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Décisions

CA Paris, ch. 3, 22 mars 2018, n° 17/00955

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

DE LA COMETE (SNC)

Défendeur :

Madame H.

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M Daniel FARINA

Conseillers :

M Philippe JAVELAS, Mme Pascale WOIRHAYE

Avocats :

Me Sylvie K. T. de l'AARPI Dominique O., Me Bruno G, Me Pierre B.

Tribunal d'Instance de PARIS, 30 Déc. 20…

30 décembre 2016

Par acte notarié du 30 décembre 2014, la SCPI UFG PIXEL I a vendu à la SNC DE LA COMÈTE, au sein d'un ensemble immobilier sis [...], les lots de copropriété 15 et 81, le premier étant un appartement de cinq pièces au rez-de-chaussée avec jouissance d'un jardin, le second une cave 23-24.

Ces lots ont été vendus occupés par Madame Marie-France H., aux termes d'un bail à usage mixte soumis à la loi du 6 juillet 1989, conclu le 4 août 1997 pour une durée initiale de 6 ans, expirant au 14 octobre 2003 et tacitement reconduit depuis.

Par acte d'huissier du 10 février 20l5,la SNC DE LA COMÈTE a fait délivrer à la locataire un congé aux fins de vendre dans les conditions prévues par l'article 15-ll de la loi du 6 juillet 1989, à effet au 14 octobre 2015, ledit congé comportant offre d'acquisition des biens loués au prix de un million d'euros.

Par acte d'huissier du 29 avril 2015, Madame Marie-France H. a fait signifier à sa bailleresse un acte d'opposition au congé-vente pour nullité de celui-ci au regard de la loi Alur en date du 24 mars 2014 tant pour la date contestée de son effet que pour les motifs purement spéculatifs de l'opération menée.

Par assignation du 2 juin 2015, la SNC DE LA COMÈTE a saisi le Tribunal d'instance de PARIS 8ème aux fins de validation du congé délivré le 10 février 2015, d'expulsion sous astreinte de 200 € de Madame Marie-France H. et des occupants de son chef, et pour obtenir qu'il lui soit enjoint de respecter son droit de visite stipulé au bail sous même astreinte à compter de la date de toute infraction constatée et sa condamnation à lui payer la somme de 3000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens.

En cours d'instance la SNC DE LA COMÈTE a modifié sa demande d'astreinte assortissant l'expulsion en demande d'indemnité d'occupation fixée à 2.500 € par mois indexée à compter du 15 octobre 2015.

En défense, Madame Marie-France H. a sollicité essentiellement le débouté et à titre reconventionnel la condamnation du bailleur à lui verser 30.000 € de dommages et intérêts et 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par jugement contradictoire assorti de l'exécution provisoire, le tribunal d'instance de PARIS 8ème a déclaré nul le congé délivré le 10 février 2015 à effet au 14 octobre 2015 délivré à Madame Marie-France H. par la SNC DE LA COMÈTE, a débouté les parties du surplus de leurs demandes et condamné la SNC DE LA COMÈTE aux dépens et à payer à Madame Marie-France H. la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La Cour est saisie de l'appel interjeté à l'encontre de ce jugement par la SNC DE LA COMÈTE selon déclaration en date du 11 janvier 2017.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 7 décembre 2017, laissée sans suite faute d'acceptation de Madame Marie-France H. dans le délai imparti, la SNC DE LA COMÈTE a sollicité du Conseiller de la mise en état qu'il constate son désistement d'appel.

Dans le dispositif de ses conclusions récapitulatives et en réplique n°3 notifiées par la voie électronique le 19 janvier 2018, la SNC DE LA COMÈTE sollicite de la Cour, au visa des articles 15 de la loi du 6 juillet 1989, 14 de la loi du 24 mars 2014, 4 du Code de procédure pénale, 9 et 400 et suivants du Code de procédure civile, qu'elle :

Sur l'appel principal,

- Lui donne acte du désistement de son appel principal envers Madame Marie-France H.,

- Constate l'acquiescement de Madame Marie-France H. à ce désistement,

- Constate l'extinction de l'appel principal,

Sur l'appel incident,

- Dise et juge Madame Marie-France H. irrecevable et mal fondée en tous ses moyens,

fins et prétentions formés par voie d'appel incident,

- L'en déboute,

- Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame Marie-France H. de sa demande en paiement de dommages et intérêts formée à son endroit,

En tout état de cause,

- Condamne Madame Marie-France H. à lui payer la somme de 8.000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamne Madame Marie-France H. aux dépens, lesquels pourront être recouvrés directement par Maître Dominique O., Avocat au Barreau de PARIS, dans les conditions prévues par l'article 699 du Code de procédure civile.

Dans le dispositif de ses conclusions d'intimée n°3 notifiées par la voie électronique le 3 janvier 2018, Madame Marie-France H. sollicite de la Cour, au visa des articles 15 de la loi du 6 juillet 1989 et 4 du Code de procédure pénale, qu'elle :

- Lui donne acte de ce qu'elle acquiesce à ce seul désistement de l'appel principal, mais de ce qu'elle maintient son appel incident,

- Infirme ou amende le jugement sur le surplus,

- Condamne la SNC DE LA COMÈTE à lui verser :

- 30.000 à titre de dommages et intérêts,

- 8.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile pour la procédure de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 25 janvier 2018.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur le désistement d'appel de la SNC DE LA COMÈTE

Il résulte de l'article 401 du code de procédure civile que le désistement d'appel n'a besoin d'être accepté que s'il contient des réserves ou si la partie à l'égard de laquelle il est fait, a préalablement formé un appel incident ou une demande incidente.

En l'espèce, le désistement d'appel de l'appelant est fait sans réserve. Cependant Madame Marie-France H. a signifié par le RPVA le 3 octobre 2017 des conclusions au fond qui précèdent les conclusions de désistement et comportent appel incident du chef de la demande de dommages et intérêts de 30.000 € dont elle a été déboutée en première instance.

N'étant pas parfait, le désistement n'a pu produire d'effet extinctif que du chef de l'appel principal auquel Madame Marie-France H. a acquiescé, ce dont il sera donné acte aux parties au dispositif de l'arrêt.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par Madame Marie-France H. à titre d'appel incident

Au soutien de son appel incident du chef du rejet de sa demande de dommages et intérêts Madame Marie-France H. expose que :

- par ses compétences et son objet social de marchand de biens, la SNC DE LA COMÈTE ne pouvait se méprendre sur l'application de la loi Alur, dont elle-même avait pris soin de se prévaloir dans son opposition du 15 avril 2015 au congé du 10 février 2015,

- alors qu'elle disposait de 5 ans pour revendre la SNC DE LA COMÈTE lui avait délivré congé vente 10 jours après son acquisition pour un prix majoré de 37,93 % par rapport au coût de celle-ci, pour un motif de pure spéculation et dans le but de l'intimider et précipiter son départ, ce qui constitue la fraude visée à l'article 15-IV de la loi du 6 juillet 1989 lui ouvrant droit à réparation, qu'elle fait grief au tribunal de n'avoir pas retenue,

- le préjudice consistant à devoir rechercher un autre local répondant aux normes d'accessibilité pour l'exercice de son activité de kinésithérapeute et à subir l'angoisse de devoir déménager pendant la période allant du 10 février 2015 au 7 décembre 2017, justifie la somme demandée.

Ceci exposé, le fait d'avoir délivré un congé à Madame Marie-France H. pour obtenir un meilleur prix à la revente de l'appartement loué le 4 août 1997, ne constitue pas en soi une fraude, dès lors qu'il consacre l'exercice d'un droit qui est justifié en l'espèce, ainsi que le soutient la SNC DE LA COMÈTE par son activité commerciale qui est d'acheter pour revendre dans un délai limité.

Comme l'a à juste titre retenu le premier juge par ailleurs, il ne peut y avoir fraude non plus, ni même faute dolosive à commettre une erreur sur l'application dans le temps de la Loi Alur, qui est tellement complexe qu'elle a donné lieu à avis de la Cour de Cassation pour l'application de l'article 24-V de cette loi, étant ajouté que cet avis a été suivi d'une nouvelle loi dite Macron du 5 août 2015, qui a notamment précisé l'application dans le temps de l'article 15 en débats.

En conséquence, en l'absence de faute ou fraude du bailleur dans la mise en oeuvre du congé querellé, la demande de réparation de Madame Marie-France H., qui a continué de jouir de son appartement pendant toute la période qu'elle vise, est rejetée.

Sur les dépens et frais irrépétibles

La SNC DE LA COMÈTE s'étant désistée de son appel principal, elle sera condamnée aux dépens, le jugement étant confirmé pour ceux de première instance.

En considération de l'équité, la SNC DE LA COMÈTE sera également condamnée à payer à Madame Marie-France H. la somme de 3.000 € en sus de celle octroyée en première instance, elle-même étant déboutée de sa demande sur le même fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement,

Sur l'appel principal,

DONNE acte à la SNC DE LA COMÈTE du désistement de son appel principal envers Madame Marie-France H. ;

CONSTATE l'acquiescement de Madame Marie-France H. à ce désistement ;

CONSTATE l'extinction de l'appel principal ;

Sur l'appel incident,

CONFIRME le jugement du Tribunal d'instance de PARIS 8ème en date du 30 décembre 2016 en ce qu'il a débouté Madame Marie-France H. de sa demande en paiement de dommages et intérêts ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la SNC DE LA COMÈTE à payer à Madame Marie-France H. la somme de somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais d'appel ;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

CONDAMNE la SNC DE LA COMÈTE aux dépens de la procédure d'appel.