Cass. crim., 23 mars 1992, n° 90-84.180
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tacchella
Rapporteur :
M. Hecquard
Avocat général :
M. Amiel
Avocats :
SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 497, 498, 500, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit recevable l'appel incident du ministère public ;
" aux motifs que " la disposition de l'article 500 du Code de procédure pénale qui prévoit qu'en cas d'appel d'une des parties dans le délai de dix jours à compter du jugement contradictoire les autres parties ont un délai supplémentaire de cinq jours pour interjeter appel, est générale et permet au ministère public d'exercer son recours jusqu'à l'expiration du 15ème jour suivant le prononcé de la décision " ;
" alors que, dans l'hypothèse d'un jugement contradictoire à signifier aux parties, l'appel incident n'est recevable que dans les cinq jours de l'appel principal, même si ce dernier est formé avant la signification ; qu'en l'espèce, comme l'ont du reste soulevé les conclusions régulièrement déposées devant la cour d'appel au nom du prévenu et restées sans réponse, les premiers juges, ayant constaté que le délibéré avait été prorogé à plusieurs audiences auxquelles le défendeur ne s'était pas présenté, ont statué " par jugement contradictoire à signifier " ; qu'en conséquence, seule la partie civile ayant interjeté appel principal le 14 octobre 1988, le délai d'appel incident expirait le 31 octobre 1988 et que dès lors l'appel incident du ministère public formé le 2 novembre 1988 devait nécessairement être déclaré irrecevable comme tardif " ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 497, 498, 500, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a " rejeté les conclusions du prévenu quant à la saisine de la Cour " ;
" aux motifs que l'appel du ministère public saisissait la Cour de l'ensemble des faits visés dans la prévention, sous la qualification de détournement d'objets saisis et de banqueroute ;
" alors que la cour d'appel qui a relevé que la d partie civile a interjeté appel le 26 octobre 1988 du jugement prononcé contradictoirement à son égard et à celui de X... le 19 octobre 1988 et que le ministère public a exercé son recours le 2 novembre 1988, devait constater qu'en l'absence d'appel du prévenu, l'appel incident du ministère public ne pouvait concerner que la décision de relaxe visant les faits de détournement d'objets saisis, la décision des premiers juges visant les faits de banqueroute, pour lesquels la partie civile n'était pas partie au procès, étant devenue définitive faute d'appel principal du prévenu ou du ministère public dans le délai de dix jours ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que le jugement déféré, rendu le 19 octobre 1988, a été frappé d'appel par la partie civile non le 14 octobre mais le 26 du même mois ;
Attendu qu'en déclarant recevable l'appel incident du ministère public formé le 2 novembre suivant et en se déclarant saisie par ce recours de l'ensemble de la prévention, la cour d'appel a fait l'exacte application de la loi ;
Qu'en effet, d'une part, les dispositions de l'article 500 du Code de procédure pénale aux termes duquel en cas d'appel d'une des parties dans le délai ordinaire de dix jours, les autres parties ont un délai supplémentaire de cinq jours pour faire appel, sont générales et s'appliquent à toutes les parties en cause ;
Que, d'autre part, en vertu des articles 509 et 515 du Code de procédure pénale, l'appel du ministère public, sauf limitation expresse, défère à la juridiction du second degré tous les faits objet de l'action publique ;
Que, dès lors, les moyens ne peuvent qu'être écartés ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 156, 158, 164, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense ;
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé de prononcer la nullité de l'ordonnance de commission d'experts du magistrat instructeur en date du 9 mai 1985, rejetant ainsi les conclusions du prévenu en ce qu'elles contesteraient la mission qui avait été donnée aux experts de " signaler tous faits susceptibles de constituer une infraction qu'aura relevé l'expertise " et " d'examiner les conséquences pénales au plan de l'extension des procédures du règlement judiciaire ou liquidation des biens aux sociétés Cash Informatique et Champ des Cordes " ;
" aux motifs que " par arrêt définitif du 5 décembre 1986 " statuant notamment sur cette demande d'annulation, la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris a rejeté l'argumentation de X... qui se fondait sur les mêmes énonciations " ;
" alors que, ainsi que le constate la chambre criminelle statuant sur le pourvoi formé à l'encontre dudit arrêt, la chambre d'accusation était saisie limitativement de l'appel de l'ordonnance de refus de contre-expertise et ne pouvait statuer sur les demandes d'annulation d'acte de la procédure étrangères à l'objet de l'appel ; que, dès lors, la cour d'appel, en se retranchant, pour refuser de statuer sur les conclusions de nullité qui lui étaient soumises, derrière la prétendue autorité de l'arrêt de la chambre d'accusation qui n'avait justement pu examiner légalement ce point de droit, n'a pas justifié sa décision " ;
Attendu que la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer que pour écarter l'exception de nullité régulièrement soulevée, la cour d'appel a statué non par simple référence aux énonciations d'un arrêt de la chambre d'accusation mais par des motifs propres des premiers juges ;
Que, dès lors, le moyen ne saurait être admis ;
Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation des articles 400 du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré le prévenu coupable du délit de détournement d'objets saisis ;
" aux motifs que les procès-verbaux de saisie des 14 janvier 1981 et 5 mai 1982, " nonobstant l'absence de signature du gardien dont aucune disposition légale ou réglementaire relative aux mesures conservatoires n'impose la formalité... doivent être retenus comme fondement des poursuites exercées en application de l'article 400 du Code pénal " ;
" alors que le détournement d'objets saisis, pour être punissable, implique qu'un gardien ait été légalement institué, qu'il s'agisse d'un tiers ou de la partie saisie elle-même ; que nul ne pouvait être établi gardien sans son consentement, il doit donc être constaté que le gardien désigné a expressément accepté ces fonctions, constatation qui ne peut résulter que de l'apposition de la signature de celui-ci sur le procès-verbal de saisie qui le constitue gardien ; que, dès lors, en l'espèce, faute d'avoir établi que la partie saisie prétendument établie gardien aurait accepté cette fonction le délit de détournement d'objets saisis n'est pas constitué à son encontre " ;
Attendu que X... est poursuivi notamment pour avoir, en qualité de représentant de la société IPC, détourné des appareils informatiques et de bureau saisis à la requête de la société Digital Equipement France, partie civile ;
Attendu que, pour le déclarer coupable de ces faits, la cour d'appel relève que, suivant procès-verbal de saisie conservatoire établi le 14 janvier 1981 par l'huissier instrumentaire, X... a été valablement institué gardien des objets saisis même s'il n'a pas signé ledit procès-verbal ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application de l'article 400 paragraphe 3 du Code pénal, dès lors que le prévenu a eu connaissance de la saisie, le consentement du saisi à être institué gardien des objets n'étant pas l'un des éléments constitutifs de l'infraction poursuivie ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.