CA Bordeaux, 4e ch. com., 8 juin 2022, n° 19/02870
BORDEAUX
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Aquitaine Auto (Sté)
Défendeur :
Hyundai Motor France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Pignon
Conseillers :
Mme Fabry, Mme Goumilloux
Avocats :
Me Taste-Denise, Me Roquain, Me Maxwell, Me Lequint, Me Leconte, Me Gauclère, Me Taillard, Me Mathis
EXPOSE DU LITIGE
La société Aquitaine Auto a pour activité la vente de véhicules neufs et d'occasion, la réparation et l'entretien de véhicules de constructeurs asiatiques, principalement de marque Hyundai.
Elle a conclu en 2003 et 2004 plusieurs contrats de distribution avec la société Hyundai Motor France (anciennement dénommée Automobiles Hyundai France), importateur de la marque Hyundai en France, portant sur des véhicules de particuliers, des véhicules utilitaires légers et des accessoires de la marque Hyundai. Elle a également conclu un contrat de réparateur agréé.
La société de financement [P] a assuré le financement des véhicules neufs acquis par le distributeur auprès de l'importateur au moyen d'une ouverture de crédit dite "Hyundai financement", les contrats prévoyant que la société Aquitaine Auto rembourse au financeur les sommes prêtées pour acquérir un véhicule dès la revente de celui-ci.
Pour des raisons tenant uniquement à l'évolution de la réglementation européenne, la société Hyundai Motor France, a, le 27 juin 2012, résilié les contrats de distribution de l'ensemble de son réseau à effet du 30 juin 2014. Elle a conclu de nouveaux contrats avec la société Aquitaine Auto le 1er juillet 2014.
Le 7 janvier 2013, la société [P], a conclu un nouveau contrat cadre de financement des stocks de véhicule acquis auprès de la société Hyundai Motor France avec la société Aquitaine Automobile. Ce contrat prévoyait une ouverture de crédit d'un montant maximum de 4 millions d'euros, utilisable par fraction, les sommes prêtées devant être remboursées à la survenance du premier évènement suivant :
- Vente du véhicule par la société Aquitaine Auto à un tiers.
- Défaut de présentation du véhicule lors du contrôle du stock.
Suite à un contrôle des stocks des véhicules détenus par la société Aquitaine Auto, la société [P] a constaté que celle-ci avait cédé des véhicules depuis juin 2013 à une société espagnole Quadriga Car sans rembourser la ligne de crédit correspondante.
Le 17 février 2014, les parties ont conclu un protocole d'accord de remboursement de la dette non contestée de la société Auto Aquitaine s'élevant à 532 599,61 euros selon les modalités suivantes :
- Versement des primes dues par la société Hyundai Motor France à la société Aquitaine Auto directement à la société [P] pour un montant de 200 000 euros.
- Versement sur le compte [P] des financements en stocks VO par compensation pour un montant de 61 017,70 euros.
- Le solde, soit 271 581,91 euros, en huit versements entre le 17 février 2014 et le 22 février 2014.
La société [P] a effectué un nouveau contrôle des stocks les 5 et 14 mai 2014 duquel il est résulté que de nouveaux véhicules avaient été vendus par la société Aquitaine Auto sans que le crédit les concernant ne soit remboursé.
Par courrier du 12 mai 2014, la société [P] a informé la société Aquitaine Auto qu'elle réduisait sa ligne de crédit à 3 millions d'euros.
Puis suite à un nouveau contrôle des stocks de véhicule le 11 août 2014, la société CGL, venant aux droits de la société [P], a notifié le 14 août 2014 à la société Aquitaine Auto la résiliation de ses contrats de financement des stocks de véhicules neufs et d'occasion et lui a demandé le remboursement de la somme totale de 2 168 787,65 euros.
La société CGL a résilié également les contrats de financement portant sur les véhicules de marque Mitsubishi Motors et Ssangyong.
Par jugement du 24 septembre 2014, le tribunal de commerce de Bordeaux a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société Aquitaine Auto. La date de cessation des paiements a été fixée au 19 septembre 2014.
Par jugement du 14 janvier 2015, le tribunal de commerce de Bordeaux ordonné la cession de la société Aquitaine Auto à la société Sipa moyennant un prix de 410 000 euros hors stock.
Le 25 février 2015, le tribunal de commerce de Bordeaux a prononcé la liquidation judiciaire de la société Aquitaine Auto et a désigné Maître [F] [G] en qualité de liquidateur.
Le passif a été déclaré à hauteur de 5 178 739 euros.
Par exploit d'huissier en date du 7 janvier 2016, Maître [G], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Aquitaine Auto, a fait assigner les sociétés [P] et Hyundai Motor France devant le tribunal de commerce de Bordeaux aux fins de les voir condamner in solidum à lui verser la somme en principal de 4 521 228 euros , leur comportement fautif ayant entrainé selon lui le placement en liquidation judiciaire de la société Aquitaine Auto.
Par jugement contradictoire du 11 avril 2019, le tribunal de commerce de Bordeaux a :
- Dit recevable la demande de Maître [G], es qualités de liquidateur de la société Aquitaine Auto.
- Débouté Maître [G], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Aquitaine Auto de sa demande de voir condamner la société Hyundai Motor France et la société [P] à lui verser in solidum la somme de 2 375 005,15 euros.
- Condamné la société Silvestri-[G], es qualités de liquidateur judiciaire de la société aquitaine Auto, à régler à la société Hyundai Motor France et la société [P] chacune la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- Débouté les parties du surplus de leurs demandes.
- Condamné la société Silvestri-[G] aux entiers dépens et inscrit les dépens dus par la société Silvestri-[G], es qualités, de liquidateur judiciaire de la société aquitaine Auto au titre des frais privilégiés dans le cadre de la liquidation de la société aquitaine Auto.
Par déclaration du 21 mai 2019, la société Silvestri-[G] a interjeté appel de cette décision à l'encontre de l'ensemble des chefs qu'elle a expressément énumérés, intimant les sociétés [P] et Hyundai Motor France.
Par acte du 29 novembre 2019, la société Hyundai Motor France a fait assigner en intervention forcée Monsieur [G], mandataire judiciaire, pris en son nom personnel.
PRETENTIONS ET MOYENS
Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 15 septembre 2020, auxquelles la cour se réfère expressément, Maître [G], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Aquitaine Auto, demande à la cour de :
- Déclarer recevable et bien-fondé Maître [F] [G], membre de la société Silvestri-[G], ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Aquitaine Auto, en son appel à l'encontre du jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux en date du 11 avril 2019.
- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux en ce qu'il a :
- Débouté Maître [F] [G], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Aquitaine Auto de sa demande de voir condamner la société Hyundai Motor France SAS et la société [P] à lui verser in solidum la somme de 2 375 005,15 euros.
- Condamné la société Silvestri-[G], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Aquitaine Auto, à régler à la société Hyundai Motor France SAS et la société [P] chacune la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire
- Débouté les parties du surplus de leurs demandes.
- Condamné la société Silvestri-[G] aux entiers dépens et inscrit les dépens dus par la société Silvestri-[G] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Aquitaine Auto au titre des frais privilégiés dans le cadre de la liquidation de la société Aquitaine Auto.
- Et statuant à nouveau,
- Déclarer Maître [F] [G], membre de la société Silvestri-[G], ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Aquitaine Auto recevable et bien fondé en son action en responsabilité à l'encontre de la société Hyundai Motor France et de la société [P].
- Dire et juger que les contrats signés entre la société Hyundai Motor France et la société Aquitaine Auto, la société Aquitaine Auto et la société [P], et le contrat de collaboration conclu entre la société [P] et la société Hyundai Motor France, forment un tout indivisible.
- Dire et juger que la société Aquitaine Auto s'est trouvée placée en état de dépendance économique vis-à-vis des sociétés [P] et Hyundai Motor France.
- Dire et juger que la société Aquitaine Auto a été victime de violences économiques de la part des sociétés [P] et Hyundai Motor France, la contraignant à signer le protocole d'accord du 17 février 2014 avec la société [P].
- En conséquence,
- Dire et juger que les sociétés [P] et Hyundai Motor France ont engagé leur responsabilité à l'égard de la collectivité des créanciers représentés par Maître [F] [G], membre de la Société Silvestri-[G], es qualités de mandataire liquidateur de la société Aquitaine Auto, et cela sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil dans leur ancienne rédaction.
- Condamner in solidum la société Hyundai Motor France et la société [P] à réparer l'intégralité du préjudice subi par la liquidation judiciaire de la société Aquitaine Auto et conséquemment, à payer à Maître [F] [G], ès-qualités principalement la somme de 2 036 965,93 euros assortie des intérêts de droit à compter de la signification des présentes conclusions valant mise en demeure.
- Débouter la société Hyundai Motor France et la société [P] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires aux présentes.
- Condamner in solidum la société Hyundai Motor France et la société [P] à payer à Maître [F] [G] es-qualité la somme de 30.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de Maître Gouarrigues, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Maître [G] fait notamment valoir que son action a été introduite dans l'intérêt collectif des créanciers de la société Aquitaine Auto et qu'il est bien-fondé à agir en responsabilité des sociétés [P] et Hyundai Motor France ; que les contrats signés d'une part, entre la société Hyundai Motor France et la société Aquitaine Auto, et d'autre part entre la société Aquitaine Auto et la société [P], et enfin entre la société [P] et la société Hyundai Motor France, forment un tout indivisible ; que la société Hyundai Motor France l'a contrainte à contrevenir au contrat de distribution sélective en revendant des véhicules en Belgique à des revendeurs professionnels pour contourner les accords de commercialisation conclus entre la société Hyundai Motor France et la maison mère de la marque coréenne puis en lui imposant dans un second temps d'inclure cette flotte destinée à la société belge Quadriga car dans l'encours de la société [P]; que la société Aquitaine Auto s'est trouvée placée en état de dépendance économique vis-à-vis des sociétés [P] et Hyundai Motor France ; que la société Aquitaine Auto a été victime de violences économiques de la part des sociétés [P] et Hyundai Motor France, la contraignant à signer le protocole d'accord du 17 février 2014 ; que les sociétés [P] et Hyundai Motor France ont engagé leur responsabilité à l'égard de la collectivité des créanciers.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 17 février 2020, auxquelles la cour se réfère expressément, la société [P] demande à la cour de :
- Dire et juger la société Silvestri-[G], représentée par Maître [G], ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Aquitaine Auto, irrecevable et mal fondée à agir à l'encontre de la société [P].
- La débouter de l'ensemble de ses demandes et conclusions à l'encontre de la société [P].
- Reconventionnellement, condamner la société Silvestri-[G], représentée par Maître [G], ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Aquitaine Auto, à payer à la société [P] la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- Condamner la société Silvestri-[G], ès-qualités, aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont recouvrement au profit de Maître Maxwell, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
La société [P] fait notamment valoir que la société Silvestri-[G], représentée par Maître [G], ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Aquitaine Auto, est irrecevable et mal fondée à agir à son encontre ; qu'un protocole d'accord a été conclu entre elle et la société Aquitaine Auto ; que les contrats ne sont pas indivisibles ; que les responsabilités contractuelle et délictuelle ne se cumulent pas et que sa responsabilité délictuelle ne peut être engagée pour un manquement contractuel ; qu'elle n'a pas rompu les contrats de financement de manière abusive et que la société Aquitaine Auto n'a pas subi de préjudice financier lié à l'opération Quadriga Car.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 29 avril 2020, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Hyundai Motor France demande à la cour de :
- In limine litis :
- Dire et juger recevable la mise en cause de Me [G] à titre personnel.
- Á titre principal :
- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Bordeaux du 11 avril 2019.
- En conséquence,
- Débouter Me [G], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Aquitaine Auto, de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Hyundai Motor France,
- Á titre subsidiaire :
- Dire et juger que Me [G], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Aquitaine Auto, ne démontre aucun lien de causalité entre les fautes et les préjudices allégués.
- Dire et juger que Me [G], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Aquitaine Auto, ne démontre aucun préjudice certain.
- En conséquence,
- Débouter de surcroît Me [G], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Aquitaine Auto, de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Hyundai Motor France.
- Á titre reconventionnel :
- Condamner Me [G], es qualités de liquidateur judiciaire de la société Aquitaine Auto, à régler à la société Hyundai Motor France la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- Condamner Me [G] à titre personnel à régler à la société Hyundai Motor France la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts, ou à tout le moins à garantir la procédure collective du règlement des condamnations prononcées à son encontre au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - condamner in solidum Me [G], es qualités, et Me [G] à titre personnel aux dépens d'instance.
- En tout état de cause :
- Débouter Me [G] à titre personnel de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
La société Hyundai Motor France fait notamment valoir que la mise en cause de Maître [G] à titre personnel pour la première fois en cause d'appel est recevable ; que cette mise en cause est justifiée par le fait qu'un appel ait été interjeté ; qu'elle n'a pas commis de faute contractuelle et que sa responsabilité délictuelle à l'égard de la collectivité des créanciers ne peut être engagée ; qu'il n'existe pas de solidarité ou de "responsabilité conjointe" entre elle et la société [P] dès lors qu'elles sont indépendantes et ont des relations contractuelles bilatérales et divisibles ; que la société Aquitaine Auto n'a pas été contrainte à réaliser des opérations de vente à l'export ; que le retour aux conditions de paiement prévues en l'absence de financement a été décidé conformément au contrat ; qu'à titre subsidiaire, que Maître [G], es qualités, ne démontre aucun lien de causalité entre les fautes et les préjudices allégués et n'apporte pas la preuve d'un préjudice certain.
Maître [G] intervenant à titre personnel, aux termes de ses conclusions signifiées par RPVA le 29 janvier 2020, demande à la cour :
- De déclarer irrecevables les demandes formées à son encontre pour la première fois en cause d'appel.
- Á titre subsidiaire de débouter la société Hyuandai Motor France de ses demandes.
- De juger que la mise en cause personnel de M. [G] constitue un abus de droit.
- De le recevoir en sa demande reconventionnelle.
- De condamner la société Hyundai Motor France à lui verser la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts et une indemnité de procédure de 15 000 euros.
Il soutient qu'en l'absence d'évolution du litige, son intervention forcée en cause d'appel n'est pas recevable.
Il soutient que la société Hyundai Motor France ne caractérise pas une prétendue faute de la liquidation judiciaire qui ferait dégénérer le droit d'agir en abus.
Selon lui, la société Hyundai Motor France tente d'user d'un moyen de pression à son encontre, ce qui lui cause un préjudice moral et professionnel.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 29 décembre 2021 puis a été reportée au 16 mars 2022 et le dossier a été fixé à l'audience du 13 avril 2022.
Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.
MOTIFS DE LA DECISION
I) sur la recevabilité de la demande du liquidateur :
Le liquidateur fonde son action en indemnisation du préjudice subi par la communauté des créanciers sur le fondement des dispositions de l'article 1382 ancien du code civil, dans sa version applicable à ce litige.
Il reproche ainsi aux intimés de ne pas avoir respecté les dispositions contractuelles des contrats de distribution et de financement les liant à la société Aquitaine Auto, ceux-ci ayant en outre agi intentionnellement et de manière concertée afin de le mettre en difficulté financière.
Ces fautes contractuelles sont selon lui à l'origine de l'état de cessation des paiements de la société Aquitaine Auto et du placement en liquidation judiciaire de cette dernière, situation qui a causé un préjudice à la communauté des créanciers.
La société [P] affirme que le liquidateur est irrecevable à agir sur le fondement délictuel.
Contrairement à ce que soutient la société [P], une faute contractuelle qui a causé un préjudice à un tiers au contrat peut servir de fondement à une action délictuelle de ce dernier contre le cocontractant fautif, à charge pour celui-ci de démontrer le lien de causalité entre la faute contractuelle et le préjudice dont il fait état.
M. [G] es qualité peut donc fonder ses demandes sur les dispositions de l'article 1382 du code civil.
Il est en outre le seul à avoir qualité et intérêt à agir au nom de l'ensemble des créanciers qu'il est chargé de représenter.
La demande du liquidateur est recevable.
La décision de première instance sera confirmée sur ce point.
II) sur la recevabilité de la mise en cause de M. [G] à titre personnel en appel :
L'article 555 du code de procédure civile permet d'appeler dans la cause en appel des personnes qui n'étaient pas partie en première instance "quand l'évolution du litige implique leur mise en cause".
La société Hyundai soutient que M. [G] a formé un appel injustifié, ce qui constitue une évolution du litige; que la procédure collective risque de ne pas être en mesure de régler l'indemnité de procédure qu'elle sera condamnée à lui verser, ce qui lui cause un préjudice; qu'en vertu des dispositions de l'article 698 du code de procédure civile, M. [G] peut en outre être condamné à titre personnel aux dépens; que la cour de cassation a en outre jugé qu'un mandataire peut être condamné à des dommages et intérêts s'il a engagé de manière injustifiée une procédure; que M.[G] doit dès lors être condamné à titre personnel à lui régler la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts, ou à tout le moins à garantir la procédure collective du règlement des condamnations prononcées à son encontre au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
S'agissant de la demande de dommages est intérêt, le simple fait de faire appel, même à supposer cet appel injustifié ou abusif, ne constitue pas une évolution du litige au sens de l'article précité contrairement à ce qui est soutenu.
Il apparait en réalité que sous couvert d'une volonté de garantir la procédure collective d'une éventuelle condamnation au paiement d'une indemnité de procédure mise à sa charge, la société Hyuandai Motor France cherche à mettre en jeu la responsabilité de Maître [G]. Or, une telle demande est une demande nouvelle. Elle n’est pas l'accessoire d'une demande déjà formée en première instance et ne pourrait que faire l'objet d'une procédure distincte.
S'agissant de la demande relative aux dépens, le mandataire judiciaire n'a pas besoin d'être mis en cause à titre personnel pour être condamné à titre personnel aux dépens. Le juge peut même procéder à cette condamnation d'office.
L'intervention forcée de M. [G] à titre personnel en cause d'appel est irrecevable.
III) sur le fond :
2.1- Sur l'indivisibilité du contrat de distribution et du contrat de financement :
Le liquidateur soutient que le contrat de distribution et de financement sont des contrats indivisibles et qu'ainsi chacune des parties pourrait être déclarée responsable des fautes commises par l'autre dans le cadre d'une condamnation in solidum.
Les intimés soutiennent qu'il n'existe aucune convention tripartite et indivisible.
Il convient de relever à titre liminaire que l'ordonnance du 10 février 2016 dont sont issus les nouveaux articles 1189 et 1186 du code civil relatifs à l'interprétation des contrats indivisibles et à la notion d'interdépendance contractuelle n'est pas applicable en l'espèce.
Cependant, sous l'empire des textes anciens, la notion de contrat indivisible a pu être retenue notamment en matière de crédit-bail et de location financière lorsque l'utilité économique de chacun ne se révélait qu'à l'aune de l'ensemble contractuel, l'anéantissement de l'un entraînant l'anéantissement de l'autre. L'intention commune des parties peut également être retenue.
Il a été conclu, dans le cadre de ce litige, trois types de contrat :
- Des contrats de distribution entre l'importateur et le distributeur français.
- Un contrat de collaboration entre la société [P] et l'importateur, visant à permettre à l'importateur de faire bénéficier d'un financement avantageux à ses distributeurs en France.
- Un contrat de financement entre le distributeur, la société Aquitaine Auto et le financeur, la société [P].
Aucun de ces contrats ne fait pas mention d'une volonté de les rendre indivisibles. Au contraire, la convention de financement conclue entre la société Séfia et la société Aquitaine Auto affirme l'absence de caractère indivisible entre les différents contrats.
Les contrats de distribution produits aux débats prévoient un paiement au comptant. Il n'est pas imposé aux termes de ceux-ci au distributeur de se faire financer par la société [P].
La société Aquitaine Auto a souhaité cependant bénéficier des accords négociés entre la société Hyundai Motor France et la société Séfia et en a fait une condition substantielle de son accord au contrat de financement proposé par [P]. Pour autant, cette seule mention ne caractérise pas un lien interdépendance ou d'indivisibilité entre le contrat de distribution et le contrat de financement.
Aucune des pièces versées par le liquidateur aux débats n'établit ainsi que le distributeur se soit vu interdire de choisir un autre mode de financement, de changer de financeur à tout moment ou même de régler les véhicules acquis au comptant.
En outre, si le principe acté dans le contrat de financement était que l'intégralité des véhicules étaient financés par Séfia, le distributeur pouvait en décider autrement à condition d'en avertir [P] "le moment opportun".
Il sera relevé encore que :
- La poursuite du contrat de distribution n'était pas subordonnée à la poursuite du contrat de financement. S'il est vrai qu'il aurait été difficile pour la société Aquitaine Auto de s'autofinancer ou de trouver un autre financement, il n'en demeure pas moins que cette possibilité existait et n'était interdite par aucun des contrats souscrits.
- La société [P] avait des rapports contractuels avec la société Aquitaine Auto sans lien avec la société Hyundai Motor France puisqu'elle finançait également les acquisitions effectuées par la société Aquitaine Auto auprès d'autres constructeurs, tels que Mitsubishi Motors et Ssangyong ( ligne de crédit de 500 000 euros et 150 000 euros).
Enfin, la série d'arrêts produits aux débats et commentés dans les conclusions de l'appelant porte sur des contrats de locations financières, qui constituent effectivement des hypothèses d'interdépendance des contrats mais non transposables au cas d'espèce.
Le juge de première instance a pu ainsi à bon droit juger que les contrats n'étaient pas indivibles.
Chacun des intimés ne peut donc être tenu que des fautes qu'il a lui-même commises.
Comme le soutient cependant à juste titre l'appelant, une condamnation in solidum peut cependant intervenir s'il est établi que les fautes de chacun ont contribué à la réalisation de l'entier dommage.
2.2- Sur les fautes :
Il convient de rechercher si, comme l'affirme le liquidateur, les intimés ont commis des fautes à l'origine de l'état de cessation de paiement de la société Aquitaine Auto.
La société Aquitaine Auto a effectué une déclaration de cessation de paiement peu de temps après que la société [P] a résilié sa ligne de crédit.
Selon le liquidateur, cette résiliation est abusive et s'inscrit dans une série de fautes commises par l'importer et son financeur à compter de février 2014 alors que la société Aquitaine Auto était déjà en difficulté, sans être en état de cessation des paiements, du fait d'une politique drastique du constructeur qui exigeait de lourds investissements de ses distributeurs tout en diminuant leurs marges commerciales.
En substance, le liquidateur reproche à la société Hyundai Motor France de l'avoir contrainte, pour son seul bénéfice, à enfreindre les règles du contrat de distribution qu'elles avaient conclu ensemble, en l'obligeant à revendre à un distributeur espagnol des véhicules Hyundai dans le but de contourner les accords de commercialisation qu'elle avait elle-même conclus avec sa maison mère en Corée. A compter de 2014, l'importateur l'a en outre obligé à faire financer cette flotte par la société [P] alors que ce financement n'entrait pas dans le cadre de l'accord de financement qui ne concernait que les véhicules vendus en France. Cette situation l'a mise en grande difficulté puisqu'elle a été obligée « d'acheter à la société Hyundai Motor France au prix fort, des véhicules qu'elle allait revendre à un prix inférieur en sachant que les avoirs supposés compenser les pertes, étaient consentis par la société Hyundai Motor France avec plusieurs mois de retard, entrainant de surcroit un préjudice sur le plan de la trésorerie ». La société Aquitaine Auto soutient qu'elle s'est trouvée "brutalement" dans l'obligation de rembourser la société [P] du prix d'achat des véhicules qu'elle avait vendus moins cher que leur prix d'acquisition dans l'attente d'un avoir de la société Hyundai Motor France. Elle devait en outre faire l'avance de la Tva intracommunautaire.
Elle soutient avoir été dans un état de dépendance économique et avoir subi des "violences économiques" de la part des deux intimés qui souhaitaient se séparer d'elle au profit d'un concurrent.
Il conviendra d'étudier successivement chaque faute alléguée par le liquidateur dans l'ordre de ses conclusions.
* Première faute alléguée 'la vente et le financement de véhicules exclus des contrats de distribution et de financement :
Le contrat comportait une clause interdisant à la société Aquitaine Auto de revendre les véhicules à des personnes physiques ou morales qui achèteraient pour revendre.
Malgré cette clause, la société Aquitaine Auto a revendu, avec l'accord de la société Hyundai Motor France et même à l'initiative de celle-ci, des véhicules acquis auprès de la société Hyundai Motor France à un concessionnaire espagnol, la société Quadriga car.
La société Hyundai Motor France reconnaît que le rôle de la société Aquitaine Auto n'était "qu'administratif" puisqu'elle livrait elle-même directement les véhicules à la société espagnole acquis par le distributeur français à un prix supérieur à celui auquel il les revendait à la société espagnole, mais percevait en contrepartie une prime dite société correspondant à 11 % du prix d'achat du véhicule destinée à compenser la différence entre le prix d'acquisition et le prix de vente , une commission de 120 euros par véhicule et voyait ses primes quantitatives et qualitatives augmenter du fait du nombre de vente réalisées ainsi ( primes perçues en 2013 : 229 205,69 euros).
A supposer que cette pratique soit contraire aux accords conclus entre l'importateur français et sa maison mère coréenne, il ne s'agirait pas d'une faute dans les rapports entre l'importateur et le distributeur qui apparaissent en réalité avoir agi de concert à dessein de servir chacun leur propre intérêt, à savoir l'augmentation de leur nombre de ventes.
Il n'est pas plus établi de faute à l'encontre du financeur qui s'était engagé à financer tout véhicule acquis auprès de la société Hyundai Motor France.
Le premier juge a ainsi pertinemment relevé que rien n'interdisait aux parties de déroger à leur propre accord et de mettre en place un système de vente des véhicules à des professionnels, ce qui n'est pas contraire à l'ordre public.
Aucune des pièces produites ne démontre que la société Aquitaine Auto a été contrainte par la société Hyundai Motor France, dans le seul intérêt de celle-ci, à vendre un nombre important de véhicules à un concessionnaire espagnol. Elle ne produit aucune pièce indiquant qu'elle ait même simplement manifesté des réserves à cette dérogation à leur contrat.
Comme l'a relevé à juste titre le premier juge, elle a nécessairement tiré un bénéfice de ce système, fort ancien puisqu'il a été mis en place dès 2008 ( pièce 1 de la société Hyundai Motor France ) et qui, d'après les chiffres produits lui permettait de réaliser la part la plus importante de son chiffre d'affaires ( 626 vendus à l'export sur un total de 926 véhicules) compte tenu de la prime encaissée pour chaque véhicule et de la prime annuelle versée en fonction des objectifs quantitifs de vente.
La société Aquitaine Auto explique que la société Hyundai Motor France l'a contrainte à compter de 2014 à recourir au financement de la société [P] mais n'en justifie pas. Elle indique que ce mode de financement l'a mise en difficulté mais ne donne aucune précision sur la façon dont elle aurait financé cette flotte extrêmement importante avant 2014 alors même qu'elle soutient que son activité ne lui permettait pas de financer l'acquisition de véhicules au comptant ou d'avoir recours à un autre financeur.
Il est enfin plaidé une dépendance économique accompagnée de 'violences économiques' qui aurait empêché l'appelante de refuser les exigences de son cocontractant.
La dépendance économique ne peut être caractérisée par le seul fait que la société Aquitaine Auto réalisait la très grande partie de son chiffre d'affaires avec la société Hyundai Motor France.
La société Aquitaine Auto ne caractérise ainsi pas la faute alléguée.
*Deuxième faute alléguée : "le retard dans l'émission des avoirs et des régularisations de TVA intracommunautaire" :
La société Aquitaine Auto soutient qu'elle a été placée dans l'impossibilité de rembourser la ligne de crédit souscrite auprès de la société [P] car la société Hyundai Motor France a tardé à lui rembourser les avoirs promis sur les ventes et qu'elle a dû faire une avance sur la TVA intracommunautaire.
La société Hyundai Motor France soutient que ce retard n'est pas démontré.
L'appelante ne produit qu'une seule pièce au soutien de cette allégation, sa pièce 31qui correspond à plusieurs échanges de mail en 2013.
Il ressort de cette pièce qu'il était convenu entre les parties le système suivant, accepté par tous : après la vente d'un véhicule à la société Quadriga, la société Aquitaine Auto ne remboursait à la société [P] qu'une somme correspondant au prix payé par la société Quadriga, le différentiel n'étant réglé qu'après réception de la TVA demandée à l'administration fiscale et paiement des avoirs par la société Hyundai Motor France (mail du 2 août 2013).
Il ressort en outre du mail en date du 5 août 2013 que la société Aquitaine Auto a réglé la somme de 1 086 043,57 euros à la société [P] alors qu'elle n'avait reçu que la somme de 1 084 620 euros de la société 1 084 620 euros. Eu égard au montant extrêmement important en jeu, il ne peut être sérieusement soutenu que cet égard de 2 000 euros constaté à une seule reprise, et qui peut provenir d'une erreur, est à l'origine des retards de paiement de la société Aquitaine Auto qui s'élevaient à plus de 500 000 euros selon le protocole d'accord conclu en février 2014.
Il ressort encore de ce mail que la société Aquitaine Auto n'a pas réglé à la société [P] le prix de vente du véhicule après déduction des avoirs et de la TVA conformément à leur accord.
La réponse de la société Hyundai Motor France qui consiste à indiquer qu'elle va "optimiser le process" ne peut en aucun cas établir la preuve que celle-ci avait du retard dans le paiement de ces avoirs. Elle rappelle d'ailleurs à la société Aquitaine Auto qu'elle a 'urgemment besoin de comprendre l'écart entre ce qui a été enlevé sur les parcs et ce qui a été payé par Aquitaine Auto' puisque le financeur fait état de 1,7 million d'euros dus.
La société Aquitaine Auto ne caractérise ainsi pas la faute alléguée.
* Troisième faute alléguée : "le remboursement immédiat des véhicules imposés par [P]" dans le cadre du protocole d'accord signé sous la contrainte le 17 février 2014:
L'appelante soutient avoir été contrainte de signer cet accord dans le cadre d'une "exploitation abusive d'une situation de dépendance économique"; que sa trésorerie a été mise exsangue du fait de cet accord, ce qui l'a conduite à un état de cessation des paiements; que la transaction était gravement déséquilibrée ; qu'elle est dépendante de la société [P] puisque sans son financement, elle ne pouvait acquérir des véhicules et poursuivre son activité; que la société Hyundai a fait preuve « d'une passivité injustifiée et fautive face à la dégradation de sa situation économique sous l'effet de la contrainte imposée par la société [P] » ; qu'elle a agi de concert avec le financeur.
L'appelante ne justifie pas, comme indiqué précédemment, avoir été victime de violences ou de vices du consentement de quelque nature que ce soit l'ayant conduite à signer ce protocole qui vise au remboursement de sommes qui étaient bien dues.
Son conseil plaide, dans le cadre de ce troisième manquement contractuel allégué, une 'exploitation abusive d'une situation de dépendance économique' sans solliciter pour autant, ni dans le corps de ses conclusions, ni dans son dispositif l'application des dispositions de l'article L. 420-2 alinéa 2 du code de commerce relatif à l'abus de dépendance économique.
En tout état de cause, la dépendance économique vis à vis du financeur ne peut résulter du seul fait que le distributeur a besoin d'un financement pour exercer son activité.
En ce qui concerne l'exploitation abusive, elle nécessite la preuve, non apportée en l'espèce, de pratiques d'exploitation, qui permettent à l'entreprise en situation de domination relative d'obtenir de manière générale des avantages indus ou encore de soumettre l'autre partie à des déséquilibres significatifs dans les droits et obligations n'est pas apportée.
En l'espèce, la société [P] a pu, sans aucun abus, solliciter le paiement des sommes qui lui étaient dues par application du contrat liant les parties.
Enfin et surtout, l'argumentation de l'appelant qui repose essentiellement sur le moyen tiré d'une action concertée des deux intimées pour lui nuire ne repose sur aucune preuve concrète de cette action.
La faute alléguée n'est pas établie.
* Quatrième faute alléguée : « le blocage de la vente de véhicule Hyundai à Aquitaine Auto à l'initiative de Séfia » et l'immixtion fautive de la société [P] dans la gestion de la société Aquitaine Auto :
Sur ce point, le juge de première instance a pertinemment considéré que la société [P], suite au protocole d'accord de février 2014, a procédé à un contrôle de l'utilisation des financements qu'elle a accordés à la société Aquitaine Auto, contrôle qui est légitime, et qui ne peut s'analyser en une immixtion fautive susceptible d'engager sa responsabilité.
Contrairement à ce qui est soutenu, la société [P] a continué à financer des véhicules après février 2014.
La faute alléguée n'est pas établie.
*Cinquième faute alléguée : la rupture abusive des contrats de financement par [P] :
La société Aquitaine Auto reproche à la société [P] d'avoir rompu le contrat de financement sous un motif fallacieux, le non-respect de la clause de propriété, et sans respecter le délai légal de préavis. Elle soutient que le premier juge a considéré à tort que le contrat avait été résilié en raison de nouveaux impayés.
Aux termes des dispositions de l'article L. 313-12 du code monétaire et financier, tout concours à durée indéterminée, autre qu'occasionnel, qu'un établissement de crédit ou une société de financement consent à une entreprise, ne peut être réduit ou interrompu que sur notification écrite et à l'expiration d'un délai de préavis fixé lors de l'octroi du concours. Ce délai ne peut, sous peine de nullité de la rupture du concours, être inférieur à soixante jours. Dans le respect des dispositions légales applicables, l'établissement de crédit ou la société de financement fournit, sur demande de l'entreprise concernée, les raisons de cette réduction ou interruption, qui ne peuvent être demandées par un tiers, ni lui être communiquées. L'établissement de crédit ou la société de financement ne peut être tenu pour responsable des préjudices financiers éventuellement subis par d'autres créanciers du fait du maintien de son engagement durant ce délai.
L'établissement de crédit ou la société de financement n'est pas tenu de respecter un délai de préavis, que l'ouverture de crédit soit à durée indéterminée ou déterminée, en cas de comportement gravement répréhensible du bénéficiaire du crédit ou au cas où la situation de ce dernier s'avérerait irrémédiablement compromise.
Le non-respect de ces dispositions peut entraîner la responsabilité pécuniaire de l'établissement de crédit ou de la société de financement.
Aux termes des articles 10.1 et suivants des conditions générales du contrat de financement, les parties peuvent résilier le contrat à tout moment moyennant le respect d'un préavis de 60 jours.
La société [P] peut néanmoins résilier le contrat :
- Huit jours après une mise en demeure demeurée infructueuse en cas de non-paiement de tout ou partie d'une échéance, d'impossibilité de réaliser le contrôle des stocks, de non présentation d'un bien financé lors d'un contrôle, ( art 10.2).
- De plein droit, sans délai ou mise en demeure préalable, en cas de comportement gravement répréhensible du bénéficiaire du crédit ou si la situation de ce dernier s'avérait irrémédiablement compromise au sens de l'article L. 313.12 du Code monétaire et financier, caractérisée notamment par...la vente d'un bien financé sans remboursement de [P].
La résiliation de plein droit fera l'objet d'une notification par lettre recommandée avec accusé de réception adressée au distributeur (art 10.3).
Suite aux premiers contrôles faisant apparaître la vente de véhicule sans remboursement de la société [P], celle-ci rappelait à la société Aquitaine Auto, par courrier de mise en demeure du 16 mai 2014 que conformément à l'article 10 du contrat de financement de stocks susvisé, la vente d'un bien financé sans remboursement de la société [P] pouvait entraîner la résiliation du contrat et une exigibilité de la totalité de la créance ; qu'elle n'était pas opposée au paiement des sommes dues sur 12 mois « sous réserve qu'Aquitaine Auto s'engage à ce qu'il n'y ait plus aucun nouvel impayé ou vente de véhicule sans remboursement de [P]. Dans le cas contraire, tout accord serait caduc ».
Elle a ensuite adressé un courrier de résiliation du contrat de financement le 14 août 2014 à son cocontractant dans lequel elle reproche à ce dernier :
- D'avoir vendu 27 nouveaux véhicules sans procéder au remboursement de la ligne de crédit relative à chaque véhicule vendu pour un montant de 430 358,24 euros, le montant des véhicules non payés s'élevant à la somme de 829 198,23 euros.
- D'avoir cédé ses véhicules sans respecter la clause de réserve de propriété.
Il apparaît ainsi que le non-respect de la clause de réserve de propriété n'est que le second motif de résiliation du contrat, le premier motif étant l'absence de remboursement de la ligne de crédit relative à chaque véhicule vendu.
Or l'absence de remboursement de la ligne de crédit relative à chaque véhicule vendu est une infraction récurrente qui porte sur des montants importants. L'appelant reconnait en outre lui-même que le remboursement du protocole d'accord l'a mis exsangue.
Dès lors, il est à la fois caractérisé :
- Un comportement gravement répréhensible du bénéficiaire du crédit.
- Une situation irrémédiablement compromise de la société caractérisée par la vente d'un bien financé sans remboursement de [P].
Les deux conditions de l'article 10.3, qui ne sont qu'alternatives, sont réunies.
La société [P] n'a pas commis de faute en résiliant sans préavis l'ouverture de crédit consentie à la société Auto Aquitaine.
Il conviendra en conséquence de juger que les juges de première instance ont pu à bon droit juger qu’aucune action fautive n'était imputable aux intimés, la cour adoptant en outre la motivation circonstanciée de la décision de première instance quant à l'absence de caractérisation des fautes.
La décision de première instance sera ainsi confirmée en ce qu'elle a débouté la société Aquitaine Auto de sa demande de mise en jeu de la responsabilité des intimées et de sa demande subséquente de fixation de dommages et intérêts à son passif.
IV- Sur la demande reconventionnelle de M. [G] en dommages et intérêts :
M. [G] n'établit pas que l'intervention volontaire diligentée à son encontre par la société Hyundai Motor France procède d'une intention de lui nuire et d'un abus de droit.
Il sera dès lors débouté de sa demande de dommages et intérêts.
V- Sur les demandes d'indemnité de procédure et les dépens :
M.[G] es qualités de liquidateur de la société Auto Aquitaine sera condamné à verser la somme de 3500 euros à la société Hyundai Motor France et la somme de 3500 euros à la société [P] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Aux termes de l'article 698 du code de procédure civile, les dépens afférents aux instances, actes et procédures d'exécution injustifiés sont à la charge des auxiliaires de justice qui les ont faits, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés. Il en est de même des dépens afférents aux instances, actes et procédures d'exécution nuls par l'effet de leur faute.
Les dépens seront pris en frais privilégiés de la procédure de liquidation.
Il n'y a pas lieu de condamner M.[G] aux dépens à titre personnel, celui-ci ayant exercé le droit qui lui appartenait de faire appel de la décision de première instance pour le compte de la liquidation, sans que le caractère injustifié de sa décision ne puisse découler du seul fait qu'il ait été débouté de ses demandes.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort.
Déclare irrecevable l'intervention forcée de M. [G] à titre personnel en cause d'appel.
Confirme la décision rendue le 11 avril 2019 par le tribunal de commerce de Bordeaux.
Y ajoutant,
Déboute M. [G], pris à titre personnel, de sa demande de dommages et intérêts formée à l'encontre de la société Hyundai Motor France.
Condamne M.[G] es qualités de liquidateur de la société Auto Aquitaine à verser la somme de 3500 euros à la société Hyundai Motor France et la somme de 3500 euros à la société [P] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Dit que les dépens d'appel seront pris en frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire de la société Auto Aquitaine dont distraction au profit des avocats qui en ont la demande.