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Décisions

Cass. 3e civ., 9 octobre 1996, n° 94-17.198

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. BEAUVOIS

Colmar, 1re chambre civile, du 24 mai 19…

24 mai 1994

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
 
I - Sur le pourvoi n° K 94-17.198 formé par :
- la société Brasserie Kronenbourg, société anonyme, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 24 mai 1994 par la cour d'appel de Colmar (1re chambre civile) , au profit :
 
1°/ de M. Oscar A...,
2°/ de Mlle Josette A..., demeurant tous deux restaurant "Au Coq blanc", ..., en redressement judiciaire, 3°/ de M. Christian E..., syndic administrateur judiciaire, assistant M. Oscar A... et Mlle Josette A..., domicilié ..., 4°/ de Mme D... A..., née H..., ayant demeuré restaurant "Au Coq blanc", ..., et aux droits de laquelle se trouvent ses héritiers :

Mlle Josette A... et M. Gabriel A..., qui ont déclaré, par conclusions déposées au greffe le 3 mars 1995, reprendre l'instance, 5°/ de la société civile immobilière (SCI) Germarc, dont le siège est ..., représentée par sa gérante, Mme Victorine B..., née G..., propriétaire de l'immeuble ..., défendeurs à la cassation du pourvoi n° K 94-17.198 ;

II - Sur le pourvoi n° Q 94-19.870 formé par :

1°/ M. Oscar A...,

2°/ Mlle Josette A...,

3°/ M. Christian E..., administrateur judiciaire ès qualités, 4° Mme D... A..., née H..., aux droits de laquelle se trouvent ses héritiers, en cassation du même arrêt rendu au profit 1°/ de la société civile immobilière (SCI) Germarc, 2°/ de la société anonyme Brasserie Kronenbourg, défenderesses à la cassation du pourvoi n° Q 94-19.870 ;

Sur le pourvoi n° K 94-17.198 :

La demanderesse invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Sur le pourvoi n° Q 94-19.870 :

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur recours, deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 17 juillet 1996, où étaient présents :

M. Beauvois, président, Mme Stéphan, conseiller rapporteur, MM. X..., Y..., F..., C... Z... Marino, Borra, MM. Bourrelly, Peyrat, conseillers, MM. Chollet, Pronier, conseillers référendaires, M. Weber, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Stéphan, conseiller, les observations de Me Roue-Villeneuve, avocat de la société Brasserie Kronenbourg, de la SCP Nicolay et de Lanouvelle, avocat des consorts A... et de M. E..., ès qualités, de Me Vincent, avocat de la société civile immobilière (SCI) Germarc, les conclusions de M. Weber, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Joint les pourvois n° Q 94-19.870 et K 94-17.198 ;

Sur le premier moyen du pourvoi n° Q 94-19.870 :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 24 mai 1994), que les consorts North ont, par contrat du 17 octobre 1932, donné à bail à la société Brasserie Kronenbourg des locaux à usage commercial ;
que ce contrat a été renouvelé jusqu'en 1977 ;
que la société Brasserie Kronenbourg a, le 9 août 1977, cédé le fonds de commerce exploité dans les lieux à ses locataires-gérants, les époux A... ;
que le nouveau propriétaire de l'immeuble, la SCI Faubourg de Pierre, aux droits de laquelle se trouve la SCI Germarc, a donné à bail, le 20 septembre 1977, pour neuf ans, aux époux A..., les locaux dans lesquels était exploité ce fonds ;
que la SCI Germarc a, le 16 avril 1986, donné congé aux époux A... avec refus de renouvellement du bail sans offre d'indemnité d'éviction au motif qu'ils n'étaient pas propriétaires du restaurant exploité dans les lieux ;
que les locataires ont assigné la bailleresse pour se voir reconnaître la propriété du fonds de commerce ;
que celle-ci les a assignés pour faire constater qu'ils étaient occupants sans droit ni titre ;
que les époux A... ont appelé en garantie la société Brasserie Kronenbourg ;

Attendu que les consorts A... font grief à l'arrêt de déclarer recevable et fondé le congé délivré par la SCI Germarc, alors, selon le moyen, "que la délivrance d'un congé, même régulier en la forme, pour une date différente de l'échéance prévue par le bail, équivaut à une absence de congé ;

que la cour d'appel, qui a reconnu pleine force au congé donné par la SCI Germarc aux consorts A..., après avoir constaté qu'il avait été délivré pour une date différente de l'échéance visée par le bail, a violé les articles 5 et 6 du décret du 30 septembre 1953" ;

Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu que la délivrance du congé pour le 31 octobre 1986 au lieu du 31 décembre 1986, date d'expiration du bail, n'avait pas pour conséquence de rendre nul ce congé mais qu'il convenait d'en reporter l'effet au 31 décembre 1986 ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi n° Q 94-19.870 :

Attendu que les consorts A... font grief à l'arrêt de dire qu'ils n'avaient pas la qualité de propriétaires du fonds de commerce exploité dans les locaux, alors, selon le moyen, "que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ;

qu'en énonçant que le contrat de bail conclu le 17 octobre 1932 par la société Brasserie Kronenbourg avec les consorts North concernait à la fois les locaux et le fonds, puis que ce contrat ne faisait état que des locaux, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant, abstraction faite de motifs surabondants, relevé, par motifs adoptés, que les consorts A... n'avaient pas acquis la qualité de propriétaires du fonds malgré l'acte de cession du 9 août 1977 dès lors qu'il résultait du contrat d'apport du 25 avril 1970 que la société Brasserie Kronenbourg n'était que le locataire du fonds, la cour d'appel ne s'est pas contredite ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° K 94-17.198 :

Attendu que la société Brasserie Kronenbourg fait grief à l'arrêt de déclarer fondé l'appel en garantie formé par les consorts A... à son encontre, alors, selon le moyen, "1°) que le bail d'origine du 17 octobre 1932 indique en son article 7 que les bailleurs garantissent à la société Brasserie Kronenbourg la possession et la jouissance des lieux loués en tant que débit de bière ;

que la cour d'appel, qui avait constaté que les actes de renouvellement du bail portaient, quant à eux, la mention suivante :
"Il existe relativement à la brasserie restaurant "Au Coq blanc" un bail conclu en 1932, ce qui implique qu'il ne s'agissait plus de l'exploitation du même fonds de commerce que celui loué à l'origine ;
d'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qu'appelaient ses propres constatations et a violé les articles 8 et suivants du décret du 30 septembre 1953 ;

2°) que la responsabilité du vendeur ne saurait être recherchée lorsque l'acquéreur a acquis en toute connaissance de cause ;

que dès lors que l'acte de cession du fonds de commerce, en date du 9 août 1977, de la société Brasserie Kronenbourg aux époux A... énonçait clairement que l'acquéreur avait pris connaissance de la lettre du 20 mai 1977 à la société Brasserie Kronenbourg, dénonçant le bail, et fera son affaire du non-renouvellement du bail par le propriétaire actuel, de manière à ce que le vendeur ne puisse être recherché à ce sujet, il s'ensuit qu'en condamnant la société Brasserie Kronenbourg à garantir les consorts A..., la cour d'appel a dénaturé le contenu des clauses de l'acte de cession du fonds de commerce et a ainsi violé l'article 1134 du Code civil" ;

Mais attendu qu'ayant souverainement retenu que le fonds de commerce exploité en 1977 par la société Brasserie Kronenbourg était le même que celui exploité en 1932 dans ces mêmes locaux, la cour d'appel a, sans dénaturation et sans se contredire, légalement justifié sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Brasserie Kronenbourg aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande des consorts A... et de M. E..., ès qualités ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf octobre mil neuf cent quatre-vingt-seize.