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Décisions

Cass. com., 3 mars 2021, n° 19-10.693

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Darbois

Rapporteur :

Mme Lefeuvre

Avocat général :

Mme Beaudonnet

Avocats :

SCP Foussard et Froger, SCP Gaschignard

Lyon, du 13 nov. 2018

13 novembre 2018

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 13 novembre 2018), M. D..., gérant de la société Bessimo, et la société Compagnie foncière du Genevois, dont M. Mercieca est l'actionnaire majoritaire, se sont rapprochés en vue de constituer deux sociétés, l'une, entre M. D... et la société Compagnie foncière du Genevois et l'autre, entre cette dernière et la société Bessimo.

2. M. D... ayant décidé de ne pas concrétiser ce projet, les sociétés Compagnie foncière du Genevois, Europe enchères et [...], aux droits de laquelle vient la société [...] , l'ont assigné, ainsi que la société Bessimo, en responsabilité. M. D... et la société Bessimo ont soulevé la nullité de la promesse de société invoquée au soutien des demandes de dommages-intérêts.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Les sociétés Compagnie foncière du Genevois, Europe enchères et [...] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes de dommages-intérêts, alors :

« 1°/ que l'affectio societatis s'entend de la volonté de collaborer à l'oeuvre commune constituant l'objet de la société en vue de tirer profit de celle-ci ; que la Compagnie foncière du Genevois faisait valoir qu'elle s'était accordée avec M. D... et la société Bessimo pour fonder deux sociétés dont elles avaient ensemble arrêté la forme sociale, l'importance des apports respectifs et l'objet, qui consistait dans l'acquisition de l'ensemble immobilier sis [...] et son exploitation sous quelque forme que ce soit ; que la cour d'appel constate que M. D... tenait M. Mercieca, actionnaire majoritaire de la Compagnie foncière du Genevois, au courant de l'état d'avancement de l'acquisition de l'ensemble immobilier sis à Bellignat, que cette dernière avait contribué pour moitié au dépôt de garantie exigé à la signature du compromis de vente et que les parties avaient discuté des projets de statuts chez le notaire ; qu'en décidant que la promesse de société était nulle par des motifs inopérants relatifs aux motivations des parties quant aux modalités précises d'occupation des locaux à acquérir, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1832 et 1833 du code civil ;

2°/ que la Compagnie foncière du Genevois faisait valoir que M. D..., dès lors, d'une part, qu'il ne pouvait ignorer que M. Mercieca, huissier de justice et actionnaire majoritaire de la Compagnie souhaitait exercer une telle activité, cependant que la société Bessimo elle-même, après avoir acquis seule les locaux litigieux avait exploité ces locaux à cette fin, avait de mauvaise foi prétendu que l'affectation des locaux à un usage de salle de ventes était contraire à l'objet qu'il poursuivait ; qu'en faisant droit à la demande de la société Bessimo tendant à l'annulation de la promesse au motif que cette dernière n'avait pas de communauté de vues quant à l'usage éventuel des locaux à des fins de ventes sans rechercher si ce moyen de nullité avait été soutenu de bonne foi, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles 1832 et 1833 du code civil, ensemble l'article 1134 dans sa rédaction applicable au litige. »

Réponse de la Cour

4. D'une part, l'arrêt énonce que l'affectio societatis se définit comme une volonté non équivoque de tous les associés de collaborer ensemble et sur un pied d'égalité à la poursuite de l'oeuvre commune. Il constate qu'il est établi que M. D... tenait M. Mercieca au courant de l'avancement de ses démarches en vue de l'acquisition des biens immobiliers que les futures sociétés devaient exploiter, que la société Compagnie foncière du Genevois avait versé la moitié du dépôt de garantie et qu'un rendez-vous avait été organisé chez le notaire pour discuter des statuts des sociétés dont la création était envisagée. Il retient que la preuve n'est pas rapportée d'un échange entre les parties sur leurs projets respectifs concernant la destination des biens immobiliers concernés, ni sur les modalités pratiques de leur occupation respective. Il retient ensuite que le contenu du courriel de M. D... du 29 juillet 2011 démontre son ignorance des projets de M. Mercieca ainsi qu'une absence de communauté de vue sur l'usage de ces biens et de volonté de collaborer ensemble et sur un pied d'égalité à une oeuvre commune, que les activités ponctuelles de M. D... et de la société Bessimo, qu'il décrit, ne suffisent pas davantage à démontrer. En l'état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que les parties ne s'étaient pas entendues sur l'objet des sociétés qu'elles envisageaient de constituer, que les biens à acquérir devaient servir à réaliser, ce dont elle a pu déduire l'absence d'affectio societatis et, par voie de conséquence, la nullité de la promesse de sociétés, la cour d'appel a légalement justifié sa décision.

5. D'autre part, il ne ressort ni de l'arrêt ni de leurs conclusions que les sociétés Compagnie foncière du Genevois, Europe enchères et [...] aient, devant la cour d'appel, invoqué la mauvaise foi de M. D... pour s'opposer à la demande de nullité formée par ce dernier et la société Bessimo. Le moyen, en sa seconde branche, est ainsi nouveau et mélangé de fait et de droit.

6. Le moyen, pour partie irrecevable, n'est donc pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.