TUE, 9e ch., 8 juin 2022, n° T-144/20
TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Guangxi Xin Fu Yuan Co. Ltd
Défendeur :
Commission européenne
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
J. Costeira
Juges :
M. Kancheva (rapporteure) , P. Zilgalvis
LE TRIBUNAL (neuvième chambre),
Arrêt
Antécédents du litige
1 La requérante, Guangxi Xin Fu Yuan Co. Ltd., est une société de droit chinois productrice et exportatrice d’articles en céramique pour la table et la cuisine.
2 Le 16 février 2012, à la suite d’une plainte déposée au nom des producteurs de l’Union européenne, la Commission européenne a ouvert une procédure antidumping concernant les importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine originaires de la République populaire de Chine (JO 2012, C 44, p. 22, ci-après l’« enquête initiale »).
3 L’enquête initiale a conduit à l’adoption du règlement (UE) no 1072/2012 de la Commission, du 14 novembre 2012, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine originaires de la République populaire de Chine (JO 2012, L 318, p. 28), puis du règlement d’exécution (UE) no 412/2013 du Conseil, du 13 mai 2013, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine originaires de la République populaire de Chine (JO 2013, L 131, p. 1).
4 La requérante a coopéré à l’enquête initiale et a, à ce titre, présenté une réponse consolidée au formulaire d’échantillonnage fourni par la Commission, aux côtés de trois autres sociétés chinoises. Les sociétés en question étaient Shenzhen Worthyway Fine Porcelain Co. Ltd, qui était spécialisée dans l’exportation d’articles en céramique pour la table et la cuisine fabriqués par ses actionnaires (ci-après « Shenzhen Worthyway »), Evershine Fine China Co., Ltd, qui produisait des articles en céramique pour la table haut de gamme et les commercialisaient à la fois sur le marché domestique et à l’étranger (ci après « Evershine »), ainsi que Guangxi Beiliu XinFuYuan Porcelain Co. Ltd, qui produisait des articles en céramique pour la table de bas de gamme, vendus uniquement sur le marché domestique. Dans cette réponse consolidée, il était précisé que la requérante était majoritairement détenue par A, à hauteur de 71,25 %, et par d’autres actionnaires individuels. Il était également précisé que Shenzhen Worthyway était détenue à parts égales par deux fils de A, à savoir B et C. Il était en outre précisé que Evershine était détenue par Shenzhen Worthyway, à hauteur de 30 %, et par Worthyway GEN.TRD.L.L.C, société ayant son siège à Dubaï (Émirats arabes unis), à hauteur de 70 %, dont les actionnaires étaient D, à hauteur de 51 %, B, l’un des fils de A, à hauteur de 46 % et E, à hauteur de 3 %.
5 Aux termes de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 412/2013, « il est institué un droit antidumping définitif sur les importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine, à l’exclusion des couteaux en céramique, des moulins à condiments et à épices en céramique ainsi que leurs éléments de broyage en céramique, des éplucheurs en céramique, des aiguiseurs à couteaux en céramique et des pierres à pizza en céramique de cordiérite des types utilisés pour la cuisson de pizzas ou de pains, relevant actuellement des codes NC ex 6911 10 00, ex 6912 00 10, ex 6912 00 30, ex 6912 00 50 et ex 6912 00 90 (codes TARIC 6911100090, 6912001011, 6912001091, 6912003010, 6912005010 et 6912009010) et originaires de la [République populaire de Chine] ».
6 Conformément à l’article 1er, paragraphe 2, du règlement d’exécution no 412/2013, les droits antidumping individuels étaient compris entre 13,1 et 23,4 %. En vertu de cette même disposition, la requérante et Evershine se sont vu imposer, comme tous les producteurs-exportateurs chinois ayant coopéré non retenus dans l’échantillon, mentionnés à l’annexe 1 dudit règlement, un taux de droit antidumping définitif de 17,9 %. La requérante a reçu, à ce titre, le code TARIC additionnel B588 et des codes TARIC individuels. Les autres producteurs-exportateurs ont été soumis au taux de droit résiduel de 36,1 %.
7 Le 12 août 2017, la Commission a fait savoir, par un avis publié au Journal officiel (JO 2017, C 268, p. 5) que, conformément aux dispositions de l’article 11, paragraphe 2, du règlement (UE) 2016/1036 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de l’Union européenne (JO 2016, L 176, p. 21, ci-après le « règlement de base »), sauf s’il était procédé à un réexamen selon la procédure définie dans ledit avis, les mesures antidumping instituées par le règlement d’exécution no 412/2013 expireraient le 16 mai 2018.
8 Le 15 mai 2018, eu égard à la demande en ce sens des producteurs de l’Union, la Commission a annoncé l’ouverture d’un réexamen au titre de l’expiration des mesures antidumping prévues par le règlement d’exécution no 412/2013, conformément à l’article 11, paragraphe 2, du règlement de base (JO 2018, C 167, p. 6).
9 La requérante a répondu individuellement au formulaire d’échantillonnage fourni par la Commission dans le cadre de la procédure de réexamen (ci-après la « deuxième enquête »). Dans sa réponse audit formulaire, la requérante a notamment précisé quelles étaient ses activités, ainsi que celles des sociétés qui lui étaient liées, au sens de l’article 127 du règlement d’exécution (UE) 2015/2447 de la Commission, du 24 novembre 2015, établissant les modalités d’application de certaines dispositions du règlement no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil établissant le code des douanes de l’Union (JO 2015, L 343, p. 558), à savoir Shenzhen Worthyway et Evershine. La requérante a également précisé dans sa réponse qu’elle était toujours détenue à hauteur de 71,25 % par A et que Shenzhen Worthyway était également toujours détenue à parts égales par B et C. Il était également indiqué dans ladite réponse que, si Evershine était toujours détenue par Shenzhen Worthyway, à hauteur de 30 %, elle était désormais également détenue, à hauteur de 70 %, par One And Only Trade Co. Limited, cette dernière étant elle-même détenue par B et C à hauteur, respectivement, de 49 et de 51 %.
10 Le 12 juillet 2019, la Commission a adopté le règlement d’exécution (UE) 2019/1198, instituant un droit antidumping définitif sur les importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine originaires de la République populaire de Chine à l’issue d’un réexamen au titre de l’expiration des mesures effectué conformément à l’article 11, paragraphe 2, du règlement 2016/1036 (JO 2019, L 189, p. 8). Par ledit règlement, la Commission a étendu les mesures antidumping instituées par le règlement d’exécution no 412/2013 et maintenu le taux de droit et les codes TARIC individuels de la requérante et d’Evershine.
11 Lors de l’examen des données rassemblées au cours de la deuxième enquête, la Commission a analysé les éléments de preuve disponibles concernant les schémas et circuits de vente des articles en céramique pour la table et la cuisine depuis l’institution des mesures antidumping par le règlement d’exécution no 412/2013. La Commission a relevé que la comparaison des chiffres des exportations de 2014 et de 2018 révélait une forte hausse ou baisse des exportations de certains producteurs-exportateurs, ce qui constituait un indicateur des pratiques de reconfiguration des ventes. En outre, la Commission a noté que, dans certains cas, les exportations réelles de certains producteurs-exportateurs dépassaient leur production déclarée. Se posait en outre la question de l’utilisation abusive de codes additionnels TARIC spécifiques par des sociétés. La Commission a conclu qu’il ressortait de ces indicateurs que certaines sociétés soumises à un taux de droit individuel élevé ou au taux de droit résiduel de 36,1 % vendaient leurs articles en céramique pour la table et la cuisine par l’intermédiaire d’autres producteurs-exportateurs soumis à un droit moins élevé. La Commission a également observé que ces pratiques semblaient entraîner une modification de la configuration des échanges concernant les exportations d’articles en céramique pour la table et la cuisine originaires de Chine après l’instauration des mesures antidumping par le règlement d’exécution no 412/2013, sans qu’il existe une motivation suffisante ou de justification économique autre que l’institution du droit.
12 Le 7 mars 2019, la Commission a rédigé une note jointe au dossier sur l’ouverture d’office d’une enquête concernant le contournement des mesures antidumping applicables aux importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine en provenance de Chine. Dans cette note, la Commission présentait deux indicateurs d’une reconfiguration des ventes du produit soumis aux mesures antidumping instaurées par le règlement d’exécution no 412/2013. Le premier indicateur était celui des sociétés dont les exportations avaient augmenté de plus de 210 % en volume – au cours de la période allant de 2014 à 2018 – qui étaient soumises au droit de 17,9 % et qui exportaient 330 tonnes ou plus vers l’Union en 2018. Le second indicateur était celui des sociétés dont les chiffres des exportations dépassaient leur capacité de production déclarée sur la base de leurs réponses au formulaire d’échantillonnage du réexamen au titre de l’expiration des mesures instaurées par le règlement d’exécution no 412/2013. Dans cette même note, la Commission indiquait qu’elle avait été informée d’enquêtes en cours des autorités douanières concernant un usage abusif de codes TARIC individuels. La Commission indiquait que, sur la base de ces indicateurs et de ces informations, elle estimait avoir suffisamment de preuve des pratiques de reconfiguration des ventes pour 50 sociétés, au sens de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base. Parmi les sociétés en question figuraient Evershine et Shenzhen Worthyway, mais pas la requérante.
13 Le 21 mars 2019, la Commission a adopté le règlement d’exécution (UE) 2019/464, portant ouverture d’une enquête sur le contournement possible des mesures antidumping instituées par le règlement d’exécution no 412/2013 et soumettant ces importations à enregistrement (JO 2019, L 80, p. 18, ci-après le « règlement d’ouverture »).
14 L’article 1er du règlement d’ouverture dispose qu’« [u]ne enquête est ouverte en vertu de l’article 13, paragraphe 3, du règlement [de base] afin de déterminer si les importations dans l’Union d’articles en céramique pour la table et la cuisine, à l’exclusion des moulins à condiments et à épices en céramique ainsi que leurs éléments de broyage en céramique, des moulins à café en céramique, des aiguiseurs à couteaux en céramique, des fusils à aiguiser en céramique, des outils de cuisine en céramique destinés à être utilisés pour les opérations de découpe, broyage, grattage, tranchage, râpage et pelage, et des pierres à pizza en céramique de cordiérite des types utilisés pour la cuisson de pizzas ou de pains, relevant actuellement des codes NC ex 6911 10 00, ex 6912 00 21, ex 6912 00 23, ex 6912 00 25 et ex 6912 00 29 (codes TARIC 6911100090, 6912002111, 6912002191, 6912002310, 6912002510 et 6912002910), originaires de la République populaire de Chine et importés sous les codes additionnels TARIC énumérés en annexe contournent les mesures instituées par le règlement [d’exécution no 412/2013] ».
15 L’article 2, premier alinéa, du règlement d’ouverture prévoit que, conformément à l’article 13, paragraphe 3, et à l’article 14, paragraphe 5, du règlement de base, les autorités douanières prennent les mesures appropriées pour enregistrer les importations dans l’Union déclarées sous les codes additionnels TARIC énumérés à l’annexe dudit règlement.
16 L’annexe du règlement d’ouverture contient un tableau dans lequel figure une liste de 50 codes TARIC additionnels, l’identité des sociétés auxquelles correspondaient ces codes, ainsi que le taux de droit auquel les importations de ces sociétés étaient soumises. Cette liste comporte le code TARIC additionnel d’Evershine, B514, ainsi que la dénomination sociale de celle-ci et le taux de droit de 17,9 %, qui lui avait été imposé par le règlement d’exécution no 412/2013. Le code TARIC additionnel de la requérante ne figure pas dans ladite liste.
17 L’article 3 du règlement d’ouverture dispose ce qui suit :
« 1. Les parties intéressées doivent se faire connaître en prenant contact avec la Commission dans un délai de 15 jours à compter de la date d’entrée en vigueur [dudit règlement].
2. Les parties intéressées doivent présenter leur point de vue par écrit ainsi que les réponses au questionnaire ou toute autre information, qui, pour être pris en considération au cours de l’enquête, seront présentés, sauf indication contraire, dans les 37 jours à compter de la date de publication du présent règlement au Journal officiel de l’Union européenne.
3. Les parties intéressées peuvent également demander à être entendues par la Commission dans le même délai de 37 jours.
[…] »
18 À cet égard, les considérants 13 et 14 du règlement d’ouverture précisent que, afin d’obtenir les informations qu’elle juge nécessaires à son enquête, la Commission enverra des questionnaires aux producteurs-exportateurs mentionnés en annexe, mais que, en tout état de cause, toutes les parties intéressées doivent prendre contact avec la Commission sans tarder, dans le délai prévu à l’article 3, paragraphe 1, dudit règlement, et que le délai prévu à l’article 3, paragraphe 2, de ce même règlement s’applique à toutes les parties intéressées.
19 Aux termes du considérant 16 du règlement d’ouverture, « [t]outes les parties intéressées, y compris l’industrie de l’Union, les importateurs et toute association concernée, sont invitées à faire connaître leur point de vue par écrit et à l’étayer sur des éléments probants, à condition que ces communications soient présentées dans le délai prévu à l’article 3, paragraphe 2 [ ; e]n outre, la Commission peut entendre les parties intéressées, à condition qu’elles en fassent la demande par écrit et qu’elles prouvent qu’il existe des raisons particulières de les entendre ».
20 Le considérant 20 du règlement d’ouverture précise que les parties ne peuvent exercer les droits procéduraux énoncés dans le règlement de base que si elles se sont fait connaître dans le délai fixé à l’article 3 de ce même règlement.
21 Aux termes du considérant 21 du règlement d’ouverture, « [s]i une partie intéressée refuse l’accès aux informations nécessaires, ne les fournit pas dans les délais prévus ou fait obstacle à l’enquête de façon significative, des conclusions, positives ou négatives, peuvent être établies sur la base des données disponibles, conformément à l’article 18 du règlement de base ».
22 Il était précisé au considérant 24 du règlement d’ouverture que, conformément à l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base, l’enquête serait menée à terme dans un délai de neuf mois à compter de la date d’entrée en vigueur dudit règlement.
23 Par ailleurs, l’article 2 du règlement d’ouverture prévoit que, conformément à l’article 13, paragraphe 3, et à l’article 14, paragraphe 5, du règlement de base, les autorités douanières prennent les mesures appropriées pour enregistrer les importations dans l’Union déclarées sous les codes additionnels TARIC énumérés à l’annexe du règlement d’ouverture et que cet enregistrement prend fin neuf mois après la date d’entrée en vigueur de ce dernier règlement.
24 Le questionnaire de la Commission précisait que la période d’enquête s’étendait du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2018 et comportait différentes questions. L’une des questions portait sur l’organisation du groupe auquel Evershine appartenait. Il était ainsi demandé à cette dernière de fournir un schéma du groupe auquel elle appartenait détaillant la structure entrepreneuriale mondiale et les relations, incluant les sociétés mères, filiales et les autres sociétés liées directement ou indirectement à Evershine.
25 Le 6 mai 2019, Evershine a soumis sa réponse au questionnaire à la Commission. S’agissant, en particulier, de la question relative au groupe auquel elle appartenait, Evershine a mentionné Shenzhen Worthyway et une autre société détenue par cette dernière, Liling Taiyu Porcelain Industries Co., Ltd.
26 Par courrier du 28 mai 2019, la Commission a informé Evershine que, après avoir examiné sa réponse au questionnaire, elle avait constaté un certain nombre de manquements quant aux informations demandées. La Commission faisait notamment observer que, dans sa réponse, Evershine n’avait pas fourni une image complète et précise de toutes les entreprises filiales ou apparentées. Elle indiquait que, grâce au système chinois national de publicité des informations de crédit sur les entreprises, elle avait été en mesure d’identifier des sociétés liées à Evershine ou qui lui étaient liées lors de la période d’enquête et qui n’étaient pas mentionnées dans la réponse d’Evershine au questionnaire. La Commission relevait que ces sociétés étaient très probablement actives dans le secteur des articles de table en tant que producteurs ou commerçants et étaient donc supposées soumettre leurs propres réponses au questionnaire. Parmi les sociétés liées identifiées par la Commission figuraient, notamment, Guangxi Beiliu XinFuYuan Porcelain Co. Ltd et la requérante.
27 Dans ce même courrier, la Commission faisait observer que la requérante avait été considérée comme une société liée pendant la période d’enquête, dès lors qu’elle et Shenzhen Worthyway étaient directement ou indirectement détenues par des membres de la même famille. La Commission relevait ainsi que la requérante avait été mentionnée comme société liée lors de l’enquête initiale, ainsi que lors de la deuxième enquête, mais qu’aucune relation n’avait été mentionnée dans la réponse soumise dans le cadre de l’enquête lancée par le règlement d’ouverture. Or, la Commission faisait observer que l’enquête avait permis d’établir les faits suivants s’agissant de la requérante :
« […]
– Avant le 5 juillet 2018, l’actionnaire principal, [A], était le père des actionnaires de Shenzhen Worthyway, [B] et [C] ;
– Le 5 juillet 2018, la majorité des parts de [la requérante] (56, 25 %) ont été transférées de [A] à [B] ;
– Après la période d’enquête, le 17 avril 2019, [B] avait transféré les parts qu’il détenait dans [la requérante]. Toutefois, il a été conclu que, premièrement, ce transfert avait eu lieu plusieurs semaines après le lancement de l’enquête et après que le questionnaire avait été envoyé, deuxièmement, la préparation de certaines réponses au questionnaire avait eu lieu le jour juste après le transfert des parts en question, troisièmement, le transfert des parts avait eu lieu après la période d’enquête et, par conséquent, les informations demandées dans le questionnaire concernant les sociétés liées auraient dû être fournies. »
28 Toujours dans ce même courrier, la Commission rappelait que, conformément aux considérants 21 à 23 du règlement d’ouverture et comme cela a été annoncé dans le questionnaire, elle avait l’intention de fonder ses conclusions sur les faits disponibles, comme le permettait l’article 18, paragraphe 1, du règlement de base, lorsqu’une partie intéressée ne fournit pas les informations nécessaires. S’agissant de la requérante, la Commission indiquait que l’analyse de la base de données douanière de l’Union montrait que celle-ci avait augmenté ses exportations du produit concerné vers l’Union de 1 657 tonnes en 2014 à 3 929 tonnes en 2018. La Commission précisait à cet égard que, compte tenu des lacunes relevées dans la réponse de Evershine au questionnaire, les preuves disponibles, à ce stade, étaient de nature à indiquer qu’il n’y avait aucune justification économique à cette augmentation autre que le fait de canaliser la production d’autres producteurs chinois d’articles de table. La Commission rappelait enfin que, conformément à l’article 18, paragraphe 4, du règlement de base, Evershine avait le droit de fournir davantage d’explications concernant cette évaluation préliminaire.
29 Par un courriel du 25 juin 2019, la requérante a informé la Commission que Evershine lui avait transmis sa réponse au questionnaire du 6 mai 2019, ainsi que le courrier de la Commission du 28 mai 2019, respectivement les 17 et 19 juin 2019. Dans ce courriel, la requérante indiquait ne pas avoir eu, jusqu’alors, connaissance de l’enquête lancée par le règlement d’ouverture et demandait à la Commission de lui permettre de répondre au questionnaire. La requérante se déclarait prête à assumer les coûts d’une inspection sur place, si la Commission jugeait une telle inspection nécessaire. Par ailleurs, la requérante soutenait que l’augmentation de sa capacité de production à une moyenne de 12 000 tonnes par an durant les dernières années était suffisante pour expliquer l’augmentation de son volume d’exportation. La requérante faisait également valoir que les produits de la table fabriqués par Evershine étaient totalement différents de ceux qu’elle produisait, tant quant à leur nature que quant à leurs prix respectifs.
30 Par un courriel du 9 juillet 2019, la Commission a informé la requérante que l’enquête lancée par le règlement d’ouverture étant toujours en cours, elle ne pouvait pas faire de commentaire sur les résultats de celle-ci et, en particulier, sur son impact en ce qui concerne le taux de droit antidumping applicable à la requérante. Dans ce même courriel, la Commission confirmait à la requérante que celle-ci ne faisait pas partie de la liste des sociétés annexée au règlement d’ouverture. Elle soulignait toutefois que la requérante avait elle-même révélé ses relations avec Evershine et Shenzhen Worthyway lors de l’enquête initiale et de la deuxième enquête. La Commission relevait à cet égard que la requérante avait révélé non seulement qu’elle avait des actionnaires communs avec Evershine et Shenzhen Worthyway, mais aussi qu’elle avait avec ces dernières des relations commerciales. La Commission faisait également observer que, d’après les informations en sa possession, ces relations entre ces trois sociétés avaient perduré au cours de la période d’enquête et que c’était seulement le 17 avril 2019, après l’ouverture de l’enquête anticontournement, que des changements dans ces relations avaient eu lieu. Toutefois, en l’absence d’information claire et de documents concernant les circonstances et les personnes liées au changement de structure d’actionnariat de la requérante, la Commission indiquait qu’elle continuerait de la considérer comme liée à Evershine et à Shenzhen Worthyway, aux fins de l’enquête. La Commission invitait la requérante à fournir avant le 12 juillet toute information ou documentation concernant le changement intervenu le 17 avril 2019 dans la structure de son actionnariat.
31 Par un courriel du 11 juillet 2019, la requérante a informé la Commission que, le 17 avril 2019, B avait transféré les parts qu’il détenait dans la requérante à D, son épouse, et a fourni les documents relatifs à ce transfert.
32 Par courrier du 27 septembre 2019, la Commission a tout d’abord informé la requérante que, dans le cadre de l’enquête en cours, elle avait fait savoir à Evershine qu’elle avait l’intention de faire application à l’égard de cette société de l’article 18 du règlement de base en raison de certains manquements constatés et qu’elle avait conclu que ladite société était engagée dans des pratiques de contournement. Elle a ensuite indiqué à la requérante que, compte tenu des liens que cette dernière entretenait avec Evershine, il existait un risque de reconfiguration des ventes et que, afin de limiter ce risque, elle avait l’intention de révoquer son code TARIC additionnel et de le soumettre, en conséquence, au taux de droit résiduel de 36,1 %. La Commission a également informé la requérante qu’elle avait la possibilité de contester sa relation avec Evershine en soumettant ses commentaires à cette fin jusqu’au 18 octobre 2019. Enfin, la Commission a rappelé à la requérante que celle-ci pouvait demander à être entendue par ses services si elle en faisait la demande dans un délai de trois jours ou par le conseiller auditeur pour les procédures commerciales.
33 Le même jour, la Commission a communiqué un document d’information générale dans lequel étaient exposés les motifs d’ouverture de l’enquête, son déroulement et les conclusions de celle-ci.
34 Le 10 octobre 2019, la requérante a contesté les appréciations de la Commission dans le cadre d’une audition organisée à sa demande. Le 18 octobre 2019, elle a également transmis des observations écrites à la Commission relatives au courrier du 27 septembre 2019, dans lesquelles elle a fait valoir que la révocation de son propre code TARIC additionnel n’était justifiée ni en fait ni en droit. Elle a également fait valoir qu’il n’existait aucun risque de reconfiguration commerciale entre elle-même et les sociétés avec lesquelles elle était liée. En outre, elle s’est enquise des garanties et des engagements supplémentaires qui permettraient à la Commission de contrôler les articles en céramique pour la table, fabriqués par la société et importés sous son code TARIC additionnel.
35 Le 28 novembre 2019, la Commission a adopté le règlement d’exécution (UE) 2019/2131 modifiant le règlement d’exécution 2019/1198, instituant un droit antidumping définitif sur les importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine originaires de la République populaire de Chine à l’issue d’un réexamen au titre de l’expiration des mesures effectué conformément à l’article 11, paragraphe 2, du règlement [de base] (JO 2019, L 321, p. 139, ci-après le « règlement attaqué »).
36 L’article 1er, paragraphe 1, du règlement attaqué dispose que le droit antidumping définitif de 36,1 % applicable à « toutes les autres sociétés » institué par l’article 1er, paragraphe 2, du règlement d’exécution 2019/1198 est, à partir du samedi 23 mars 2019, étendu aux importations déclarées par les sociétés qu’il énumère et que les codes TARIC additionnels de ces sociétés, tel que cela a été visé à l’article 1er, paragraphe 2, et à l’annexe I du règlement d’exécution 2019/1198, sont révoqués et remplacés par le code additionnel TARIC B999. Parmi les sociétés énumérées à l’article 1er, paragraphe 1, du règlement attaqué, figure Evershine.
37 L’article 1er, paragraphe 2, du règlement attaqué dispose que, en raison de leur lien avec les sociétés énumérées à l’article 1er, paragraphe 1, dudit règlement, le droit antidumping définitif de 36,1 % applicable à « toutes les autres sociétés » institué par l’article 1er, paragraphe 2, du règlement d’exécution 2019/1198 est, à partir du samedi 23 mars 2019, également étendu aux importations déclarées par les sociétés qu’il énumère et que les codes TARIC additionnels de ces sociétés, tels qu’ils sont mentionnés en annexe I du règlement d’exécution 2019/1198, sont révoqués et remplacés par le code additionnel TARIC B999. Parmi les sociétés énumérées à l’article 1er, paragraphe 2, du règlement attaqué, figure la requérante.
38 Au considérant 47 du règlement attaqué, la Commission a précisé qu’elle avait rejeté l’argumentation présentée par la requérante lors de son audition du 10 octobre 2019 et dans ses observations écrites du 18 octobre 2019 dans les termes suivants :
« Conformément à la définition des sociétés liées figurant à l’article 127 du [règlement d’exécution 2015/2447], la [requérante] est liée à [la société] qui a apporté des réponses très insuffisantes au questionnaire ([Evershine]). Au moment de l’ouverture de l’enquête, il existait un lien financier solide et, après la cession de la participation, peu de temps après cette date, la relation s’est poursuivie sur la base de liens familiaux. En outre, [la requérante] a écrit dans sa lettre du 18 octobre 2019 qu’il exist[ait] encore “un lien familial (à savoir époux et épouse)” entre l’un des actionnaires actuels de cette société et l’un des actionnaires actuels des autres sociétés, confirmant ainsi le fait que les sociétés étaient liées. Il s’ensuit que l’omission de [Evershine] de déclarer toutes les sociétés liées figurant dans une réponse au questionnaire peut également être imputée à la [requérante]. Ensemble, elles ont manqué l’occasion de partager des faits pertinents avec la Commission en dépit d’une lettre du 28 mai 2019 adressée à [Evershine]. En outre, le comportement passé de la [requérante] indique qu’il existe un risque élevé d’acheminement intraentreprise entre les sociétés liées. [La requérante] a augmenté ses exportations qui sont passées de 1 657 tonnes en 2014 à 3 929 tonnes en 2018. Cette hausse ne s’explique par aucune justification économique. Enfin, la Commission a noté que la possibilité de proposer une offre d’engagement au titre de l’article 8 du règlement de base n’exist[ait] pas en cas de contournement au titre de l’article 13 du règlement de base. En conséquence, il convient d’abroger le code additionnel TARIC de la [requérante]. »
Procédure et conclusions des parties
39 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 mars 2020, la requérante a introduit le présent recours.
40 La Commission a déposé le mémoire en défense le 11 juin 2020.
41 La requérante a déposé la réplique le 31 août 2020. La Commission a déposé la duplique le 13 novembre 2020.
42 Un membre de la neuvième chambre ayant été empêché de siéger, la présidente de la neuvième chambre a, par décision du 21 juin 2021, désigné une autre juge pour compléter la chambre, conformément à l’article 17, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal.
43 La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler le règlement attaqué en ce qu’il la concerne ;
– condamner la Commission aux dépens.
44 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
45 À l’appui de son recours, la requérante soulève trois moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base, lu conjointement avec l’article 5, paragraphes 10 et 11, dudit règlement et les articles 6.1, 6.2 et 12.1 de l’accord sur la mise en œuvre de l’article VI de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (GATT) (JO 1994, L 336, p. 103, ci-après l’« accord antidumping »), figurant à l’annexe 1A de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) (JO 1994, L 336, p. 3), ainsi que des principes de non-discrimination et de protection de la confiance légitime. Le deuxième moyen est tiré de l’absence de base juridique du règlement attaqué, d’une erreur manifeste d’appréciation et de l’omission d’examiner tous les éléments de preuve pertinents. Le troisième moyen est tiré de la violation des droits de la défense et du principe de non-discrimination.
Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base, lu conjointement avec l’article 5, paragraphes 10 et 11, dudit règlement et les articles 6.1, 6.2 et 12.1 de l’accord antidumping, ainsi que des droits de la défense, des principes de non-discrimination et de protection de la confiance légitime
46 Le premier moyen se divise en trois branches.
Sur la première branche du premier moyen, tirée de la violation de l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base, lu conjointement avec l’article 5, paragraphes 10 et 11, dudit règlement et avec les articles 6.1, 6.2 et 12.1 de l’accord antidumping
47 La requérante reproche, en substance, à la Commission d’avoir violé les obligations procédurales résultant de l’article 13 du règlement de base, concernant les enquêtes anticontournement, ainsi que d’avoir modifié le champ d’application de l’enquête entre le règlement d’ouverture et le règlement attaqué et d’avoir violé en conséquence ses droits de la défense. Il convient d’examiner ces trois griefs de manière séparée.
– Sur le premier grief, relatif à la violation des obligations procédurales résultant de l’article 13 du règlement de base
48 La requérante soutient que la Commission n’a pas respecté les obligations procédurales prévues par l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base, lu en combinaison avec notamment l’article 5, paragraphes 10 et 11, de ce même règlement et les articles 6.1, 6.2 et 12.1 de l’accord antidumping.
49 La Commission conteste ces arguments.
50 À cet égard, il convient de relever que l’article 13 du règlement de base, tel que modifié par le règlement (UE) n° 2018/825 du Parlement et du Conseil, du 30 mai 2018 (JO L 143, p. 1), sous la rubrique « Contournement », dispose ce qui suit :
« 1. Les droits antidumping institués en vertu du présent règlement peuvent être étendus aux importations en provenance de pays tiers de produits similaires, légèrement modifiés ou non, ainsi qu’aux importations de produits similaires légèrement modifiés en provenance du pays soumis aux mesures ou de parties de ces produits, lorsque les mesures en vigueur sont contournées.
En cas de contournement des mesures en vigueur, des droits antidumping n’excédant pas le droit résiduel institué conformément à l’article 9, paragraphe 5, peuvent être étendus aux importations en provenance de sociétés bénéficiant d’un droit individuel dans les pays soumis aux mesures.
Le contournement se définit comme une modification de la configuration du commerce entre les pays tiers et l’Union ou entre des sociétés du pays soumis aux mesures et l’Union, découlant de pratiques, d’opérations ou d’ouvraisons pour lesquelles il n’existe pas de motivation suffisante ou de justification économique autre que l’imposition du droit, en présence d’éléments attestant qu’il y a préjudice ou que les effets correctifs du droit sont compromis en termes de prix et/ou de quantités de produits similaires et d’éléments de preuve […]
Les pratiques, opérations ou ouvraisons visées au troisième alinéa englobent, entre autres :
[…]
c) la réorganisation, par des exportateurs ou des producteurs, de leurs schémas et circuits de vente dans le pays soumis aux mesures de telle manière que leurs produits sont en fin de compte exportés vers l’Union par l’intermédiaire de producteurs bénéficiant d’un taux de droit individuel inférieur au taux applicable aux produits des fabricants ;
[…]
3. Une enquête est ouverte, en vertu du présent article, sur l’initiative de la Commission ou à la demande d’un État membre ou de toute partie intéressée, sur la base d’éléments de preuve suffisants relatifs aux facteurs énumérés au paragraphe 1 du présent article. L’enquête est ouverte au moyen d’un règlement de la Commission, qui enjoint également aux autorités douanières de rendre l’enregistrement des importations obligatoire conformément à l’article 14, paragraphe 5, ou d’exiger des garanties. La Commission fournit des informations aux États membres lorsqu’une partie intéressée ou un État membre a présenté une demande justifiant l’ouverture d’une enquête et que la Commission a terminé l’examen de celle-ci, ou lorsque la Commission a elle-même déterminé qu’il était nécessaire d’ouvrir une enquête.
[…]
Lorsque les faits définitivement établis justifient la prorogation des mesures, celle-ci est décidée par la Commission, statuant conformément à la procédure d’examen visée à l’article 15, paragraphe 3. L’extension prend effet à compter de la date à laquelle l’enregistrement a été rendu obligatoire conformément à l’article 14, paragraphe 5, ou à laquelle les garanties ont été exigées. Les dispositions de procédure correspondantes du présent règlement concernant l’ouverture et la conduite des enquêtes s’appliquent dans le cadre du présent article.
[…] »
51 Il s’ensuit que, s’agissant des procédures relatives aux enquêtes anticontournement, la Commission est tenue, conformément à l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base, d’ouvrir une enquête, par la voie de l’adoption d’un règlement, de sa propre initiative ou à la demande d’un État membre ou de toute partie intéressée, sur la base d’éléments de preuve suffisants. Celle-ci est également tenue de fournir aux États membres des informations relatives à l’ouverture de ces enquêtes. Enfin, la Commission est tenue d’enjoindre aux autorités douanières de soumettre les importations visées à enregistrement, ou d’exiger des garanties et elle a la faculté de proroger les mesures adoptées lorsqu’elle estime que les faits définitivement établis le justifient.
52 En l’occurrence, il ressort tant du règlement d’ouverture que du règlement attaqué que la Commission a ouvert son enquête de sa propre initiative et informé les États membres et les autorités de la République populaire de Chine qu’il existait des éléments de preuve suffisants pour ouvrir ladite enquête conformément à ces dispositions. La Commission a également informé les producteurs-exportateurs énumérés dans l’annexe du règlement d’ouverture, en leur demandant des informations concernant leurs sociétés liées, et en soumettant leurs importations à enregistrement.
53 La requérante fait valoir néanmoins que, conformément à l’article 5, paragraphes 10 et 11, du règlement de base, d’une part, et aux articles 6.1, 6.2 et 12.1 de l’accord antidumping, d’autre part, la Commission est, dans le cadre d’enquêtes anticontournement, tenue de notifier l’ouverture de ladite enquête à l’ensemble des parties intéressées en les informant plus précisément des produits et des pays concernés, ainsi qu’en ménageant pour ces parties des possibilités de participer à l’enquête en produisant notamment des éléments de preuve.
54 S’agissant, en premier lieu, de l’article 5, paragraphes 10 et 11, du règlement de base, celui-ci prévoit, sous l’intitulé « Ouverture de la procédure », ce qui suit :
« 10. L’avis d’ouverture de la procédure annonce l’ouverture d’une enquête, indique le produit et les pays concernés, fournit un résumé des informations reçues et prévoit que toute information utile doit être communiquée à la Commission.
Il fixe le délai dans lequel les parties intéressées peuvent se faire connaître, présenter leur point de vue par écrit et communiquer des informations si ces points de vue et ces informations doivent être pris en compte au cours de l’enquête. Il précise également le délai dans lequel les parties intéressées peuvent demander à être entendues par la Commission conformément à l’article 6, paragraphe 5.
11. La Commission avise les exportateurs, les importateurs ainsi que les associations représentatives des importateurs ou exportateurs notoirement concernés, de même que les représentants du pays exportateur et les plaignants, de l’ouverture de la procédure et, tout en veillant à protéger les informations confidentielles, fournit le texte intégral de la plainte écrite reçue conformément au paragraphe 1 aux exportateurs connus, aux autorités du pays exportateur et, à leur demande, aux autres parties intéressées. Lorsque le nombre d’exportateurs concernés est particulièrement élevé, il convient plutôt de n’adresser le texte intégral de la plainte écrite qu’aux autorités du pays exportateur ou à l’association professionnelle concernée. »
55 À cet égard, il convient de relever que l’article 13, paragraphe 3, troisième alinéa, dernière phrase, du règlement de base prévoit que « les dispositions de procédure correspondantes du présent règlement concernant l’ouverture et la conduite des enquêtes s’appliquent dans le cadre du présent article ».
56 En ce qui concerne, d’une part, l’article 5, paragraphe 10, du règlement de base, cette disposition établit des obligations en matière de publicité de l’ouverture d’une enquête et d’information des parties intéressées, qui doivent être invitées à participer à la procédure d’enquête dans des délais établis.
57 En l’espèce, il convient de relever que la Commission a respecté ces obligations, en ce que, ainsi qu’il ressort du règlement d’ouverture, elle a annoncé l’ouverture d’une enquête anticontournement en vertu de l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base, tout en indiquant le produit soumis à l’enquête ainsi que le pays concerné. Elle a également fourni un résumé des informations justifiant l’ouverture de l’enquête et a demandé, tant aux sociétés listées en annexe au règlement d’ouverture qu’aux parties intéressées, de lui communiquer toute information utile. S’agissant, en particulier, des parties intéressées, l’article 3 du règlement d’ouverture prévoit expressément que celles-ci doivent se faire connaître en prenant contact avec la Commission dans un délai de 15 jours à compter de la date d’entrée en vigueur dudit règlement et présenter leur point de vue par écrit, ainsi que les réponses au questionnaire de l’enquête dans les 37 jours à compter de la date de publication de ce même règlement. La Commission a enfin informé les parties intéressées qu’elles pouvaient également demander à être entendues dans le même délai de 37 jours.
58 En ce qui concerne, d’autre part, l’article 5, paragraphe 11, du règlement de base, cette disposition exige notamment de la Commission d’aviser les exportateurs, les importateurs ainsi que les associations représentatives des importateurs ou exportateurs notoirement concernés, de même que les représentants du pays exportateur et les plaignants, de l’ouverture de la procédure. Cette obligation s’applique dans le contexte des procédures anticontournement, bien qu’il ne saurait en découler comme le fait valoir la requérante, que la Commission soit tenue de notifier l’ouverture de l’enquête et ses faits essentiels à toutes les parties intéressées. En effet, ainsi que le souligne à juste titre la Commission, à la différence des enquêtes antidumping, qui sont menées pour un pays dans son ensemble et qui visent tous les exportateurs dudit pays, les enquêtes anticontournement examinent des pratiques spécifiques, énumérées à l’article 13 du règlement de base, qui peuvent ne pas concerner un pays dans son ensemble et ciblent des sociétés connues soupçonnées d’y participer.
59 En l’occurrence, l’annexe du règlement d’ouverture publié au Journal officiel contenait une liste de 50 sociétés suspectées d’être impliquées dans des pratiques de reconfiguration des ventes, auxquelles la Commission a adressé un questionnaire, destiné, notamment, à révéler l’identité des sociétés liées susceptibles d’être aussi impliquées dans ces mêmes pratiques. Le fait que la Commission n’ait pas notifié l’avis d’ouverture de manière particulière à d’autres sociétés et qu’elle n’ait pas non plus limité son enquête anticontournement aux seules 50 sociétés mentionnées dans la liste contenue dans l’annexe du règlement d’ouverture, ne saurait être considéré comme une violation de l’article 5, paragraphe 11, du règlement de base. À défaut, l’objectif des enquêtes menées conformément à l’article 13 du règlement de base, lequel, selon la jurisprudence de la Cour, est d’assurer l’efficacité des droits antidumping et d’éviter que ceux-ci ne soient contournés (voir, en ce sens, arrêt du 17 décembre 2015, APEX, C 371/14, EU:C:2015:828, point 50), serait compromis, en ce que des sociétés liées aux sociétés soupçonnées, qui pourraient être impliquées dans des pratiques de contournement, dont notamment la reconfiguration des ventes, resteraient en dehors des possibilités d’enquête de la Commission.
60 Il s’ensuit que la requérante ne saurait reprocher à la Commission d’avoir violé l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base, lu conjointement avec l’article 5, paragraphes 10 et 11, de ce même règlement.
61 S’agissant, en second lieu, des articles 6.1, 6.2, et 12.1 de l’accord antidumping, force est de constater que, à supposer que ces dispositions soient invocables en l’espèce, la requérante n’explique pas en quoi la Commission aurait violé ces dispositions de façon distincte de la prétendue violation de l’article 5, paragraphes 10 et 11, du règlement de base dont elle se prévaut.
62 Il ressort de ce qui précède que, contrairement à ce que la requérante fait valoir, la Commission n’a pas violé les obligations procédurales la concernant lors de l’ouverture et de la mise en œuvre de l’enquête anticontournement.
63 Le premier grief doit donc être rejeté comme non fondé.
– Sur le deuxième grief, relatif à la modification du champ d’application de l’enquête survenue entre le règlement d’ouverture et le règlement attaqué
64 La requérante considère que la Commission a violé l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base, en modifiant le champ d’application de son enquête anticontournement dans le règlement attaqué. Elle souligne, à cet égard, que la Commission n’avait pas le droit d’étendre son enquête à des sociétés ayant un code TARIC additionnel individuel différent de ceux des sociétés figurant dans l’annexe du règlement d’ouverture. Elle ajoute également que la Commission connaissait ses rapports avec la société Evershine depuis 2013. Enfin, la requérante reproche à la Commission de s’écarter de sa pratique habituelle en la matière.
65 La Commission conteste ces arguments.
66 Tout d’abord, il convient de relever que le règlement d’ouverture, dans ses considérants 1, 7, 11, 13 et 14, prévoit ce qui suit :
« 1. La Commission […] a décidé, de sa propre initiative, en vertu de l’article 13, paragraphe 3, et de l’article 14, paragraphe 5, du [règlement de base], d’enquêter sur un éventuel contournement des mesures antidumping instituées sur les importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine originaires de la République populaire de Chine et de soumettre ces importations à enregistrement.
[…]
7. Il ressort [des] indicateurs que certaines sociétés actuellement soumises au taux de droit résiduel de 36,1 % (code additionnel TARIC B999) ou à un taux de droit individuel vendent leurs produits par l’intermédiaire d’autres sociétés soumises à un droit moins élevé. La liste des sociétés soupçonnées d’être impliquées dans de telles pratiques est jointe en annexe.
[…]
11. Si des pratiques de contournement relevant de l’article 13 du règlement de base autres que les pratiques susmentionnées devaient être constatées au cours de l’enquête, elles pourraient, elles aussi, être soumises à enquête.
[…]
13. Afin d’obtenir les informations qu’elle juge nécessaires à son enquête, la Commission enverra des questionnaires aux producteurs-exportateurs mentionnés en annexe.
14. En tout état de cause, toutes les parties intéressées doivent prendre contact avec la Commission sans tarder, dans le délai prévu à l’article 3, paragraphe 1, du présent règlement. Le délai fixé à l’article 3, paragraphe 2, s’applique à toutes les parties intéressées. »
67 Ensuite, aux termes de l’article 1er du règlement d’ouverture :
« Une enquête est ouverte en vertu de l’article 13, paragraphe 3, du [règlement de base] afin de déterminer si les importations dans l’Union d’articles en céramique pour la table et la cuisine, à l’exclusion [de certains produits], originaires de la République populaire de Chine et importés sous les codes additionnels TARIC énumérés en annexe, contournent les mesures instituées par le règlement d’exécution (UE) 412/2013. »
68 Enfin, dans le questionnaire adressé par la Commission aux 50 sociétés listées dans l’annexe du règlement d’ouverture, il est établi ce qui suit :
« I. Introduction
[…]
L’enquête peut également couvrir d’autres pratiques de contournement identifiées au cours de cette enquête, autres que celles mentionnées ci-dessus
[…]
II. Instruction pour remplir ce questionnaire
1. Instructions générales
[…]
4. Bien que le questionnaire soit adressé à votre entreprise, il est entendu que toute entreprise liée, située en République populaire de Chine, doit également remplir ce questionnaire, en répondant le cas échéant, si elle a été impliquée dans la fabrication, la production, la vente ou reventes de vaisselle et ustensiles de cuisine en céramique depuis le début des enquêtes initiales contre les importations de vaisselle et ustensiles de cuisine en céramique en provenance de la République populaire de Chine.
[…] »
69 Il découle des éléments qui précèdent qu’il est certes vrai que le règlement d’ouverture ne cite pas de manière expresse la requérante à son annexe et que ledit règlement vise, selon son article 1er, les pratiques de contournement relatives aux sociétés citées et à leurs codes TARIC additionnels afférents.
70 Cependant, le fait que, d’une part, la Commission ait étendu son enquête à la requérante, alors que celle-ci n’était pas mentionnée dans la liste contenue dans l’annexe du règlement d’ouverture et que, d’autre part, le code TARIC additionnel individuel révoqué soit différent des codes TARIC additionnels visés par ledit règlement ne saurait être considéré comme une extension du champ d’application de l’enquête contraire à l’article 13 du règlement de base.
71 En effet, d’une part, même si la requérante n’est pas incluse dans la liste annexée au règlement d’ouverture, elle devait être considérée comme faisant l’objet de l’enquête en tant que société liée à Evershine, ce qui a été expressément souligné par la Commission dans le questionnaire transmis à cette dernière société, et ce qui ressort également du considérant 7 du règlement d’ouverture. Une interprétation contraire de l’article 13 du règlement de base serait susceptible de nuire à l’objectif de cette dernière disposition, en ce que des sociétés liées, qui pourraient être impliquées dans des pratiques de contournement, comme la reconfiguration des ventes, ne pourraient se voir incluses dans le champ des enquêtes menées par la Commission. À cet égard, il convient de relever que, à partir du moment où la Commission a pris connaissance des liens entretenus entre la requérante et Evershine, elle pouvait à juste titre l’inclure dans la suite de l’enquête.
72 D’autre part, l’affirmation de la requérante selon laquelle la référence à des codes TARIC concrets dans le règlement d’ouverture signifierait que les sociétés liées aux sociétés listées n’étaient pas couvertes, à moins que leurs codes TARIC ne soient inscrits sur la même liste, ne saurait être accueillie. À cet égard, force est de constater que l’article 1er du règlement d’ouverture mentionne comme faisant l’objet de l’enquête anticontournement les produits importés sous des codes additionnels TARIC mentionnés énumérés à l’annexe dudit règlement, et non les produits fabriqués et exportés par les producteurs s’étant vu attribuer les codes additionnels TARIC en question.
73 Il y a donc lieu de conclure que la mention et l’énumération de codes TARIC additionnels à l’annexe du règlement d’ouverture ne limitaient pas l’objet de l’enquête aux sociétés auxquelles lesdits codes étaient attribués, dans la mesure où la reconfiguration des ventes implique précisément que certaines sociétés utilisent à tort les codes TARIC d’autres sociétés. Une enquête visant ce type de pratiques est dès lors susceptible de cibler davantage de sociétés que celles ayant reçu un code TARIC additionnel dont la Commission soupçonne un usage abusif.
74 Le constat opéré au point 73 ci-dessus ne saurait être remis en cause par l’affirmation de la requérante selon laquelle le libellé de l’article 13 du règlement de base ne permet pas d’interpréter la référence à d’« autres pratiques », au considérant 11 du règlement d’ouverture, comme signifiant « des exportateurs autres que ceux énumérés dans l’annexe ».
75 En effet, cette interprétation de l’article 13 du règlement de base se heurte au principe même des enquêtes visant à contrer la reconfiguration des ventes. Dans le cadre de telles pratiques, les sociétés utilisent un code TARIC qui ne leur a pas été attribué, car il est soumis à un taux de droit antidumping plus bas. Il est dès lors nécessaire pour la Commission, afin de déterminer si une société donnée contourne des mesures antidumping, qu’elle soit en mesure d’enquêter non seulement sur d’autres formes de contournement, mais également sur d’autres sociétés que celles auxquelles les codes TARIC correspondant à un taux de droit moins élevé ont été attribués, y compris les sociétés liées, qui pourraient utiliser abusivement lesdits codes lorsque leurs propres codes TARIC correspondent à un taux de droit plus élevé, ou être elles-mêmes engagées dans des pratiques de reconfiguration des ventes consistant à permettre à d’autres sociétés d’utiliser abusivement leur code TARIC additionnel.
76 La requérante ne saurait davantage reprocher à la Commission d’avoir manqué à sa pratique habituelle relative à la publication d’un nouvel avis d’ouverture afin d’inclure dans la liste figurant à l’annexe du règlement d’ouverture des sociétés qui n’y étaient pas initialement mentionnées.
77 En effet, d’une part, il convient de relever que la requérante n’apporte aucun élément de preuve concernant cette prétendue pratique habituelle. À cet égard, force est de constater que la requérante se borne à fournir des exemples connexes codifiés dans le règlement (UE) 2016/1037 du Parlement et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de l’Union européenne (JO 2016, L 176, p. 55, tel que modifié), dont le contenu et la visée diffèrent du règlement de base. D’autre part, et en tout état de cause, il convient de relever que, selon la jurisprudence constante, l’existence d’une pratique antérieure de la Commission en matière antidumping ne prive pas, en soi, cette institution de la possibilité de la modifier ultérieurement (voir, en ce sens, arrêt du 28 février 2017, JingAo Solar e.a./Conseil, T 157/14, non publié, EU:T:2017:127, point 125 et jurisprudence citée).
78 Il ressort de ce qui précède que la Commission n’a pas étendu illégalement le champ d’application de l’enquête en violation de l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base.
79 Le deuxième grief doit donc être rejeté comme non fondé.
– Sur le troisième grief, relatif à la violation alléguée des droits de la défense
80 La requérante reproche, en substance, à la Commission d’avoir violé ses droits de la défense en ne l’incluant pas dans l’annexe du règlement d’ouverture et en lui octroyant en conséquence moins d’opportunités de faire valoir ses arguments que si elle avait été avertie dès le début de son inclusion dans l’enquête.
81 Selon une jurisprudence constante, lorsque les institutions de l’Union disposent d’un large pouvoir d’appréciation, comme c’est le cas dans le domaine des mesures de défense commerciale, le respect des garanties conférées par l’ordre juridique de l’Union dans les procédures administratives revêt une importance d’autant plus fondamentale. Parmi ces garanties, figurent, notamment, l’obligation, pour l’institution compétente, d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce, et le droit de l’administré de faire connaître son point de vue ainsi que de voir motiver la décision de façon suffisante (voir, en ce sens, arrêt du 20 mars 2019, Foshan Lihua Ceramic/Commission, T 310/16, EU:T:2019:170, point 103 et jurisprudence citée).
82 En particulier, les entreprises concernées par une procédure d’enquête précédant l’adoption d’un règlement antidumping doivent être mises en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement leur point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et circonstances allégués et sur les éléments de preuve retenus par la Commission à l’appui de ses allégations (voir, en ce sens, arrêt du 28 octobre 2004, Shanghai Teraoka Electronic/Conseil, T 35/01, EU:T:2004:317 point 289 et jurisprudence citée).
83 Toutefois, une irrégularité procédurale ne saurait entraîner l’illégalité d’un règlement en matière d’antidumping que si, en raison de celle-ci, les parties n’ont pas été en mesure de défendre utilement leurs intérêts (voir arrêt du 14 décembre 2017, AETMD/Conseil, T 460/14, non publié, EU:T:2017:916, point 81 et jurisprudence citée).
84 Premièrement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la circonstance qu’elle n’a pas fait partie des sociétés dont les codes TARIC additionnels étaient mentionnés dans l’annexe du règlement d’ouverture l’aurait induite en erreur quant à la portée de l’enquête et, partant, l’aurait privée de la possibilité de participer à l’enquête dès le début de celle-ci, il convient de relever que la requérante avait elle-même déclaré, dans le cadre de la deuxième enquête, être liée à Evershine dont le code TARIC additionnel était mentionné à l’annexe du règlement d’ouverture. Il convient également de relever que les produits visés par l’article 1er du règlement d’ouverture sont identiques à ceux pour lesquels la requérante s’était vu imposer un taux de droit antidumping de 17,9 % par le règlement d’exécution no 412/2013. Il convient encore de relever que le considérant 11 du règlement d’ouverture précisait que, si des pratiques de contournement relevant de l’article 13 du règlement de base autres que celles mentionnées dans ledit règlement devaient être constatées au cours de l’enquête, elles pourraient, elles aussi, être soumises à l’enquête.
85 Dans ces conditions, la requérante ne pouvait ignorer que, si elle ne faisait pas partie des sociétés dont les codes TARIC additionnels étaient mentionnés à l’annexe du règlement d’ouverture, elle était, à tout le moins, une partie intéressée au sens de l’article 3 de ce même règlement et pouvait, en cette qualité, prendre part à l’enquête dès le début de celle-ci, à la condition que, conformément à l’article 3, paragraphe 1, de ce même règlement, elle se fasse connaître de la Commission dans un délai de quinze jours à compter de l’entrée en vigueur de ce dernier.
86 Il convient de rappeler à cet égard que, conformément à l’article 3, paragraphe 2, du règlement d’ouverture, les parties intéressées qui se manifestaient dans le délai prévu par l’article 3, paragraphe 1, de ce même règlement avaient la possibilité de présenter leur point de vue par écrit, de répondre au questionnaire ou de fournir toute autre information, qui, pour être pris en considération, devaient être présentés, sauf indication contraire, dans un délai de 37 jours à compter de la publication au Journal officiel dudit règlement.
87 Le délai prévu par l’article 3, paragraphe 1, du règlement d’ouverture, entré en vigueur le 23 mars 2019, arrivait à expiration le 7 avril 2019. Or, il est constant entre les parties que la requérante a pris contact avec la Commission dans le cadre de l’enquête anticontournement lancée par le règlement d’ouverture pour la première fois le 25 juin 2019.
88 Il s’ensuit que c’est en raison de cette prise de contact tardive, qui lui est imputable, que la requérante n’a pas été en mesure de participer à l’enquête anticontournement dès le début de celle-ci et non, comme elle le soutient à tort, parce qu’elle n’avait pas été incluse dans la liste des sociétés dont les codes TARIC additionnels étaient mentionnés à l’annexe du règlement d’ouverture.
89 Deuxièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel elle aurait eu moins de temps pour faire valoir ses arguments que les sociétés dont les codes TARIC additionnels étaient mentionnés à l’annexe du règlement d’ouverture, il convient de relever qu’il est vrai que, dans son courriel du 9 juillet 2019, la Commission a accordé à la requérante trois jours afin de fournir des informations et de produire des documents justificatifs quant au changement de structure de son actionnariat (voir point 30 ci-dessus). Toutefois, un tel délai ne saurait être comparé au délai de 37 jours dont ont bénéficié les autres sociétés participant à l’enquête, en vertu de l’article 3, paragraphe 2, du règlement d’ouverture, dans la mesure où, la requérante ne s’étant pas fait connaître de la Commission dans le délai prévu par l’article 3, paragraphe 1, de ce même règlement, elle n’a, en conséquence, pas reçu le questionnaire, ni répondu à celui-ci dans le délai qui était imparti.
90 Il y a dès lors lieu de considérer que, eu égard aux circonstances de l’espèce, la requérante s’est vu aménager une période conforme au temps restant à la Commission pour clore son enquête.
91 Troisièmement, s’agissant de l’allégation de la requérante selon laquelle, en substance, elle aurait été privée de la possibilité de faire valoir ses observations concernant la communication finale étant donné qu’elle n’a eu qu’un délai de 20 jours, alors que les autres sociétés auraient disposé de 37 jours, force est de constater que celle-ci doit être rejetée en ce qu’elle repose sur une confusion entre le délai accordé aux parties intéressées pour soumettre leur point de vue par écrit ainsi que leurs réponses au questionnaire et toute autre information, conformément à l’article 3, paragraphe 2, du règlement d’ouverture, et le délai accordé aux parties par la Commission pour prendre position sur la communication individuelle aux parties de ses intentions les concernant avant l’adoption du règlement attaqué.
92 Quatrièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la Commission l’a également privée de la possibilité de bénéficier d’une demande d’exemption, force est de constater que la Commission a, à plusieurs reprises, octroyé à la requérante l’occasion de faire valoir une telle demande tant dans le cadre de sa correspondance avec ses services en juin et en juillet 2019 que lors de l’audition d’octobre 2019, et que la requérante n’a pas saisi cette opportunité, de sorte que cet argument doit être écarté.
93 Il s’ensuit que le troisième grief doit être rejeté comme non fondé, ainsi que, partant, la première branche dans son ensemble.
Sur la deuxième branche du premier moyen, tirée de la violation du principe de non-discrimination
94 La requérante fait valoir que, en ne l’incluant pas dans la liste initiale des sociétés faisant l’objet de l’enquête, alors même qu’elle était une exportatrice liée connue, la Commission l’a traitée différemment des exportateurs inclus dans cette liste. La requérante ajoute que le fait qu’elle ne satisfait pas aux critères énoncés dans la note du 7 mars 2019 ne saurait justifier objectivement une différence de traitement par rapport aux autres sociétés.
95 La requérante considère que cette différence de traitement a entraîné un désavantage par rapport aux autres exportateurs, en ce qu’elle a bénéficié de moins de temps pour préparer et exercer ses droits de la défense, traitement constitutif d’une violation du principe de non-discrimination.
96 La Commission conteste les arguments de la requérante.
97 Par la deuxième branche du premier moyen, la requérante reproche à la Commission, en substance, d’avoir violé le principe de non-discrimination en ne l’inscrivant pas sur la liste initiale des sociétés faisant l’objet de l’enquête. Elle soutient avoir fait l’objet d’un traitement discriminatoire, sans qu’il soit fondé sur une différence objective par rapport aux sociétés inscrites sur la liste en annexe au règlement d’ouverture.
98 Selon la jurisprudence constante, le respect des principes d’égalité et de non-discrimination requiert que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt du 13 décembre 2007, Asda Stores, C 372/06, EU:C:2007:787, point 62 et jurisprudence citée).
99 Dès lors, la violation, par les institutions de l’Union, du principe de non-discrimination suppose qu’elles aient traité d’une façon différente des sociétés se trouvant dans des situations comparables, entraînant un désavantage pour certaines sociétés par rapport à d’autres, sans que cette différence de traitement soit justifiée par l’existence de différences objectives d’une certaine importance (voir arrêt du 23 octobre 2003, Changzhou Hailong Electronics & Light Fixtures et Zhejiang Yankon/Conseil, T 255/01, EU:T:2003:282, point 60 et jurisprudence citée).
100 En l’espèce, la requérante considère qu’elle se trouvait dans une situation similaire à celle des exportateurs inscrits sur la liste en annexe au règlement d’ouverture.
101 Toutefois, la requérante ne saurait ni faire valoir qu’elle se trouvait dans la même situation que les sociétés visées par l’annexe du règlement d’ouverture, ni soutenir qu’elle a fait l’objet, par conséquent, d’un traitement différent des autres sociétés.
102 D’une part, ainsi qu’il ressort de la note jointe au dossier du 7 mars 2019 (voir point 12 ci-dessus), seules les sociétés qui remplissaient les critères objectifs établis par la Commission figuraient sur la liste publiée en annexe au règlement d’ouverture. La non-inclusion du nom de la requérante dans cette annexe suppose qu’elle était susceptible de s’adonner à des pratiques de contournement d’une façon différente de celle précisément visée dans ladite note, élaborée par ailleurs en vertu du large pouvoir d’appréciation reconnu à la Commission lors de la mise en œuvre d’enquêtes en matière de politique commerciale (voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2014, Gold East Paper et Gold Huasheng Paper/Conseil, T 444/11, EU:T:2014:773, point 71 et jurisprudence citée).
103 À cet égard, il convient d’ajouter que la requérante n’a pas démontré que les critères objectifs établis par la Commission ne témoigneraient pas d’une différence entre les sociétés qui y satisfaisaient et celles qui n’y satisfaisaient pas, et en quoi la définition de ces critères allait au-delà dudit pouvoir d’appréciation.
104 D’autre part, il ressort de l’examen effectué aux points 80 à 93 ci-dessus, que la requérante n’a pas démontré avoir eu moins de possibilités d’exercer ses droits de la défense que les sociétés figurant dans l’annexe du règlement d’ouverture, ce qui fonde, en substance, le reproche formulé à l’encontre de la Commission dans le cadre de la présente branche du présent moyen.
105 Il ne saurait donc être reproché à la Commission d’avoir violé le principe de non-discrimination.
106 La seconde branche du premier moyen doit dès lors être rejetée.
Sur la troisième branche du premier moyen, tirée de la violation du principe de protection de la confiance légitime
107 La requérante considère qu’elle a pu, à l’aune du comportement de la Commission, acquérir une confiance légitime dans le fait qu’elle ne ferait pas l’objet de son enquête et que son code TARIC individuel ne serait pas révoqué.
108 La requérante relève, à ce titre, que la Commission l’a traitée de manière distincte d’Evershine durant l’enquête initiale et dans le cadre des mesures de réexamen, en leur accordant notamment des codes TARIC individuels distincts, en incluant uniquement Evershine dans le règlement d’ouverture ainsi qu’en ne soumettant pas les importations de la requérante à un enregistrement, contrairement à sa pratique usuelle.
109 La Commission conteste ces arguments.
110 La requérante estime que la Commission a violé le principe de protection de la confiance légitime en étendant ultérieurement le champ d’application du réexamen pour l’y inclure, alors qu’elle avait auparavant par son comportement fait naître en elle une attente légitime à ne pas se voir désigner comme faisant l’objet de l’enquête ou à voir son code TARIC révoqué.
111 Le droit de se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime s’étend à tout justiciable à l’égard duquel une institution de l’Union a fait naître des espérances fondées. Le droit de se prévaloir de ce principe suppose néanmoins la réunion de trois conditions cumulatives. Premièrement, des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, doivent avoir été fournies à l’intéressé par l’administration de l’Union. Deuxièmement, ces assurances doivent être de nature à faire naître une attente légitime dans l’esprit de celui auquel elles s’adressent. Troisièmement, les assurances données doivent être conformes aux normes applicables (arrêt du 12 mai 2017, Costa/Parlement, T 15/15 et T 197/15, non publié, EU:T:2017:332, point 73 et jurisprudence citée).
112 Concernant la première de ces conditions, il s’ensuit en particulier qu’une partie n’est en principe pas fondée à se prévaloir du silence de l’administration pour invoquer la violation du principe de protection de la confiance légitime (arrêt du 12 mai 2017, Costa/Parlement, T 15/15 et T 197/15, non publié, EU:T:2017:332, point 74 et jurisprudence citée).
113 Néanmoins, une simple pratique ou tolérance administrative, non contraire à la réglementation en vigueur et n’impliquant pas l’exercice d’un pouvoir d’appréciation, peut susciter la confiance légitime des intéressés, sans donc que celle-ci doive nécessairement se fonder sur une communication de portée générale (arrêt du 28 septembre 2004, MCI/Commission T 310/00, EU:T:2004:275, point 112).
114 En l’espèce, afin de déterminer, d’une part, si la Commission a pu faire naître une attente légitime dans le chef de la requérante quant au fait qu’elle ne ferait pas l’objet de l’enquête et, d’autre part, si la Commission a violé la confiance légitime de la requérante en lui retirant son code TARIC individuel, il convient d’examiner la nature et le contenu des échanges ayant eu lieu entre la Commission et la requérante lors de l’enquête.
115 À cet égard, il doit d’emblée être constaté qu’aucun élément du dossier ne permet d’établir l’existence de prétendues assurances relatives à la non-inclusion de la requérante dans le champ de l’enquête. La Commission reconnaît avoir eu des contacts avec la requérante entre le 9 juillet et le 10 octobre 2019 dans le cadre notamment de sa réponse à la requérante, laquelle avait proposé sa coopération, et dans la perspective de lui signaler son intention de révoquer son code TARIC individuel ainsi que dans le cadre d’une audition.
116 Cependant, aucune des informations communiquées par la Commission à la requérante n’est susceptible de faire naître de telles assurances pour la requérante. Il ressort, en effet, des éléments du dossier que la Commission a davantage mis l’accent, au début du réexamen, sur le fait qu’elle n’avait pas encore pris position concernant l’issue de l’enquête s’agissant de la requérante. Ainsi, il ressort du courriel adressé par la Commission à la requérante le 9 juillet 2019 ce qui suit :
« Nous ne pouvons actuellement pas commenter l’impact que l’enquête aurait sur le droit antidumping applicable pour votre société […] L’impact de toute relation d’une certaine société avec ses sociétés liées énumérées à l’annexe (UE) no 2019/464 doit encore être analysé. »
117 De même, la Commission a fait savoir à la requérante son intention de révoquer son code TARIC individuel ainsi que les évolutions potentielles de l’enquête, notamment dans le cadre de sa communication du 27 septembre 2019, qui indique ce qui suit :
« Étant donné que vous êtes lié à la société susmentionnée, il existe un risque de reconfiguration des ventes intersociétés. Afin d’atténuer ce risque, nous avons l’intention d’abroger votre propre code additionnel TARIC (B588). Par conséquent, vous serez soumis au droit résiduel national de 36,1 %. Cette divulgation ne préjuge pas de toute décision ultérieure qui pourrait être prise par la Commission, mais lorsqu’une telle décision est fondée sur des faits et considérations différents, ceux-ci seront divulgués à votre entreprise dès que possible. »
118 Il s’ensuit que la Commission n’a donné à la requérante aucune assurance précise et inconditionnelle que celle-ci serait définitivement exclue du champ de l’enquête et des mesures adoptées.
119 La constatation qui précède ne saurait être remise en cause par les différents éléments invoqués par la requérante.
120 Premièrement, la requérante souligne ne pas avoir été listée parmi les sociétés visées par l’enquête. Toutefois, à ce titre, s’il est admis par la Commission elle-même, dans son courriel du 9 juillet 2019, que la requérante n’a effectivement pas été incluse dans l’annexe du règlement d’ouverture, la Commission a bien précisé, ainsi que cela ressort du passage cité au point 116 ci-dessus, que l’impact sur les sociétés liées de tout lien qu’elles pouvaient entretenir avec des sociétés listées dans ladite annexe n’avait pas encore été tranché à ce stade.
121 En outre, dans ce même courriel, la Commission a précisé que, selon l’état des informations communiquées à ce stade, la requérante était considérée comme une société liée :
« […] nous continuons à considérer votre entreprise comme liée aux autres entreprises aux fins de l’enquête. »
122 Enfin, la Commission a également ajouté, dans la communication individuelle du 27 septembre 2019, ce qui suit :
« Étant donné que vous êtes lié à la société susmentionnée, il existe un risque de reconfiguration des ventes intersociétés. »
123 Il ne saurait dès lors être considéré que la Commission, en n’incluant pas la requérante dans l’annexe du règlement d’ouverture, lui a donné des assurances inconditionnelles sur le caractère définitif de son exclusion du champ de l’enquête.
124 Deuxièmement, la requérante soutient ne pas avoir été contactée par la Commission dans le cadre de l’enquête. Cette allégation doit toutefois être rejetée.
125 Il convient en effet de relever que la Commission a informé la requérante de l’état de l’enquête dans le cadre de ses courriers des 9 juillet et 27 septembre 2019 et l’a effectivement invitée à fournir davantage d’informations concernant ses liens avec Evershine avant le 12 juillet 2019. Il ne saurait donc être fait grief à la Commission de ne pas être entrée en contact avec la requérante.
126 Troisièmement, la requérante fait valoir que ses importations n’ont pas fait l’objet d’un enregistrement au titre de l’article 2 du règlement d’ouverture. La requérante fonde en partie sa confiance légitime alléguée sur « la pratique habituelle [de la Commission] de rendre tout d’abord l’enregistrement des importations obligatoire avant d’instituer des mesures anticontournement sur ces importations ».
127 À cet égard, il convient de rappeler que la Commission dispose d’une marge d’appréciation quant à la décision de soumettre des importations à enregistrement et que l’existence d’une pratique antérieure ne prive pas, en soi, les institutions de la possibilité de la modifier ultérieurement (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 17 juillet 1998, Thai Bicycle/Conseil, T 118/96, EU:T:1998:184, points 68 et 69).
128 Les exemples relatifs à des affaires différentes auxquels se réfère la requérante ne permettent pas d’établir une pratique constante de la Commission. S’il est vrai qu’il est, tout au plus, usuel pour la Commission de faire précéder l’imposition de mesures anticontournement d’un enregistrement des importations, cette seule pratique ne saurait faire naître chez la requérante une confiance légitime dans le fait qu’elle ne se verrait pas imposer des mesures anticontournement dès lors que ses importations n’ont pas été enregistrées.
129 Quatrièmement, la requérante considère qu’elle a été traitée « séparément » d’Evershine, notamment au regard du fait que la Commission leur a attribué des codes TARIC individuels et qu’elle a également examiné leur situation respective de manière distincte. À cet égard, il suffit de relever que la Commission a, à plusieurs reprises, rappelé à la requérante qu’elle la considérait comme liée à la société Evershine et l’impact potentiel qui pourrait en résulter pour la requérante. En outre, la Commission a expliqué, sans être utilement contredite par la requérante, que, compte tenu du grand nombre de sociétés qui avaient coopéré lors de l’enquête initiale et bénéficié, en conséquence d’un taux de droit réduit, telles que la requérante et Evershine, celles-ci s’étaient toutes vu attribuer des codes TARIC individuels afin de permettre l’identification de leurs exportations et de limiter ainsi les risques de pratiques de reconfiguration des ventes. La requérante ne saurait donc soutenir que la circonstance que la Commission lui a attribué un code TARIC différent de celui de la société Evershine était de nature à fonder sa confiance légitime dans le fait qu’elle n’était pas concernée par l’enquête lancée par le règlement d’ouverture.
130 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que les arguments avancés par la requérante ne sont pas de nature à démontrer que la Commission a violé le principe de protection de la confiance légitime.
131 La troisième branche du premier moyen doit dès lors être rejetée comme non fondée, ainsi que, partant, le premier moyen dans son ensemble.
Sur le deuxième moyen, tiré de l’absence de fondement juridique, d’une erreur manifeste d’appréciation et de l’omission d’examiner tous les éléments de preuve pertinents
132 Le deuxième moyen s’articule autour de deux branches.
Sur la première branche du deuxième moyen, tirée de l’absence de fondement juridique
133 En premier lieu, la requérante soutient que la révocation de son code TARIC additionnel est uniquement fondée sur un prétendu risque élevé de contournement en raison de sa relation avec Evershine qui, selon la Commission serait elle-même engagée dans une pratique de contournement.
134 Toutefois, premièrement, une telle situation ne relèverait pas de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base, qui définirait les conditions permettant d’établir l’existence d’un contournement et non d’un simple risque de contournement, ce qui aurait été confirmé par le Tribunal dans l’arrêt du 26 novembre 2015, Giant (China)/Conseil (T 425/13, non publié, EU:T:2015:896).
135 Deuxièmement, l’argument de la Commission selon lequel il existait un « risque réel » de poursuite au travers de la requérante des pratiques de contournement dans lesquelles Evershine était engagée ne pourrait pas occulter le fait que la Commission n’a pas rapporté la preuve que la requérante s’était elle-même engagée dans une pratique de contournement.
136 Troisièmement, le risque de contournement invoqué par la Commission pour justifier la révocation du code TARIC additionnel de la requérante aurait déjà existé lorsque le règlement no 1072/2012 qui a imposé les mesures antidumping initiales a été adopté, ce qui aurait justifié l’inclusion d’une clause de surveillance spéciale dans ce même règlement ainsi que l’attribution de codes TARIC additionnels différents à des sociétés soumises au même taux de droits.
137 Quatrièmement, le prétendu « risque réel » de contournement ne reposerait que sur la relation d’investissement qui existait entre la requérante et Evershine ainsi que les autres sociétés liées à cette dernière pendant la période d’enquête. Toutefois, la Commission n’aurait ni allégué, ni démontré que la requérante et Evershine ou les sociétés liées à cette dernière auraient acheminé ou seraient capables d’acheminer des produits par leur entremise réciproque.
138 Cinquièmement, la Commission n’aurait pas non plus démontré qu’Evershine s’était effectivement engagée dans des pratiques de contournement, mais aurait simplement présumé ces pratiques en se fondant sur l’augmentation de ses exportations vers l’Union pendant la période d’enquête. Il s’ensuivrait que le risque de contournement invoqué par la Commission en raison des liens de la requérante avec Evershine n’est pas avéré au sens de la jurisprudence, mais seulement hypothétique.
139 En second lieu, la requérante considère qu’il ressort de l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base que l’enregistrement des importations est une condition préalable à l’institution et à l’extension de mesures anticontournement. Cet article exige, selon elle, que l’enregistrement des importations ou l’imposition d’autres garanties constitue le point de départ de l’extension des mesures. Les mesures ne pourraient donc être étendues, à compter de la date d’enregistrement, que pour les importations effectivement enregistrées.
140 La requérante relève à cet égard qu’il résulte de la pratique de la Commission que la mise en place de mesures provisoires est une condition sine qua non à l’institution de droits rétroactifs et soutient qu’elle n’aurait pu faire l’objet de mesures anticontournement, en ce qu’elle n’a à aucun moment vu ses importations soumises à enregistrement. La Commission n’aurait alors fait reposer sa décision sur aucune base juridique.
141 La Commission conteste ces arguments.
– Sur le premier grief, relatif à l’existence d’un risque de contournement
142 La requérante reproche à la Commission d’avoir fondé la révocation de son code TARIC additionnel sur un prétendu risque de contournement découlant uniquement des liens qu’elle entretenait avec Evershine, alors même que, d’une part, un tel risque ne relève pas des situations visées par l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base et, d’autre part, la Commission n’a pas démontré, en l’espèce, que ce risque était avéré.
143 Il convient de rappeler que l’article 13, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement de base définit le contournement dans les termes suivants :
« Le contournement se définit comme une modification de la configuration du commerce entre les pays tiers et l’Union ou entre des sociétés du pays soumis aux mesures et l’Union, découlant de pratiques, d’opérations ou d’ouvraisons pour lesquelles il n’existe pas de motivation suffisante ou de justification économique autre que l’imposition du droit, en présence d’éléments attestant qu’il y a préjudice ou que les effets correctifs du droit sont compromis en termes de prix et/ou de quantités de produits similaires et d’éléments de preuve, si nécessaire fondés sur les dispositions de l’article 2, de l’existence d’un dumping en liaison avec les valeurs normales précédemment établies pour les produits similaires […] »
144 L’existence d’un contournement des mesures antidumping est établie, conformément à l’article 13, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement de base, lorsque quatre conditions sont réunies. Premièrement, il doit y avoir une modification de la configuration des échanges entre un pays tiers et l’Union ou entre des sociétés du pays soumis aux mesures et l’Union. Deuxièmement, cette modification doit découler de pratiques, d’opérations ou d’ouvraisons pour lesquelles il n’existe pas de motivation suffisante ou de justification économique autre que l’imposition du droit. Troisièmement, il doit exister des éléments démontrant que l’industrie de l’Union subit un préjudice ou que les effets correctifs du droit antidumping sont compromis. Quatrièmement, il doit exister des éléments de preuve de l’existence d’un dumping (arrêt du 26 janvier 2017, Maxcom/Chin Haur Indonesia, C 247/15 P, C 253/15 P et C 259/15 P, EU:C:2017:61, point 55).
145 La définition du contournement est formulée en des termes très généraux, ce qui laisse une large marge d’appréciation aux institutions de l’Union, aucune précision n’étant donnée quant à la nature et aux modalités de la modification de la configuration des échanges entre les pays tiers et l’Union (arrêt du 4 septembre 2014, Simon, Evers & Co., C 21/13, EU:C:2014:2154, point 48).
146 À cet égard, premièrement, il y a lieu de relever que l’argumentation de la requérante repose sur la prémisse que la Commission aurait justifié la révocation de son code TARIC additionnel par un risque de contournement résultant uniquement de sa relation avec Evershine.
147 Toutefois, il ressort du considérant 47 du règlement attaqué que la Commission a fondé le retrait du code TARIC additionnel de la requérante sur le constat que celle-ci était liée à Evershine, qui avait apporté des réponses très insuffisantes au questionnaire. La Commission a ajouté que le comportement passé de la requérante indiquait qu’il existait un risque élevé d’acheminement intraentreprise entre les sociétés liées. La Commission a ensuite précisé à cet égard que la requérante avait augmenté ses exportations qui étaient passées de 1 657 tonnes en 2014 à 3 929 tonnes en 2018 et que cette hausse ne s’expliquait par aucune justification économique. La Commission a relevé ensuite que la possibilité de proposer une offre d’engagement au titre de l’article 8 du règlement de base n’existait pas en cas de contournement au titre de l’article 13 dudit règlement. Elle en a conclu qu’il convenait d’abroger le code TARIC additionnel de la requérante.
148 Il s’ensuit que, contrairement à ce que soutient la requérante, la Commission a justifié la révocation de son code TARIC additionnel par le risque élevé de contournement résultant, d’une part, des liens de la requérante avec Evershine et, d’autre part, du comportement propre à la requérante pendant la période d’enquête.
149 Deuxièmement, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base ne serait pas applicable à un risque de contournement. Il convient en effet de relever que, contrairement à ce que soutient la requérante, dans l’arrêt du 26 novembre 2015, Giant (China)/Conseil (T 425/13, non publié, EU:T:2015:896, points 83 et 84), le Tribunal n’a pas exclu que, lors de l’imposition de droits antidumping ou dans le cadre du refus d’octroi d’un droit individuel, les institutions de l’Union puissent se fonder sur un risque de contournement, mais s’est borné à indiquer qu’un tel risque ne pouvait pas être uniquement hypothétique. Cette considération a par ailleurs été confirmée par la Cour dans son arrêt sur pourvoi, dans lequel celle-ci a précisé que, quand bien même le risque de contournement des mesures antidumping serait plus élevé s’agissant d’exportateurs liés auxquels des droits antidumping d’un niveau différent pourraient être imposés, les institutions de l’Union étaient néanmoins tenues de démontrer que, eu égard aux circonstances propres à l’enquête concernée, ce risque était avéré [arrêt du 14 décembre 2017, EBMA/Giant (China), C 61/16 P, EU:C:2017:968, point 84].
150 Troisièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la Commission n’aurait pas rapporté la preuve qu’elle s’était elle-même engagée dans une pratique de contournement, il y a lieu de rappeler que la Commission a justifié la révocation du code TARIC additionnel de la requérante par le risque élevé de contournement résultant non seulement de ses liens avec Evershine, mais également du comportement de la requérante, à savoir une augmentation de ses exportations vers l’Union de 2014 à 2018, qui ne pouvait pas s’expliquer par une justification économique.
151 Il convient également de rappeler que, dans son avis d’ouverture de l’enquête, la Commission a souligné que « [l]a reconfiguration des ventes entraîn[ait] des coûts de transport supplémentaires en République populaire de Chine sans aucune valeur ajoutée » et que « [p]ar conséquent, ce changement dans la configuration des échanges interv[enait] sans motif valable ou justification suffisante autre que l’imposition du droit pour un tel changement ».
152 Il convient encore de rappeler que la Commission a mentionné l’augmentation des exportations de la requérante ainsi que le défaut de justification de celle-ci dans son courrier du 28 mai 2019, qui a été transmis à la requérante par Evershine le 19 juin 2019.
153 Toutefois, la requérante, qui était, à tout le moins, une partie intéressée (voir point 85 ci-dessus), n’a pris contact avec la Commission que le 25 juin 2019, soit plusieurs mois après l’expiration du délai imparti par l’article 3, paragraphe 1, du règlement d’ouverture (voir point 87 ci-dessus), et n’a donc pas, en raison de cette prise de contact tardive, qui lui était imputable, participé à l’enquête anticontournement dès le début de celle-ci (voir point 88 ci-dessus).
154 En outre, pour seule explication de l’augmentation de ses exportations vers l’Union pendant la période d’enquête, la requérante s’est bornée à indiquer à la Commission, dans son courriel du 25 juin 2019 ainsi que dans sa lettre du 18 octobre 2019, que sa capacité de production pouvait absorber suffisamment le volume de ses exportations.
155 En ce qui concerne le niveau de preuve requis pour démontrer l’existence d’un contournement dans l’hypothèse d’une coopération insuffisante ou inexistante d’une partie des producteur-exportateurs, il y a lieu de rappeler qu’aucune disposition du règlement de base ne confère à la Commission, dans le cadre d’une enquête sur l’existence d’un contournement, le pouvoir de contraindre les producteurs ou les exportateurs visés par une plainte à participer à l’enquête ou à produire des renseignements. La Commission est donc tributaire de la coopération volontaire des parties intéressées pour lui fournir les informations nécessaires (arrêt du 26 janvier 2017, Maxcom/Chin Haur Indonesia, C 247/15 P, C 253/15 P et C 259/15 P, EU:C:2017:61, point 60).
156 C’est la raison pour laquelle le législateur de l’Union a prévu à l’article 18, paragraphe 1, du règlement de base que, lorsqu’une partie intéressée refuse l’accès aux informations nécessaires ou ne les fournit pas ou fait obstacle de façon significative à l’enquête, des conclusions préliminaires ou finales, positives ou négatives, peuvent être établies sur la base des données disponibles (arrêt du 26 janvier 2017, Maxcom/Chin Haur Indonesia, C 247/15 P, C 253/15 P et C 259/15 P, EU:C:2017:61, point 61 et jurisprudence citée).
157 En outre, l’article 18, paragraphe 6, de ce même règlement précise que, si une partie concernée ne coopère pas ou ne coopère que partiellement et que, de ce fait, des renseignements pertinents ne sont pas communiqués, il peut en résulter pour ladite partie une situation moins favorable que si elle avait coopéré.
158 La Cour a précisé, à cet égard, qu’il ressortait de l’article 18 du règlement de base que le législateur de l’Union n’a pas entendu établir une présomption légale permettant de déduire directement du défaut de coopération des parties intéressées ou concernées l’existence d’un contournement et, partant, dispensant les institutions de l’Union de toute exigence de preuve. Toutefois, compte tenu de la possibilité d’établir des conclusions, même définitives, sur la base des données disponibles et de traiter la partie qui ne coopère pas ou qui ne coopère que partiellement de façon moins favorable que si elle avait coopéré, il est tout aussi évident que les institutions de l’Union sont autorisées à se fonder sur un faisceau d’indices concordants permettant de conclure à l’existence d’un contournement au sens de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base (arrêt du 26 janvier 2017, Maxcom/Chin Haur Indonesia, C 247/15 P, C 253/15 P et C 259/15 P, EU:C:2017:61, point 64 et jurisprudence citée).
159 À titre d’exemple, une telle pratique peut être identifiée lorsque la modification de la configuration des échanges entre un pays et l’Union a commencé juste après l’institution du droit antidumping sur les importations en provenance d’un deuxième pays tiers. Cette coïncidence dans le temps constitue un indice important permettant d’établir un lien logique et raisonnable entre l’augmentation considérable des importations en provenance du premier état tiers et l’imposition du droit antidumping (arrêt du 4 septembre 2014, Simon, Evers & Co., C 21/13, EU:C:2014:2154, point 52).
160 Force est de constater que l’augmentation des exportations de la requérante vers l’Union de 2014 à 2018 constitue un indice sérieux de contournement au sens de la jurisprudence citée au point 159 ci-dessus.
161 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que, eu égard au manque de coopération de la requérante durant l’enquête, la Commission pouvait fonder ses conclusions quant au comportement passé de la requérante sur les données disponibles relatives à l’augmentation des exportations de la requérante durant la période d’enquête.
162 Quatrièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel le risque de contournement invoqué par la Commission existait déjà lors de l’adoption des mesures antidumping initiales, il suffit de relever que lors de l’adoption desdites mesures, la requérante et Evershine s’étaient certes vu attribuer des codes TARIC additionnels différents, mais qu’elles s’étaient également vu imposer un montant de droit antidumping identique, de sorte que, contrairement à ce que soutient la requérante, il n’existait pas de risque d’acheminement intraentreprise entre la requérante et Evershine.
163 Cinquièmement, il convient de rejeter, comme reposant sur une prémisse erronée, l’argument de la requérante selon lequel dans la mesure où la révocation de son code TARIC additionnel était uniquement justifiée par les liens d’investissement qui l’unissaient à Evershine, la Commission était tenue de démontrer que la requérante, Evershine, ou les autres sociétés liées à cette dernière avaient acheminé ou étaient capables d’acheminer des produits par leur entremise réciproque. En effet, contrairement à ce que soutient la requérante, il ressort du dossier ainsi que du considérant 47 du règlement attaqué que la Commission a constaté l’existence pendant la période d’enquête non seulement de liens financiers, mais également de liens d’actionnariat ainsi que de liens familiaux entre la requérante et Evershine.
164 Sixièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la Commission n’aurait pas rapporté la preuve qu’Evershine se serait effectivement engagée dans des pratiques de contournement, mais aurait présumé qu’Evershine s’était engagée dans de telles pratiques, il convient de relever qu’il ressort du règlement attaqué qu’Evershine faisait partie des producteurs-exportateurs ayant transmis des réponses très incomplètes au questionnaire de la Commission et que, en conséquence, la Commission a établi ses conclusions à l’égard d’Evershine sur la base, d’une part, des données disponibles, notamment, les données relatives aux tendances des exportations vers l’Union et, d’autre part, de son évaluation du niveau d’insuffisance dans les réponses audit questionnaire, conformément à l’article 18, paragraphe 1, du règlement de base (voir considérant 35 du règlement attaqué). Il ressort également du règlement attaqué que la Commission a conclu que, en l’absence de justification économique autre que des pratiques de contournement, Evershine se livrait à des pratiques de reconfiguration des ventes (voir considérant 36 du règlement attaqué).
165 Toutefois, la requérante ne conteste pas le caractère très incomplet de la réponse d’Evershine au questionnaire de la Commission et n’explique pas en quoi, dans ces conditions, eu égard à la jurisprudence rappelée au point 158 ci-dessus, la Commission aurait à tort fondé ses conclusions relatives au comportement d’Evershine sur les données disponibles.
166 Il convient donc de rejeter l’argument de la requérante tiré de ce que la Commission n’aurait pas rapporté la preuve qu’Evershine s’était effectivement engagée dans des pratiques de contournement.
167 Eu égard aux considérations qui précèdent il convient de rejeter le premier grief de la première branche du présent moyen comme non fondé.
– Sur le second grief, relatif à l’obligation d’enregistrement des importations
168 S’agissant de la condition d’enregistrement des importations, la requérante reproche à la Commission d’avoir agi sans fondement juridique en étendant les mesures anticontournement prises à son égard sans l’avoir préalablement soumise à l’enregistrement de ses importations, qu’elle considère comme une condition sine qua non, ainsi que cela ressortirait de l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base.
169 Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base, tel que modifié par le règlement (UE) n° 2018/825 du Parlement et du Conseil, du 30 mai 2018 (JO L 143, p. 1), « [l]’enquête est ouverte au moyen d’un règlement de la Commission, qui enjoint également aux autorités douanières de rendre l’enregistrement des importations obligatoire conformément à l’article 14, paragraphe 5, ou d’exiger des garanties ».
170 Selon la jurisprudence constante, il découle de l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base qu’un règlement portant extension d’un droit antidumping a pour seul objet d’assurer l’efficacité de celui-ci et d’éviter qu’il ne soit contourné. En outre, l’obligation d’enregistrement des importations concernées, dans le cadre spécifique d’un tel contournement, vise également l’efficacité des mesures définitives étendues en rendant possible l’application rétroactive des droits afin d’éviter que les mesures définitives à appliquer ne soient vidées de leur effet utile (arrêts du 6 juin 2013, Paltrade, C 667/11, EU:C:2013:368, points 28 et 29, et du 17 décembre 2015, APEX, C 371/14, EU:C:2015:828, point 50).
171 La Commission dispose à cette fin, comme pour l’ensemble de ses prérogatives, d’une large marge d’appréciation concernant les mesures qu’elle est susceptible de mettre en œuvre dans le cadre de ses enquêtes, afin d’assurer l’efficacité des mesures qu’elle choisit de mettre en place (voir, en ce sens, arrêt du 4 septembre 2014, Simon, Evers & Co., C 21/13, EU:C:2014:2154, point 48).
172 En l’occurrence, le Tribunal considère, à l’instar de la Commission, que, étant donné que l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base n’identifie pas les importations à soumettre à enregistrement, la Commission peut faire le choix, s’agissant de pratiques de reconfiguration des ventes, de ne procéder qu’à l’enregistrement des importations pour lesquelles elle dispose d’indices solides relatifs audit contournement.
173 Une telle conclusion découle de la logique des enquêtes anticontournement, qui sont étendues à un nombre d’entreprises supérieur à celui des entreprises directement visées par le règlement d’ouverture. La Commission n’étant pas en mesure, dès le règlement d’ouverture, d’identifier individuellement l’ensemble des sociétés présentant un intérêt pour son enquête, il est cohérent que la Commission puisse limiter l’enregistrement des importations à certaines sociétés identifiées.
174 Par ailleurs, ce constat ne saurait être remis en cause par l’allégation de la requérante relative à une pratique constante de la Commission consistant à enregistrer l’ensemble des importations. D’une part, la requérante ne saurait démontrer l’existence d’une telle pratique sur le seul fondement d’un exemple unique. D’autre part, même si la requérante était parvenue à caractériser cette pratique constante, la Commission dispose de la possibilité de modifier cette pratique du fait de sa marge d’appréciation, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 77 ci-dessus.
175 Il s’ensuit que la Commission n’a pas agi en violation des obligations lui incombant en vertu de l’article 13, paragraphe 3, du règlement de base.
176 Il convient, dès lors, de rejeter le second grief de la première branche du deuxième moyen comme non fondé.
177 Partant, il y a lieu de rejeter la première branche du deuxième moyen.
Sur la seconde branche du deuxième moyen, relative à l’erreur manifeste d’appréciation et l’omission d’examiner tous les éléments pertinents
178 La requérante fait valoir, en substance, que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation et a omis d’examiner avec soin et impartialité l’ensemble des éléments de preuve pertinents concernant le risque de pratiques de reconfiguration des ventes. Elle considère, en outre, que le raisonnement de la Commission est peu concluant, ne repose pas sur les faits, et est insuffisant pour satisfaire aux critères du droit de l’Union en la matière.
179 La requérante formule ces arguments à l’égard, d’une part, de l’appréciation par la Commission des liens qu’elle entretenait avec Evershine et, d’autre part, de son appréciation de la corrélation entre l’augmentation des exportations et les pratiques de contournement.
– Sur le premier grief, relatif aux liens constatés par la Commission entre la requérante et Evershine
180 La requérante soutient que l’analyse par la Commission des relations entre sociétés dans le cadre d’une enquête anticontournement est prospective et se fonde sur l’état le plus récent des relations entre les parties. La requérante ne conteste pas le constat de la Commission concernant l’existence entre elle et Evershine de liens familiaux et actionnariaux, mais soutient que la Commission ne saurait justifier en quoi ce simple lien permettrait de présupposer l’existence d’une participation, d’un contrôle réciproque sur les opérations entre les sociétés ou d’un risque d’acheminement. Même si sa situation est conforme à la définition des sociétés « liées » de l’article 127 du règlement d’exécution 2015/2447, cette conformité serait réfragable tant au regard de la pratique de la Commission que de la jurisprudence de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), lorsque le lien visé se révèle insuffisamment étroit, ce qui serait le cas en l’espèce, au regard des opérations matérielles totalement séparées des sociétés, et des modifications récentes de leur gestion et de leur actionnariat.
181 En outre, la requérante considère que, même dans l’hypothèse où une relation économique suffisante existerait entre les sociétés, celle-ci serait insuffisante en elle-même pour justifier la présomption par la Commission d’un risque élevé de contournement. La Commission aurait manqué d’analyser les éléments significatifs supplémentaires apportés par la requérante, relatifs aux différences entre les produits exportés par la requérante et Evershine, issues de leurs processus de production, rendant peu probable un acheminement intraentreprise.
182 La requérante en conclut que sa non-inscription sur la liste initiale des exportateurs dans le règlement d’ouverture confirme que ni la Commission ni les autorités douanières de l’Union n’ont observé par le passé des modifications concernant les produits exportés.
183 La Commission conteste les arguments de la requérante.
184 Il convient de relever que, au considérant 47 du règlement attaqué, la Commission a indiqué que, conformément à la définition des sociétés liées figurant à l’article 127 du règlement d’exécution 2015/2447, la requérante était liée à une société qui avait apporté des réponses très insuffisantes au questionnaire, à savoir Evershine. La Commission a précisé à cet égard que, « […] au moment de l’ouverture de l’enquête, il existait un lien financier solide et, après la cession de la participation, peu de temps après cette date, la relation s’était poursuivie sur la base de liens familiaux ». La Commission a, en outre, relevé que la requérante avait indiqué dans son courrier du 18 octobre 2019 qu’il existait encore un lien familial entre l’un des actionnaires de la requérante et l’un des actionnaires des autres sociétés, ce qui confirmait que les sociétés étaient liées (voir point 38 ci-dessus).
185 L’article 127 du règlement d’exécution 2015/2447 définit la notion de sociétés « liées » comme suit :
« 1. Aux fins du présent chapitre, deux personnes sont réputées liées si l’une des conditions suivantes est remplie :
a) elles font partie de la direction ou du conseil d’administration de l’entreprise de l’autre personne ;
b) elles ont juridiquement la qualité d’associés ;
c) l’une est l’employée de l’autre ;
d) une tierce partie possède, contrôle ou détient directement ou indirectement 5 % ou plus des actions ou parts émises avec droit de vote de l’une et de l’autre ;
e) l’une d’elles contrôle l’autre directement ou indirectement ;
f) toutes deux sont directement ou indirectement contrôlées par une tierce personne ;
g) ensemble, elles contrôlent directement ou indirectement une tierce personne ;
h) elles sont membres de la même famille.
2. Les personnes qui sont associées en affaires entre elles, du fait que l’une est l’agent, le distributeur ou le concessionnaire exclusif, quelle que soit la désignation employée, de l’autre, ne sont réputées liées que pour autant qu’elles répondent à l’un des critères énoncés au paragraphe 1.
3. Aux fins du paragraphe 1, [sous] e), f) et g), une personne est réputée contrôler l’autre lorsque la première est, en droit ou en fait, en mesure d’exercer sur la seconde un pouvoir d’orientation. »
186 Le questionnaire de la Commission adressé à Evershine reprenait cette définition et précisait que des personnes n’étaient réputées être membres de la même famille au sens de l’article 127, paragraphe 1, sous h), du règlement d’exécution 2015/2447 que « si elles [étaient] liées l’une à l’autre par une des relations mentionnées ci-après : i) époux et épouse ; ii) ascendants et descendants, en ligne directe au premier degré ; iii) frères et sœurs (germains, consanguins ou utérins) ; iv) ascendants et descendants, en ligne directe au deuxième degré ; v) oncle ou tante et neveu ou nièce ; vi) beaux-parents et gendre ou belle-fille ; vii) beaux-frères et belles-sœurs ».
187 En l’espèce, la requérante estime, en premier lieu, que le lien qui l’unissait à Evershine était insuffisamment étroit au regard des opérations matérielles séparées des sociétés et des modifications récentes de leur gestion et de leur actionnariat, pour qu’elles puissent être considérées comme des sociétés liées. Il n’existerait qu’une « seule relation technique […] entre la requérante, d’une part, et Evershine et Liling Taiyu, de l’autre ».
188 Cet argument doit être écarté dans la mesure où, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 163 ci-dessus, la Commission ne s’est pas limitée à établir un rapport technique entre la requérante et les deux autres sociétés, mais a aussi constaté l’existence d’un actionnariat commun entre les sociétés visées et la requérante ainsi que de liens d’investissement et de liens familiaux.
189 En outre, ce constat ne saurait, au regard des éléments du dossier, être remis en cause par la requérante, qui n’a produit aucun élément de preuve attestant de la séparation de leurs activités et qui a fourni des réponses parfois contradictoires concernant leurs liens familiaux et leur actionnariat commun, sans fournir la preuve de la rupture desdits liens, comme elle le prétend.
190 Ainsi, dans la réponse à la communication finale de la Commission du 27 septembre 2019, la requérante a d’abord souligné qu’elle s’identifiait comme liée à Evershine dès le début.
191 Toutefois, la requérante a ensuite déclaré lors de l’audition qui s’est tenue le 10 octobre 2019 que, depuis avril 2019, des changements étaient intervenus dans son actionnariat et qu’il n’existait plus de liens familiaux entre elle-même et Evershine.
192 Par la suite, la requérante a cependant allégué, dans son courrier du 18 octobre 2019, qu’elle « […] ne ni[ait] pas qu’il exist[ait] toujours un lien familial (c’est-à-dire [époux-épouse]) entre l’un d[e ses] actionnaires actuels […] et l’un des actionnaires actuels d’Evershine et de [Shenzhen] Worthyway, mais sout[enai]t que la restructuration de l’actionnariat en avril 2019 manifest[ait] toujours une séparation formelle de ces sociétés déjà factuellement indépendantes ». La requérante a expliqué à cet égard devant le Tribunal que B et F étaient divorcés depuis le 8 octobre 2019.
193 Il ressort du dossier que, jusqu’au 5 juillet 2018, A était l’actionnaire principal de la requérante, à hauteur de 71,25 %. Le 5 juillet 2018, A a cédé à son fils B la majorité des parts qu’il détenait dans la société requérante et le reste desdites parts au directeur général de la requérante, G. À partir de cette date, B est devenu l’actionnaire principal de la société requérante, à hauteur de 56,25 %. Le 17 avril 2019, B a lui-même cédé les parts qu’il détenait dans la société requérante à son épouse, F (voir point 27 ci-dessus). Il ressort également du dossier que Evershine était détenue, à hauteur de 30 %, par Shenzhen Worthyway, qui était elle-même détenue à parts égales par B et C, les fils de A et, à hauteur de 70 %, par One And Only Trade, cette dernière étant détenue par B et C à hauteur, respectivement, de 49 et de 51 % (voir point 9 ci-dessus).
194 Force est donc de constater que, durant la période d’enquête, qui s’étendait du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2018, la relation entre la société requérante et la société Evershine a d’abord été caractérisée, jusqu’au 5 juillet 2018, par les liens familiaux père-fils existant entre leurs actionnaires respectifs. À partir du 5 juillet 2018 et jusqu’au 17 avril 2019, cette relation a été caractérisée par les liens familiaux entre B, actionnaire principal de la société requérante, et son frère C, actionnaire des deux sociétés mères d’Evershine, ainsi que par un actionnariat commun, B étant devenu actionnaire à la fois de la requérante et d’Evershine.
195 À cet égard, il y a lieu de relever que les changements intervenus à partir d’avril 2019 dans l’actionnariat de la requérante ainsi que dans les liens familiaux entre les actionnaires de la requérante et d’Evershine ne sont pas, par définition, de nature à remettre en cause les circonstances qui prévalaient lors de la période d’enquête.
196 En outre, il convient de relever que, si la cession à F des parts que B détenait dans la société requérante a certes mis fin à la situation d’actionnariat commun entre la requérante et Evershine, des liens familiaux entre les actionnaires des deux sociétés persistaient, compte tenu de la situation matrimoniale de B et F. La requérante ne saurait faire utilement valoir à cet égard la circonstance que B et F auraient divorcé le 8 octobre 2019 dès lors que, d’une part, elle n’apporte aucun élément de preuve à l’appui de cette affirmation et, d’autre part, elle a elle-même indiqué dans les dernières observations qu’elle a transmises à la Commission le 18 octobre 2019 qu’un lien familial « [époux-épouse] » existait entre l’un de ses actionnaires et l’un des actionnaires d’Evershine.
197 Par ailleurs, la requérante soutient que B et F n’interféraient pas « dans le fonctionnement et la gestion de la société » et que celle-ci était gérée par G, qui avait repris depuis 2016 le rôle de représentant légal de la requérante, précédemment occupé par A, et n’avait aucun lien avec Evershine. À cet égard, il y a lieu de relever que la réponse de la requérante au questionnaire d’échantillonnage dans le cadre de la deuxième enquête a effectivement été signée par G, en qualité de représentant légal de la requérante. Il est en outre indiqué dans la réponse en question que G occupe les fonctions de directeur général au sein de la requérante. Toutefois, il y a lieu de relever que ce simple constat ne permet pas de conclure que les actionnaires majoritaires successifs de la requérante, A, puis B, puis F, n’étaient pas en mesure d’intervenir dans la gestion de cette dernière.
198 De plus, il convient de relever que la relation d’investissement entre la requérante et Evershine a été confirmée par la requérante dès sa première prise de contact avec la Commission et n’a pas été remise en question par celle-ci par la suite. À cet égard, il ressort du courriel que la requérante a adressé à la Commission le 25 juin 2019 ce qui suit :
« […] nous avons eu une relation d’investissement avec Evershine Fine China Co., Ltd et Liling Taiyu Porcelain Industries Co., Ltd pendant la période d’enquête. »
199 Au regard de l’ensemble des éléments susmentionnés, la Commission a pu considérer à juste titre, au considérant 47 du règlement attaqué, que la relation entre la requérante et Evershine était déterminée, durant la période d’enquête, par des liens d’investissement, des liens familiaux et par l’existence d’un actionnariat commun.
200 Il ne saurait donc être reproché à la Commission d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation en concluant que la requérante était une société liée à Evershine.
201 En second lieu, la requérante soutient que la simple constatation du statut de sociétés liées d’Evershine et d’elle ne permet pas d’en déduire l’existence d’un risque de contournement. Si cette affirmation est correcte en droit, en l’espèce, ce grief doit être écarté dans la mesure où la Commission n’a pas fondé les mesures adoptées sur la seule existence de liens entre la requérante et Evershine. En outre, il ressort des constatations effectuées aux points 188 à 199 ci-dessus, ainsi que des éléments du dossier, examinés aux points 202 à 207 ci-après, que la Commission s’est correctement fondée sur un ensemble suffisant d’éléments pour identifier un contournement.
202 À cet égard, tout d’abord, il ressort de la note de la Commission du 7 mars 2019 sur l’ouverture d’office de l’enquête que la Commission a ouvert son enquête initiale sur la base d’éléments de preuve qui laissent apparaître l’existence de pratiques de contournement, en se fondant, à titre principal, sur l’intensification des exportations vers l’Union des sociétés auxquelles la requérante se trouvait liée :
« [l]es statistiques Surv2 montrent une augmentation globale des exportations chinoises totales (volumes en hausse de 7 % entre 2014 et 2018). La part des exportations sous le taux de droit moyen pondéré de 17,9 % a augmenté au cours de cette période, passant de 84 % du total des exportations chinoises en 2014 à 86 % en 2018. La part globale des exportations sous le taux de droit résiduel de 36,1 % a diminué de 9 % en 2014 à 7 % en 2018. Ces données au niveau macro soutiennent l’idée qu’un contournement pourrait avoir lieu. »
203 Il ressort de cette même note que, s’agissant des indications d’une reconfiguration des ventes par Evershine, société à laquelle la requérante est liée, la Commission a également constaté que les exportations de celle-ci vers l’Union ont fortement augmenté sans justification économique :
« La Commission dispose de preuves suffisantes de l’existence d’une réorganisation des schémas et des circuits de vente du produit concerné. Les indicateurs de telles pratiques de canalisation sont […] »
204 En outre, dans ses lettres des 28 mai et 11 juin 2019, adressées à Evershine, la Commission a constaté qu’il existait des indices que le négociant lié Shenzhen Worthyway se livrait à des pratiques de contournement. Ce constat a été ultérieurement étendu à la requérante, notamment dans la lettre du 28 mai 2019, dans laquelle la Commission a affirmé ce qui suit :
« […] L’analyse de la base de données douanière de l’UE montre que [la requérante] a augmenté ses exportations vers l’UE de 1 657 tonnes en 2014 à 3 929 tonnes en 2018 du produit concerné. Compte tenu des lacunes décrites dans l’annexe I, les éléments de preuve disponibles indiqueraient qu’il n’y a aucune justification économique à cette augmentation autre que la canalisation de la production d’autres producteurs chinois de vaisselle. »
205 Enfin, ce constat a été étendu par la Commission à la requérante, en tant que société liée, dans le cadre du règlement attaqué, la Commission ayant considéré que la requérante avait fait preuve d’un comportement prouvant qu’il existait un risque élevé d’acheminement intraentreprise entre les sociétés liées et qu’elle avait augmenté ses exportations, lesquelles étaient passées de 1 657 tonnes en 2014 à 3 929 tonnes en 2018.
206 Il s’ensuit que la Commission a fondé son constat sur des données statistiques chiffrées réitérées, pour lesquelles la requérante n’a pas fourni de preuves contraires ou alternatives.
207 La requérante fait néanmoins valoir que la Commission a manqué d’analyser les éléments supplémentaires qu’elle a apportés, relatifs aux différences entre les produits qu’elle et Evershine ont exportés, rendant peu probable une reconfiguration des ventes. À cet égard, il suffit de relever que, s’il est vrai qu’un risque de reconfiguration des ventes est plus probable lorsque les produits commercialisés par les différentes sociétés sont identiques ou à tout le moins similaires, il n’en demeure pas moins que la requérante ne démontre ni qu’il existerait une réelle différence entre ces produits, ni quel serait l’impact de cette différence sur l’existence d’un risque de contournement. En effet, la requérante se borne à reprendre, en substance, dans sa requête et son mémoire en réplique, ses explications concernant la différence de procédés de production entre les produits commercialisés qu’elle et Evershine commercialisent.
208 Il ressort de ce qui précède que, contrairement à ce que la requérante prétend, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste lors de l’appréciation des liens qu’elle entretenait avec Evershine aux fins de constater l’existence d’un risque de reconfiguration des ventes.
209 Le premier grief doit dès lors être rejeté comme non fondé.
– Sur le second grief, relatif à la corrélation entre l’augmentation des importations et l’existence de pratiques de contournement
210 La requérante considère que la Commission s’est fondée à tort sur le constat d’une augmentation passée de ses exportations pour conclure à un risque d’acheminement intraentreprise, alors même que rien n’indique que cette augmentation était due à un contournement. La Commission aurait omis d’examiner l’existence d’explications plausibles à l’augmentation des exportations et de lui donner l’opportunité d’expliquer ce phénomène. Elle relève, à ce titre, que, lorsque ses volumes d’importation et sa capacité de production sont comparés, lesdits volumes sont couverts par sa production, ainsi que cela ressort de la réponse d’échantillonnage qu’elle a présentée lors du réexamen au titre de l’expiration des mesures. La requérante en conclut que le constat de la Commission selon lequel l’augmentation des exportations ne s’expliquerait par aucune « justification économique » ne repose pas sur un examen soigneux des éléments de preuve pertinents apportés par la société.
211 La requérante précise qu’elle n’a été informée du fait que l’enquête était susceptible de la concerner que le 17 juin 2019, et que, en dépit de ses communications directes avec la Commission, cette dernière ne lui a pas directement transmis sa demande de renseignements et ne l’a jamais interrogée sur l’augmentation de ses exportations, se bornant à demander des informations sur la structure de son actionnariat. Partant, la requérante soutient qu’à la suite de ces échanges elle aurait pu s’attendre raisonnablement à ce que la Commission ne soit plus intéressée par ses volumes d’exportation.
212 La Commission conteste les arguments de la requérante.
213 Selon la jurisprudence, pour établir un risque d’acheminement intra-entreprise, la Commission est tenue d’identifier une modification des échanges et de vérifier s’il existe une explication alternative crédible à la modification de la configuration des échanges et aux pratiques de contournement, ce qui revient, en pratique, à rechercher s’il existe des éléments susceptibles de faire obstacle à l’établissement du lien causal entre cette modification et les pratiques de contournement (voir, en ce sens, arrêt du 26 janvier 2017, Maxcom/Chin Haur Indonesia, C 247/15 P, C 253/15 P et C 259/15 P, EU:C:2017:61, point 102).
214 En l’espèce, la Commission a fondé sa décision concernant la participation de la requérante à des pratiques de contournement sur le constat de la modification des importations de la requérante. En particulier, ainsi qu’il résulte du considérant 47 du règlement attaqué, la Commission a considéré que le comportement passé de la requérante indiquait qu’il existait un risque élevé d’acheminement intraentreprise entre les sociétés liées. Elle a relevé à ce titre que la requérante avait augmenté ses exportations qui étaient passées de 1 657 tonnes en 2014 à 3 929 tonnes en 2018, cette hausse ne s’expliquant par aucune justification économique. Cette assertion avait été préalablement formulée par la Commission, dans la lettre que celle-ci a adressée le 28 mai 2019 à Evershine en raison de sa réponse incomplète au questionnaire (voir point 28 ci-dessus), en relevant ce qui suit :
« L’analyse de la base de données douanière de l’UE montre que [la requérante] a augmenté ses exportations vers l’UE de 1 657 tonnes en 2014 à 3 929 tonnes en 2018 du produit concerné. Compte tenu des lacunes décrites dans l’annexe I, les éléments de preuve disponibles indiqueraient qu’il n’y a aucune justification économique à cette augmentation autre que la canalisation de la production d’autres producteurs chinois de vaisselle. »
215 S’agissant de l’argumentation de la requérante selon laquelle l’existence d’un « risque élevé » de contournement à l’avenir ne saurait logiquement être fondée sur une augmentation ancienne des exportations qui n’était pas elle-même due à un acheminement intraentreprise, il convient de relever que la requérante n’a fourni aucune pièce justificative permettant à cette dernière de se fonder sur l’état le plus récent ou à tout le moins un état plus récent des activités d’importation et d’exportation de la requérante. À cet égard, il convient de rappeler, à l’instar de la jurisprudence citée au point 155 ci-dessus, que la Commission est tributaire de la coopération volontaire des parties intéressées aux fins de disposer des informations nécessaires.
216 Ainsi, la requérante n’ayant pas coopéré dans le délai prévu par l’article 3 du règlement d’ouverture, la Commission a été contrainte d’effectuer ses constatations sur la base des données disponibles. Elle a donc utilisé ses propres données statistiques pour les importations, datant de 2018, extraites de la base de données établie au titre de l’article 14, paragraphe 6, du règlement de base, qui ont mis à jour une modification claire de la configuration du commerce au regard de la multiplication des exportations de la requérante par plus de deux. La Commission a, par ailleurs, informé le groupe de sociétés de la requérante de son intention de se fonder sur ces éléments dans sa lettre du 28 mai 2019 à Evershine en indiquant ce qui suit :
« Conformément à l’article 18, paragraphe 4, du règlement [de base], vous avez le droit de fournir des explications supplémentaires concernant l’évaluation préliminaire ci-dessus. Si vous le souhaitez, merci de répondre à la boîte aux lettres fonctionnelle avant le 5 juin 2019. Dans tous les cas, vous êtes prié de fournir un accusé de réception de ce courrier en nous adressant un e-mail à la boîte aux lettres fonctionnelle. »
217 La Commission a, en outre, informé la requérante de son intention de se fonder sur lesdits éléments dans sa lettre du 27 septembre 2019 à la requérante dans laquelle elle a indiqué ce qui suit :
« Au cours de la présente enquête, nous avons informé [Evershine] de notre intention d’appliquer l’article 18 (non-coopération) du règlement de base en raison de certaines déficiences qui ont été identifiées et de notre conclusion selon laquelle elle se livre à des pratiques de contournement. »
218 La Commission a donc correctement établi la modification du flux de commerce relatif à la requérante, caractéristique d’une pratique de contournement, particulièrement au regard du peu d’informations ou de données supplémentaires fournies par cette dernière, et ce malgré les invitations de la Commission à cette fin. Il ne saurait donc être reproché à la Commission de s’être fondée sur des éléments anciens, n’illustrant pas une pratique de contournement.
219 Un grief similaire est ensuite formulé par la requérante à l’égard du constat effectué par la Commission de l’absence de justification économique aux pratiques de contournement. La Commission aurait manqué d’apprécier l’ensemble des éléments soulevés par la requérante, et, plus particulièrement, ses arguments portant sur ses capacités de production.
220 En l’espèce, le Tribunal relève que, comme il a été établi dans le cadre de l’examen de la première branche du présent moyen, la Commission s’est conformée à son obligation de rechercher une justification économique à la modification des échanges.
221 En outre, la seule justification fournie à cet égard par la requérante au cours de la procédure administrative, d’abord dans son courrier électronique du 25 juin 2019, puis dans sa lettre du 27 septembre 2019, est que, même en tenant compte de leur augmentation durant la période d’enquête dans le cadre du réexamen, ses exportations restaient largement inférieures à ses capacités de production. Toutefois, il ne ressort pas du dossier que la requérante ait apporté des éléments de preuve à l’appui de cette explication.
222 Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel une augmentation des exportations qui serait due à un acheminement intraentreprise aurait entraîné automatiquement une modification du type de produits qu’elle exportait. En effet, aucun élément n’a été produit par la requérante afin d’étayer cette affirmation, formulée d’ailleurs brièvement dans son courriel du 11 juillet 2019 à la Commission. La requérante se borne effectivement à souligner les différences entre le procédé de production de ses produits et celui d’Evershine et à affirmer que ses produits ne peuvent pas être mélangés avec ceux d’Evershine, sans fournir d’éléments venant appuyer ces affirmations.
223 De surcroît, la requérante confond ses arguments relatifs à une prétendue erreur d’appréciation des éléments de fait par la Commission et ceux relatifs à l’existence d’une confiance légitime quant au fait que les justifications économiques relatives à ses flux d’importations ne seraient pas mises en cause. Contrairement à ce qui est allégué par la requérante, le fait que la Commission n’ait pas, dans son courriel du 9 juillet 2019, mentionné ses volumes d’exportation ne saurait impliquer qu’elle aurait pu s’attendre raisonnablement, à la suite de cette communication directe, à ce que la Commission ne soit plus intéressée par ses volumes d’exportation. Force est de constater, à cet égard, que la Commission s’était auparavant intéressée à ces volumes et à leur justification.
224 Il en résulte que la Commission n’a pas omis d’examiner certains éléments de preuve ou commis une erreur manifeste d’appréciation de ces éléments dans le cadre du constat d’un risque élevé de pratiques de contournement attribuées à la requérante.
225 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter la seconde branche du deuxième moyen comme non fondée, ainsi que, par conséquent, ce moyen dans son ensemble.
Sur le troisième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense et du principe de non-discrimination, en ce que le règlement attaqué mentionnerait des éléments de fait nouveaux sur lesquels la requérante n’a pas eu la possibilité de prendre position
226 La requérante soutient que, malgré l’obligation d’information des parties pesant sur la Commission conformément à la jurisprudence constante, le règlement attaqué contenait deux éléments de fait nouveaux sur lesquels elle n’a pas eu la possibilité de formuler des observations, à savoir, d’une part, l’augmentation de ses exportations entre 2014 et 2018 et, d’autre part, le fait que cette augmentation ne s’expliquait prétendument par aucune justification économique.
227 La requérante relève que, dans sa communication du 27 septembre 2019, la Commission l’avait informé de son intention de révoquer son code TARIC additionnel en raison du risque d’acheminement intraentreprise résultant de ses liens allégués avec Evershine qui était engagée, selon la Commission, dans des pratiques de contournement.
228 Concernant, d’une part, l’augmentation de ses exportations, la requérante soutient que la Commission n’a à aucun moment mentionné ou directement demandé d’informations sur ses schémas de production et d’exportation. Elle reproche en outre à la Commission d’avoir sorti ces informations de leur contexte dans le règlement attaqué. Concernant, d’autre part, la justification économique de cette augmentation, la requérante fait valoir que ce n’est que dans le règlement attaqué que la Commission a, pour la première fois, tenu compte des circonstances économiques dans lesquelles s’inscrivaient ses exportations. Elle relève qu’aucun de ses échanges avec la Commission ne portait sur cette question.
229 Enfin, la requérante rappelle que la Commission l’a spécifiquement exclue de son enquête anticontournement en ne lui offrant pas de possibilité de fournir une réponse au questionnaire. Dans ces circonstances, elle estime que le fait de n’avoir eu aucun moyen d’expliquer les variations de ses exportations, alors que les autres exportateurs faisant l’objet de l’enquête se sont vu offrir une telle possibilité, constitue une violation de ses droits de la défense et une violation du principe de non-discrimination.
230 La Commission conteste les arguments de la requérante.
231 Dans le cadre de son troisième moyen, la requérante reproche à la Commission de ne pas l’avoir informée en temps utile de deux éléments qu’elle considère comme nouveaux, présents dans le règlement attaqué, relatifs à l’augmentation de ses exportations vers l’Union entre 2014 et 2018 et à l’absence de justification économique de cette augmentation, et de l’avoir, dès lors, privée de la possibilité de les commenter contrairement aux autres exportateurs faisant l’objet de l’enquête, violant ainsi, d’une part, ses droits de la défense et, d’autre part, le principe de non-discrimination. Il convient d’examiner ces deux griefs de manière séparée.
Sur le premier grief, relatif à la violation des droits de la défense
232 Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, lorsque les institutions de l’Union disposent d’un large pouvoir d’appréciation, le respect des garanties conférées par l’ordre juridique de l’Union revêt une importance fondamentale. Parmi ces garanties, figurent, notamment, l’obligation, pour l’institution compétente, d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce, et le droit de l’administré de faire connaître son point de vue ainsi que de voir motiver la décision de façon suffisante (voir arrêt du 20 mars 2019, Foshan Lihua Ceramic/Commission, T 310/16, EU:T:2019:170, point 103 et jurisprudence citée).
233 De même, les entreprises concernées par une procédure d’enquête précédant l’adoption d’un règlement antidumping doivent être mises en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement leur point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et circonstances allégués et sur les éléments de preuve retenus par la Commission à l’appui de ses allégations (voir, en ce sens, arrêt du 28 octobre 2004, Shanghai Teraoka Electronic/Conseil, T 35/01, EU:T:2004:317, point 289 et jurisprudence citée).
234 En l’espèce, tout d’abord, il convient de relever que, dans son courrier du 28 mai 2019 adressé à Evershine, la Commission a indiqué qu’elle avait relevé un certain nombre de manquements dans la réponse de celle-ci au questionnaire qui lui avait été adressé dans le cadre de l’enquête. La Commission a ainsi notamment relevé qu’Evershine n’avait pas mentionné les liens qu’elle entretenait ou qu’elle avait entretenus pendant la période d’enquête, avec d’autres sociétés dont la requérante. La Commission a en outre précisé que ces sociétés étant très probablement actives dans le secteur des articles de table en tant que producteurs ou commerçants, elles étaient supposées soumettre leurs propres réponses au questionnaire (voir point 26 ci-dessus). S’agissant de la requérante, la Commission a explicitement fait référence à l’augmentation de ses exportations vers l’Union entre 2014 et 2018 ainsi qu’à l’absence de justification économique à celle-ci (voir point 28 ci-dessus). Dans ce courrier, la Commission a encore rappelé que, conformément aux considérants 21 à 23 du règlement d’ouverture et comme cela est annoncé dans le questionnaire, elle avait l’intention de fonder ses conclusions sur les faits disponibles, comme le lui permettait l’article 18, paragraphe 1, du règlement de base, lorsqu’une partie intéressée ne fournissait pas les informations nécessaires. Elle précisait également qu’Evershine avait le droit de fournir des explications supplémentaires concernant cette évaluation préliminaire, conformément à l’article 18, paragraphe 4, du règlement de base (voir point 28 ci-dessus).
235 À cet égard, il convient de souligner que le courrier de la Commission du 28 mai 2019 a été transmis à la requérante par Evershine le 19 juin 2019, comme la requérante l’a elle-même expliqué à la Commission dans le courriel qu’elle lui a adressé le 25 juin 2019 (voir point 29 ci-dessus).
236 Il convient également de relever que, dans son courriel du 25 juin 2019, la requérante a confirmé, s’agissant de l’augmentation de ses exportations vers l’Union, les données fournies par la Commission dans sa lettre du 28 mai 2019 et a indiqué que cette augmentation s’expliquait par une augmentation de sa capacité de production (voir point 29 ci-dessus). Force est donc de constater que ce sujet avait été porté à la connaissance de la requérante au plus tard le 19 juin 2019, date à laquelle elle a reçu d’Evershine le courrier de la Commission du 28 mai 2019 et qu’elle a pris position à cet égard dès le 25 juin 2019, soit plusieurs mois avant l’adoption du règlement attaqué.
237 Il est certes vrai que, comme le fait valoir la requérante, la Commission n’a pas fait expressément référence dans la communication qu’elle lui a adressée le 27 septembre 2019 à l’augmentation des exportations de la requérante vers l’Union entre 2014 et 2018 et à l’absence de justification économique à cette augmentation. Dans cette communication, la Commission a en effet indiqué qu’elle avait constaté que la requérante était liée à Evershine et que cette dernière était engagée dans des pratiques de contournement. La Commission avait précisé que, compte tenu de cette situation, il existait un risque d’acheminement intraentreprise et que, afin de limiter ce risque, elle avait l’intention d’abroger le code TARIC additionnel de la requérante et de soumettre celle-ci, en conséquence, à un taux de droit résiduel de 36,1 %.
238 Toutefois, il importe de souligner que, dans le document d’information générale que la Commission a diffusé auprès des entreprises concernées par l’enquête le 27 mars 2019, la Commission a indiqué ce qui suit :
« Début 2019, la Commission a analysé les éléments de preuve disponibles concernant les modèles et les circuits de vente d’articles de table et de cuisine en céramique depuis l’institution des mesures initiales. La comparaison des chiffres d’exportation entre 2014 et 2018 a révélé une forte hausse ou baisse des exportations de certains producteurs-exportateurs, ce qui a constitué un indicateur des pratiques d’acheminement intra-entreprise […] En effet, les volumes d’importations du produit soumis à l’enquête, tels que définis au considérant (15), ont augmenté de manière significative pour certains producteurs-exportateurs entre 2014 et 2018 […] »
239 Dans ce même document, la Commission a également indiqué que « [l]’enquête n’a[vait] mis en lumière aucun motif valable ou justification économique pour les pratiques d’acheminement intra-entreprise autre que l’évitement du droit résiduel ou plus élevé en vigueur sur la vaisselle et les ustensiles de cuisine originaires de la [République populaire de Chine] ».
240 Force est donc de constater que la requérante ne pouvait ignorer que la Commission fonderait son appréciation à son égard, notamment, sur l’augmentation de ses exportations vers l’Union et l’absence de justification économique à cette augmentation et qu’elle avait encore, à ce stade, la possibilité d’évoquer cette question avec la Commission lors de l’audience du 10 octobre 2019. En tout état de cause, il convient de relever que, dans sa lettre du 18 octobre 2019, la requérante a d’elle-même abordé la question de l’augmentation de ses exportations vers l’Union et justifié celle-ci par une augmentation de ses capacités de production (voir point 34 ci-dessus).
241 Par ailleurs, ainsi que le fait justement observer la Commission, si la requérante avait des doutes quant au respect de son droit d’être entendu lors de la procédure administrative en ce qui concerne cette constatation de la Commission à son égard et les conséquences qu’elle pourrait en tirer, il lui était loisible de saisir le conseiller-auditeur, ce qu’elle s’est abstenue de faire.
242 Il ne saurait donc être considéré que l’augmentation des exportations de la requérante vers l’Union de 2014 à 2018 et l’absence de justification économique de cette augmentation, relevées par la Commission dans le règlement attaqué, constituaient des éléments nouveaux sur lesquels la requérante n’aurait pas eu la possibilité de faire valoir des observations en temps utile.
243 Ce constat ne saurait être remis en cause par l’argument de la requérante selon lequel la Commission ne se serait pas directement renseignée auprès d’elle concernant l’augmentation de ses volumes d’exportation vers l’Union et une éventuelle justification économique de celle-ci.
244 En effet, pour autant que, par cet argument, la requérante reproche à la Commission de ne pas lui avoir permis de remplir un questionnaire, malgré la proposition qu’elle avait formulée à cet égard dans son courrier du 25 juin 2019, il convient de relever, à l’instar de la Commission, que celle-ci était tenue de clore l’enquête anticontournement dans un délai de neuf mois, conformément au règlement de base, de sorte qu’elle a pu considérer à juste titre qu’il n’était pas possible de reprogrammer les différentes étapes de l’enquête, en envoyant de nouveaux questionnaires et en programmant des visites de vérification, sans compromettre le déroulement de l’enquête dans le délai imparti.
245 Il ressort de tout ce qui précède que, contrairement à ce que fait valoir la requérante, elle a eu l’occasion de se prononcer sur les deux éléments qu’elle invoque et que, par conséquent, la Commission n’a pas violé ses droits de la défense.
246 Le premier grief doit dès lors être rejeté comme non fondé.
Sur le second grief, relatif à la violation du principe de non-discrimination
247 Conformément à une jurisprudence constante, le respect des principes d’égalité et de non-discrimination requiert que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt du 13 décembre 2007, Asda Stores, C 372/06, EU:C:2007:787, point 62 et jurisprudence citée).
248 Dès lors, la violation, par les institutions de l’Union, du principe de non-discrimination suppose qu’elles aient traité d’une façon différente des sociétés se trouvant dans des situations comparables, entraînant un désavantage pour certaines sociétés par rapport à d’autres, sans que cette différence de traitement soit justifiée par l’existence de différences objectives d’une certaine importance (voir arrêt du 23 octobre 2003, Changzhou Hailong Electronics & Light Fixtures et Zhejiang Yankon/Conseil, T 255/01, EU:T:2003:282, point 60 et jurisprudence citée).
249 En l’espèce, la requérante soutient que, à la différence des autres sociétés visées par l’enquête, elle ne s’est pas vu aménager des possibilités de commenter l’augmentation de ses exportations vers l’Union entre 2014 et 2018, ni l’affirmation de la Commission selon laquelle cette augmentation ne s’expliquerait par aucune justification économique. La Commission aurait ainsi violé le principe de non-discrimination.
250 Cet argument doit être écarté.
251 En effet, ainsi qu’il découle de la deuxième branche du premier moyen, ainsi que des développements figurant dans le cadre du présent moyen et relatifs au respect des droits de la défense, la requérante ne se trouvait pas dans la même situation ou dans une situation comparable à celles des autres sociétés visées par l’enquête. De plus, il a été démontré que la Commission a, autant que faire se peut, aménagé des possibilités pour la requérante de faire valoir ses arguments sur les deux aspects litigieux avant l’adoption du règlement attaqué.
252 Il en résulte qu’il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir traité la requérante différemment des autres sociétés en violation du principe de non-discrimination, de sorte que le présent grief doit être rejeté, ainsi que, partant, le troisième moyen.
253 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.
Sur les dépens
254 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.