Cass. 3e civ., 26 septembre 2001, n° 99-18.156
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Ah-Sing investissements (SARL), Fascom international (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Beauvois
Rapporteur :
Mme Stéphan
Avocat général :
M. Weber
Avocats :
SCP Gatineau, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que l'arrêt mentionne au bas du paragraphe relatif à la composition de la cour d'appel le nom de Mme Séry en sa qualité de greffier, présente lors du prononcé de l'arrêt, et qu'à défaut de contestation régulièrement présentée, conformément aux dispositions de l'article 430, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, le moyen est irrecevable ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis, 21 mai 1999), que la société Maison Ah Sing, aux droits de laquelle se trouvent les sociétés Ah-Sing investissements, (société Ah-Sing) et Fascom international, a acquis un immeuble appartenant à Mme Y, selon jugement du 9 mai 1989, confirmé par arrêt du 22 mai 1992, valant acte authentique de vente ; qu'elle a assigné M. X, occupant d'une partie de cet immeuble, en expulsion comme étant sans droit ni titre ; que M. X s'est prévalu d'un bail commercial consenti par Mme Y le 27 avril 1990 ; que les sociétés Ah-Sing et Fascom international ont conclu à l'inopposabilité de ce bail à leur égard et, subsidiairement, à sa résiliation judiciaire ; que, parallèlement, une saisie-arrêt a été pratiquée, à hauteur de 450 000 francs, entre les mains de M. X, à la requête d'un tiers créancier de Mme Y, sur le montant des loyers qu'il devait à celle-ci ; que la saisie-arrêt a été validée par jugement du 7 avril 1992 ;
Attendu que les sociétés Ah-Sing et Fascom international font grief à l'arrêt de dire que M. X est titulaire d'un bail commercial, qui leur est opposable, alors, selon le moyen :
1°) que le tiers ne peut se prévaloir de la théorie de l'apparence lorsque celui-ci a eu connaissance de la situation véritable ou de l'existence d'un doute sur la qualité de propriétaire du cocontractant ;
qu'en l'espèce, il résulte des constatations des juges du fond qu'aux termes de la lettre que M. Z, notaire, avait adressée à Mme Y le 15 octobre 1990, celui-ci avait déclaré avoir attiré l'attention de M. X sur l'impossibilité de réaliser quelqu'acte que ce soit en ce qui concernait l'immeuble de Mme Fruteau compte tenu du procès pendant avec la Maison Ah Sing ; qu'il ressortait donc de cette lettre que M. X avait été informé par le notaire de l'existence d'un litige sur la propriété de l'immeuble, objet du bail, entre Mme Y et la Maison Ah Sing et qu'il ne pouvait se prévaloir de la théorie de l'apparence ; qu'en retenant néanmoins, pour dire que le bail commercial conclu entre Mme Y et M. X était opposable aux sociétés Ah-Sing Fascom international par application de la théorie de l'apparence, que l'intervention de M. Z à l'acte de cession de la licence IV, qui avait fait l'objet, comme l'immeuble de Mme Fruteau, de la promesse de vente consentie par cette dernière à la société Maison Ah Sing, confortait M. X, à la date de la conclusion du bail, dans la croyance légitime que Mme Y était propriétaire de l'immeuble sans même rechercher si, compte tenu de la lettre précitée de M. Z, M. X n'avait pas entendu passer outre aux recommandations qui lui avaient été faites par le notaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 544 et 1713 du Code civil ;
2°) que le bail consenti par le propriétaire apparent de la chose louée n'est opposable au véritable propriétaire que lorsque le locataire a traité de bonne foi sous l'empire de l'erreur commune ; que l'erreur individuelle commise par le tiers qui a traité avec le propriétaire apparent ne suffit donc pas ; que les juges du fond doivent également relever la croyance que tout le monde avait que le titulaire apparent du droit de propriété était le véritable titulaire de ce droit ; qu'en se contentant de relever, pour faire application en l'espèce de la théorie de l'apparence, la croyance légitime qu'aurait eue M. X que Mme Y était propriétaire de l'immeuble au moment de la conclusion du bail commercial litigieux sans aucunement constater que M. X aurait également contracté avec Mme Y sous l'empire d'une erreur commune, comme étant partagée par d'autres, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 544 et 1713 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté qu'il n'était pas établi qu'à la date de conclusion du bail, le 27 avril 1990, M. X avait pu mettre en doute la qualité de propriétaire de Mme Y, qui occupait l'immeuble loué, n'ayant eu connaissance du jugement du 9 mai 1989, translatif de propriété, que par la signification qui lui en avait été faite le 8 juin 1990 et qu'il avait, en outre, été conforté dans cette croyance par la rédaction de l'acte notarié de cession de la licence IV à lui consentie par Mme Y en liaison avec le bail, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le troisième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant retenu que M. X n'avait pu payer les loyers à la société Maison Ah Sing en conséquence de la saisie-arrêt, validée par jugement du 7 avril 1992, pratiquée entre ses mains, à hauteur de 450 000 francs, au bénéfice d'un tiers créancier de Mme Y, à concurrence de sa dette de loyers envers cette dernière, qu'il s'était ensuite régulièrement acquitté à compter de décembre 1994 de ses loyers envers les sociétés Ah-Sing et Fascom international, et qu'en ce qui concerne les travaux d'aménagement de l'immeuble pris à bail, que le bail autorisait expressément, il n'était pas allégué que les travaux s'étaient poursuivis au-delà de la signification qui lui avait été faite de l'arrêt du 22 mai 1992 confirmant définitivement le transfert de propriété de l'immeuble loué à la société Maison Ah Sing, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié l'existence et la gravité des fautes du locataire au regard de la demande de prononcé de la résiliation du bail présentée par la bailleresse, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.