;

Et attendu que la chambre d'accusation était compétente, qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle le demandeur est renvoyé, que la procédure est régulière et que les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus.