Livv
Décisions

ADLC, 21 juin 2022, n° 22-D-13

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Relative à des pratiques mises en œuvre par Google dans le secteur de la presse

ADLC n° 22-D-13

20 juin 2022

L’Autorité de la concurrence (section IB),

Vu les lettres enregistrées les 15 et 19 novembre 2019 sous les numéros 19/0074 F,  19/0075 M, 19/0078 F, 19/0079 M, 19/0080 F et 19/0081 M par lesquelles le Syndicat des  Éditeurs de la Presse Magazine (ci-après « SEPM »), l’Alliance de la Presse d’Information  Générale, le Syndicat de la presse quotidienne nationale, le Syndicat de la presse quotidienne  régionale, le Syndicat de la presse quotidienne départementale et le Syndicat de la presse  hebdomadaire régionale (ci-après, conjointement, « l’APIG »), et l’Agence France-Presse  (ci-après « l’AFP »), ont saisi l’Autorité de la concurrence de pratiques mises en œuvre par  les sociétés Google LLC, Google Ireland Ltd. et Google France dans les secteurs de la presse,  des services de communication au public en ligne et de la publicité en ligne, et ont sollicité,  en outre, le prononcé de mesures conservatoires ;  

Vu le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 102 ;

Vu le livre IV du code de commerce, et notamment son article L.420-2 ;

Vu la décision n° 20-MC-01 du 9 avril 2020 relative aux demandes de mesures  conservatoires présentées par le SEPM, l’APIG et l’AFP ;

Vu la décision n° 21-D-17 du 12 juillet 2021 relative au respect des injonctions prononcées  à l’encontre de Google dans la décision n° 20-MC-01 ;

Vu la décision n° 21-DE-01 du 1er décembre 2021 relative à un désistement de l’Agence  France-Presse ;

Vu la décision n° 22-DE-01 du 16 mai 2022 relative à un désistement de l’Alliance de la  Presse d’Information Générale, du Syndicat de la presse quotidienne nationale, du Syndicat  de la presse quotidienne régionale, du Syndicat de la presse quotidienne départementale et  du Syndicat de la presse hebdomadaire régionale ;

Vu le courrier du 14 juin 2022 relatif au désistement du Syndicat des Éditeurs de la Presse  Magazine ;

Vu la décision du 26 novembre 2019, par laquelle la rapporteure générale adjointe de  l’Autorité a procédé à la jonction de l’instruction des affaires 19/0074F-19/0075M,  19/0078F-19/0079M et 19/0080F-19/0081M ;

Vu l’évaluation préliminaire transmise au Syndicat des Éditeurs de la Presse Magazine, à  l’Alliance de la Presse d’Information Générale, à la société Alphabet Inc., aux sociétés  Google LLC, Google Ireland Ltd, Google France et au commissaire du Gouvernement le 3 décembre 2021 ;  

Vu les observations présentées par le Syndicat des Éditeurs de la Presse Magazine, l'Alliance  de la Presse d'Information Générale e.a., l’Agence France-Presse et le commissaire du  Gouvernement ;  

Vu la proposition d’engagements des sociétés Google LLC, Google Ireland Ltd et  Google France du 9 décembre 2021, modifiée le 11 mars, les 21, 26 et  29 avril, et 9 mai 2022 ;

Vu les observations recueillies dans le cadre du test de marché ;  

Vu les autres pièces du dossier ;

Les rapporteurs, la rapporteure générale adjointe, les représentants des sociétés Google LLC,  Google Ireland Ltd., Google France et Alphabet Inc, du Syndicat des Éditeurs de la Presse  Magazine, le commissaire du Gouvernement entendus lors de la séance de l’Autorité de la  concurrence des 12 et 27 avril 2022, l’Alliance de la Presse d'Information Générale e.a ayant  été régulièrement convoquée ;

Les représentants de la Direction générale des médias et des industries culturelles du  ministère de la Culture, de la société des Droits Voisins de la Presse, du Syndicat de la presse  indépendante d’information en ligne et de la Fédération Française des Agences de Presse  entendus sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 463-7 du code  de commerce ;

Adopte la décision suivante :

Résumé1

Aux termes de la présente décision, l’Autorité de la concurrence (ci-après « l’Autorité »)  accepte les engagements d’Alphabet Inc, Google LLC, Google Ireland Ltd et Google France  (ci-après « Google ») et clôt les procédures au fond ouvertes en novembre 2019 par le SEPM,  l’APIG et l’AFP, qui dénonçaient des pratiques mises en œuvre par Google à la suite de  l’adoption de la loi n° 2019-775 du 24 juillet 2019 tendant à créer un droit voisin au profit  des agences et des éditeurs de presse (ci-après, la « Loi sur les droits voisins »).

L’instruction menée a conduit à l’identification de plusieurs préoccupations de concurrence  relatives au comportement de Google. Tout d’abord, Google pourrait avoir imposé aux  éditeurs et agences de presse des conditions de transaction inéquitables au sens des articles  L. 420-2 du code de commerce et 102 a) du TFUE, en refusant de négocier et de rémunérer  l’affichage de contenus de presse protégés sur les services existants de Google au titre des  droits voisins. Ensuite, en imposant une rémunération nulle pour tous les éditeurs et agences  de presse lors de l’entrée en vigueur de la loi n° 2019-775 du 24 juillet 2019 tendant à créer  un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse (« Loi sur les droits  voisins »), indépendamment d’un examen de leurs situations respectives, Google est  susceptible d’avoir traité de façon identique des acteurs économiques placés dans des  situations différentes en-dehors de toute justification objective, et, partant, d’avoir mis en  œuvre une pratique discriminatoire au sens des articles L. 420-2 du code de commerce et  102 c) du TFUE. Enfin, Google pourrait avoir abusé de sa position dominante pour  contourner la Loi sur les droits voisins, notamment en utilisant la possibilité laissée aux  éditeurs et agences de presse de consentir des licences gratuites pour imposer  systématiquement un principe de non-rémunération pour l’affichage des contenus protégés  sur ses services, sans aucune possibilité de négociation et en refusant de communiquer les  informations nécessaires à la détermination de la rémunération.

À titre de mesures conservatoires, l’Autorité avait prononcé plusieurs injonctions à  l’encontre de Google dans sa décision n° 20-MC-01du 9 avril 2020 (la « Décision de  mesures conservatoires »), qui s’articulaient autour d’une obligation principale de négocier  de bonne foi, en vue de formuler une proposition financière portant sur l’affichage de  contenus protégés sur les services de Google, à savoir la reprise d’extraits d’articles et de  photos de presse sur son moteur de recherche Google Search, ou ses services Google  Actualités et Discover.

En dépit de ces injonctions, l’Autorité a constaté, aux termes de la décision n° 21-D-17 du  12 juillet 2021 (la « Décision de non-respect des Injonctions »), que Google a été en mesure  de faire échec aux négociations avec les éditeurs et agences de presse sur l’utilisation actuelle  des contenus de presse protégés sur ses services.  

• L’Autorité a, en particulier, relevé que pendant la quasi-totalité de la période de  négociations de trois mois prévue par la Décision de mesures conservatoires, Google  a orienté systématiquement les négociations vers la conclusion d’un contrat de  licence global, dont l’objet portait principalement sur un nouveau service, dénommé  Showcase, fondé sur la reprise d’articles de presse en intégralité qui n’étaient  précédemment pas accessibles sur les portails de Google. Par ce comportement, les  éditeurs et agences de presse ont été privés de leur capacité de négocier la  rémunération pour les seules utilisations actuelles de leurs contenus protégés pendant  la quasi-totalité de la période de négociation, alors même qu’ils avaient exprimé  clairement ce souhait à de multiples reprises auprès de Google.  

• L’Autorité a également relevé que Google avait significativement réduit le champ  d'application de la Loi sur les droits voisins, en excluant le principe d'une  rémunération des contenus de presse issus de titres ne disposant pas d'une  certification « Information Politique et Générale » (ou « IPG ») et en refusant aux  agences de presse le bénéfice d'une rémunération de leurs contenus repris par les  éditeurs de presse.  

• L’Autorité a, en outre, constaté que Google avait exprimé une conception  excessivement restrictive de la notion de revenus tirés de l’affichage de contenus de  presse au titre de l’article L. 218- 4 du CPI, en ne retenant, à ce titre, que les seuls  revenus publicitaires des pages de Google Search sur lesquelles s’affichent des  contenus protégés. De fait, Google a exclu les revenus indirects résultant de  l’attractivité apportée à ses services par l’affichage de contenus protégés, qui, d’une  part, renforce le volume de données collectées de Google et améliore sa capacité à  faire de la publicité ciblée et, d’autre part, augmente la probabilité que l’utilisateur  accède à des liens sponsorisés payants sur son site de recherche en ligne.

Aux termes de la Décision de non-respect des Injonctions, l’Autorité a infligé une sanction  pécuniaire à Google d’un montant de 500 millions d’euros, en lui enjoignant sous astreinte  de se conformer à la Décision de mesures conservatoires.

À la suite de l’évaluation préliminaire adressée dans le cadre de l’instruction du dossier au  fond, Google a présenté une série d’engagements le 9 décembre 2021. Ces engagements ont  fait l’objet d’un test de marché et ont été discutés lors d’une séance devant l’Autorité,  conduisant à de nouvelles propositions d’engagements. Le 9 mai 2022, Google a présenté  une ultime version de ses engagements. Dans le cadre de son offre finale :

• Google étend le champ d’application de ses engagements à tous les éditeurs visés par  l’article L. 218-1 du code de propriété intellectuelle (« CPI »), qu’ils disposent ou  non d’une certification IPG. Il en est de même pour la titularité de droits voisins aux  agences de presse dont les contenus sont intégrés dans des publications d’éditeurs  tiers.

• Google s’engage à négocier de bonne foi, avec les agences et éditeurs de presse qui  en feraient la demande, la rémunération due pour toute reprise de contenus protégés  sur ses services, conformément aux modalités prévues par l’article L.218-4 du CPI  et selon des critères transparents, objectifs et non discriminatoires. Google s’engage  expressément à mener des négociations distinctes et indépendantes, d’une part, sur  le service Showcase ou tout autre nouveau service de Google et, d’autre part, sur  l’utilisation existante de contenus protégés.

• Google s’engage à communiquer aux éditeurs et agences de presse les informations  prévues par l’article L.218-4 du CPI et permettant une évaluation transparente de la  rémunération proposée par Google. À cette fin, Google a prévu de communiquer,  dans un premier temps, un socle minimum d’informations, décrites dans l’annexe 1  des engagements, à chaque partie négociante dans un délai de 10 jours ouvrés en cas  de négociations individuelles et de 15 jours ouvrés en cas de négociations collectives.  Google s’engage, dans un second temps, à communiquer les informations  complémentaires pertinentes demandées par les parties négociantes dans un délai de  15 jours ouvrés, sous le contrôle d’un mandataire indépendant. Le mandataire pourra  également émettre des propositions sur les modalités de transmission des  informations complémentaires demandées par les parties négociantes, en prévoyant,  le cas échéant, des mesures destinées à préserver la confidentialité des informations  de Google. Ce mécanisme permettra de concilier la demande légitime de Google de  protéger ses secrets d’affaires avec la nécessité pour les éditeurs et agences de presse  d’obtenir les informations nécessaires à l’évaluation des revenus directs et indirects  de Google liés à l’affichage de leurs contenus protégés.

• Google s’engage, dans les trois mois suivant le début des négociations, à faire une  proposition de rémunération. Dans l’hypothèse où les parties ne parviendraient pas à  un accord à l’issue de cette période, les parties négociantes auront la possibilité de  saisir un tribunal arbitral chargé de déterminer le montant de la rémunération. Afin  de tenir compte des moindres ressources financières des éditeurs et agences de  presse, ces derniers pourront demander à Google de prendre en charge intégralement  la rémunération des arbitres, y compris dans une éventuelle procédure d’appel.

• Google s’engage à prendre les mesures nécessaires pour que les négociations  n’affectent ni l’indexation, ni le classement, ni la présentation des contenus protégés  et n’affectent pas les autres relations économiques qui existeraient entre Google et  les éditeurs de presse et agences de presse.

• Google propose de faire bénéficier des dispositions des présents engagements les  éditeurs et agences de presse qui ont déjà entamé des négociations ou conclu un  contrat avec elle au titre des droits voisins, soit directement, soit par l’intermédiaire  d’une association professionnelle. Les agences et les éditeurs de presse ayant déjà  conclu un accord pourront donc l’amender ou le résilier sans frais, pour engager de  nouvelles négociations avec Google, étant précisé que la rémunération convenue en  vertu de leurs accords préexistants continuera de s’appliquer jusqu’à la date de cet  amendement ou de cette résiliation.

• Un mandataire indépendant agréé par l’Autorité s’assurera de la mise en œuvre des  engagements pris et pourra s’adjoindre, le cas échéant, les services d’experts techniques, financiers ou spécialisés en propriété intellectuelle. Il supervisera le  déroulement des négociations entre Google et les éditeurs et agences de presse et sera  également associé à la revue et à la mise à jour annuelle du socle minimum  d’informations que Google devra communiquer aux éditeurs et agences de presse.  Le mandataire jouera, le cas échéant, un rôle actif dans le règlement d’éventuels  points de désaccord survenant entre les parties au cours de leur négociation, en  émettant des avis ou des propositions à l’Autorité sur toute contestation relative à la  qualification d’éditeur ou d’agence de presse, sur la question de savoir si le domaine  d’un éditeur de presse contient du contenu protégé, sur la faisabilité technique ou sur  la pertinence d’une demande d’informations complémentaires, ainsi que sur les  modalités de communication des réponses aux demandes d’informations  complémentaires aux éditeurs et agences de presse. Google s’est engagée à se  conformer à ces avis et propositions, qui ne présentent pas de caractère contraignant  à l’égard des éditeurs et des agences de presse. Ce mécanisme constitue un mode  rapide de règlement des différends qui, tout en étant contraignant pour Google,  préserve la liberté des éditeurs et agences de presse de recourir à d’autres voies de  droit pour faire valoir leurs prétentions si elles le jugent opportun.

• Les engagements s’appliqueront pour une durée de 5 ans, et seront renouvelables  pour une nouvelle période de 5 ans sur décision motivée de l’Autorité.

• Google s’engage à se désister de son recours contre la Décision de non-respect des  Injonctions.  

L’Autorité considère que les engagements proposés par Google, dans leur version finale du  9 mai 2022, sont de nature à mettre un terme aux préoccupations de concurrence exprimées  dans l’évaluation préliminaire des services d’instruction et présentent un caractère  substantiel, crédible et vérifiable. L’Autorité décide donc de les accepter et de les rendre  obligatoires.

I. Constatations

A. LA PROCEDURE

1. LES SAISINES

1. Par lettres enregistrées les 15 et 19 novembre 2019 sous les numéros 19/0074 F, 19/0078 F  et 19/0080 F, le Syndicat des Éditeurs de la Presse Magazine (ci-après le « SEPM »),  l’Alliance de la Presse d’Information Générale, le Syndicat de la presse quotidienne  nationale, le Syndicat de la presse quotidienne régionale, le Syndicat de la presse quotidienne  départementale et le Syndicat de la presse hebdomadaire régionale (ci-après, conjointement,  « l’APIG »), et l’Agence France-Presse (ci-après « l’AFP ») ont saisi l’Autorité de pratiques  mises en œuvre par Google LLC, Google Ireland Ltd et Google France (ci-après « Google »).

2. Les saisissants dénonçaient un potentiel abus de position dominante de Google, prenant la  forme d’un contournement de l’objet de la loi n° 2019-775 du 24 juillet 2019 tendant à créer  un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse (ci-après, la  « Loi sur les droits voisins »), et de l’imposition de conditions de transaction inéquitables.  Pour les mêmes raisons, les saisissants reprochaient également à Google d’avoir abusé de la  situation de dépendance économique dans laquelle ils se trouveraient vis-à-vis de Google.  

3. Accessoirement à leurs saisines au fond, les saisissants ont sollicité, par lettres enregistrées  les 15 et 19 novembre 2019, sous les numéros 19/0075 M, 19/0079 M et 19/0081 M, le  prononcé de mesures conservatoires sur le fondement de l’article L. 464-1 du code de  commerce.  

4. Par décision du 26 novembre 2019, la rapporteure générale adjointe de l’Autorité a procédé  à la jonction de l’instruction des affaires 19/0074 F – 19/0075 M, 19/0078 F – 19/0079 M et  19/0080 F – 19/0081 M. Les numéros de référence pour le traitement de ces affaires à la  suite de cette décision de jonction sont les 19/0074 F – 19/0075 M.

2. LA DECISION N° 20-MC-01

5. Le 9 avril 2020, l’Autorité a adopté la décision n° 20-MC-01 (ci-après « la Décision de  mesures conservatoires ») relative à des demandes de mesures conservatoires présentées par  le SEPM, l’APIG et l’AFP, et a prononcé les mesures conservatoires suivantes à l’égard de  Google, prenant la forme de sept injonctions (ci-après les « Injonctions » et individuellement  « l’Injonction ») :  

« Article 1er : Il est enjoint aux sociétés Google LLC, Google Ireland Ltd et Google France,  à titre conservatoire et dans l’attente d’une décision au fond, de négocier de bonne foi avec  les éditeurs et agences de presse ou les organismes de gestion collective qui en feraient la  demande, la rémunération due par Google à ces derniers pour toute reprise des contenus  protégés sur ses services, conformément aux modalités prévues à l’article L. 218-4 du code  de la propriété intellectuelle et selon des critères transparents, objectifs et non  discriminatoires. Cette négociation devra couvrir la période de reprise des contenus depuis  le 24 octobre 2019.  

Article 2 : Il est enjoint aux sociétés Google LLC, Google Ireland Ltd et Google France, à  titre conservatoire et dans l’attente d’une décision au fond, de communiquer aux éditeurs et  agences de presse les informations prévues à l’article L. 218-4 du code de la propriété  intellectuelle.  

Article 3 : Il est enjoint aux sociétés Google LLC, Google Ireland Ltd et Google France, à  titre conservatoire et dans l’attente d’une décision au fond, de maintenir, pendant la période  de négociation, les modalités d’affichage mises en place depuis l’entrée en vigueur de la Loi  n° 2019-775, selon les paramètres retenus par les éditeurs. Il est enjoint à Google LLC,  Google Ireland Ltd et Google France de permettre aux éditeurs et agences de presse n’ayant  pas accordé à Google d’autorisation de reprise de leurs contenus protégés depuis le  24 octobre 2019 mais souhaitant entrer en négociation dans le cadre des articles 1 et 2 de  la présente décision, de ne pas s’opposer à l’affichage de leurs contenus protégés au sein  de ses services selon les modalités choisies par ces éditeurs et agences de presse, pendant  la période de négociation.  

Article 4 : Il est enjoint aux sociétés Google LLC, Google Ireland Ltd et Google France, à  titre conservatoire et dans l’attente d’une décision au fond, de conduire les négociations  visées par les articles 1 et 2 de la présente décision dans un délai de 3 mois à partir de la  demande d’ouverture de négociation émanant d’un éditeur de presse, d’une agence de  presse ou d’un organisme de gestion collective.  

Article 5 : Il est enjoint aux sociétés Google LLC, Google Ireland Ltd et Google France, à  titre conservatoire et dans l’attente d’une décision au fond, de prendre les mesures  nécessaires pour que l’existence et l’issue des négociations prévues par les articles 1 et 2 de  la présente décision n’affectent ni l’indexation, ni le classement, ni la présentation des  contenus protégés repris par Google sur ses services.  

Article 6 : Il est enjoint aux sociétés Google LLC, Google Ireland Ltd et Google France, à  titre conservatoire et dans l’attente d’une décision au fond, de prendre les mesures  nécessaires pour que les négociations prévues par les articles 1 et 2 de la présente décision  n’affectent pas les autres relations économiques qui existeraient entre Google et les éditeurs  et agences de presse.  

Article 7 : Les sociétés Google LLC, Google Ireland Ltd et Google France adresseront, dans  un délai de 4 semaines à compter de l’ouverture des négociations avec un ou plusieurs  éditeurs, agences de presse ou organisme de gestion collective, un premier rapport sur la  manière dont elles se conforment aux articles 1 à 6 de la présente décision. Les rapports  suivants seront communiqués à l’Autorité le 5 de chaque mois jusqu’à la publication de la  décision au fond de l’Autorité. »

6. L’Autorité a estimé que ces Injonctions devaient rester en vigueur jusqu’à la publication de  sa décision sur le fond (article 8 du dispositif de la Décision de mesures conservatoires) et  que l’instruction devait être poursuivie au fond pour l’ensemble des pratiques (article 9 du  dispositif de la Décision de mesures conservatoires).

7. La cour d’appel de Paris, saisie d’un recours formé par les sociétés Google contre la Décision  de mesures conservatoires, a, dans un arrêt du 8 octobre 2020, rejeté l’ensemble des moyens  d’annulation formulés2 . Elle a toutefois réformé l’article 5, considérant sa portée trop  générale et pas strictement nécessaire pour faire face à l’urgence, en le complétant ainsi :  

« Cette injonction ne fait pas obstacle aux améliorations et innovations des services offerts  par les sociétés Google LLC, Google Ireland Ltd et Google France, sous réserve qu’elles  n’entrainent, directement ou indirectement, aucune conséquence préjudiciable aux intérêts  des titulaires de droits voisins concernés par les négociations prévues par les articles 1 et 2  de la présente décision. »

8. N’ayant pas fait l’objet d’un pourvoi, l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 8 octobre 2020  est devenu définitif.

3. LA DECISION N° 21-D-17

9. Par lettres enregistrées les 31 août 2020 et 2 septembre 2020, sous les numéros 20/0083 F,  20/0084 F et 20/0085 F, l’APIG, le SEPM et l’AFP ont saisi l’Autorité pour inexécution par  Google des Injonctions prononcées dans la Décision de mesures conservatoires.  

10. Par une décision n° 21-D-17 du 12 juillet 2021 relative au respect des injonctions prononcées  à l’encontre de Google dans la Décision de mesures conservatoires (la « Décision de non[1]respect des Injonctions »), l’Autorité a considéré que Google n’avait pas respecté les articles  1 et 2 de la Décision de mesures conservatoires (les Injonctions 1 et 2) relatives à l’obligation  de négociation de bonne foi et à la communication des informations prévues à  l’article L. 218-4 du code de la propriété intellectuelle, dans le délai de trois mois prévu par  l’article 4 de la Décision de mesures conservatoires (l’Injonction 4).  

11. Elle a aussi considéré que Google n’avait pas respecté l’article 5 de la Décision de mesures  conservatoires (l’Injonction 5), relative à l’obligation de neutralité sur la façon dont sont  indexés, classés et, plus généralement, présentés les contenus protégés sur ses services, et  l’article 6 de la Décision de mesures conservatoires (l’Injonction 6), relative à l’obligation  de neutralité des négociations relatives aux droits voisins sur toute autre relation économique  qu’entretiendrait Google avec les éditeurs et agences de presse.  

12. Elle a, en conséquence, infligé une sanction pécuniaire à Google d’un montant de  500 millions d’euros et enjoint à Google3 :

« […] au titre de l’exécution de l’Injonction 1, de proposer une offre de rémunération  répondant aux prescriptions de la Loi et de la Décision au titre de l’utilisation actuelle des  contenus protégés sur les services de Google aux saisissantes qui en feraient la demande.  Google devra déférer à une telle demande dans un délai de deux mois à compter de la  réception de toute demande de réouverture des négociations envoyée, le cas échéant, par les  saisissantes, par lettre recommandée avec avis de réception, après la notification de la  présente décision » ;

« […] au titre de l’exécution de l’Injonction 2, d’assortir cette offre des informations prévues  à l’article L. 218-4 du code de propriété intellectuelle. Ces informations devront comprendre  une estimation des revenus totaux qu’elle génère en France par l’affichage de contenus  protégés sur ses services, en indiquant la part des revenus générés par l’éditeur ou l’agence  de presse à l’origine de la demande d’offre de rémunération. Cette estimation devra détailler  les postes de revenus suivants : (i) les revenus publicitaires que Google génère sur les pages  de son moteur de recherche en ligne sur lesquels les contenus protégés apparaissent ;  (ii) les revenus que Google perçoit en tant qu’intermédiaire de publicité en ligne, au titre  des annonces ciblées générées sur les sites des éditeurs vers lesquels l’utilisateur du moteur  de recherche est redirigé et pour lesquelles Google perçoit une commission ; et (iii) les  revenus indirects perçus par Google résultant de l’attractivité apportée à ses services par  l’affichage de contenus protégés, attractivité qui peut jouer tant dans le déclenchement  d’une recherche que dans le temps passé par l’utilisateur sur le moteur de recherche et  l’ensemble des services de Google et les données personnelles qui en dérivent ».

13. Afin d’assurer l’exécution de ces injonctions, l’Autorité les a, par ailleurs, assorties d’une  astreinte de 300 000 euros par jour de retard à l’expiration d’un délai de deux mois, courant  à compter de la demande formelle de réouverture des négociations formulée, le cas échéant,  par chacune des saisissantes.  

14. La Décision de non-respect des Injonctions fait actuellement l’objet d’un recours exercé par  Google. Conformément aux engagements finaux qu’elle a présentés le 9 mai 2022, Google  s’est engagée à se désister de ce recours.  

4. LE DESISTEMENT DE L’APIG ET DE L’AFP

15. Par courrier du 24 novembre 2021, l’AFP a informé l’Autorité de son désistement au fond.  Par décision n° 21-DE-01 du 1er décembre 2021, l’Autorité a pris acte de ce désistement et  a décidé de poursuivre et de traiter l’affaire enregistrée sous le numéro 19/0080 F comme  une saisine d’office4.

16. De même, par courrier du 15 avril 2022, l’APIG a informé l’Autorité de son désistement de  au fond. Par décision n° 22-DE-01 du 16 mai 2022, l’Autorité a pris acte de ce désistement  et a décidé de poursuivre et de traiter l’affaire enregistrée sous le numéro 19/0078 F comme  une saisine d’office5.

B. LES ENTREPRISES CONCERNEES

1. L’APIG ET LES SYNDICATS LA CONSTITUANT

17. L’APIG est une union de syndicats créée en septembre 2018 par les quatre syndicats  professionnels de la Presse Quotidienne Nationale (« SPQN »), Régionale (« SPQR ») et  Départementale (« SPQD ») et le Syndicat de la Presse Hebdomadaire Régionale  (« SPHR »). L’APIG et les syndicats la constituant ont fait l’objet d’une présentation  détaillée aux paragraphes 26 à 31 de la Décision de mesures conservatoires.

2. LE SEPM

18. Le SEPM est un syndicat professionnel créé en décembre 2012, formé du Syndicat de la  Presse Magazine (« SPM ») et du Syndicat Professionnel de la Presse Magazine et d’Opinion  (« SPPMO »), et dont le siège est à Paris. Le SEPM a fait l’objet d’une présentation détaillée  aux paragraphes 23 à 25 de la Décision de mesures conservatoires.

3. L’AFP

19. L’AFP est une agence de presse mondiale et généraliste, chargée de collecter, vérifier,  recouper et diffuser, tant en France qu’à l’étranger, des informations sous une forme neutre,  fiable et utilisable directement par tous types de médias (radios, télévision, presse écrite,  sites internet), mais aussi par des grandes entreprises et administrations. L’AFP a fait l’objet  d’une présentation détaillée aux paragraphes 32 et 33 de la Décision de mesures  conservatoires.

4. GOOGLE

20. Google est une entreprise créée en 1998, dont les fondateurs ont inventé le moteur de  recherche éponyme, qui est le plus utilisé en France et dans le monde. Les activités de Google  sont aujourd’hui concentrées sur la fourniture de services de recherche en ligne, l’offre de  plateformes et de systèmes d’exploitation et la publicité en ligne.

21. À compter d’une réorganisation interne, achevée le 2 octobre 2015, la société Alphabet Inc.  a remplacé Google LLC (anciennement Google Inc.) en tant que société mère du groupe  Google, et Google LLC est devenue une filiale exclusive d’Alphabet Inc6.

22. Google a fait l’objet d’une présentation détaillée aux paragraphes 34 à 61 de la Décision de  mesures conservatoires.

A. LE SECTEUR CONCERNE

23. La présente affaire concerne le secteur de la presse, lequel a fait l’objet d’une présentation  détaillée aux paragraphes 11 à 22 de la Décision de mesures conservatoires.  

24. Dans ces développements, l’Autorité a souligné le profond bouleversement auquel le secteur de la presse doit faire face, avec notamment la baisse des revenus issus de la publicité entre  2007 et 2017, alors que, dans le même temps, les recettes publicitaires des acteurs  numériques augmentent de manière importante (paragraphes 14 à 18 de la Décision de  mesures conservatoires). Ce phénomène de « captation de la valeur » par les acteurs  numériques au détriment des acteurs de la presse a également été relevé dans le cadre des  travaux parlementaires qui ont précédé l’adoption de la Loi sur les droits voisins  (paragraphes 20 et 21 de la Décision de mesures conservatoires).

25. La crise sanitaire a conduit au renforcement de l’usage des supports et services numériques  et a fortement affecté de nombreuses branches d’activités, dont le secteur de la presse.  Bien que les sites d’actualité aient observé une augmentation de leur audience en ligne entre  juillet 2019 et juin 2020, le secteur de la presse a connu une chute brutale de son chiffre  d’affaires, notamment publicitaire, et a vu ses activités fortement perturbées (notamment en  raison des baisses des ventes au numéro en kiosque, de la perturbation des acheminements  des journaux et magazines vendus sous abonnement, ou encore de la suppression des  activités de conférences en lien avec les titres de presse).

26. En effet, selon les chiffres publiés par l’Alliance pour les chiffres de la presse et des médias7 , la fréquentation numérique des sites d’éditeurs de presse a connu une hausse pour toutes les  familles de presse entre juillet 2019 et juin 2020 : + 7,8 % pour la presse quotidienne  nationale, + 24,5 % pour la presse quotidienne régionale et + 22,8 % pour la presse  magazine. Cette hausse de la fréquentation est notamment liée à la fermeture de nombreux  points de vente physiques pendant la période de confinement et à la souscription  d’abonnements en ligne8. Entre juillet 2020 et juin 2021, la fréquentation numérique a  continué d’augmenter fortement : + 40,4 ¨% pour la presse quotidienne nationale, + 41,4 %  pour la presse quotidienne régionale et + 21,1 % pour la presse magazine9.

27. Néanmoins, ces audiences numériques n’ont pas compensé la perte des revenus publicitaires  et la chute des ventes d’exemplaires papier, qui constituent les principales ressources de la  presse. D’après une étude du ministère de la Culture d’avril 2022 sur les secteurs culturels10,  en 2021, les recettes annuelles du secteur de la presse étaient inférieures de 10 % à leur  valeur de 2019, soit une perte de plus d’un milliard d’euros par rapport à 201911.

28. Cette situation a conduit à des réorganisations d’entreprises de presse. On peut notamment  relever le placement en liquidation judiciaire du quotidien régional La Marseillaise12, l’arrêt  de l’hebdomadaire Grazia sous forme papier au profit d’un contenu entièrement numérique,  la restructuration du quotidien Le Parisien ainsi qu’une réduction de la masse salariale pour  le journal L’Équipe13.  

29. Afin de réduire les conséquences de la crise, le gouvernement a annoncé, le 27 août 2020, un plan de soutien à la filière de la presse comprenant, d’une part, des mesures d’urgence  visant à garantir la continuité de la distribution de la presse, pour un montant de 106 millions  d’euros, et, d’autre part, une enveloppe de 377 millions d’euros pour financer des mesures  de relance sur la période 2020-202214..  

B. LES PRATIQUES CONSTATEES

1. LE CADRE JURIDIQUE APPLICABLE

30. Le cadre juridique applicable, à savoir notamment la Directive n° 2019/790 du 17 avril 2019  sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique du numérique  (la « Directive »), ainsi que la Loi sur les droits voisins, a fait l’objet d’une présentation  détaillée aux paragraphes 64 à 89 de la Décision de mesures conservatoires.  

31. En adoptant la Directive, le législateur européen a poursuivi l’objectif de mettre en place un  régime de protection juridique des éditeurs et des agences de presse, compte tenu des  spécificités du secteur de la presse et de son rôle essentiel dans le cadre d’une société  démocratique. Afin d’atteindre cet objectif, l’article 15 de la Directive prévoit la création  d’un droit voisin au bénéfice des éditeurs et agences de presse, leur conférant le droit  d’autoriser ou d’interdire la reproduction de leurs contenus par les plateformes, agrégateurs  et moteurs de recherche.  

32. La Loi sur les droits voisins a transposé en droit français l’article 15 de la Directive. Elle a  créé, à ce titre, un droit voisin au bénéfice des agences et éditeurs de presse, par des  dispositions insérées dans le code de la propriété intellectuelle (« CPI »). À cet égard, il est  précisé qu’en vertu de ces dispositions, les agences de presse bénéficient directement de la  protection conférée par les droits voisins, tant pour les contenus qu’elles publient  directement que pour les contenus repris par des éditeurs de presse tiers15.

33. En outre, la Loi sur les droits voisins a créé un article L. 218-4 du CPI qui dispose que :  

« La rémunération due au titre des droits voisins pour la reproduction et la communication  au public des publications de presse sous une forme numérique est assise sur les recettes de  l'exploitation de toute nature, directes ou indirectes ou, à défaut, évaluée forfaitairement,  notamment dans les cas prévus à l'article L. 131-4.  

La fixation du montant de cette rémunération prend en compte des éléments tels que les  investissements humains, matériels et financiers réalisés par les éditeurs et les agences de  presse, la contribution des publications de presse à l'information politique et générale et  l'importance de l'utilisation des publications de presse par les services de communication  au public en ligne.  

Les services de communication au public en ligne sont tenus de fournir aux éditeurs de  presse et aux agences de presse tous les éléments d'information relatifs aux utilisations des  publications de presse par leurs usagers ainsi que tous les autres éléments d'information  nécessaires à une évaluation transparente de la rémunération mentionnée au premier alinéa  du présent article et de sa répartition. »

2. LES PRATIQUES DE GOOGLE

a) Les pratiques constatées dans la Décision de mesures conservatoires

34. Les pratiques en cause trouvent leur origine dans l’annonce de la modification de la politique  d’affichage des contenus d’actualité par Google, en prévision de l’entrée en vigueur de la  Loi sur les droits voisins. Cette annonce a notamment pris la forme d’une publication du  25 septembre 2019 sur le blog de Google, où celle-ci précise que « [l]orsque la loi française  entrera en vigueur, nous n’afficherons plus d’aperçu du contenu en France pour les éditeurs  de presse européens, sauf si l’éditeur a fait les démarches pour nous indiquer que c’est son  souhait »16.

35. En parallèle, Google a indiqué par divers moyens qu’elle n’entendait pas rémunérer les  éditeurs et agences de presse pour la reprise de leurs contenus éditoriaux. Cette position  ressort également d’une page « FAQ » publiée par Google à destination des éditeurs de  presse et dont un extrait figure au paragraphe 94 de la Décision de mesures conservatoires.  

36. En conséquence de cette nouvelle politique d’affichage, l’accord donné par un éditeur pour  la reprise de son contenu, notamment celui protégé, équivaut à l’octroi d’une licence à titre  gratuit pour l’exploitation de son contenu par Google dans ses différents services  (Google Search, Google Actualités et Discover, en particulier).

37. Il ressort des éléments versés au dossier qu’à compter de l’entrée en vigueur de la nouvelle  politique d’affichage de Google, la très grande majorité des éditeurs ont autorisé Google à  afficher des contenus protégés sans percevoir de rémunération.  

38. Par ailleurs, les éditeurs n’ayant pas autorisé Google à afficher des contenus protégés se sont  exposés à des baisses de trafic significatives. À cet égard, la Décision de mesures  conservatoires présente l’incidence des aperçus de contenus sur le classement et le trafic  redirigé vers les sites des éditeurs de presse aux paragraphes 111 à 119.  

39. Enfin, les éléments du dossier, repris aux paragraphes 120 à 125 de la Décision de mesures  conservatoires, attestent que les éditeurs n’ayant pas fait les démarches pour maintenir la  reprise et l’affichage par Google des contenus protégés ont été exposés à de fortes baisses  d’audience, pouvant se traduire en baisse de revenus significative.  

40. Dans sa Décision de mesures conservatoires, l’Autorité a ainsi considéré qu’en l’état de  l’instruction, la modification par Google de sa politique d’affichage des contenus de presse  au sein de ses services à la suite de l’entrée en vigueur de la Loi sur les droits voisins était  susceptible d’être qualifiée d’abus de position dominante contraire aux articles L. 420-2 du  code de commerce et 102 du TFUE.  

41. L’Autorité a ainsi estimé, d’une part, que Google pourrait avoir imposé aux éditeurs et  agences de presse des conditions de transaction inéquitables au sens des articles L. 420-2 du  code de commerce et 102 a) du TFUE, en évitant toute forme de négociation et de  rémunération pour la reprise et l’affichage des contenus protégés au titre des droits voisins.  

42. D’autre part, l’Autorité a estimé que Google était susceptible d’avoir traité de façon  identique des acteurs économiques placés dans des situations différentes en-dehors de toute  justification objective, et, partant, d’avoir mis en œuvre une pratique discriminatoire au sens  des articles L. 420-2 du code de commerce et 102 c) du TFUE.

43. Enfin, l’Autorité a estimé que Google pourrait avoir abusé de sa position dominante pour  contourner la Loi sur les droits voisins, notamment en utilisant la possibilité laissée aux  éditeurs et agences de presse de consentir des licences gratuites pour imposer  systématiquement un principe de non-rémunération pour l’affichage des contenus protégés  sur ses services, sans aucune possibilité de négociation ; en refusant de communiquer les  informations nécessaires à la détermination de la rémunération ; et en reprenant des titres  d’articles dans leur intégralité en considérant qu’ils échappaient par principe à la Loi sur les  droits voisins.

44. Dans l’attente d’une décision au fond, l’Autorité a prononcé les Injonctions rappelées  ci-avant, qui s’articulaient autour d’une obligation principale de mettre en œuvre une  négociation de bonne foi, en vue de formuler une proposition financière portant sur  l’affichage de contenus protégés sur les services de Google, à savoir notamment la reprise  d’extraits d’articles et de photos de presse sur son moteur de recherche Google Search, ou  ses extensions Google Actualités et Discover (voir les paragraphes 319 et 320 de la Décision  de mesures conservatoires).

b) Les pratiques constatées dans la Décision de non-respect des Injonctions

45. En dépit des Injonctions prononcées par l’Autorité aux termes de sa Décision de mesures  conservatoires, l’Autorité a constaté que Google a été en mesure de faire échec aux  négociations avec les éditeurs et agences de presse sur l’utilisation actuelle des contenus de presse protégés sur ses services.

46. En premier lieu, pendant la quasi-totalité de la période de négociations de trois mois prévue  par la Décision de mesures conservatoires, Google a orienté systématiquement les  négociations vers la conclusion d’un contrat de licence global, dont l’objet portait  principalement sur un nouveau service commercial, dénommé Showcase, fondé sur la reprise  en intégralité d’articles de presse, qui n’était précédemment pas accessibles sur les portails  de Google. Cette proposition de contrat comprenait une offre de redevance unique, couvrant  à la fois les nouvelles utilisations d’articles de presse dans le cadre du nouveau service  Showcase et les utilisations actuelles de contenus protégés depuis l’entrée en vigueur de la  Loi, ce qui ne permettait donc pas de distinguer les revenus attribuables à l’utilisation  existante des contenus protégés sous forme d’extraits des publications de presse sur les  services existants de Google.  

47. Par ce comportement, les éditeurs et agences de presse ont été privés de leur capacité de  négocier une rémunération pour les seules utilisations actuelles de leurs contenus protégés  pendant la quasi-totalité de la période de négociation, alors même qu’ils avaient exprimé  clairement ce souhait à de multiples reprises à Google.

48. Le comportement de Google a perduré après la fin de la période de trois mois prévue par les  injonctions et, en particulier, après l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 8 octobre 2020 qui  a confirmé la Décision de mesures conservatoires. La cour d’appel de Paris a pourtant estimé  que Google ne pouvait pas « sérieusement » se prévaloir de l’existence de négociations  portant sur la reprise d’articles complets sur de nouveaux services de Google pour soutenir  qu’il ne s’était pas opposé à négocier une rémunération au titre des droits voisins portant sur  la reprise d’extraits d’articles de presse ou de photographies de presse sur ses services  existants17.  

49. Si, aux termes d’un accord-cadre finalement conclu avec l’APIG le 12 février 2021, les  éditeurs de presse pouvaient négocier une rémunération spécifique au titre de la reprise de  leurs contenus protégés sur les services de Google, ils devaient, en contrepartie, renoncer à  participer au programme Showcase. De fait, ils renonçaient alors à la fois à la rémunération  et à l’exposition sur Google de leurs contenus par rapport à leurs concurrents y participant,  et au bénéfice éventuel de la négociation collective. Les éditeurs étaient donc fortement  incités à privilégier l’offre de rémunération globale émise par Google sur les utilisations  actuelles et nouvelles par Google de l’affichage des contenus protégés. D’ailleurs, comme  le relèvent les paragraphes 346 à 352 de la Décision de non-respect des Injonctions, Google  a laissé entendre à plusieurs reprises que la rémunération due au titre des utilisations actuelles  des contenus de presse sur ses services était vouée à être non significative, voire inexistante,  rendant les discussions sur ces utilisations actuelles tout à fait accessoires par rapport à celles  portant sur le nouveau partenariat Showcase.

50. En deuxième lieu, Google a significativement réduit le champ d'application de la Loi sur les droits voisins, en excluant le principe d'une rémunération des contenus de presse issus de  titres ne disposant pas d'une certification « Information Politique et Générale »  (ou « IPG »)18, contrairement aux dispositions de la Loi sur les droits voisins et ce alors  même que, selon ses propres évaluations, les revenus que Google tire des contenus  « non IPG » sont supérieurs à ceux issus des contenus « IPG ».

51. En troisième lieu, Google a refusé aux agences de presse le bénéfice d'une rémunération de  leurs contenus repris par les éditeurs de presse, en contradiction, là aussi, avec la Décision  de mesures conservatoires et l'arrêt de la cour d’appel de Paris du 8 octobre 2020. Dans cet  arrêt, la cour a, en effet, explicitement confirmé l’existence d’un droit voisin au profit des  agences de presse en retenant que « la loi de 2019 vise les “éditeurs et agences de presse” de  sorte qu’il est vain de prétendre, comme le fait Google, que l’AFP ne peut directement  revendiquer des droits voisins, ce d’autant qu’une grande majorité des contenus de l’AFP  reproduits par le moteur de recherche correspond à des images »19 (soulignement ajouté).

52. En quatrième lieu, Google a retenu une approche excessivement restrictive des revenus  qu’elle perçoit du fait de l’affichage de contenus de presse sur ses services.  

53. En effet, dans le cadre de la mise en œuvre de la Décision de mesures conservatoires, Google  a indiqué que les seuls revenus qui pouvaient être associés à l’utilisation de contenus  protégés étaient les revenus publicitaires que Google génère sur des pages sur lesquelles ces  contenus apparaissent20. De fait, Google a exclu la prise en compte de toute autre forme de  revenus indirects générés par la présence de contenus protégés sur Google Search ou sur  d’autres services de Google, comme Google Actualités ou encore Discover.

54. Or, le paragraphe 210 de la Décision de mesures conservatoires souligne que Google perçoit  d’autres formes de revenus tirés de l’affichage de contenus protégés sur ses services.  L’affichage de contenus de presse diversifiés et attractifs sur ses différents services permet, en effet, à Google d’inciter l’utilisateur à les visiter régulièrement et à demeurer dans son  environnement pour des durées plus longues que celles qui seraient constatées en l’absence  de ces contenus. Ce faisant, Google, d’une part, renforce le volume de données collectées et  améliore ainsi sa capacité à faire de la publicité ciblée, et, d’autre part, augmente la  probabilité que l’utilisateur accède à des liens sponsorisés payants sur son site de recherche  en ligne.  

55. Dans son arrêt du 8 octobre 2020, la cour d’appel de Paris a confirmé l’existence de ces deux  sources de revenus, en indiquant que Google : « tire un intérêt économique certain de cet  affichage de publication de presse en raison :

− d’une part des revenus publicitaires directs qu’il perçoit grâce aux annonces  publicitaires qui s’affichent avec les résultats de la recherche, fussent-elles peu  nombreuses lorsque la recherche porte sur un thème d’actualité, et celles qu’il  perçoit en tant qu’intermédiaire de publicité en ligne, au titre des annonces ciblées  qu’il génère sur le site de l’éditeur vers lequel l’utilisateur du moteur de recherche  est redirigé ; et pour lesquelles il perçoit une commission ;

− d’autre part, et surtout, de l’attractivité apportée à son moteur de recherche par cet  affichage de contenu, attractivité qui peut jouer tant dans le déclenchement d’une  recherche que dans le temps passé par l’utilisateur sur le moteur de recherche et les  données personnelles qui en dérivent.

Si cette attractivité joue également indirectement en faveur des éditeurs de presse, elle  représente un intérêt majeur pour Google étant rappelé que la collecte de données  personnelles de ses utilisateurs constitue l’un des deux piliers de son modèle économique »21 (soulignement ajouté).

56. Dans le cadre de la Décision de non-respect des Injonctions, l’Autorité a considéré que la  méthode de valorisation des contenus protégés proposée par Google dans le cadre de ses  échanges avec l’APIG, le SEPM et l’AFP était particulièrement réductrice et contraire tant  à l’intention du législateur qu’aux positions exprimées par l’Autorité, puis la cour d’appel  de Paris.

57. En cinquième lieu, l’Autorité a constaté que les données communiquées par Google pendant  la plus grande partie de la période de négociations se sont limitées au seul service de moteur  de recherche en ligne Google Search, à l’exclusion des autres services de Google et de tout  autre revenu indirect que Google tire de l’exploitation de ces contenus. L’Autorité a  considéré que ces communications étaient insuffisantes pour permettre à l’éditeur ou à  l’agence de presse de faire le lien entre l’utilisation par Google de contenus protégés, les  revenus qu’elle en tire, et sa proposition financière.

58. En sixième lieu, en établissant un lien entre les négociations sur la rémunération des droits  voisins au titre des utilisations actuelles et celles sur la rémunération de nouveaux partenariats tels que Showcase, Google n’a pas respecté l’obligation de neutralité des  négociations sur la présentation des contenus de presse protégés sur ses services et sur les  autres relations économiques qu’entretiendrait Google avec les éditeurs et agences de presse.  

59. À cet égard, l’Autorité a constaté que l’accès au programme Showcase emportait des  conséquences significatives en termes de visibilité pour les éditeurs et agences de presse et  a considéré que le mécanisme mis en place par Google était ainsi de nature à inciter fortement ces derniers à accepter les conditions imposées par Google, sous peine de voir leurs conditions de visibilité se dégrader à l’égard des autres éditeurs et agences de presse ayant accepté de participer à ce programme.

II. La mise en œuvre de la procédure d’engagements

A. L’EVALUATION PRELIMINAIRE  

1. APPLICABILITE DU DROIT DE L’UNION

60. L’article 102 du TFUE dispose qu’« est incompatible avec le marché commun et interdit,  dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d’en être affecté, le fait  pour une ou plusieurs entreprises d’exploiter de façon abusive une position dominante sur  le marché commun ou dans une partie substantielle de celui-ci ».  

61. Dans ses lignes directrices relatives à la notion d’affectation du commerce figurant aux  articles 81 et 82 du traité (JOUE 2004, C 101, p. 81), la Commission européenne (ci-après  la « Commission ») rappelle que les articles 81 et 82 du traité CE, devenus les articles 101  et 102 du TFUE, s’appliquent aux accords horizontaux et verticaux, ainsi qu’aux pratiques  abusives d’entreprises qui sont « susceptibles d’affecter le commerce entre États membres »,  et ce « de façon sensible ».

62. Dans le cas d’espèce, les pratiques dénoncées portent sur le comportement adopté par  Google à la suite de la création par la Directive d’un droit voisin pour les éditeurs et les  agences de presse établis au sein de l’Union européenne. En outre, Google est un acteur de  dimension internationale, de même que certains éditeurs de presse qui appartiennent à des  groupes de dimension européenne, voire mondiale. Enfin, à la fois les services de Google et  les sites internet des éditeurs et agences de presse concernés couvrent l’ensemble du territoire  français et, en tant qu’activité en ligne, sont par nature ouverts au commerce transfrontalier.  Les utilisateurs français peuvent par exemple accéder à des sites d’éditeurs de presse situés  dans d’autres États membres que la France22. À cet égard, Google désigne elle-même les  éditeurs concernés par sa nouvelle politique de reprise et d’affichage des contenus protégés  comme « publication de presse européenne » (cote 23, 19/0074 F).

63. Partant, les pratiques dénoncées sont susceptibles d’affecter de manière sensible le  commerce entre États membres et d’être qualifiées au regard de l’article 102 du TFUE.

2. LES MARCHES PERTINENTS ET LA POSITION DE GOOGLE  

a) Le marché des services de recherche généraliste

64. Dans le cadre de leur pratique décisionnelle23, la Commission et l’Autorité ont considéré que  la fourniture de services de recherche généraliste (ou générale) constituait un marché  pertinent. Par ailleurs elles ont considéré que le marché des services de recherche généraliste  était de dimension nationale.  

65. Dans la Décision de mesures conservatoires, l’Autorité a considéré qu’il convenait de retenir  le marché français des services de recherche généraliste. 66. Depuis cette décision, aucun élément nouveau n’est venu modifier l’analyse de l’Autorité  sur cette question. Il convient donc de retenir également cette définition dans le cadre de la  présente décision.

b) La position de Google sur le marché français des services de recherche  généraliste

67. L’article 102 du TFUE concerne une situation de « puissance économique détenue par une  entreprise qui lui donne le pouvoir de faire obstacle au maintien d’une concurrence effective sur le marché en cause en lui fournissant la possibilité de comportements indépendants dans une mesure appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et, finalement, des consommateurs »24.

68. L’appréciation de la position dominante d’une entreprise s’effectue donc à partir d’un faisceau d’indices qui prend en compte des données d’ordre structurel, comme les parts de marché de l’entreprise et celles de ses principaux concurrents, mais aussi des éléments qui  sont de nature à conférer un avantage concurrentiel à l’entreprise concernée, comme l’appartenance à un groupe puissant ou la détention d’une avance technologique.

69. En ce qui concerne plus particulièrement les parts de marché, la Cour de Justice considère  qu’une part de marché significative permet de présumer l’existence d’une position  dominante : « [s]’agissant des parts de marché, la Cour a jugé (arrêt du 13 février 1979, Hoffmann La Roche, point 4l, 85/76, Rec. p. 461) que des parts extrêmement importantes constituent par elles-mêmes, et sauf circonstances exceptionnelles, la preuve de l’existence d’une position dominante. Tel est le cas d’une part de marché de 50 % comme celle constatée en l’espèce »25.

70. Au regard de ces critères et en l’état des éléments versés au dossier, Google dispose d’une  position dominante sur le marché français des services de recherche généraliste. Ses parts de  marché se situent à des niveaux très élevés, de l’ordre de 90 %, alors même que celles de ses  concurrents restent très limitées. La position dominante de Google est également confortée  par l’existence de fortes barrières à l’entrée du marché des services de recherche généraliste.  À cet égard, il est renvoyé aux paragraphes 153 à 171 de la Décision de mesures  conservatoires.  

71. En conclusion, il peut être considéré que Google détient une position dominante sur le  marché français des services de recherche généraliste. Par ailleurs, ainsi que cela a été relevé  au paragraphe 172 de la Décision de mesures conservatoires, à bien des égards, cette position  dominante de Google est susceptible de revêtir l’aspect « extraordinaire », ou exceptionnel,  relevé par la Commission dans l’affaire Microsoft26, et plus récemment par l’Autorité dans  sa décision n° 19-D-2627.

3. LES PREOCCUPATIONS DE CONCURRENCE

72. L’article L. 420-2 du code de commerce dresse une liste non-exhaustive de pratiques  abusives lorsqu’elles sont mises en œuvre par un opérateur en position dominante. De même,  selon l’article 102 du TFUE :

« Est incompatible avec le marché intérieur et interdit, dans la mesure où le commerce entre  États membres est susceptible d'en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises  d'exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché intérieur ou dans une  partie substantielle de celui-ci. Ces pratiques abusives peuvent notamment consister à :

a) imposer de façon directe ou indirecte des prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions  de transaction non équitables,  

b) limiter la production, les débouchés ou le développement technique au préjudice des  consommateurs,  

c) appliquer à l'égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations  équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence,  

d) subordonner la conclusion de contrats à l'acceptation, par les partenaires, de prestations  supplémentaires qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux, n'ont pas de lien  avec l'objet de ces contrats. »

73. S’agissant plus spécifiquement du a) du deuxième alinéa de l’article 102 du TFUE, son  application ne se limite pas à l’hypothèse dans laquelle l’acteur dominant impose des prix  non équitables ou excessifs, mais couvre aussi, comme l’article y fait expressément  référence, le cas où cet acteur impose, de façon directe ou indirecte, d’« autres conditions  de transaction non équitables ».

74. En l’espèce, la Loi sur les droits voisins - qui transpose la Directive – a créé un droit voisin  du droit d’auteur au bénéfice des éditeurs de presse et des agences de presse. La création de  ce droit voisin, qui est un droit patrimonial, devait permettre à ses bénéficiaires de percevoir  une rémunération, en contrepartie de la reprise de leurs contenus protégés par les exploitants  de services de communication au public en ligne. Ce droit a été instauré afin de rééquilibrer  le partage de la valeur créée par les contenus éditoriaux sur ces services, au bénéfice des  éditeurs et agences de presse.

75. Nonobstant l’entrée en vigueur de la Loi sur les droits voisins, le 24 octobre 2019, Google  a, dès le mois de septembre 2019, modifié unilatéralement sa politique d’affichage, en  demandant aux éditeurs de presse de renoncer à toute forme de rémunération financière pour  la reprise de leurs contenus de presse sur les services existants de Google, sous peine de  risquer une dégradation de l’affichage de leurs contenus de presse sur ses services de  recherche en ligne.

76. Aux termes de la Décision de mesures conservatoires, l’Autorité a considéré que les  conditions d’affichage imposées par Google ont permis à cette dernière d’éviter toute forme  de négociation et de rémunération pour la reprise des contenus protégés, quelle que soit leur  nature, et ce alors que les droits voisins créés par la loi ouvraient aux éditeurs et agences de  presse une possibilité de négociation pour la valorisation de leurs contenus, en fonction des  critères énumérés par la Loi sur les droits voisins.

77. À l’instar de ce qu’avait relevé l’Autorité au titre de la Décision de mesures conservatoires,  les services d’instruction ont notifié à Google un certain nombre de préoccupations de  concurrence.

78. D’abord, Google pourrait avoir imposé aux éditeurs et agences de presse des conditions de  transaction inéquitables au sens des articles L. 420-2 du code de commerce et 102 a) du  TFUE, en imposant, de manière unilatérale et sans aucune négociation, une rémunération  nulle pour la reprise et l’affichage des contenus protégés au titre des droits voisins (voir les  paragraphes 190 à 237 de la Décision de mesures conservatoires).  

79. L’imposition de conditions de transaction inéquitables pourrait ne pas se limiter à la seule  faculté de Google d’imposer un prix « nul », dès lors que la Décision de non-respect des  Injonctions a par ailleurs mis en exergue la capacité de Google, d’une part, à proposer une  rémunération ne valorisant pas ou de manière marginale les utilisations existantes de  contenus protégés et, d’autre part, à lier cette rémunération à l’utilisation par l’éditeur ou  l’agence concernée de nouveaux services de Google (voir les paragraphes 325 à 419 et 460  à 505 de la Décision de non-respect des Injonctions).  

80. En dépit des injonctions de la Décision de mesures conservatoires, Google n’a pas intégré dans ses propositions de rémunération la période débutant à la date d’entrée en vigueur de  la Loi sur les droits voisins (voir les paragraphes 366 à 370 de la Décision de non-respect  des Injonctions).

81. De même, Google a été en mesure de faire obstacle aux négociations de bonne foi, en  communiquant de manière partielle et tardive les informations permettant de rendre  transparentes les propositions de rémunération de Google (voir les paragraphes 420 à 459 de  la Décision de non-respect des Injonctions).  

82. Il ressort de ces éléments que Google est donc susceptible d’avoir utilisé sa position  dominante pour imposer des conditions de transaction inéquitables, aussi bien s’agissant du  niveau de rémunération que des informations communiquées et participant à la  détermination de ce niveau.  

83. Ensuite, conformément à la jurisprudence européenne, le principe d’égalité de traitement  exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des  situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement  soit objectivement justifié28. En imposant une rémunération nulle pour tous les éditeurs et  agences de presse lors de l’entrée en vigueur de la Loi sur les droits voisins, indépendamment  d’un examen de leurs situations respectives, Google est susceptible d’avoir traité de façon  identique des acteurs économiques placés dans des situations différentes en-dehors de toute  justification objective, et, partant, d’avoir mis en œuvre une pratique discriminatoire au sens  des articles L. 420-2 du code de commerce et 102 c) du TFUE (voir les paragraphes 238 à  241 de la Décision de mesures conservatoires).

84. Enfin, en utilisant dans un premier temps la possibilité laissée aux éditeurs et agences de  presse de consentir des licences gratuites pour imposer systématiquement un principe de  non-rémunération pour l’affichage des contenus protégés sur ses services Google pourrait  avoir abusé de sa position dominante pour contourner la Loi sur les droits voisins, qui visait  à créer un droit patrimonial au profit des éditeurs et agences de presse en contrepartie de la  reprise de leurs contenus protégés par les services de communication au public en ligne (voir  les paragraphes 255 à 268 de la Décision de mesures conservatoires). De même, le  comportement adopté par Google après la Décision de mesures conservatoires, consistant à  substituer une négociation portant sur la fourniture de nouveaux services, tel que Showcase,  à la négociation de la rémunération due au titre des utilisations actuelles de contenus protégés  soulève des préoccupations aussi bien en droit de la concurrence qu’au regard du respect de  la Loi sur les droits voisins.

85. Compte tenu des éléments du dossier, aucune justification objective ne semble devoir être  retenue s’agissant des pratiques en cause.

86. Ces pratiques sont susceptibles d’avoir entraîné des effets sur les éditeurs et agences de  presse, en privant ces derniers de ressources essentielles à la pérennité de leurs activités et à  la qualité de l’information. Ces pratiques ont également pu avoir des effets sur les autres  services de recherche généraliste, ces derniers pouvant supporter des coûts auxquels leur  principal concurrent, Google, peut échapper en raison de sa position dominante (voir les  paragraphes 242 à 254 de la Décision de mesures conservatoires).  

87. Les pratiques en cause sont donc susceptibles de constituer des abus de position dominante  contraires aux articles L. 420-2 du code de commerce et 102 TFUE et soulèvent ainsi des  préoccupations de concurrence.  

88. Elles sont mises en œuvre par les sociétés Google France, Google Ireland et Google LLC.  En outre, Alphabet Inc., en tant que société mère29, peut également être tenue responsable  des agissements de ses filiales. En tout état de cause, des éléments au dossier tendent à  démontrer sa participation active aux pratiques30.

89. Ces préoccupations concernent donc, d’une part, les sociétés Google France, Google Ireland  Ltd., Google LLC et Alphabet Inc. en raison de leur participation directe aux pratiques en  cause, et d’autre part Alphabet Inc., en tant que société mère.

B. LES ENGAGEMENTS PROPOSES PAR GOOGLE

1. LES ENGAGEMENTS PROPOSES PAR GOOGLE LE 9 DECEMBRE 2021

90. À la suite de la communication de l’évaluation préliminaire, Google a transmis une  proposition d’engagements le 9 décembre 2021, qui comprenait les six mesures correctives  suivantes.

91. Premièrement, Google s’engageait à négocier de bonne foi, avec les agences de presse et les  services de presse en ligne reconnus par la Commission Paritaire des Publications et Agences  de Presse (« CPPAP »), qui en feraient la demande, la rémunération due pour toute reprise  de contenus protégés sur ses services conformément aux modalités prévues par l’article  L. 218-4 du CPI et selon des critères transparents, objectifs et non discriminatoires. De plus,  Google s’engageait à ce que ces négociations couvrent la période de reprise du contenu  protégé depuis le 24 octobre 2019, date d’entrée en vigueur de la Loi sur les droits voisins, pour toute demande de négociation effectuée avant la date d’entrée en vigueur des  engagements.

92. La proposition d’engagements précisait que : « Les Parties Négociantes pourront, si elles le  souhaitent, exiger que ces négociations portent sur la rémunération des seules utilisations  existantes de leurs Contenus protégés sur les services de Google à la date de leur demande  d’entrée en négociations. Dans l’hypothèse où les négociations porteraient à la fois sur les  utilisations existantes des contenus protégés sur les services de Google à la date d’entrée en  négociations et sur de nouvelles utilisations, les utilisations existantes devront faire l’objet  d’une rémunération spécifique ».

93. Deuxièmement, Google s’engageait à communiquer aux éditeurs de presse et agences de  presse les informations prévues par l’article L. 218-4 du CPI et permettant une évaluation  transparente de la rémunération proposée par Google.

94. L’offre d’engagements comprenait une annexe, fournissant une liste précise d'informations  que Google s'engageait à fournir dans les 21 jours ouvrés qui suivent la réception de la  demande en négociations d’une partie négociante. Les éditeurs ou agences en négociations  avec Google pouvaient formuler, sous le contrôle d’un mandataire indépendant, des  demandes d’informations complémentaires.

95. Troisièmement, Google s’engageait à maintenir, durant la période de négociations avec les  parties négociantes, les modalités d’affichage mises en place à la date de la demande d’entrée  en négociations, selon les paramètres retenus par les parties négociantes.

96. Quatrièmement, Google s’engageait à faire une proposition de rémunération dans un délai  de trois mois à compter à compter de la date de réception de la demande en négociations de  la partie négociante.

97. Dans l’hypothèse où les parties ne parviendraient pas à un accord, les parties négociantes  avaient la possibilité de saisir un tribunal arbitral chargé de déterminer le montant de la  rémunération. La procédure d’arbitrage serait régie par le règlement d’arbitrage de la  Chambre Commerciale Internationale (« CCI »), selon une procédure accélérée de six mois,  avec la possibilité de former un appel devant un tribunal arbitral autrement composé.  Dans le cadre de ce mécanisme, Google s’engageait à supporter les frais d’arbitrage  (à l’exclusion des honoraires d’avocats de la partie négociante) en première instance  uniquement.

98. L’offre d’engagements précisait néanmoins que la décision du tribunal arbitral n’emportait  aucune obligation pour Google de conclure des licences payantes pour reprendre les  contenus protégés de la partie négociante. Google se réservait donc le droit de ne plus  reproduire sur ses services les contenus de presse protégés de l’éditeur ou de l’agence  concerné. La proposition d’engagements disposait en revanche que, dans l’hypothèse où  Google décidait de reprendre les contenus objet de la décision arbitrale, la rémunération ne  pourrait être inférieure à celle fixée par le tribunal arbitral.

99. Cinquièmement, Google s’engageait à prendre les mesures nécessaires pour que les  négociations n’affectent ni l’indexation, ni le classement, ni la présentation des contenus  protégés.

100. Sixièmement, Google s’engageait à prendre les mesures nécessaires pour que les  négociations n’affectent pas les autres relations économiques qui existeraient entre Google  et les éditeurs de presse et agences de presse, avec lesquels Google est en négociations.

101. L’offre d’engagements prévoyait la nomination d’un mandataire, agréé par l’Autorité, pour  surveiller la mise en œuvre des engagements de Google. Les engagements prévoyaient  également que le mandataire pouvait s’adjoindre les services d’un ou plusieurs experts agréés par l’Autorité, afin de l’aider dans ses analyses.  

102. Ces engagements étaient proposés pour une durée de 5 ans.

2. LES OBSERVATIONS RECUEILLIES LORS DU TEST DE MARCHE

103. Conformément à l’article R. 464-2 du code de commerce, l’offre initiale d’engagements a fait l’objet d’une communication aux parties à la procédure et au commissaire du Gouvernement, ainsi que d’une consultation des tiers.

104. Dans le cadre de la présente procédure et après avoir rappelé que les préoccupations de concurrence relevées pourraient être considérées comme étant constitutives de pratiques contraires aux articles L. 420-2 du code de commerce et 102 du TFUE, l’Autorité a soumis pour commentaires, entre le 15 décembre 2021 et le 31 janvier 2022, les engagements  proposés aux parties et aux tiers concernés.

105. L’offre initiale d’engagements de Google a fait l’objet d’observations de la part des  saisissants, du commissaire du Gouvernement, de plusieurs associations professionnelles et  d’éditeurs et agences de presse.

a) Sur le recours à une procédure d’engagements

106. Plusieurs répondants au test de marché31 ont mis en cause la pertinence même de recourir à  une procédure d’engagements.

107. Premièrement, ils soutiennent qu’une procédure d’engagements n’est pas appropriée en  l’espèce, compte tenu de la gravité des pratiques reprochées à Google et du dommage à  l’économie qui en résulterait. Ils indiquent à cet égard que la mise en œuvre d’une procédure  d’engagements est généralement réservée par l’Autorité à des affaires dans lesquelles les  atteintes à la concurrence sont de faible gravité et que cette procédure est exclue dans le cas  « de certains abus de position dominante ayant déjà causé un dommage à l’économie  important » 32. Or au cas d’espèce, le comportement de Google a été qualifié par l’Autorité  comme étant d’une exceptionnelle gravité dans le cadre de la Décision de non-respect des  Injonctions. En outre, selon les répondants au test de marché, les pratiques mises en œuvre par Google, qui ont duré plus de deux ans, auraient déjà causé un dommage important à  l’économie.  

108. Deuxièmement, certains répondants au test de marché font valoir que les engagements  proposés par Google ont une portée très générale et ne reprennent que les termes de la Loi  sur les droits voisins et les Injonctions de la Décision de mesures conservatoires sans réelle  valeur ajoutée. Selon l’APIG, la proposition d’engagements permet de maintenir la capacité  de Google d’abuser de sa position dominante. Ce risque résulterait des termes mêmes des  engagements, qui permettent à Google de proposer une rémunération nulle pour la reprise  de contenus protégés (paragraphe 11 de la proposition d’engagements du  9 décembre 202133), de ne pas reprendre certains contenus à l’issue de la procédure  d’arbitrage (paragraphe 2334) et de modifier l’indexation ou le référencement de contenus  non inclus dans les accords (paragraphe 2535).

109. Compte tenu de l’historique du dossier, cette proposition d’engagements serait, selon l’AFP, insuffisante pour apporter les garanties nécessaires à l’efficacité d’un dispositif déjà existant  et non respecté par Google. Selon l’AFP, ces craintes sont renforcées par le recours formé  par Google contre la Décision de non-respect des Injonctions, recours ouvrant à Google la  possibilité de réduire la portée des engagements dans l’hypothèse où il prospèrerait.

110. Plusieurs répondants au test de marché soutiennent que Google continue à ne pas respecter  les Injonctions de la Décision de mesures conservatoires36. À cet égard, le SEPM indique  que le législateur a lui-même récemment constaté, dans le rapport de la mission  d’information parlementaire sur l’application de la Loi sur les droits voisins37, que Google  persistait dans sa stratégie de mise en échec de cette loi.  

111. Troisièmement, le ministre chargé de l’économie, ainsi que plusieurs répondants au test de  marché, soutiennent que l’absence de décision au fond représenterait un avantage  considérable pour Google, en ce qu’elle lui permettrait d’échapper à la fois à une décision  de constat d’infraction, sur laquelle pourraient se fonder les éditeurs et agences de presse dans le cadre d’un recours indemnitaire devant les juridictions compétentes, et au prononcé  d’une amende.  

b) Sur le champ d’application des engagements

112. Le ministre de l’économie et plusieurs répondants au test de marché ont critiqué le caractère  restrictif et le manque de clarté du champ d’application des engagements.

113. Premièrement, ils relèvent que les engagements proposés par Google s'appliquent  uniquement aux éditeurs qui publient un « service de presse en ligne » (ci-après « SPEL »)  reconnu par la CPPAP, aux termes du décret n° 2009-1340 du 29 octobre 2009. Ce critère  exclut donc, de fait, les sites internet de plusieurs éditeurs qui ne sont pas reconnus par la  CPPAP, notamment dans la presse magazine. Selon les répondants au test de marché38,  l’ajout de ce critère serait restrictif et en contradiction avec la Loi sur les droits voisins, qui  s’applique à tous les éditeurs au sens du III de l'article L. 218-1 du CPI, et non aux seuls  SPEL reconnus par la CPPAP.

114. Deuxièmement, l’AFP et Fédération Française des Agences de Presse (« FFAP ») soulignent  que, dans sa proposition d’engagements, Google ne reconnaît pas de manière claire et non  équivoque la titularité de droits voisins aux agences de presse dont les contenus sont intégrés  dans des publications tierces. La proposition d’engagements de Google n’offrirait donc  aucune garantie aux agences de presse de percevoir une rémunération au titre des droits  voisins pour les contenus repris par les éditeurs de presse, alors même qu’il s’agit de la  majorité de leurs flux. Ce risque serait d’autant plus fort que Google a contesté la titularité  de droits voisins aux agences de presse sur cette catégorie de contenus dans le cadre du  recours formé contre la Décision de non-respect des Injonctions.

115. Troisièmement, les engagements ne contiennent pas de définition précise de la notion de  « contenus protégés » ouvrant le droit à la rémunération au titre des droits voisins, de sorte  que la portée des engagements demeure incertaine.  

116. L’APIG fait valoir qu’il est nécessaire que les engagements comportent une définition  précise des contenus protégés :

− sur le critère de l'application territoriale du droit voisin notamment, qui devrait  inclure la prise en compte de toute utilisation des contenus protégés à travers le  monde et de tous revenus associés ;

− sur les limitations des droits voisins, et en particulier sur l’exclusion des « courts  extraits », sur lesquels Google entretiendrait une opacité défavorable aux éditeurs.

117. L’APIG propose également de préciser ce que recouvrent les « services existants » de  Google, afin de délimiter précisément les usages faits par Google des contenus protégés ouvrant le droit à une offre de rémunération spécifique. Dans le même sens, News Media  Europe suggère de clarifier le paragraphe 10 de la proposition d’engagements39, afin de  préciser que la négociation de la rémunération des « usages existants » et la négociation de  la rémunération des « nouveaux usages » restent distinctes et aboutissent à des accords  indépendants.

c) Sur le premier engagement relatif au principe de négociation de bonne foi Sur le déclenchement des négociations

118. La proposition d’engagements de Google prévoit que le déclenchement des négociations  interviendra à compter de la réception d’une demande complète d’entrée en négociations.  Pour être considérée comme complète, la demande d’informations devra comprendre une  liste d’informations précises (énumérée en annexe 2) et un engagement de confidentialité  signé (dont un modèle figure en annexe 4).  

119. L’APIG conteste que l’entrée en négociations puisse dépendre de la seule appréciation par  Google du caractère complet d’une demande formulée par un éditeur. Selon l’APIG,  l’éditeur doit avoir la possibilité pleine et entière de déclencher une négociation sans que  Google puisse exiger que celui-ci lui communique au préalable des informations.

120. Le Groupement des Éditeurs de Services en Ligne (le « GESTE ») suggère de préciser les  critères utilisés par Google pour apprécier le caractère complet d’une demande d’entrée en  négociations et de prévoir un délai pour que Google se prononce sur la complétude de cette  demande.

121. Selon le groupe M6, imposer un formalisme aux demandes d’entrée en négociations n’apparaît pas justifié. Pour simplifier la procédure de négociation, le groupe M6 propose  que l’appréciation du caractère complet de la demande d’entrée en négociations ne soit soumise au mandataire qu’en cas de désaccord entre les parties.

122. L’AFP et la FFAP soulignent que l’annexe 2 est insuffisamment précise s’agissant des  agences de presse. Outre la communication de balises méta IPTC40 demandées par Google  dans le cadre de cette annexe, d’autres méthodes pouvant permettre d’identifier les contenus  des agences de presse devraient être envisagées et il appartient à Google de solliciter en  amont les agences afin qu’elles fournissent les informations et données qui leur sont  raisonnablement nécessaires pour cela.

Sur les offres de rémunération émises par Google

123. Plusieurs répondants au test de marché41 indiquent que l’engagement de négociation de  bonne foi n’apporte aucune valeur ajoutée par rapport à la Loi sur les droits voisins, ni  aucune garantie permettant de mettre fin aux pratiques de Google.

124. Ils soulignent à cet égard que Google se réserve la possibilité de formuler une offre de  rémunération nulle aux éditeurs ou agences de presse, sans expliquer dans quels cas  particuliers une telle proposition serait justifiée.

125. Plusieurs répondants au test de marché font valoir la nécessité de définir, dans le cadre de la  proposition d’engagements, une méthodologie de calcul approuvée par les parties prenantes,  précisant les critères d’évaluation des revenus associés aux contenus de presse protégés, en  particulier les revenus indirects.

126. Selon l’APIG, cette méthodologie de calcul devrait corriger les biais actuels de la méthode  utilisée par Google, qui se caractériserait par une valorisation uniforme de tous les types de  contenus de presse, l’exclusion de l’ensemble des hyperliens/titres, de la valorisation  « insignifiante » des revenus indirects sur Google Search, de l’absence totale de valorisation  sur les services Discover et Google Actualités et de la seule prise en compte des utilisateurs  localisés en France.

127. Le groupe M6 déplore l’absence d’offre de référence pour déterminer la rémunération des  contenus protégés. Il soutient qu’il est nécessaire a minima que le mandataire ait la  possibilité de contrôler les critères sur lesquels Google établira une proposition de  rémunération.  

128. TF1 dénonce l’absence de précisions concernant la façon dont Google entend appliquer le  critère légal des investissements42 pour construire sa proposition de rémunération due en  application de l’article L. 218-4 du CPI. Selon TF1, la connaissance de la manière dont ce  critère sera appliqué est primordiale en matière d’information politique et générale, qui  nécessite de disposer d’une rédaction propre et de correspondants internationaux.

129. Altice considère de son côté que Google devrait s’engager à détailler les éléments retenus  pour calculer le montant de la valeur globale du marché des droits voisins ainsi que le  pourcentage de redistribution aux ayants droit. Selon Altice, un tel engagement apparaît  nécessaire, dès lors que les estimations du marché des droits voisins de Google sont  nettement éloignées de leurs propres estimations. Altice ajoute que Google devrait s’engager  à tenir compte de toute réévaluation du montant global du marché des droits voisins en cours  de contrat afin de réévaluer, le cas échéant, le montant de la rémunération.

130. Le GESTE considère que, pour répondre à l’engagement de négociation de bonne foi, il est  nécessaire que le mandataire puisse réaliser une contre-expertise de l’assiette de  rémunération estimée par Google. Ce dernier devra, pour ce faire, obtenir communication  des informations nécessaires. Le GESTE considère également que Google devrait s’engager  à ce que l’enveloppe globale de rémunération puisse évoluer en fonction de la conjoncture,  de la réalité des négociations individuelles et, si nécessaire, de l’évaluation faite par le  mandataire ou tout expert habilité.  

Sur l’obligation de confidentialité

131. Plusieurs répondants au test de marché43 critiquent l’annexe 4 qui impose la signature d’un  accord de confidentialité aux parties négociantes. Cet engagement serait, selon eux, de nature  à faire obstacle à l’émergence d’un marché transparent des droits voisins de contenus de  presse en France.

132. Selon Corint44, tout élément tendant à la confidentialité serait de nature à faire obstacle à  l’émergence d’un marché transparent des droits voisins. Il conviendrait donc d’en supprimer  toute référence dans la proposition d’engagements.

133. La Fédération Nationale de la Presse Spécialisée (« FNPS ») considère que les licences  négociées par Google au titre des droits voisins devront être transparentes, le secret des  affaires ne pouvant pas se justifier de manière absolue en matière de droits voisins comme  le suggère l'accord de confidentialité proposé, et encore moins dans le cadre d'une gestion  collective de ces droits.

134. Selon News Media Europe, il serait opportun de permettre aux éditeurs de presse qui le  souhaitent d’échanger et de comparer, sur une base suffisamment agrégée et anonyme, les  critères clés des accords proposés par Google. En outre, News Media Europe suggère que le  contenu des décisions d'arbitrage soit mis à disposition de l’industrie de la presse, le cas  échéant au travers d’un mécanisme adéquat à mettre en place par l’Autorité ou par le mandataire.  

d) Sur le deuxième engagement relatif aux informations communiquées par  Google sur les revenus qu’elle retire de l’affichage de contenus de presse sur  ses services

Sur les informations communiquées par Google

135. Un grand nombre de répondants au test de marché45 soutiennent que les informations listées  dans l’annexe 1 de la proposition d’engagements de Google sont insuffisantes pour conduire  des négociations équilibrées.  

136. En ce qui concerne les données sur les revenus de Google, ils indiquent que la proposition  d’engagements prévoit uniquement la communication des revenus publicitaires directs et  indirects, réalisés sur Google Search et qu’aucun revenu lié aux contenus de presse sur  Google Actualités et Discover n’est communiqué. Or, selon eux, ces services seraient  sources de revenus indirects pour Google, même s’ils ne sont pas monétisés en France par  de la publicité. Enfin, ils soutiennent qu’aucune information sur les revenus indirects liés à  la collecte de données personnelles en lien avec la connaissance par Google de la  consultation de sites de presse, même forfaitaire, n’est prévue.  

137. En ce qui concerne les données relatives à l’utilisation des contenus protégés, le ministre de  l’économie indique que Google s’engage à ne communiquer les chiffres de l’éditeur ou de  l’agence qu’en valeur absolue et en pourcentage par rapport aux chiffres totaux pour les  éditeurs de presse. Selon le ministre de l’économie, en l’absence de comparaison, ces  chiffres ne permettent pas d’évaluer l’importance relative des contenus de presse pour le  moteur de recherche de Google.  

138. Par ailleurs, plusieurs répondants au test de marché relèvent que la communication par  Google des informations s’effectuera vingt et un jours ouvrés après la date de réception de  la demande. Par conséquent, selon eux, pendant près d’un tiers de la durée de la négociation,  l’éditeur ou l’agence n’aura pas connaissance des informations nécessaires à l’évaluation de  sa rémunération.

Sur la définition des revenus indirects

139. Plusieurs répondants46 au test de marché indiquent enfin que Google persisterait à contester  l’existence des revenus indirects qu’elle retire de l’affichage de contenus de presse sur ses  services. Dans sa proposition d’engagements, Google définit les revenus indirects tirés de  l’affichage de contenus protégés comme des « Revenus publicitaires sur Google Search qui  pourraient éventuellement résulter de l’attractivité apportée aux services de Google par  l’affichage de Contenus protégés ». Plusieurs répondants au test de marché considèrent que  l’emploi du conditionnel dans cette définition ne leur offre aucune garantie que les revenus  indirects soient effectivement pris en compte par Google, d’autant plus que Google conteste  l’existence de ces revenus indirects dans le cadre de son recours contre la Décision de non[1]respect des Injonctions devant la cour d’appel de Paris.

e) Sur le troisième engagement relatif au maintien des conditions d’affichage des  contenus de presse sur Google

140. Plusieurs répondants au test de marché47 critiquent le fait que l’engagement de maintien des  modalités d’affichage des contenus de presse ne couvre que la période de négociation et  considèrent que celui-ci devrait s’étendre pendant toute la durée d’exécution des licences de  contenus conclues avec Google. Selon eux, la réserve exprimée par Google dans sa  proposition d’engagements, qui lui permet, à l'issue de la période de négociation, de ne pas  maintenir ou de « s'opposer » aux modalités d'affichage choisies par les éditeurs risque  d’être utilisée par Google comme un moyen de pression, voire de discrimination entre  éditeurs.

f) Sur le quatrième engagement

Sur le délai des négociations

141. Plusieurs répondants au test de marché48 ont émis des réserves sur le délai de trois mois  prévu par Google pour proposer une offre de rémunération.

142. Selon la FFAP, la date de début de négociation devrait être fixée à compter du moment où  Google a communiqué l’ensemble des informations prévues par l’article L. 218-4 du CPI, et  non à compter de l’envoi d’une demande complète d’entrée en négociations des éditeurs ou  agences de presse. La FFAP suggère qu’un délai de seulement un mois soit prévu pour les  négociations avec Google, sous réserve que celui-ci ait communiqué aux éditeurs ou agence  de presse une proposition de rémunération dans les cinq jours ouvrés suivant l’ouverture de  la négociation. Le groupe M6 propose que Google s’engage à finaliser les négociations dans  un délai de trois mois à compter d’une demande d’entrée en négociations, ce qui implique  qu’elle communique une offre de rémunération dans un délai maximum de quinze jours  après l’ouverture des négociations. Dans le même sens, le GESTE souhaite que Google  s’engage sur un délai de trois mois pour finaliser la négociation et suggère que le délai laissé  à Google pour émettre une offre de rémunération soit inférieur à ce délai de trois mois.

Sur la procédure d’arbitrage

143. Les répondants au test de marché49 ont émis des critiques sur le recours à la procédure  arbitrale et ses modalités de fonctionnement.  

144. Ils ont exprimé des craintes sur le caractère coûteux et complexe d’une procédure arbitrale,  ainsi que sur les délais particulièrement longs inhérents à ce type de procédure. L’existence  d’un appel « de novo » contre la première décision arbitrale serait de nature à complexifier  et augmenter la durée de cette procédure, d’autant plus qu’aucune précision n’est apportée à  l’exécution de la première décision arbitrale le temps du prononcé de cet appel. S’agissant  du coût de l’arbitrage, la FFAP considère que Google devrait s’engager à payer les coûts  subis par les ayants droit en cas de décision arbitrale leur donnant raison, y compris les frais  de conseils.

145. En outre, la proposition d’engagements ne confère pas de force contraignante à la procédure  d’arbitrage à l’égard de Google, puisqu’aux termes du paragraphe 23 de la proposition d’engagements, Google se réserve le droit de ne pas « prendre en licence les Contenus  protégés de la Partie Négociante ».

146. L’AFP expose que l’efficacité d’une telle procédure dépend des informations à disposition  du tribunal. Or, la proposition d’engagements ne confère pas à l’arbitre la capacité  d’enjoindre à Google de communiquer des informations. De plus, à supposer que le tribunal  ne s’estime pas à même de remplir sa mission, faute d’informations nécessaires par exemple,  il conviendrait de prévoir quelles en seraient les conséquences.  

147. Plusieurs répondants au test de marché50 ont fait valoir que les modalités de financement de  la procédure d’arbitrage ne sont pas à même de garantir la neutralité de la procédure, dès  lors qu’elles sont mises à la charge de Google.

148. Aussi, plusieurs répondants ont proposé des solutions alternatives à la procédure d’arbitrage  prévue par Google, notamment la médiation ou la saisine de tribunaux judiciaires, qui  seraient plus simples, plus rapides et moins coûteuses.

149. Plusieurs répondants au test de marché51 proposent également de remplacer la procédure  arbitrale par un mécanisme semblable à celui adopté en Australie dans le cadre du « News  Media Bargaining Code », en vertu duquel, selon News Media Alliance :

− l’arbitrage peut être demandé par un éditeur de presse, en cas d’échec des  négociations ;

− l'Autorité australienne des communications et des médias est chargée d'établir et de  tenir à jour une liste d'arbitres agréés et peut procéder à la nomination des membres  du tribunal arbitral en cas de désaccord des parties ;

− le « News Media Bargaining Code » établit des règles pour le processus « d’arbitrage  de l’offre finale » : chacune des parties doit remettre une offre finale dans un délai  précis ; ce code détaille les informations nécessaires à la rédaction des offres, les  facteurs devant être pris en compte lors de l'évaluation des offres et les exigences que  les parties doivent respecter lors de la soumission de leurs offres finales ;

− le tribunal arbitral doit arbitrer entre les deux offres finales proposées et retenir celle  qui lui paraît la plus raisonnable. Les arbitres peuvent refuser ou adapter les offres  qu’ils reçoivent, s’ils estiment que ces offres de rémunération présentent un risque  d’atteinte grave pour la diffusion des contenus de presse protégés en Australie ou  pour l’intérêt du consommateur australien.

150. De son côté, TF1 propose que le mandataire puisse intervenir en premier ressort pour fixer  la rémunération de reprise de contenus et qu’en cas de désaccord, les parties puissent alors  saisir le tribunal arbitral.  

151. TF1 indique par ailleurs qu’il est nécessaire de prévoir une harmonisation des règles de  procédure concernant le contrôle de la détermination de la rémunération et de l’exécution du  contrat de rémunération de l’utilisation des contenus. Sur ce point, TF1 indique que le projet  d’accord qui lui a été transmis par Google prévoit l’application, en cas de difficulté dans  l’exécution du contrat, du droit anglais et le recours à une procédure d’arbitrage à Londres  et en anglais. Selon TF1, il existe donc une distorsion entre les deux procédures qui pourrait  comporter un risque de « stratégie d’enlisement »: si Google décidait de suspendre le  paiement de tout ou partie de la rémunération, le litige serait alors porté devant le tribunal  arbitral de Londres, aux frais de l’éditeur.  

g) Sur le cinquième engagement

152. Plusieurs répondants au test de marché52 ont émis des craintes sur le fait que Google puisse  cesser d’indexer, de référencer ou d’afficher les contenus protégés des éditeurs ou agences  de presse qui ne respectent pas les règles d’utilisation des services de Google. Ils indiquent  que ces règles, qui sont définies de manière unilatérale par Google et peuvent être modifiées  à tout moment par lui, peuvent être utilisées par Google comme un moyen de pression sur  les éditeurs ou agences de presse dans le cadre des négociations sur les droits voisins.

153. L’APIG considère aussi que la proposition d’engagements de Google du 9 décembre 2021 donne la possibilité à Google de ne plus indexer et de déclasser des contenus non compris  dans des négociations ou des accords. Une telle facilité serait de nature à placer les éditeurs  dans la même situation qu’en septembre 2019 avant l’entrée en vigueur de la Loi sur les  droits voisins, au moins pour une partie de leurs contenus. Selon l’APIG, il conviendrait dès  lors de maintenir l’obligation de neutralité pendant toute la durée des négociations et  d’exécution des licences.  

h) Sur le sixième engagement

154. Le Point relève que la proposition d’engagements de Google, qui oblige Google à respecter  un principe de neutralité des négociations relatives aux droits voisins vis-à-vis de toute autre  relation économique, s’applique uniquement aux parties avec lesquelles Google est en  négociation. La proposition d’engagements constitue ainsi un recul par rapport à la Décision  de mesures conservatoires, qui imposait que ce principe de neutralité s’applique à tous les  éditeurs et agences de presse, que ces derniers soient ou non parties aux négociations.

i) Sur le recours à un mandataire indépendant et, le cas échéant, à des experts

155. L’APIG critique le dispositif prévu par la proposition d’engagements de Google du  9 décembre 2021, la désignation du mandataire étant, selon elle, « essentiellement à la main  de Google ». L’APIG souligne également une trop grande proximité entre Google et le  mandataire, caractérisée par des échanges directs et un accès privilégié de Google aux  rapports du mandataire. Cette proximité serait de nature à créer une situation de conflit  d’intérêts et à créer une asymétrie par rapport aux éditeurs. Dans le même sens, le ministre  de l’économie relève que Google aura accès aux conclusions de l’expert avant son envoi à  l’Autorité, alors que les parties négociantes n’auront accès, au mieux, qu’à une version non  confidentielle des conclusions et constatations de l’expert. Cette différence apparaît non  justifiée et de nature à déséquilibrer les relations entre Google et les parties négociantes.

156. L’APIG souhaite la désignation d’un « certificateur-auditeur » par l’Autorité, afin  notamment de vérifier la pertinence et la conformité des données communiquées par Google.  Afin d’en garantir l’indépendance, la détermination de sa rémunération devrait relever de la  compétence de l’Autorité.

157. Le ministre de l’économie considère que la procédure de désignation d’un ou plusieurs  experts est complexe et manque de cohérence, puisque le texte des engagements indique que  le mandataire pourra s’adjoindre un ou plusieurs experts, alors que l’annexe 3 indique qu’un  seul expert pourra être désigné et non plusieurs. Corint considère que le mandataire devrait pouvoir choisir les experts qu’il souhaite s’adjoindre et non que Google soit chargé de les  désigner.

158. Altice et le GESTE considèrent que les missions du mandataire pourraient être étendues,  afin que ce dernier évalue le montant total du marché des droits voisins, et ce notamment à  l’aide d’un expert. Afin d’assurer l’effectivité d’une telle mission, les engagements  pourraient être modifiés pour contraindre Google à transmettre au mandataire tout élément  permettant de déterminer ce montant. Dans le même sens, Corint indique que Google devrait  s’engager à donner au mandataire un droit de regard sur l’ensemble des procédures et  données internes à Google.

159. Selon TF1, pour s’assurer de la bonne exécution des engagements, il est nécessaire que le  mandataire ait à sa disposition l’ensemble des éléments susceptibles d’affecter le calcul de  la rémunération. Les engagements devraient donc prévoir :  

− l’obligation pour Google de transmettre au mandataire une méthodologie générale  permettant d’évaluer les revenus directs et indirects, ainsi que les données  correspondantes ;  

− la transmission au mandataire par les éditeurs et agences de presse de toutes les  données dont ils disposent concernant l’évaluation des revenus directs et indirects,  l’estimation de l’assiette globale de leur rémunération, ainsi que des informations  concernant le montant de leurs éventuels investissements humains, matériels et  financiers et la contribution de leurs publications à l’information politique et  générale.

160. En cas de désaccord entre les parties, le mandataire pourrait venir moduler à la hausse ou à  la baisse le montant proposé par les parties sur la base de ses propres calculs. En cas de  désaccord persistant, il y aurait alors recours à la détermination de la rémunération par un  tiers, conformément au quatrième engagement.

j) Sur la durée des engagements

161. Plusieurs répondants au test de marché ont souligné que la durée des engagements de 5 ans  est trop courte et devrait être illimitée.

3. LES ENGAGEMENTS PROPOSES PAR GOOGLE A LA SUITE DU TEST DE MARCHE

162. Après avoir pris connaissance des résultats du test de marché, Google a communiqué aux services d’instruction, le 11 mars 2022, une nouvelle version de ses engagements53.

163. La séance devant le Collège de l’Autorité a débuté le 12 avril 2022 et a été suspendue.  Google a déposé ensuite deux nouvelles versions des engagements les 21 et 26 avril 202254.  La séance a repris et s’est terminée le 27 avril 2022, au cours de laquelle une nouvelle version  des engagements a été transmise55. Enfin, deux notes en délibéré ont été versées au dossier,  contenant une nouvelle version des engagements datée du 29 avril 202256, puis les  engagements finaux, le 9 mai 202257. Ces engagements finaux ont été signés par les  représentants de Google et transmis aux parties le 10 mai 202258.

III. Discussion

A. SUR LA MISE EN ŒUVRE DE LA PROCEDURE D’ENGAGEMENTS

164. L’article L. 464-2 du code de commerce dispose que l'Autorité de la concurrence peut  « accepter des engagements, d'une durée déterminée ou indéterminée, proposés par les  entreprises ou associations d'entreprises et de nature à mettre un terme à ses préoccupations  de concurrence susceptibles de constituer des pratiques prohibées visées aux articles  L. 420-1 à L. 420-2-2 et L. 420-5 ou contraires aux mesures prises en application de l'article  L. 410-3 ».

165. Dans son communiqué du 2 mars 2009, l’Autorité précise notamment que la mise en œuvre  de la procédure d’engagements « permet à l’Autorité d’accélérer la résolution des affaires ne portant pas sur des pratiques dont la nature ou les effets sont tels qu’ils appellent a priori le prononcé d’une sanction »59 et que « [l]’Autorité n’applique pas la procédure  d’engagements dans les cas où, en tout état de cause, l’atteinte à l’ordre public économique  impose le prononcé de sanctions pécuniaires, ce qui exclut notamment a priori les ententes particulièrement graves comme les cartels et certains abus de position dominante ayant déjà causé un dommage à l’économie important »60.

166. Comme le précise le communiqué précité, l’Autorité dispose ainsi d’un large pouvoir  d’appréciation pour déterminer la voie procédurale la plus adaptée parmi celles prévues par  le I de l’article L. 464-2 du code de commerce, et notamment pour opter entre la procédure  d’acceptation d’engagements et la procédure de sanction.

167. Par ailleurs, la cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 19 décembre 2013, a relevé que  « la procédure d’engagements constitue ainsi l’un des outils qui permet à une autorité de  concurrence d’assurer sa mission consistant à garantir le fonctionnement de la concurrence  sur les marchés, cette mission de défense de l’ordre public économique habilitant ladite  autorité à rendre des décisions d’engagements, non pas pour satisfaire la demande d’une  partie plaignante, mais pour mettre fin à des situations susceptibles d’être préjudiciables à  la concurrence »61.

168. Quand bien même les pratiques mises en œuvre par Google, notamment entre le  25 septembre 2019 et le 9 avril 2020, date d’adoption de la Décision de mesures  conservatoires (voir les paragraphes 34 et suivants ci-avant) sont très graves, cette  circonstance n’exclut pas que la voie des engagements soit la plus appropriée pour répondre  aux préoccupations de concurrence, dès lors que cette solution améliore et complète le  dispositif des injonctions prononcées par l’Autorité.  

169. Une exclusion par principe d’une décision d’acceptation des engagements de Google serait  d’autant moins opportune en l’espèce que la proposition de Google permet, grâce au  mécanisme de rémunération rétroactive (voir le paragraphe 212 ci-après), de remédier,  a posteriori, au dommage causé par les pratiques de Google.

170. Si le non-respect par Google de la Décision de mesures conservatoires (voir les paragraphes  45 et suivants) constitue un comportement d’une exceptionnelle gravité, l’Autorité a déjà  sanctionné ce comportement dans sa décision du 12 juillet 2021. En outre, cette sanction ne  pourra pas être remise en cause, à la suite de l’engagement de Google de se désister de son  recours contre la Décision de non-respect des Injonctions (voir paragraphe 176 ci-après).  

171. Par ailleurs, la circonstance que l’Autorité a constaté le non-respect, par Google, des mesures  conservatoires ne saurait emporter une présomption selon laquelle Google ne respecterait  pas les engagements auxquels elle s’engage pour l’avenir. Enfin, l’allégation selon laquelle  Google persisterait à ne pas respecter la Décision de mesures conservatoires n’est pas étayée  à ce stade62.

172. Dans ces conditions, il appartient à l’Autorité, dans le cadre de la présente décision, de  s’assurer que les engagements proposés par les Parties sont suffisamment pertinents,  crédibles, vérifiables et proportionnés pour mettre un terme aux préoccupations de  concurrence identifiées.

B. SUR LES MODIFICATIONS APPORTEES A L’OFFRE D’ENGAGEMENTS  DE GOOGLE

173. À la suite de la séance du 12 avril 2022 devant le collège de l’Autorité, Google a transmis  successivement au collège quatre nouvelles versions des engagements ainsi qu’une offre  finale des engagements le 9 mai 2022.  

174. Cette offre finale contient un certain nombre de modifications par rapport à la version initiale  qui avait été soumise à l’Autorité le 9 décembre 2021, et prend ainsi en compte à la fois les  préoccupations exprimées dans le cadre du test de marché et celles exprimées lors de la  séance devant le collège de l’Autorité.  

175. Les principales modifications sont résumées ci-après.

176. En premier lieu, Google étend ses engagements à Alphabet Inc, société de tête du groupe Google et s’engage à se désister de son recours contre la Décision de non-respect des  Injonctions.

177. En deuxième lieu, Google étend et précise le champ d’application des engagements, tant en  ce qui concerne les éditeurs de presse et les agences de presse que les contenus de presse  protégés :

− s’agissant des éditeurs de presse, les engagements ne se limitent plus à ceux disposant  d’une certification CPPAP, mais s’appliquent à l’ensemble des éditeurs de presse au  sens de l’article L. 218-1 du CPI ;

− s’agissant des agences de presse, Google reconnaît expressément la titularité de droits  voisins aux agences de presse sur les contenus repris à l’identique dans les  publications d’éditeurs de presse tiers ;

− s’agissant de la notion de contenus de presse protégés, Google précise qu’elle s’étend  aux textes, photos et vidéos intégrés dans les publications de presse.  

178. Enfin, en cas de désaccord portant sur la qualification d’éditeur ou d’agence de presse au  sens des engagements ou sur la question de savoir si le domaine d’un éditeur contient un  contenu protégé, les parties pourront saisir le mandataire chargé du suivi des engagements  qui devra émettre un avis dans un délai de dix jours ouvrés à compter du jour où il a été  consulté, avis auquel Google s’engage à se conformer.  

179. En troisième lieu, Google a précisé les modalités d’application de l’engagement de  négociation de bonne foi de reprise de contenus de presse sur ses services (Engagement n° 1).  

180. Sauf si la partie négociante demande expressément le contraire, Google s’engage à mener  des négociations distinctes, d’une part, sur le service Showcase ou tout autre nouveau service  de Google et, d’autre part, sur l’utilisation existante de contenus protégés. En cas de  négociations portant à la fois sur les utilisations existantes et nouvelles de contenus protégés,  Google s’engage à mener ces négociations de manière indépendante et à transmettre deux  offres de rémunération distinctes : la première portant sur les utilisations existantes de  contenus protégés, la seconde sur les autres services de Google ou les nouvelles utilisations  de ces contenus.

181. En outre, l’offre de Google inclura une proposition de mise à jour du montant de la  rémunération au moins une fois par an, au 1er février, sur la base des données communiquées  par Google sur l’importance de l’utilisation des contenus protégés pendant l’année  précédente et les revenus d’exploitation associés, ainsi qu’une régularisation finale du  paiement au terme de l’accord, le cas échéant.  

182. En quatrième lieu, Google a complété sa proposition d’engagements s’agissant des  communications d’informations (engagement n° 2).

183. Google a complété le socle minimum d’informations qu’elle devra transmettre à chaque  partie négociante (annexe 1 des engagements), tout en réduisant le délai maximum de  communication de ces informations de vingt et un jours ouvrés à dix jours ouvrés en cas de  négociations individuelles et quinze jours ouvrés en cas de négociation collective.

184. Ce socle d’informations pourra être élargi, dans un second temps, par des demandes  d’informations complémentaires formulées par les éditeurs et agences de presse, sur le  fondement de l’article L. 218-4 du CPI. En cas de désaccord entre Google et une partie négociante sur la faisabilité technique ou la pertinence de ces demandes d’informations  complémentaires au regard de l’article L. 218-4 du CPI, chaque partie pourra soumettre le  désaccord au mandataire qui émettra un avis, auquel Google s’engage à se conformer.  

185. Google s’engage à transmettre ces informations complémentaires dans un délai maximum  de quinze jours ouvrés, à compter de la demande de la partie négociante ou, le cas échéant,  de l’avis du mandataire en cas de désaccord sur la pertinence de la demande.

186. Dans le cadre des demandes complémentaires, Google pourra demander au mandataire de  prendre les mesures adéquates pour tenir compte de la confidentialité des informations. Le  mandataire pourra alors soumettre une proposition à l’Autorité, que Google s’engage à  respecter, qui prévoit :

− une communication d’informations sans mesure de protection supplémentaire aux  éditeurs et agences de presse, lesquels sont soumis déjà à un engagement de  confidentialité ;  

− une communication d’informations assortie de procédures de confidentialité  renforcées, telles qu’un accès restreint aux seuls conseils des éditeurs et agences de  presse ou le partage d’une version expurgée des informations confidentielles ; ou

− une communication d’informations exclusivement au mandataire et, le cas échéant  aux experts, lorsque les données comportent des informations particulièrement  sensibles et sont de nature à leur permettre d’apprécier les offres de rémunération de  Google dans un contexte plus global ou en lien avec les demandes d’informations  complémentaires. Les revenus publicitaires Search ads et Display ads de Google en  France relèvent de cette catégorie.

187. En cinquième lieu, Google a apporté plusieurs modifications à la procédure d’arbitrage  prévue en cas de désaccord persistant avec la partie négociante sur l’offre de rémunération  émise par Google.  

188. Alors que, dans sa proposition initiale, Google se réservait la possibilité de refuser de  rémunérer et d’afficher les contenus protégés sur ses services à l’issue de la procédure  d’arbitrage, Google s’engage dorénavant à émettre une offre de rémunération à la partie  négociante au moins égale à la rémunération fixée par le tribunal arbitral63. Par conséquent,  la rémunération fixée par le tribunal arbitral s’imposera à Google.

189. Par ailleurs, Google s’engage à prendre en charge la rémunération des arbitres, à la demande  de la partie négociante, non seulement pour la première procédure d’arbitrage, mais  également pour l’éventuelle procédure de réexamen en appel. Google précise également  qu’elle prendra en charge tout ou partie des frais d’avocats de l’autre partie négociante, si le  tribunal arbitral prend une décision en ce sens, conformément à l’article 38 du Règlement  d’arbitrage de la Chambre de commerce internationale64.

190. En outre, Google a complété la liste d’informations auxquelles le tribunal arbitral aura accès  pour rendre sa sentence. Google s’engage à lui remettre les informations et documents  échangés avec le mandataire et les experts, sans préjudice de la possibilité pour le tribunal  arbitral de demander la communication de documents complémentaires, et notamment des  informations relatives aux offres faites par Google à d’autres parties négociantes.

191. Enfin, les conditions de rémunération déterminées à l’issue de l’arbitrage initial  s’appliqueront de manière non-suspensive, en cas d’activation du mécanisme de réexamen.

192. En sixième lieu, dans son offre finale d’engagements, Google a supprimé la mention visant  à restreindre la portée du sixième engagement aux seules relations avec les éditeurs et  agences de presse avec lesquelles Google est en négociation.  

193. En septième lieu, Google a ajouté un septième engagement qui prévoit la possibilité pour les  éditeurs et agences de presse qui avaient, avant la publication de la présente décision, soit  déjà conclu un accord avec Google pour la rémunération au titre des droits voisins, soit déjà  reçu une telle offre, soit déjà eu le droit de recevoir une telle offre en vertu d’un accord[1]cadre, de bénéficier des présents engagements. Dans une telle hypothèse, la mise en œuvre  des engagements se fera sans frais pour les éditeurs et agences de presse liés à la résiliation  ou à l’amendement de l’éventuel accord existant avec Google. Par ailleurs, l’accord  préexistant continuera de s’appliquer jusqu’à la date de son amendement ou de sa résiliation.  

194. En huitième lieu, dans son offre finale d’engagements, Google propose un renouvellement  des engagements pour une période de 5 ans aux termes d’une décision de l’Autorité motivée  par une nouvelle analyse concurrentielle.

195. En neuvième lieu, en ce qui concerne l’annexe 3 relative au mandataire, les principales  évolutions apportées par l’offre finale des engagements tiennent, d’abord, à la transmission  des rapports et analyses de l’expert dans des conditions identiques pour Google et les autres  parties négociantes (paragraphes 13 et 15 de l’annexe 3), ensuite à la capacité pour le  mandataire de désigner lui-même les experts qu’il souhaite s’adjoindre (paragraphe 14 de  l’annexe 3), et enfin à la possibilité pour le mandataire et l’expert, le cas échéant, de désigner  un auditeur indépendant en vue de certifier les informations financières transmises par  Google (paragraphe 18 de l’annexe 3).  

196. En dixième lieu, l’annexe 1, qui liste les informations devant être communiquées par Google  aux Parties Négociantes en vertu du paragraphe 16 des engagements (c’est-à-dire le socle  des informations transmises systématiquement) ainsi que l’annexe 2 qui liste les  informations devant être communiquées par les parties négociantes à Google en vertu du  paragraphe 13 des engagements (c’est-à-dire celles transmises dans la demande d’entrée en  négociations) prévoient, dans la version finale des engagements, une clause annuelle de  revoyure.  

197. Google s’engage ainsi à ce que ces deux listes d’informations soient revues une fois par an  avec le mandataire, et amendées le cas échéant65.  

C. SUR LA REPONSE APPORTEE AUX PREOCCUPATIONS DE  CONCURRENCE

1. SUR LE CHAMP D’APPLICATION DES ENGAGEMENTS

198. Les améliorations apportées par Google dans l’offre finale des engagements permettent de  répondre aux préoccupations de concurrence concernant le caractère restrictif et le manque  de clarté de la portée des engagements.  

199. D’abord, le champ d’application des engagements proposés par Google est désormais étendu  aux éditeurs qui remplissent les critères de l’article L. 218-1 du CPI, et non aux seuls services  de presse en ligne reconnus par la CPPAP. Par conséquent, le champ d’application des  engagements de Google est dorénavant conforme à celui défini par le législateur dans la Loi  sur les droits voisins.  

200. Ensuite, Google reconnaît de manière non équivoque la titularité de droits voisins aux  agences de presse dont les contenus sont intégrés dans des publications d’éditeurs tiers.  En apportant cette clarification et en s’engageant à se désister de son recours contre la  Décision de non-respect des Injonctions, Google s’engage expressément à rémunérer les  agences de presse au titre de droits voisins sur cette catégorie de contenus.  

201. En outre, la notion de « contenus protégés » ouvrant le droit à une rémunération est clarifiée.  Notamment, en s’engageant à se désister de son recours contre la Décision de non-respect  des Injonctions et en indiquant expressément se conformer à la Décision de mesures  conservatoires et à l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 8 octobre 2020, Google reconnaît  que les extraits d’articles composés de textes, photos mais également de vidéos constituent  des contenus protégés et ouvrent droit à rémunération.  

202. Le périmètre géographique des engagements est celui du seul territoire français. L’emploi  des termes « en France » dans l’annexe 1 de l’offre finale d’engagements de Google s’apprécie sur la base de la localisation de l’utilisateur (GPS, adresse IP ou autre) s’agissant  des recherches, impressions et clics générant l’affichage de contenus protégés, et sur la base  des données comptables s’agissant des revenus. La circonstance que le calcul de la  rémunération soit déterminé en fonction de la localisation de l’utilisateur final en France et  non selon la localisation en France de l’éditeur ou l’agence de presse apparaît cohérente avec  les dispositions de l’article L. 218-1 du CPI, lequel dispose que « Le présent chapitre  s’applique aux éditeurs de presse et agences de presse établis sur le territoire d’un État  membre de l’Union européenne ».  

203. Par conséquent, un éditeur ou une agence de presse établi dans un autre pays de l’Union  européenne que la France pourra percevoir des droits voisins aux termes de l’offre finale  d’engagements pour ses contenus protégés qui s’affichent sur les services de Google à la  suite de recherches effectuées par un internaute localisé en France. À l’inverse, si les éditeurs  et agences de presse situés en France peuvent également percevoir des droits voisins  additionnels pour l’affichage de contenus protégés générés par un utilisateur situé dans un  autre pays de l’Union européenne que la France, la négociation de ces droits n’est pas  couverte par les engagements, dès lors que ceux-ci ne peuvent se voir conférer une portée  extraterritoriale.  

2. SUR LE DECLENCHEMENT DES NEGOCIATIONS

204. L’Autorité estime que Google est fondée à demander à l’autre partie négociante, d’une part,  de lui fournir les informations utiles pour lui permettre de construire son offre de  rémunération et, d’autre part, de lui demander la signature d’un accord de confidentialité,  afin d’ouvrir des négociations qu’elle est tenue de mener dans des délais contraints.  

205. Les informations devant être communiquées par les éditeurs et agences de presse pour entrer  en négociation avec Google sont listées en annexe 2 de l’offre finale des engagements.  Ces informations permettront à Google d’identifier à quels éditeurs ou agences de presse se  rattachent les contenus protégés qui s’affichent sur ses services. Elles sont, en outre, définies  de manière précise, de sorte que les éditeurs, agences de presse, ou les organismes qui les  représentent ne devraient pas éprouver de difficultés à les communiquer. En toute hypothèse,  l’offre finale des engagements prévoit désormais que l’appréciation du caractère complet  d’une demande d’entrée en négociations interviendra sous la supervision du mandataire66.  

206. Si d’autres informations que celles listées en annexe 2 des engagements sont, selon les  agences de presse, pertinentes pour identifier leurs contenus protégés, celles-ci sont libres  de les communiquer, dans la mesure où l’annexe 2 des engagements ne constitue que le socle  minimum d’informations à fournir par les éditeurs et agences de presse pour entrer en  négociations. Pour entrer en négociations avec Google, les agences de presse devront donc  communiquer à Google des informations sur les balises méta IPTC, sans que cela ne fasse  obstacle à ce que les agences de presse communiquent, si elles le jugent utile, des informations supplémentaires permettant d’identifier utilement leurs contenus intégrés dans  des publications d’éditeurs de presse tiers (comme, par exemple, la recherche et l’analyse  des crédits nominatifs des agences de presse dans le code informatique des pages web).  En tout état de cause, la liste d’informations minimales à fournir par les agences de presse  sera susceptible d’évoluer, Google ayant expressément prévu de revoir cette liste chaque  année et, le cas échéant de l’amender, sous la supervision du mandataire.  

207. Par ailleurs, l’Autorité estime que Google est fondée à demander la signature d’un accord de  confidentialité aux parties négociantes, dans la mesure où les accords portant sur la  rémunération de droits voisins contiennent des données commerciales sensibles aussi bien  pour Google que pour les éditeurs et agences de presse.  

208. Enfin, la mise en place d’une transparence totale sur les négociations portant sur les droits  voisins, demandée par certains répondants au test de marché, apparaît disproportionnée, dès  lors que Google s’est engagée à appliquer des critères objectifs, transparents et non[1]discriminatoires, sous le contrôle du mandataire, pour rémunérer les éditeurs et les agences  de presse. À cet égard, l’Autorité relève que le mandataire, et le cas échéant le tribunal  arbitral, pourront demander à avoir accès aux accords signés par Google et les parties  négociantes, s’ils le souhaitent. Par conséquent, il ne paraît pas nécessaire d’ouvrir cette  possibilité à l’ensemble des éditeurs et agences de presse.

3. SUR LE PREMIER ENGAGEMENT RELATIF AU PRINCIPE DE NEGOCIATION DE  BONNE FOI

209. En ce qui concerne le premier engagement, Google a apporté deux modifications  significatives dans son offre finale par rapport à la version initiale des engagements.

210. D’une part, Google a reformulé le paragraphe 11 (anciennement 10), afin de clarifier la  notion d’« utilisations existantes » des contenus protégés des éditeurs et agences de presse. Sur ce point, Google précise que le service Showcase constitue un nouveau service, qui devra  faire l’objet d’une négociation indépendante de celle portant sur les utilisations existantes de  contenus protégés pour lesquels le législateur a créé un droit patrimonial spécifique, afin de  permettre aux éditeurs et agences de presse de disposer d’une nouvelle source de revenus en  contrepartie de la reprise de leurs contenus par les services de communication en ligne67.  Cette clarification apportée par Google remédie aux craintes exprimées par certains  répondants au test de marché, qui considéraient que l’ancienne rédaction des engagements pouvait éventuellement donner lieu à des stratégies de contournement (par exemple, si  Showcase venait à être considéré par Google comme une utilisation existante des contenus  protégés).

211. D’autre part, Google a précisé que la rémunération proposée aux agences et éditeurs de  presse sera mise à jour au moins une fois par an68. Cette précision est conforme aux  dispositions de l’article L. 218-4 du CPI, qui prévoit que la rémunération proposée par  Google doit être assise sur l’ensemble de ses recettes d’exploitation, celles-ci évoluant  nécessairement au fil du temps en fonction de l’utilisation des contenus protégés par Google  sur ses services.

212. L’entrée en vigueur des engagements interviendra à compter de la notification de la présente  décision à Google.  

213. Les négociations visées par le premier engagement couvriront la période de reprise des  contenus protégés depuis le 24 octobre 2019 - date d’entrée en vigueur de la Loi sur les droits  voisins - pour tous les éditeurs et agences de presse qui ont demandé à Google d’entrer en  négociations avec elle avant l’entrée en vigueur des engagements.  

214. Pour les éditeurs et agences de presse qui entameront des discussions avec Google après  l’entrée en vigueur des engagements, Google sera tenue de négocier la reprise de contenus  protégés selon le régime de droit commun, prévu par le CPI.

215. La critique exprimée par certains répondants au test de marché sur la faculté de Google de  proposer des offres de rémunération nulle doit être écartée, dès lors que la Loi sur les droits  voisins ne confère pas aux éditeurs et agences de presse un droit à rémunération garantie69.  Comme l’indique la Décision de mesures conservatoires, certains contenus protégés peuvent  théoriquement être fournis gratuitement à Google par les éditeurs et agences de presse, soit  lorsque ceux-ci souhaitent lui accorder une licence gratuite, soit lorsque les critères fixés par  la Loi sur les droits voisins ne justifient pas le versement d’une rémunération.

216. Toutefois, sauf à pouvoir le justifier sur la base de considérations objectives, la situation  dans laquelle Google proposerait une rémunération nulle à un éditeur ou agence de presse,  alors qu’elle accepte de rémunérer positivement d’autres éditeurs ou agences de presse placés dans une situation identique, serait constitutive d’un traitement discriminatoire et d’un  manquement particulièrement grave aux engagements de Google et au droit de la  concurrence. L’Autorité se montrera particulièrement vigilante si une telle situation  advenait.  

4. SUR LE DEUXIEME ENGAGEMENT RELATIF AUX INFORMATIONS COMMUNIQUEES  PAR GOOGLE  

217. Dans son offre finale d’engagements, Google a complété le socle minimum d’informations  qui sera transmis, dans un premier temps, à chaque partie négociante, en y incluant  notamment (i) le nombre d’impressions et taux de clics des impressions en France sur  Google Search, Google Actualités, Discover du contenu protégé de l’éditeur de presse ou de  l’agence de presse concernée pour toutes les requêtes par mois pour les douze derniers mois  précédant la date de la demande d’entrée en négociations en pourcentage du nombre total  d’impressions, (ii) une estimation des revenus indirects générés en France par des recherches  qui suivent celle ayant conduit à l’affichage de contenus protégés dans le cadre d’une même  visite d’utilisateur et (iii) une estimation de la valeur des contenus protégés sur Discover et  Google Actualités par référence à des marchés européens comparables sur lesquels ces  services sont monétisés par de la publicité. Ce socle minimum d’informations pourra de  surcroît être revu et complété chaque année par Google sous la supervision du mandataire.

218. Google a également réduit le délai s’imposant à elle pour la transmission de ce socle  minimum d’informations. De quinze jours calendaires pour les négociations individuelles et  vingt et un jours calendaires pour les négociations collectives, les délais ont été portés à respectivement dix jours ouvrés et quinze jours ouvrés.

219. Outre ce socle minimum d’informations, Google s’est engagée, dans un second temps, à  fournir aux parties négociantes des informations supplémentaires sur le fondement de  l’article L. 218-4 du CPI dans un délai de quinze jours ouvrés. Le mandataire pourra être  saisi et émettre un avis, auquel Google s’engage à se conformer, en cas de désaccord sur la  pertinence ou la faisabilité technique d’une demande complémentaire.  

220. Le mandataire pourra également émettre des propositions sur les modalités de transmission  des informations complémentaires demandées par les parties négociantes, en prévoyant, le  cas échéant, des mesures destinées à préserver la confidentialité des informations de Google.  Ce mécanisme permettra de concilier la demande légitime de Google de protéger ses secrets  d’affaires avec la nécessité pour les éditeurs et agences de presse d’obtenir les informations  nécessaires à l’évaluation des revenus directs et indirects de Google liés à l’affichage de  contenus protégés.

221. Enfin, en s’engageant à se désister de son recours contre la Décision de non-respect des  Injonctions, Google ne conteste plus l’existence des revenus indirects examinés par  l’Autorité aux paragraphes 357 et 358 de cette décision, en particulier ceux résultant de  l’attractivité apportée aux services de Google par l’affichage de contenus protégés, qui,  d’une part, renforce le volume de données collectées de Google et améliore sa capacité à  faire de la publicité ciblée, et, d’autre part, augmente la probabilité que l’utilisateur accède  à des liens sponsorisés payants sur son site de recherche en ligne.

5. SUR LE QUATRIEME ENGAGEMENT

222. L’Autorité considère que le mécanisme par lequel Google s’engage à formuler une offre de  rémunération à l’issue d’une période de négociation de trois mois, conjuguée à l’intervention  d’un tiers pour trancher les désaccords persistants à l’issue de cette période, est le plus  crédible pour répondre aux préoccupations de concurrence identifiées par les services  d’instruction dans l’évaluation préliminaire.  

223. D’une part, ce mécanisme est conforme à l’intention du législateur qui a privilégié la voie  de la négociation pour déterminer la rémunération des droits voisins. Comme le souligne le  paragraphe 80 de la Décision de mesures conservatoires, l’objectif poursuivi par la Loi sur  les droits voisins est d’instaurer un cadre de négociation équilibrée « afin de garantir aux  éditeurs et agences de presse une transparence optimale quant aux paramètres utilisés par  les services de communication au public en ligne pour déterminer le montant de ces  recettes » et donc l’assiette de la rémunération du droit voisin telle qu’envisagée à l’article  L. 218-4 du CPI.

224. D’autre part, Google prévoit, en cas d’échec des négociations, la possibilité pour les parties  négociantes de recourir à l’arbitrage, afin de déterminer la rémunération due par Google à  un éditeur ou une agence de presse70. Google s’est engagée à communiquer les informations  utiles au tribunal arbitral pour lui permettre de prendre une décision éclairée, à savoir les  informations et documents échangés entre Google et la partie négociante et avec le  mandataire et les experts dans le cadre des négociations et, surtout si le tribunal en fait la  demande, la communication de documents complémentaires, dont notamment des  informations relatives aux offres faites par Google à d’autres parties négociantes71. Ce mécanisme apparaît crédible, dans la mesure où l’arbitrage est une modalité usuelle de  règlement des litiges commerciaux et que, dans l’offre finale d’engagements, la sentence  prononcée par le tribunal arbitral présentera un caractère contraignant pour Google.

225. En outre, afin de tenir compte des moindres ressources financières des éditeurs et agences  de presse, ces derniers pourront, s’ils le souhaitent, demander à Google de prendre en charge  intégralement la rémunération des arbitres, tant s’agissant de la première procédure que de  l’éventuelle procédure d’appel72. Le paiement des frais d’arbitrage par Google n’interviendra qu’à la demande de la partie négociante concernée, qui peut donc y renoncer.  Le tribunal arbitral pourra par ailleurs demander à Google de prendre en charge tout ou partie  des frais d’avocats supportés par les éditeurs ou agences de presse, conformément à l’article  38 du Règlement d’arbitrage de la CCI.  

226. Enfin, les conditions de rémunération déterminées à l’issue de la première procédure  d’arbitrage s’appliqueront de manière non-suspensive, ce qui permettra d’éviter que Google  ne recoure à une procédure de réexamen devant un autre tribunal arbitral à des fins dilatoires,  comme le craignaient certains répondants au test de marché.  

227. Sans préjuger des avantages comparés du mécanisme d’arbitrage adopté en Australie par  rapport au mécanisme d’arbitrage prévu par les Engagements, l’Autorité relève que ces deux  procédures permettent à un tribunal arbitral compétent et indépendant d’opérer un choix  entre les offres proposées par Google et par l’autre partie négociante et in fine de négocier une offre qui lui paraît la plus raisonnable. La procédure australienne, qui peut sembler plus  contraignante pour le tribunal arbitral, permet néanmoins à ce dernier de s’écarter des offres  qu’il reçoit s’il considère qu’elles sont de nature à porter atteinte aux intérêts du  consommateur. La mise en place en France d’un mécanisme similaire afin de tenir compte  de l’intérêt des consommateurs, au-delà de l’intérêt particulier de l’éditeur ou de l’agence de  presse concerné, nécessiterait l’intervention du législateur à l’instar de ce qui a été fait en  Australie73.  

228. Au cas d’espèce, il appartiendra au tribunal arbitral de choisir librement la méthodologie qui  lui semble la plus appropriée pour déterminer la rémunération globale des contenus protégés.  Le tribunal arbitral pourra, s’il le juge opportun, utiliser les offres respectives de Google et  de l’autre partie négociante comme point de référence, en décidant, le cas échéant, d’ajuster  le montant de l’offre qui lui paraît la plus raisonnable des deux. Il convient de noter que  Google a souhaité que la rémunération déterminée par le tribunal arbitral puisse être  exprimée en prix par impression. Si cette demande de Google paraît légitime, en ce qu’elle  permettra à Google de disposer d’un critère pour comparer les offres qu’elle adresse aux  éditeurs et agences de presse, elle ne doit pas avoir pour effet de limiter la liberté du tribunal  arbitral de choisir la méthode de valorisation qu’il juge la plus pertinente pour évaluer la  rémunération des droits voisins.  

229. La solution préconisée par certains répondants au test de marché, consistant à définir une  offre de référence ou une méthode de valorisation des droits voisins au sein des engagements  validée par l’Autorité, n’est pas opportune, dès lors que le législateur a souhaité que cette  rémunération soit le fruit d’une négociation entre les acteurs concernés. Une telle solution  serait, en outre, particulièrement complexe à mettre en œuvre, compte tenu du grand nombre  d’acteurs concernés, de la diversité de leur modèle économique et de leur situation juridique.

230. Par ailleurs, l’Autorité considère qu’il n’est pas possible, comme l’ont demandé certains  répondants au test de marché, d’exiger que Google s’engage à finaliser les négociations  commerciales avec les parties négociantes dans un délai de trois mois. Un tel engagement  serait hors du contrôle de Google, puisque l’aboutissement d’une négociation suppose, par  essence, que deux parties parviennent à un accord. La solution consistant à prévoir un mode  de règlement des différends à l’issue de la période de négociation de trois mois apparaît donc  la solution la plus adéquate pour trancher les éventuels désaccords entre les parties prenantes.

231. En toute hypothèse, il convient de rappeler que Google ne pourra pas imposer aux éditeurs  ou agences de presse de recourir à la procédure arbitrale prévue dans l’offre finale  d’engagements74. Si un éditeur ou une agence de presse ne souhaite pas recourir à la  procédure arbitrale, il pourra soit convenir avec Google de trancher leurs différends via  d’autres modes de résolution des conflits, comme la médiation par exemple, soit saisir les  juridictions compétentes pour faire valoir ses droits.  

6. SUR LE SIXIEME ENGAGEMENT

232. Dans sa proposition finale, Google a étendu son engagement de respecter un principe de  neutralité des négociations relatives aux droits voisins vis-à-vis de toute autre relation  économique à tous les éditeurs et agences de presse, que ces derniers soient ou non parties  aux négociations. Cet engagement doit permettre d’éviter que Google vide de leurs effets les  négociations sur les droits voisins en compensant sur d’autres activités les rémunérations  versées aux éditeurs au titre des droits voisins. Il s’agit aussi d’éviter que Google ne se serve  de sa position dominante sur le marché des services de recherche généraliste pour imposer,  au cours des négociations avec les éditeurs et les agences de presse, le recours à certains de  ses services.

7. SUR LA MISE EN ŒUVRE ET LA DUREE DES ENGAGEMENTS

233. Dans leur version définitive, les engagements sont proposés pour une durée de cinq ans à  compter de la date de notification de la décision de l’Autorité, renouvelable une fois sur  décision motivée de l’Autorité75.

234. Par ailleurs, Google a proposé de faire bénéficier des présents engagements les éditeurs et  agences de presse, qui ont déjà entamé des négociations ou conclu un contrat avec elle au  titre des droits voisins, soit directement, soit par l’intermédiaire d’une association  professionnelle. Les agences et les éditeurs de presse ayant déjà conclu un accord pourront  donc l’amender ou le résilier sans frais pour engager de nouvelles négociations avec Google,  étant précisé que la rémunération convenue en vertu de leurs accords préexistants continuera  de s’appliquer jusqu’à la date de cet amendement ou de cette résiliation76. Cette amélioration  constitue une garantie substantielle de la portée du dispositif des engagements, dans la  mesure où un grand nombre d’éditeurs de presse ont d’ores et déjà conclu un accord avec  Google au titre des droits voisins.

8. SUR LE SUIVI DES ENGAGEMENTS

235. Aux termes du sixième alinéa de l’article L. 464-8 du code de commerce : « l’Autorité de la  concurrence veille à l'exécution de ses décisions ». Il résulte de ces dispositions qu’il  incombe à l’Autorité d’assurer un suivi effectif de la bonne exécution des engagements.

236. Compte tenu de leur nature, les engagements comportementaux requièrent un suivi qui peut  s’avérer plus complexe que celui des mesures de nature structurelle77. En effet, comme  l’Autorité l’a relevé dans son étude sur les engagements comportementaux, le contrôle de la  bonne exécution de ces engagements « nécessite une analyse, parfois délicate, des actions  de leur auteur et du contexte de leur mise en œuvre » 78. Le suivi de ces engagements doit,  en outre, être effectué de façon régulière pendant toute la durée de leur exécution. Dès lors,  ce suivi peut impliquer « la mobilisation de moyens importants, en particulier du côté des  services d’instruction »79.

237. S’il résulte des points 48 et 49 du communiqué de procédure du 2 mars 2009 que le suivi des  engagements peut être effectué sur la base de rapports transmis par l’entreprise aux services  d’instruction et que ces derniers peuvent demander des informations complémentaires et, le  cas échéant, réaliser une enquête, la désignation d’un mandataire peut, dans certains cas,  s’avérer utile, tout particulièrement pour le suivi d’engagements comportementaux.

238. La désignation d’un mandataire indépendant peut, en effet, permettre à l’Autorité de vérifier  et de contrôler de manière efficace le respect des engagements, tout en ne mobilisant pas de  façon excessive ses ressources80.

239. En effet, l’utilité du recours à un mandataire tient à la circonstance qu’il agit de façon  indépendante de l’entreprise qui a proposé les engagements. Il contribue à leur suivi par  l’établissement de rapports réguliers transmis à l’Autorité. Le mandataire peut, par ailleurs,  alerter cette dernière en lui signalant toute difficulté d’application81. Il convient néanmoins  de souligner que l’Autorité n’est pas liée par l’appréciation portée par le mandataire quant  au respect des engagements82.

240. Afin qu’il puisse accomplir sa mission efficacement, le mandataire doit être choisi de façon  à ne pas être en situation de conflit d’intérêts vis-à-vis de l’entreprise qui propose les  engagements, et être rémunéré dans des conditions permettant la bonne exécution de cette  mission. Il doit également posséder les qualifications nécessaires pour assurer un suivi  rigoureux des engagements. Il doit, enfin, avoir accès à l’information nécessaire afin de  pouvoir vérifier par lui-même le respect des engagements.

241. Au cas d’espèce, l’intervention d’un mandataire externe, pouvant s’adjoindre, le cas échéant,  un ou plusieurs experts (financiers, en informatique ou spécialisés en propriété intellectuelle)  apparaît particulièrement appropriée compte tenu de la complexité et des ressources  nécessaires au suivi régulier des négociations portant sur les droits voisins.  

242. Les modalités de désignation du mandataire, proposées par Google, permettent d’assurer à  la fois son indépendance et sa capacité effective à assurer la mise en œuvre et le respect des  engagements83. Outre ses garanties d’indépendance, l’Autorité veillera à ce que le  mandataire dispose des ressources humaines et matérielles suffisantes pour suivre les  engagements de manière effective, compte tenu de la variété et de la complexité potentielle  des questions à examiner.

243. Il résulte des engagements proposés que le mandataire sera étroitement associé à la mise en  œuvre des engagements.  

244. D’une part, il supervisera le déroulement des négociations entre Google et les éditeurs et  agences de presse84, sous le contrôle de l’Autorité. Il sera également associé à la revue et à  la mise à jour du socle minimum d’informations que Google devra communiquer aux  éditeurs et agences de presse85 et de la liste d’informations à fournir par les éditeurs et  agences de presse pour entrer en négociations avec Google86.  

245. D’autre part, il jouera, le cas échéant, un rôle actif pour régler les éventuels points de  désaccord survenant entre les parties au cours de leur négociation. Le mandataire pourra ainsi être amené à émettre des avis ou des propositions sur toute contestation relative à la  qualification d’éditeur ou d’agence de presse ou sur la question de savoir si le domaine d’un  éditeur de presse contient du contenu protégé87, sur la faisabilité technique ou sur la  pertinence d’une demande d’informations complémentaires88, ainsi que sur les modalités de  communication des réponses aux demandes d’informations complémentaires aux éditeurs et  agences de presse89. Si les avis et propositions ne présentent pas de caractère contraignant à  l’égard des éditeurs et des agences de presse, Google s’est engagée à s’y conformer.  Ce mécanisme constitue un mode rapide de règlement des différends, qui, tout en étant  contraignant pour Google, préserve la liberté des éditeurs et agences de presse de recourir à  d’autres voies de droit pour faire valoir leurs prétentions si elles le jugent opportun.  

246. Afin de mener à bien sa mission et de minorer l’asymétrie d’information qui peut résulter de  ce que Google dispose, seule, des éléments nécessaires pour apprécier la bonne exécution  des engagements, ceux-ci comportent une liste – non exhaustive – des documents que le  mandataire recevra sans devoir en faire la demande90. Par ailleurs, les engagements prévoient  que « Le Mandataire et le(s) Expert(s) peuvent également demander à Google de leur  fournir tous documents, informations et explications nécessaires à l’accomplissement de  leurs missions, et lorsque cela est nécessaire, mandater un auditeur indépendant en vue de  la certification des données financières communiquées par Google ». Le mandataire pourra  également avoir des interactions avec les éditeurs et les agences de presse qui le souhaitent,  les engagements prévoyant sur ce point que le mandataire aura pour mission d’« échanger  (virtuellement ou en présentiel), à leur demande, avec les Parties Négociantes qui sont  désireuses de ou ont déjà formellement demandé à entrer en négociations avec Google, de  l’état des négociations et de toute difficulté rencontrée »91. Enfin, le mandataire aura la  capacité de choisir lui-même les experts qu’il souhaite s’adjoindre et, le cas échéant, de  désigner un auditeur indépendant en vue de certifier les informations financières transmises  par Google.

247. Le mandataire soumettra à l’Autorité un rapport trimestriel, dont il adressera une version  non confidentielle à Google et aux éditeurs et agences de presse. Ces rapports trimestriels,  qui devront comprendre une synthèse des échanges entre Google et les éditeurs et agences  de presse, permettront à l’Autorité de suivre régulièrement l’avancée des négociations et  d’être informée des éventuelles difficultés qu’elles soulèvent. Le mandataire devra  également alerter l’Autorité sans délai, s’il considère que Google ne respecte pas ses  engagements.

248. Compte tenu de ces éléments, l’Autorité considère, dans le cadre du suivi des engagements  proposés par Google, que la désignation d’un mandataire doté de moyens lui permettant de  mener à bien sa mission renforce le caractère vérifiable de ces engagements.

9. CONCLUSION

249. L’Autorité considère que les engagements proposés par Google, dans leur version finale du  9 mai 2022, sont de nature à mettre un terme aux préoccupations de concurrence exprimées  dans l’évaluation préliminaire des services d’instruction et présentent un caractère  substantiel, crédible et vérifiable. Il y a donc lieu de les accepter, de les rendre obligatoires  et de clore la procédure.

DÉCISION

Article 1er : L’Autorité de la concurrence accepte les engagements pris par Alphabet Inc,  Google LLC, Google Ireland Ltd. et Google France qui font partie intégrante de la présente  décision à laquelle ils sont annexés. Ces engagements sont rendus obligatoires à compter de  la notification de la présente décision.  

Article 2 : Les saisines enregistrées sous les numéros n° 19/0074 F, 19/0078 F et 19/0080 F  sont closes.  

Délibéré sur le rapport oral de M. Grégoire Colmet-Daâge M. Frédéric Fustier, rapporteurs,  et l’intervention de Mme Lauriane Lépine, rapporteure générale adjointe, par  M. Benoît Cœuré, président, Mme Fabienne Siredey-Garnier, vice-présidente,  M. Henri Piffaut, vice-président, Mme Laurence Borrel-Prat, M. Jean-Yves Mano et  M. Savinien Grignon-Dumoulin, membres.

  NOTES DE BAS DE PAGE :

 1 Ce résumé a un caractère strictement informatif. Seuls font foi les motifs de la décision numérotés ci-après.

2 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 8 octobre 2020, n° 20/08071.

3 Décision de non-respect des Injonctions, paragraphe 560.

 4 Cotes 139 à 141, 19/0080 F.  

5 Cotes 334 et 335, 19/0078 F.

6 Voir décision n° 19-D-26 de l’Autorité du 19 décembre 2019 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la publicité en ligne liée aux recherches, paragraphe 8.

7 https://www.acpm.fr/Actualites/Les-publications/Communiques-de-la-Diffusion/Diffusion-et-frequentationde-la-Presse-OJD-2019-2020.

8 https://www.mindnews.fr/article/18513/les-abonnements-numeriques-en-tres-forte-progression-dans-lecontexte-de-crise-sanitaire/.

9 https://www.acpm.fr/Actualites/Toute-l-actualite/Actualites-generales/Diffusion-et-Frequentation-de-laPresse-DSH-OJD-2020-2021.  

10 https://www.culture.gouv.fr/Thematiques/Etudes-et-statistiques/Publications/Collections-desynthese/Note-de-conjoncture/Analyse-conjoncturelle-du-chiffre-d-affaires-de-la-culture-au-4e-trimestre2021.

11 Le chiffre d’affaires du secteur de la presse est passé de 11 772 millions d’euros en 2019 à 10 634 millions d’euros en 2021.

12 https://www.capital.fr/entreprises-marches/la-marseillaise-place-en-liquidation-judiciaire-1375655.

13 https://www.strategies.fr/actualites/medias/4046338W/la-presse-a-l-epreuve-du-deconfinement.html.

14 https://www.culture.gouv.fr/Presse/Communiques-de-presse/Annonce-du-plan-de-soutien-a-la-filierepresse. Voir également le Rapport d’information n° 692 du 16 juin 2021, fait au nom de la commission des finances du Sénat sur les aides à la presse écrite.

15 Arrêt du 8 octobre 2020, n° 20/08071, point 99 ; Décision de non-respect des Injonctions, paragraphes 397 et suivants.

16 Cote 106, 19/0078 F.

17 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 8 octobre 2020 précité, point 102.

18 La certification IPG est délivrée par la Commission paritaire des publications et agences de presse (« CPPAP »), organisme indépendant composé à parité de représentants de l’administration de l’État et de professionnels de la presse. La délivrance de cette certification aux services de presse en ligne s’appuie sur les articles 1 et 2 du décret du 29 octobre 2009, ce dernier disposant : « Présentent un caractère d'information politique et générale les services de presse en ligne dont l'objet principal est d'apporter, de façon permanente et continue, des informations, des analyses et des commentaires sur l'actualité politique et générale locale, nationale ou internationale susceptibles d'éclairer le jugement des citoyens. Ces informations doivent présenter un intérêt dépassant significativement les préoccupations d'une catégorie de lecteurs. L'équipe rédactionnelle doit comporter au moins un journaliste professionnel, au sens de l'article L. 7111-3 du code du travail » (soulignement ajouté). Davantage d’informations sont disponibles sur le site : http://www.cppap.fr/.  

19 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 8 octobre 2020 précité, point 99.

20 Voir le paragraphe 18 de la note de Google, cote VC 528, 20/0083 F.

21 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 8 octobre 2020 précité, points 105 et 106.

22 Arrêt de la cour d’appel de Paris, 16 octobre 2007, Bijourama, n° 2006/17900.  

23 Voir la décision de l’Autorité n° 20-MC-01 du 9 avril 2020 relative à des demandes de mesures conservatoires présentées par le SEPM, l’APIG et l’Agence France-Presse, paragraphes 137 et suivants et les décisions de la Commission européenne du 27 juin 2017, Google Search (Shopping), AT.39740, points 155 et suivants et du 18 juillet 2018, Google Android, AT.40099, points 323 et suivants.

24 Arrêts de la Cour du 14 février 1978, United Brands et United Brands Continentaal BV/Commission, 27/76, point 65.

25 Arrêt de la Cour du 3 juillet 1991, AKZO/Commission, C-62/86, Rec. P. I-3359, point 60.  

26 Décision de la Commission du 24 mars 2004, Microsoft, COMP/C-3/37, points 429, 472 et 560 ; arrêt du Tribunal du 17 septembre 2007, T-201/04, point 387.  

27 Décision n° 19-D-26 de l’Autorité du 19 décembre 2019 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la publicité en ligne liée aux recherches, paragraphe 321.

28 Arrêts de la Cour du 14 décembre 2004, Arnold André Gmbh c. Landrat des Kreises Herford, C-434/02, point 68 ; du 12 juillet 2005, Egon Schempp c. Finanzamt München, C-403/03, point 28 ; du 14 décembre 2004, Swedish Match AB, Swedish Match UK Ltd c. Secretary of State for Health, C-210/03, point 70 ; du 14 avril 2005, Belgique c. Commission, C-110/03, point 71 ; du 6 décembre 2005, ABNA Ltd e.a. c. Secretary of State for Health et Food Standards Agency, C-453/03, C-11/04, C-12/04 et C-194/04, point 63.

29 Cotes 4934 et VC 2784 VNC 4361, 19/0075 M.

30 Cotes VC 4420 VNC 4471, 19/0075 M.

31 Le SEPM, l’APIG, l’AFP, le groupe M6, le groupe TF1, la société Droits Voisins de la Presse (« DVP »), la Fédération de la Presse Spécialisée (la « FNPS »), le Syndicat de la Presse Indépendante d’Information en Ligne, la Fédération Française des Agences de presse (la « FFAP »), Corint.  

32 Communiqué de procédure du 2 mars 2009 sur les engagements, paragraphe 11.

33 https://www.autoritedelaconcurrence.fr/sites/default/files/prop_enga_google_dtsvoisins_dec21.pdf

34 https://www.autoritedelaconcurrence.fr/sites/default/files/prop_enga_google_dtsvoisins_dec21.pdf

35 https://www.autoritedelaconcurrence.fr/sites/default/files/prop_enga_google_dtsvoisins_dec21.pdf

36 L’AFP, le SEPM, la société DVP, le FNPS, le Spiil.

37 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/dv/l15b4902_rapport-information#

38 Le ministre de l’économie, le SEPM, le FNPS, le Point, le groupe M6.

39 https://www.autoritedelaconcurrence.fr/sites/default/files/prop_enga_google_dtsvoisins_dec21.pdf

40 Ainsi appelées en référence au format de métadonnées promu par l’International Press Telecommunications Council (IPTC), permettant de transmettre des informations sur les contenus en même temps qu’un fichier image.

41 L’APIG, le FNPS, News Media Europe.

42 L’alinéa 2 de l’article L 218-4 du CPI dispose que : « La fixation du montant de cette rémunération prend en compte

 des éléments tels que les investissements humains, matériels et financiers réalisés par les éditeurs et les agences de presse, la contribution des publications de presse à l'information politique et générale et l'importance de l'utilisation des publications de presse par les services de communication au public en ligne ».

43 Le FNPS, News Media Europe et Corint.

44 Corint est une société agréée en tant qu'organisation de gestion collective en vertu de la loi allemande sur les sociétés de gestion collective, qui regroupe plusieurs centaines d’éditeurs en Allemagne.

45 L’APIG, l’AFP, le, SEPM, Le Point, European Newspapers Publishers Association/European Magazine Media Association (ENPA/EMMA), News Media Alliance.

46 L’APIG, l’AFP, le SEPM, Le Point.

47 L’APIG, le FNPS, le groupe M6 et News Media Europe.

48 La FFAP, le groupe M6 et le GESTE.

49 L’AFP, l’APIG, le SEPM, Corint, la FFAP, l’ENPA/EMMA.

50 L’APIG, Corint, l’ENPA/EMMA.

51 L’APIG, le SEPM et News Media Alliance.

52 L’APIG, la FFAP, le Point, le Groupe M6, News Media Europe.  

53 Cotes 2558 à 2575, 19/0074 F.

54 Cotes 3101 à 3121, 19/0074 F ; cotes 3164 à 3184, 19/0074 F.  

55 Cotes 3235 à 3250, 19/0074 F.  

56 Cotes 3252 à 3274, 19/0074 F.  

57 Cotes 3310 à 3328, 19/0074 F.  

58 Cotes 3347 à 3352, 19/0074 F.

59 Communiqué de procédure de l’Autorité du 2 mars 2009 relatif aux engagements en matière de concurrence, point 6.

60 Communiqué de procédure de l’Autorité du 2 mars 2009 relatif aux engagements en matière de concurrence, point 11.

61 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 19 décembre 2013, n° 2012/19484.

62 À ce jour, seul un plaignant a saisi l’Autorité pour le non-respect de la Décision de mesures conservatoires pour la période postérieure à la publication de la Décision de non-respect des Injonctions. Ce plaignant s’est, par la suite, désisté de son action.  

63 Paragraphe 23 des engagements.  

64 Le Règlement de procédure est accessible via icc-2021-arbitration-rules-2014-mediation-rules-frenchversion.pdf (iccwbo.org).  

65 Premier paragraphe des Annexes 1 et 2.  

66 Paragraphe 13 des engagements.  

67 Paragraphe 11 des engagements.

68 Paragraphe 12 des engagements.

69 Arrêt de la cour d’appel de Paris, 8 octobre 2020, n° 20/08071, point 96.

70 Paragraphe 25 des engagements.

71 Paragraphe 28 (g) des engagements.

72 Paragraphe 28 (i) des engagements.

73 Le système d’arbitrage mis en place en Australie ne résulte pas d’une procédure d’engagements, mais d’une mesure adoptée par le législateur australien.  

74 Paragraphe 25 des engagements.

75 Paragraphe 38 des engagements.

76 Paragraphe 35 des engagements.

77 Voir en ce sens la décision n° 12-D-15 de l’Autorité du 9 juillet 2012 relative au respect des engagements figurant dans la décision autorisant l’acquisition de Socopa Viandes par Groupe Bigard, paragraphe 31.

78 Étude « Les engagements comportementaux », page 148.

79 Ibid.  

80 Voir en ce sens la décision n° 13-D-15 du 25 juin 2013 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du transport maritime de fret entre l’Europe du Nord et les Antilles françaises, paragraphe 175.

81 Voir sur ces différents points, l’étude « Les engagements comportementaux », page 150.

82 Conseil d’État, Assemblée, 21 décembre 2012, société Groupe Canal Plus, n° 353856, au recueil, paragraphe 41.

83 Paragraphes 7 à 10 des engagements.  

84 Paragraphe 14 des engagements.

85 Annexe 1 des engagements.

86 Annexe 2 des engagements.

87 Paragraphe 7 des engagements.

88 Paragraphe 17 des engagements.

89 Paragraphe 18 des engagements.

90 Paragraphe 17 des engagements.

91 Paragraphe 11 (iii) des engagements.

 

AFFAIRES N°19/0074F, 19/0078F ET 19/0080F — DROITS VOISINS

PROPOSITION D’ENGAGEMENTS D’ALPHABET INC, GOOGLE LLC, GOOGLE IRELAND LIMITED ET GOOGLE FRANCE

9 mai 2022

(1) Les présents engagements sont proposés par Alphabet Inc., Google LLC, Google Ireland Limited et Google France, ou par toute filiale ou entreprise qui viendrait à leur être substituée pendant la durée des engagements (ci-après « Google »), sur le fondement des articles L. 464-2, 1 et R. 464-2 du Code de commerce.

(2) Leur objectif est de répondre de manière pertinente, crédible et vérifiable aux préoccupations de concurrence exprimées par l’Autorité de la concurrence (1’ « Autorité ») dans son évaluation préliminaire du 3 décembre 2021 (1’ «Evaluation préliminaire »), rendue dans le cadre des affaires jointes n° 19/0074F, 19/0078F et 19/0080F.

(3) Dans le respect de la décision n°20-MC-01 de l’Autorité du 9 avril 2020 (la «Décision de mesures conservatoires »), de l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 8 octobre 2020, et de la décision n°2 1-D- 17 de l’Autorité du 12juillet 2021 (la «Décision sur le respect des injonctions »), les engagements proposés ci-après par Google visent à permettre à l’Autorité de mettre fin à la procédure susmentionnée par l’acceptation de ces engagements. Google s’engage à se désister de son appel en cours contre la Décision sur le respect des injonctions.

PROPOSITION D’ENGAGEMENTS DE GOOGLE

(4) En application des articles L. 464-2, 1 et R. 464-2 du Code de commerce, Google s’engage à mettre en oeuvre les mesures décrites dans la présente proposition d’engagements (les «Engagements »), qui, selon elle, constituent une réponse pertinente, crédible, proportionnée et vérifiable aux préoccupations de concurrence de l’Autorité.

1. Engagements proposés par Google pour remédier aux préoccupations de concurrence identifiées par l’Autorité et clore la procédure au fond devant l’Autorité

1.1 Introduction

(5) L’objectif du présent document est d’offrir des Engagements qui auront pour effet de pérenniser et compléter les mesures conservatoires enjointes par l’Autorité dans sa Décision de mesures conservatoires, au-delà de leur durée d’application actuelle. La nomination d’un mandataire chargé de surveiller la bonne exécution des Engagements (le « Mandataire »), lequel pourra s’adjoindre les services d’un ou plusieurs experts (ci-après un/les « Expert(s) ») dans les conditions visées en Annexe 3, et la mise en place d’une procédure d’arbitrage pour déterminer les conditions tarifaires conformément aux modalités prévues à l’article L. 218-4 du Code de la propriété intellectuelle (< CPI ») en cas de désaccord persistant, permettront en outre de contribuer à atteindre l’objectif consistant à trouver des accords mutuellement acceptables et négociés de bonne foi.

1.2 Portée des Engagements

(6) Les Engagements ci-après s’appliquent à:

(i) tout éditeur de presse au sens de l’article L. 2 18-1 du CPI, c’est-à-dire toute personne qui édite une publication de presse au sens de l’article L. 218-1, I du CPI ou un service de presse en ligne au sens de l’article 1, alinéa 2, de la loi n° 86-897 du I août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse, auquel renvoie l’article L. 218-1 du CPI (ci-après une «Publication de presse »)

(ci-après un/des «Éditeurs) de presse »),

ou

(ii) toute agence de presse reconnue comme telle par un Arrêté publié au Journal Officiel à la suite d’un vote favorable de la Commission Paritaire des Publications et Agences de Presse (CPPAP), conformément à l’article 1 de l’ordonnance n°45-2646 du 2 novembre 1945 portant réglementation des agences de presse

(ci-après une/des « Agence(s) de presse »),

dont l’autorisation est requise, par application de l’article L. 218-2 du CPI, avant toute reproduction ou communication au public de leur(s) contenu(s) protégé(s) (en ce compris, pour les Editeurs de presse, les textes, photos et vidéos intégrés dans leurs Publications de presse et, pour les Agences de presse, les textes, photos et vidéos repris à l’identique par les Editeurs de presse dans leurs Publications de Presse et ceux qu’ils mettent à la disposition du grand public, sous réserve des exceptions prévues à l’article L. 211-3-1 du CPI) (le(s) «Contenu(s) protégé(s) »).

(7) En cas de désaccord entre Google et un éditeur ou une agence de presse sur la qualification d’Éditeur de presse ou d’Agence de presse, et/ou sur la question de savoir si le domaine d’un Editeur de presse contient du Contenu protégé, Google et/ou l’éditeur ou agence de presse concerné(e) pourra/ont soumettre le désaccord au Mandataire, lequel s’adjoindra les services d’un expert en propriété intellectuelle, et émettra un avis dans un délai de dix (10) jours ouvrés à compter de sa consultation, sur la question de savoir si cet éditeur ou cette agence de presse et/ou son domaine peuvent être ainsi qualifiés (sous réserve de toute décision judiciaire ayant traité de ce point). Google s’engage à se conformer à l’avis du Mandataire. Les délais visés au Deuxième Engagement pour partager des informations, ainsi que la période de négociations de trois (3) mois visée au Quatrième Engagement, ne commenceront à courir qu’à compter du moment où le Mandataire aura déterminé si la publication de l’éditeur ou de l’agence de presse relève du champ d’application de l’article L. 218-1 du CPI et sous réserve de la réception d’une Demande Complète d’entrée en négociations telle définie au paragraphe 13 ci-après.

(8) Les Éditeurs de presse, les Agences de presse et tout organisme de gestion collective ou association nommé(e) par les premiers afin de négocier en leur nom et pour leur compte (ci-après un/des «Orgamiisme(s) (le gestion collective ») sont ci-après désignés comme une/des « Partie(s) Négociante(s) ».

(9) Conformément à l’article L. 211-4, V du CPI, un Contenu protégé publié après le 6 juin 2019 est protégé pendant deux ans à compter du 1er janvier de l’année civile suivant l’année de première publication de ce Contenu protégé. Premier Engagement:

(10) Google s’engage à négocier de bonne foi, avec les Parties Négociantes qui en feraient la demande, la rémunération due par Google à ces dernières pour toute reprise de Contenus protégés sur ses produits et services, conformément aux modalités prévues à l’article L. 218-4 du CPI et selon des critères transparents, objectifs et non discriminatoires. Pour toute demande de négociation effectuée avant la date d’entrée en vigueur des Engagements, ces négociations couvriront la période de reprise du Contenu protégé depuis le 24 octobre 2019 (en appliquant à cette période rétroactive la méthodologie de rémunération proposée par Google pour les Utilisations Existantes de Contenus protégés).

(11) Sauf si les Parties Négociantes demandent le contraire, ces négociations ne porteront pas sur Google. News Showcase ou d’autres nouveaux produits et services de Google qui n’existent pas à la date de leur Demande Complète d’entrée en négociations telle que définie au paragraphe 13 ci-après (les utilisations dans les produits et services objets de la négociation sont désignées ci-après par les «Utilisations Existantes »). Dans l’hypothèse où les négociations porteraient à la fois sur les Utilisations Existantes et sur Google Showcase et/ou de nouveaux types d’utilisations de Contenus Protégés, les négociations relatives aux Utilisations Existantes devront être conduites de manière indépendante et les Utilisations Existantes devront faire l’objet d’une rémunération distincte.

(12) Cet Engagement impose que les négociations aboutissent effectivement à une proposition de rémunération de la part de Google. Le cas échéant, une telle proposition pourra conduire Google à proposer une rémunération nulle. L’offre de Google inclura une proposition de mise àjour du montant de la rémunération, au moins une fois par an au 1er février, sur la base des données communiquées par Google en application du Deuxième Engagement sur l’importance de son utilisation des Contenus protégés pendant l’année précédente et les revenus d’exploitation associés, ainsi qu’une régularisation finale du paiement au terme de l’accord, le cas échéant.

(13) Toute demande d’entrée en négociations sera envoyée via le formulaire disponible en ligne à l’adresse httus:f/support.google.com/webmasters/answer/ 12272 14 I ou via tout autre canal de communication alternatif proposé par Google. Elle devra comprendre l’ensemble des informations listées en Annexe 2 ainsi qu’un engagement de confidentialité signé confonnément au modèle figurant en Annexe 4, pour être considérée comme complète (la « Demande Complète d’entrée en négociations »).

(14) Ces négociations (en ce compris l’appréciation du caractère complet d’une demande d’entrée en négociations) interviendront sous la supervision d’un Mandataire, dont les missions sont décrites en Annexe 3 ci-après.

Deuxième Engagement:

(15) Google s’engage à communiquer aux Éditeurs de presse et Agences de presse les informations prévues à l’article L. 218-4 du CPI.

(16) Dans un premier temps, Google s’engage à partager, avec les Parties Négociantes ayant formellement demandé à entrer en négociations, les éléments listés en Annexe J dans un délai maximum de dix (10) jours ouvrés (pour les négociations individuelles) ou de quinze (15) jours ouvrés (pour les négociations avec un Organisme de gestion collective ou une association) suivant l’envoi de leur Demande Complète d’entrée en négociations.

(17) Dans un second temps, le Mandataire, les Parties Négociantes et Google pourront s’adresser des demandes d’informations complémentaires, sur le fondement de l’article L. 218-4 du CPI. Google s’engage à communiquer les informations complémentaires sollicitées dans un délai de quinze (15) jours ouvrés à compter de la demande de la Partie Négociante ou de l’avis du Mandataire en cas de désaccord. En cas dc désaccord entre Google et une Partie Négociante au sujet de la faisabilité technique ou de la pertinence de ces demandes d’informations complémentaires au regard de l’article L. 2 18-4 du CPI, chaque partie pourra soumettre le désaccord au Mandataire, qui pourra s’adjoindre les services d’un ou de plusieurs expert(s) et émettra un avis. Google s’engage à se conformer à l’avis du Mandataire en cas de désaccord.

(18) Sans préjudice des données de l’Annexe 1 qui seront communiquées aux Parties Négociantes, Google pourra demander que le Mandataire tienne compte de la confidentialité des informations complémentaires demandées. Dans une telle hypothèse, le Mandataire pourra proposer, le cas échéant:

(i) qu’elles soient communiquées selon les modalités prévues au paragraphe 17, si les informations complémentaires demandées n’appellent pas de mesure particulière de protection;

(ii) de mettre en place des procédures de confidentialité appropriées (telles qu’un accès restreint aux seuls conseils de la Partie Négociante, ou le partage d’une version expurgée des informations confidentielles), ou

(iii) lorsque ces données comportent des informations commerciales particulièrement sensibles ou confidentielles et sont de nature à lui permettre d’apprécier les offres de rémunération de Google dans un contexte plus global ou en lien avec les demandes d’informations complémentaires d’une Partie négociante, que celles-ci ne soient partagées qu’avec le Mandataire et les Experts. Les revenus publicitaires Search ads et Display ads de Google en France relèvent de cette catégorie.

Google s’engage à se conformer aux modalités proposées par le Mandataire.

(19) Le Mandataire pourra proroger les délais prévus aux paragraphes 16 et 17 ci-dessus sur demande motivée.

Troisième Engagement:

(20) Google s’engage à maintenir, durant la période définie au paragraphe 22 ci-après, les modalités d’affichage mises en place à la date de la demande d’entrée en négociations, selon les paramètres retenus par les Editeurs de presse concernés. S’agissant des Editeurs de presse et Agences de presse n’ayant pas accordé à Google d’autorisation de reprise de leur Contenu protégé au 24 octobre 2019 ou à une date ultérieure, mais souhaitant entrer en négociation dans le cadre des Premier et Deuxième Engagements, Google s’engage à ne pas s’opposer à l’affichage de leurs Contenus protégés au sein de ses services selon les modalités choisies par ces Editeurs de presse et Agences de presse durant la Période de négociations.

(21) Google se conformera aux paramètres et modalités d’affichage maximum retenus par les Éditeurs de presse pour l’affichage de leur Contenu protégé, par le biais des outils et des autres méthodes que Google met à leur disposition (par exemple, le Centre pour les éditeurs (Pubiisher Center), les données structurées).

(22) Le présent Engagement s’applique pour la durée de la Période de négociations définie au paragraphe 23 ci-après et, le cas échéant, pour la durée de la procédure de Détermination par un Tribunal Arbitral de la Rémunération, telles que définies par le Quatrième Engagement.

Quatrième Engagement:

Offre de rémunération

(23) Google s’engage à conduire les négociations visées par les Premier et Deuxième Engagements dans un délai de trois (3) mois à partir dc la date de réception de la Demande Complète d’entrée en négociations de la Partie Négociante (la «Période de négociations »).

(24) Ces négociations impliquent que Google fasse, dans tin délai de trois (3) mois à partir de la réception de la Demande Complète d’entrée en négociations, une proposition de rémunération dans les conditions visées au Premier Engagement. Cette période de négociations de trois (3) mois peut être prolongée d’un commun accord.

Détermination par un Tribunal Arbitral de la Rémunération

(25) Dans l’hypothèse où, à l’expiration de la Période de négociations, Google et une Partie Négociante ne parviendraient pas à un accord (le «Différend »), chacune des parties pourra (sans que Google puisse l’imposer à la Partie Négociante), dans un délai d’un mois à compter de l’expiration de la Période de négociations (ou toute autre période plus longue convenue entre Google et la Partie Négociante), demander à un tribunal arbitral de déterminer la rémunération (la «Détermination par un Tribunal Arbitral de la Rémunération »), sur la base des critères visés à l’article L. 218-4 dii CPI, en ce compris l’importance de l’utilisation du Contenu protégé de la Partie Négociante sur les produits et services de Google, exprimée en prix par impression, sans préjudice de la méthodologie retenue par le tribunal arbitral pour déterminer une telle rémunération (la «Rémunération »).

(26) La procédure arbitrale se limitera à la détermination de la Rémunéral.ion du Contenu protégé mis à disposition du public en France par Google.

(27) L’offre de rémunération de Google pour l’utilisation de Contenus protégés de la Partie Négociante devra être au moins égale à la Rémunération fixée par le Tribunal Arbitral.

Procédure d’arbitrage

(28) La procédure d’arbitrage sera conduite comme suit (sauf commun accord des parties de suivre une procédure d’arbitrage différente):

a. A la demande de la Partie Négociante, Google prendra à sa charge les honoraires des arbitres et les coûts de la procédure d’arbitrage visée aux points b à k ci-après, à l’exclusion des frais d’avocat de la Partie Négociante (sans préjudice, s’agissant des frais d’avocat, de l’article 38 du Règlement d’arbitrage de la Chambre de commerce internationale (la « CCI»)).

b. L’arbitrage sera soumis au Règlement d’arbitrage de la CCI.

c, Le premier tribunal arbitral sera constitué de trois arbitres, chacun d’eux ayant de l’expérience en matière de négociation de licences de propriété intellectuelle et de droit d’auteur. Chacune des parties désignera un arbitre, et le président sera choisi par les deux arbitres désignés par les parties sur une liste de noms proposés par les parties. A défaut d’accord dans les trente (30) jours calendaires, le président sera désigné par la Cour Internationale d’Arbitrage conformément au Règlement d’arbitrage de la CCL

d. La langue de l’arbitrage sera le français.

e. Le tribunal arbitral appliquera le droit français au Différend.

f. Le siège de l’arbitrage sera à Paris.

g. Les informations et documents échangés entre Google et la Partie Négociante et avec le Mandataire et les Experts dans le cadre des négociations seront transmis au tribunal arbitral au début de la procédure d’arbitrage, sans préjudice de la possibilité pour le tribunal arbitral de demander la communication de documents complémentaires, et notamment des informations relatives aux offres faites par Google à d’autres Parties Négociantes, en application des dispositions des articles 1467 et 1506 du Code de procédure civile.

h. La procédure sera une procédure accélérée de six (6) mois, sauf commun accord des parties pour proroger ce délai. Le tribunal arbitral fixera un calendrier avec les parties pour lui permettre de parvenir à une décision dans ce délai de six (6) mois (ou tout autre délai plus long fixé d’un commun accord entre les parties). Les parties à l’arbitrage consentent à l’utilisation d ‘emails pour l’échange des documents.

i. L’arbitrage sera conduit en toute confidentialité, et tant la procédure que la décision arbitrale seront confidentielles. Chacune des parties doit préserver la confidentialité de la décision arbitrale et des documents confidentiels soumis par l’autre partie au cours de la procédure d’arbitrage, à moins que ces documents ne soient utilisés dans le cadre de la procédure de réexamen de la décision du premier tribunal arbitral, ou que la divulgation soit requise par la loi ou conformément à une ordonnance d’un tribunal, d’une cour ou d’une autorité administrative.

j. La décision du premier tribunal arbitral pourra être réexaminée de novo, de manière non suspensive, sur le droit et sur les faits, conformément à la procédure décrite ci-après:

i. Chacune des parties pourra solliciter le réexamen de la décision du premier tribunal arbitral auprès d’un second tribunal arbitral dans un délai de trente (30) jours calendaires à compter de la notification du projet de décision aux parties, et la décision du premier tribunal arbitral ne sera signée et, ne deviendra une sentence finale, que si aucune demande de réexamen n’est soumise dans le délai précité.

ii. Google s’engage à se conformer au projet de décision du premier tribunal arbitral jusqu’à ce que le second tribunal arbitral rende sa sentence.

iii. Sauf commun accord contraire des parties, le deuxième tribunal arbitral sera désigné et fonctionnera selon les mêmes règles et procédures que le premier tribunal arbitral, décrites aux points (b) à (j) ci-dessus. Aucun membre du premier tribunal arbitral ne pourra être désigné comme membre du second tribunal arbitral ni être impliqué, de quelque manière, dans la procédure de réexamen.

iv. Les parties conviennent que le deuxième tribunal arbitral aura toute autorité pour réexaminer les questions tranchées par le premier tribunal arbitral. Cependant, les parties peuvent convenir de limiter les questions susceptibles d’être soumises au réexamen.

v. Le réexamen sera considéré comme une procédure d’arbitrage distincte. Le siège de l’arbitrage se situera dans la même juridiction que celui du premier arbitrage.

vi. La sentence arbitrale du second tribunal arbitral sera finale, s’imposera aux parties et prévaudra sur la décision du premier tribunal arbitral.

k. Toute règle procédurale gouvernant la procédure arbitrale et non détaillée ci-dessus sera, dans chaque cas, décidée par le tribunal arbitral, conformément aux règles procédurales applicables du tribunal arbitral concerné.

Cinquième Engagement:

(29) Google s’engage à ce que l’existence et l’issue des négociations prévues par les Premier et Deuxième Engagements n’affectent ni l’indexation, ni le classement, ni la présentation des Contenus protégés repris par Google sur ses produits et services.

(30) Cet Engagement ne fait pas obstacle aux améliorations et innovations des produits et services de Google, sous réserve qu’elles n’entraînent, directement ou indirectement, aucune conséquence préjudiciable aux intérêts des titulaires de droits voisins concernés par les négociations en cours avec la Partie Négociante prévues par les Premier et Deuxième Engagements, du fait ou en liaison avec ces négociations. Cet Engagement n’empêchera pas Google, sous la supervision du Mandataire, de prendre des mesures pour cesser d’indexer, de référencer ou d’afficher le Contenu protégé des Editeurs de presse ou des Agences de presse qui ne respectent pas les conditions ou les règles qui s’appliquent à leur participation aux produits et services de Google (par exemple, les règles relatives aux contenus pour Google Actualités, les Consignes aux webmasters de Google Search (Google Search Webmaster Guidelines) ou les conditions d’utilisation de Google), ou qui enfreignent un accord nécessaire à la participation au produit ou service concerné.

(31) Le présent Engagement s’applique pour la durée de la Période de négociations et, le cas échéant, de la procédure de Détermination par un Tribunal Arbitral de la Rémunération avec la Partie Négociante concernée.

Sixième Engagement:

(32) Google s’engage à prendre les mesures nécessaires pour que les négociations prévues par les Premier et Deuxième Engagements n’affectent pas les autres relations économiques qui existeraient entre Google et les Editeurs de presse ou Agences de presse.

(33) Sans préjudice de la possibilité pour Google de créer, modifier ou cesser d’offrir des produits ou services en général, cet Engagement signifie que tout montant de rémunération versé aux Parties Négociantes pour leurs droits voisins au titre des Utilisations Existantes de leurs Contenus Protégés doit être négocié par Google indépendamment de tout autre accord commercial (en ce compris Google News Showcase) entre Google et les Editeurs de presse ou Agences de presse, que ces derniers soient ou non parties aux négociations.

(34) Le présent Engagement s’applique pour la durée de la Période de négociations et, le cas échéant, de la procédure de Détermination par un Tribunal Arbitral de la Rémunération avec la Partie Négociante concernée.

Septième Engagement:

(35) Les Éditeurs de presse et Agences de presse qui ont, avant la Décision d’Engagements de l’Autorité (telle que définie au paragraphe 38 ci-après), (a) déjà conclu un accord avec Google pour la rémunération des Utilisations Existantes de leurs Contenus protégés sur les produits et services de Google, ou (b) déjà reçu une telle offre, ou (e) le droit de recevoir une telle offre en vertu d’un accordcadre conclu entre Google et une association mandatée pour négocier pour leur compte, pourront présenter une nouvelle Demande Complète d’entrée en négociations, et bénéficier des dispositions visées aux présents Engagements. La mise en oeuvre du présent Engagement se fera sans frais liés à la résiliation ou à l’amendement de leur accord, le cas échéant et la rémunération convenue en vertu de leurs accords préexistants continuera de s’appliquer jusqu’à la date de cet amendement ou de cette résiliation, sans préjudice d’une réévaluation éventuelle au titre de la nouvelle offre.

2. Désignation d’un Mandataire chargé de surveiller la bonne exécution des Engagements

(36) L’Autorité désignera un Mandataire indépendant qui sera chargé de surveiller le respect par Google des Engagements.

(37) La procédure de désignation de ce Mandataire, les règles de Conflits d’intérêts, ses Missions, sa Rémunération, l’Engagement de coopération de Google et les règles relatives à la Durée, au remplacement, au congé et au renouvellement du mandat du Mandataire sont détaillées en Annexe 3.

3. Mise en oeuvre et durée des Engagements

(38) Les Engagements seront mis en oeuvre par Google à compter de la date de notification de la décision de l’Autorité rendant obligatoires les Engagements de Google (la « Décision d’Engagements ») et resteront en vigueur pour une durée de cinq ans, renouvelable une fois par l’Autorité aux termes d’une décision motivée par une nouvelle analyse concurrentielle.

(39) En application du paragraphe 46(a) du Communiqué de procédure de l’Autorité du 2 mars 2009 relatif aux engagements en matière de concurrence, Google scia en droit de soumettre à l’Autorité une demande de révision ou de résiliation des Engagements avant leur terme si l’un des faits sur lesquels la Décision d’Engagements repose subit un changement important.

Fait à Paris, le 9 mai 2022

Annexe 1 Liste des informations devant être communiquées par Google aux Parties Négociantes en vertu dii paragraphe 16 des Engagements

Google s’engage à revoir avec le Mandataire, une fois par an, et le cas échéant amender, la liste des informations visées dans la présente Annexe 1.

L’emploi des termes «en France » ci-après s’apprécie sur la base de la localisation de l’utilisateur (GPS, adresse IP ou autre) s’agissant des recherches, impressions et eues, et sur la base des données comptables s’agissant des revenus.

Données relatives à l’utilisation en France des Contenus protégés1

Google Search

1. Nombre d’impressions et taux de clics des impressions en France sur Google Search (onglets «Tous », «Actualités », «Images » et « Vidéos ») du Contenu protégé de l’Editeur de presse ou de l’Agence de presse concerné(e) (pour toutes les requêtes) par mois pour les douze derniers mois précédant la date de la demande d’entrée en négociations

a. en nombres absolus;

b. en pourcentage du nombre total d’impressions en France d’Editeurs de presse certifiés par la CPPAP (la « Liste >) une fois par an, le 1er février, Google mettra à jour la Liste pour y inclure les impressions d’Editeurs de presse considérés comme éligibles par le Mandataire conformément à la procédure prévue au paragraphe 7 des Engagements ; et

c. en pourcentage du nombre total d’impressions sur Google Search, en France.

2. Part estimée des requêtes en lien avec l’actualité sur le nombre total de requêtes sur Google Search en France.

Google Actualités

3. Nombre d’impressions et taux de clics des impressions en France sur Google Actualités du Contenu protégé de l’Editeur de presse ou de l’Agence de presse concerné(e) par mois pour les douze derniers mois précédant la demande d’entrée en négociations:

a. en nombres absolus;

b. en pourcentage du nombre total d’impressions en France d’Editeurs de presse certifiés par la CPPAP (la « Liste ») — une fois par an, le 1er février, Google mettra à jour la Liste pour y inclure les impressions d’Editeurs de presse considérés comme éligibles pal’ le Mandataire confoi’mément à la procédure prévue au paragraphe 7 des Engagements ; et

c. en pourcentage du nombre total d’impressions sur Google Actualités, en France.

Google Discover

4. Nombre d’impressions et taux de clics des impressions en France sur Google Discover du Contenu protégé de l’Editeur de presse ou de l’Agence de presse concerné(e) par mois pour les douze derniers mois précédant la demande d’entrée en négociations:

a. en nombres absolus;

b. en pourcentage du nombre total d’impressions d’Editeurs de presse certifiés pal’ la CPPAP (la « Liste >) — une fois par an, le lei’ février, Google mettra à joui’ la Liste pout’ y inclure les impressions d’Éditeurs de presse considérés comme éligibles pal’ le Mandataire conformément à la procédui’e prévue au paragraphe 7 des Engagements ; et

c. en pourcentage du nombi’e total d’impressions sur Google Discover, en France.

Données relatives aux revenus de Google2 en France

« Revenus directs sur Google Search »

5. Revenus publicitaires générés en France sur Google Search associés aux impressions en France de tout Contenu protégé de l’ensemble des Editeurs de presse (pour toutes les requêtes) au cours des douze derniers mois précédant la demande d’entrée en négociations.

6. Revenus publicitaires générés en France sur Google Search associés aux impressions en France de tout Contenu protégé de la Partie Négociante concernée (pour toutes les requêtes) au cours des douze derniers mois précédant la demande d’entrée en négociations.

« Revenus publicitaires Google Search additionnels et indirects »

7. Revenus publicitaires sur Google Search générés en France par des recherches qui suivent celle ayant conduit à l’affichage de Contenu(s) protégé(s) dans le cadre d’une même visite d’utilisateur (de manière récursive pour six recherches ultérieures, sous réserve qu’il y ait un tel nombre de recherches ultérieures).

8. Estimation de la valeur des Contenus protégés sur Discover en France, par exemple par référence à des marchés européens comparables sur lesquels Discover génère des revenus publicitaires3.

9. Estimation de la valeur des Contenus protégés sur Google News en France, par exemple à partir de la valeur estimée des Contenus Protégés pour Discover.

10. Informations concernant le type de données collectées en France par Google, les hypothèses dans lesquelles ces données sont collectées et l’utilisation de ces données par Google lorsque des Contenus protégés sont affichés sur les produits et services de Google.

11. Informations concernant la façon dont les algorithmes de Google Search fonctionnent et conduisent à afficher en France des Contenus protégés en réponse à une requête sur Google Search.

« Revenus de Google en tant qu’intermédiaire de publicité en ligne »

12. Revenus bruts mensuels des publicités programmatiques (dites «Display Ads ») servies par Google en France sur le site web de l’Editeur de presse ou l’Agence de presse concerné(e) au cours des douze derniers mois précédant la demande d’entrée en négociations.

13. Revenus nets perçus par Google à partir des revenus bruts mentionnés au point 12 (c’est-à-dire, les revenus nets de Google après déduction des paiements contractuellement dus à l’Editeur de presse ou Agence de presse concerné(e)).

14. La part des revenus nets mentionnés au point 13 générée suite à une redirection de l’utilisateur du moteur de recherche de Google vers le site web de l’Editeur de presse ou de l’Agence de presse concerné(e).

Annexe 2 Liste des informations devant être communiquées par les Parties Négociantes à Google en vertu du paragraphe 13 des Engagements

Google s’engage à revoir avec le Mandataire, une fois par an, et le cas échéant amender, la liste des informations visées dans la présente Annexe 2.

• Type de Partie Négociante (agence de presse / éditeur de presse / organisme de gestion collective)

• Nom et coordonnées de la Partie Négociante

• Site(s) web (URL) de la ou des publication(s) de presse pour laquelle/lesquelles la Partie Négociante souhaite entrer en négociations

• Pour les associations ou les Organismes de gestion collective, une liste de leurs membres leur ayant donné un mandat de négociation pour négocier pour leur compte avec Google

• Une copie signée de l’accord de confidentialité mis à disposition par Google, conformément au modèle figurant en Annexe 4

• Balises Méta (IPTC) régulièrement utilisées pal’ la Partie Négociante (ou ses membres), si applicable

Annexe 3 Désignation et missions du Mandataire

I. Procédure de désignation du Mandataire

(1) Dans les trente jours ouvrés suivant la notification formelle de la Décision d’Engagements, Google proposera à l’Autorité, pour approbation, le nom de trois personnes physiques ou morales parmi lesquelles elle propose de désigner un Mandataire. La proposition comprendra un projet de mandat habilitant le Mandataire à accomplir ses missions décrites au paragraphe 3 ci-après, ainsi que le plan de travail du Mandataire pour accomplir ces missions.

(2) La proposition comprendra également les modalités de rémunération du Mandataire.

Approbation ou rejet par l’Autorité

(3) L’Autorité aura toute discrétion pour approuver ou rejeter le Mandataire proposé, et pour approuver le mandat proposé. Si l’Autorité n’approuve qu’un seul nom, Google désignera la personne physique ou morale concernée comme Mandataire, conformément aux termes du mandat approuvé par l’Autorité. Si plusieurs noms sont approuvés, Google sera libre de choisir le Mandataire à désigner parmi les noms approuvés.

(4) Le Mandataire commencera à travailler dans les cinq jours ouvrés suivant l’approbation par l’Autorité du projet de mandat.

Nouvelle proposition de Google

(5) Si tous les Mandataires proposés sont rejetés pal’ l’Autorité, Google soumettra à l’Autorité les noms d’au moins deux autres personnes physiques ou morales dans tin délai de vingt-et-un jours ouvrés à compter de la date à laquelle elle est informée du rejet de l’Autorité.

Mandataire désigné par l’Autorité

(6) Dans l’éventualité où tous les Mandataires proposés dans cette nouvelle proposition seraient rejetés par l’Autorité, l’Autorité désignera elle-même, après consultation de Google, un ou plusieurs Mandataire(s) que Google nommera selon les termes du mandat approuvé par l’Autorité.

2. Conflits d’intérêts

(7) Toute relation existant actuellement entre le Mandataire et Google sera décrite dans le projet de mandat qui sera soumis à l’Autorité. Sur cette base, le Mandataire confirmera qu’à compter de la date de la signature du mandat, il n’est sujet à aucun conflit d’intérêts affectant son impartialité et sa capacité à remplir de manière indépendante ses missions conformément au mandat (ci-après le « Conflit d’intérêts »).

(8) Si le Mandataire est infommné d’un Conflit d’intérêts dans lequel il est impliqué, il s’engage à résoudre ce Conflit d’intérêts immédiatement. Si le Conflit d’intérêts ne peut être résolu dans un délai raisonnable, le Mandataire en informera immédiatement l’Autorité. De la même manière, si Google est informée de l’existence d’un Conflit d’intérêts du Mandataire, elle en informera l’Autorité sans délai.

(9) Par ailleurs, le Mandataire s’engage à mettre en place les mesures nécessaires pour garantir son indépendance et celle de ses employés.

(10) Pour la durée du mandat et pour une période d’un an à compter de la fin du mandat, le Mandataire s’engage à ne pas fournir à Google de prestation de services de toute nature, et notamment de conseil, et plus généralement s’engage à n’accepter aucun emploi, fonction ou mandat social au sein de Google.

3. Missions du Mandataire

(11) Le Mandataire aura les missions suivantes:

(i) vérifier la mise en oeuvre complète des Engagements par Google;

(ii) organiser une réunion mensuelle (ou dans un délai plus court si et lorsque cela est jugé nécessaire par le Mandataire ou Google) avec Google (virtuellement ou en présentiel) pour discuter de l’état des négociations et de toute difficulté rencontrée;

(iii) échanger (virtuellement ou en présentiel), à leur demande, avec les Parties Négociantes qui sont désireuses de ou ont déjà formellement demandé à entrer en négociations avec Google, de l’état des négociations et de toute difficulté rencontrée;

(iv) échanger (virtuellement ou en présentiel) avec Google, sans délai, chaque fois que le Mandataire a des doutes sur le respect par Google des Engagements;

(v) informer l’Autorité sans délai si Google ne respecte pas les Engagements;

(vi) communiquer à l’Autorité un rapport trimestriel sur le respect par Google des Engagements;

(vii) fournir, à la demande de l’Autorité, toute explication concernant le respect par Google des Engagements ; et

(viii) envoyer à Google une version non confidentielle de ses rapports à l’Autorité mentionnés aux points (y), (vi) et (vii).

(12) Le Mandataire soumettra à l’Autorité toutes difficultés rencontrées dans l’exécution de ses missions, notamment en cas de difficultés ou divergences d’opinion sur l’interprétation à donner aux Engagements.

(13) Les rapports préparés par le Mandataire dans le cadre de l’exécution de ses missions seront confidentiels et ne devront pas être partagés avec des tiers. Le Mandataire produira des versions nonconfidentielles de ces rapports, qui seront communiquées à Google et aux Parties Négociantes.

(14) Dans l’accomplissement de ses missions, le Mandataire pourra s’adjoindre les services d’un ou de plusieurs expert(s) techniques, financiers ou spécialisés en propriété intellectuelle (le(s) «Expert(s) »), après en avoir informé Google et les Parties Négociantes. Les Experts seront indépendants et libres de tout conflit d’intérêt à l’égard de Google et des Parties Négociantes. Google et les Parties Négociantes auront la possibilité d’être entendues par tout Expert nommé par le Mandataire.

(15) Le Mandataire préparera des versions non-confidentielles des conclusions et constatations de ces Experts, qui seront partagées avec Google et les Parties Négociantes, qui auront chacune la possibilité de discuter de ces conclusions et constatations avec le Mandataire. En cas de nomination de tels Experts, le Mandataire et les Experts seront tenus à une stricte obligation de confidentialité concernant l’accomplissement de leurs missions vis-à-vis des tiers.

(16) Dans l’hypothèse où une procédure de Détermination par un Tribunal Arbitral de la Rémunération aurait été engagée par Google ou une Partie Négociante, les conclusions du tribunal arbitral s’imposeront au Mandataire comme aux Experts.

(17) Google communiquera au Mandataire, et à l’Expert le cas échéant, tout document raisonnablement nécessaire à l’accomplissement de ses missions, en ce compris:

• toutes les données partagées par Google avec les Parties Négociantes;

• toutes les offi’es de rémunération faites par Google aux Parties Négociantes;

• toutes les contre-propositions faites à Google par les Parties Négociantes;

• tous les contrats conclus entre Google et les Parties Négociantes.

(18) Le Mandataire et le(s) Expert(s) peuvent également demander à Google de leur fournir tous documents, informations et explications nécessaires à l’accomplissement de leurs missions, et lorsque cela est nécessaire, mandater tin auditeur indépendant en vue de la certification des données financières communiquées par Google.

4. Rémunération du Mandataire

(19) Le Mandataire (ainsi que tout Expert désigné par le Mandataire) percevra une rémunération, qui sera convenue avec Google, pour l’accomplissement de ses missions. La rémunération du Mandataire ne doit entraver ni la bonne exécution de son mandat ni son indépendance.

(20) Le Mandataire (ainsi que tout Expert désigné par le Mandataire) aura également droit, sur présentation de justificatifs, au remboursement de tous frais raisonnablement encourus dans l’accomplissement de ses missions.

5. Engagement de coopération de Google

(21) Google s’engage à coopérer pleinement avec le Mandataire (ainsi que tout Expert désigné par le Mandataire), afin de permettre à ce dernier d’accomplir ses missions. 6. Durée, remplacement, congé et renouvellement du mandat du Mandataire

(22) Le Mandataire exercera ses missions jusqu’à l’expiration de la durée des Engagements.

(23) En cas d’empêchement permanent du Mandataire dans l’accomplissement de ses missions pour quelque raison que ce soit, y compris en cas de Conflit d’intérêts ou en cas de faute dans l’accomplissement de ses missions

(a) l’Autorité peut, après avoir entendu le Mandataire, exiger que Google remplace le Mandataire; ou

(b) Google peut, avec l’approbation préalable de l’Autorité, remplacer le Mandataire concerné.

(24) Google peut révoquer le Mandataire avec l’approbation préalable de l’Autorité. Google s’engage dans tin tel cas à proposer un nouveau Mandataire à l’Autorité selon la procédure décrite au point 1 cidessus, dans un délai de quinze jours ouvrés. Le Mandataire petit être tenu de poursuivre ses missions jusqu’à ce qu’un nouveau Mandataire, à qui le Mandataire révoqué aura transféré toutes les informations et tous les documents pertinents, entre en fonction.

(25) Hormis les cas de révocation décrits ci-dessus, le Mandataire ne pourra cesser d’agir en tant que mandataire qu’après que l’Autorité l’aura déchargé de ses fonctions (j) l’expiration de la durée des Engagements ou (ii) pour tout autre motif valable, y compris en cas de Conflit d’intérêts.

Annexe 4 Accord de confidentialité

ACCORD DE CONFiDENTIALITÉ

Cet accord de confidentialité (1’ «Accord de confidentialité ») est conclu entre Google LLC, en son nom et pour son compte et au nom et pour le compte des sociétés Google Ireland Limited et Google France (ci-après ensemble « Google ») et [EDITEURJAGENCE DE PRESSE/ORGANISME DE GESTION COLLECTIVE] (I’ <Editeur »). Cet Accord de confidentialité entre en vigueur à la date de la première des deux signatures ciaprès (la « Date d’entrée en vigueur »).

ATTENDU QUE la France a transposé, dans le Code de la propriété intellectuelle (CPI), l’article 15 dc la Directive 20 19/790 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique, par la Loi n°2019- 775 du 24juillet 2019 (ci-après, la «Loi»), qui est entrée en vigueur le 24 octobre 2019,

ATTENDU QUE le nouvel article L. 218-2 du CPI accorde aux éditeurs et agences de presse, tels que définis à l’article L. 218-1 du CPI (collectivement, les «Editeurs de presse »), un droit exclusif d’autoriser ou d’interdire la reproduction et la communication au public totale ou partielle des publications de presse sous une forme numérique (ci-après, le « Contenu protégé »), par un service de communication au public en ligne. Ce faisant, la Loi a expressément exclu de ce nouveau droit l’utilisation d’hyperliens et « de mots isolés ou de très courts extraits d’une publication de presse » (article L. 211-3-1 du CPi),

ATTENDU QUE Google a reçu une demande formelle de la part de l’Éditeur afin d’entrer en négociations concernant les conditions d’utilisation et d’affichage de ses contenus protégés (les «Négociations »),

ATTENDU QUE, dans ce contexte, les parties mettront certaines informations à disposition pour être discutées et revues, et mèneront les Négociations avec pour intention que j) les informations partagées durant, et ii) l’ensemble des éléments de, ces Négociations, resteront confidentielles, ne seront utilisées que pour les Négociations et pour évaluer et, potentiellement, conclure un accord commercial (collectivement, 1’ «Objectif»), et ne doivent être divulguées à aucune autre partie, sauf pour permettre à Google de se conformer à son obligation de faire des rapports à l’Autorité de la concurrence ou dans la mesure autorisée en vertu du présent Accord de confidentialité.

AINSI, les parties ont convenu ce qui suit:

1. Définitions.

a. « Affiliée» désigne une entité qui, directement ou indirectement, contrôle, est contrôlée par ou est sous contrôle commun avec, une partie.

b. « Information Confidentielle » désigne une information qu’une partie (ou une société Affiliée) divulgue à l’autre partie dans le cadre du présent Accord de confidentialité, quelle que soit la manière dont cette information est divulguée (à savoir, de manière écrite, numérique, électronique ou orale) et qui est revêtue de la mention ou indiquée comme « confidentiel(le) » ou serait normalement considérée comme une information confidentielle eu égard aux circonstances. Cette définition n’inclut pas les informations élaborées de manière indépendante par le destinataire, qui lui sont remises légitimement par un tiers sans obligation de confidentialité ou qui deviennent publiques sans faute de la part du destinataire.

2. Confidentialité.

a. Une partie (la «Partie (ilvulgatrice ») peut, au cours des Négociations, divulguer des Informations Confidentielles à l’autre partie (la «Partie destinataire >).

b. La Partie destinataire ne peut utiliser les Informations Confidentielles qu’afin d’atteindre l’Objectif. La Partie destinataire doit faire preuve d’un degré de diligence raisonnable pour protéger les Informations Confidentielles et empêcher toute utilisation ou divulgation non autorisée de celles-ci. La Partie destinataire peut partager les Informations confidentielles avec ses employés, dirigeants, agents ou prestataires (les « Délégués ») qui ont besoin d’en avoir connaissance pour atteindre l’Objectif. Chaque partie veillera à ce que chacun de ses Délégués soit informé de la nature confidentielle des Informations Confidentielles, respecte l’obligation de les garder confidentielles et se conforme aux termes du présent Accord de confidentialité comme s’il y était partie. Chaque partie reconnaît qu’elle sera responsable de toute violation du présent Accord de confidentialité par l’un de ses Délégués. En outre, Google pourra divulguer les Informations Confidentielles de l’Editeur à l’Autorité de la concurrence dans le cadre de l’exécution de ses obligations de lui faire des rapports. Chaque partie pourra divulguer les Informations Confidentielles de l’autre partie à l’Autorité de la concurrence, à tout mandataire nommé par celle-ci, ou à tout tribunal arbitral dans la mesure nécessaire au regard de l’Objectif et sous réserve de donner un préavis raisonnable à l’autre partie.

c. Une partie peut divulguer des Informations Confidentielles lorsqu’elle y est contrainte par la loi et sous réserve de donner un préavis raisonnable à l’autre partie, sauf si un tribunal ordonne que l’autre partie ne soit pas informée.

3. Durée et Expiration.

a. Cet Accord de confidentialité entre en vigueur à la Date d’entrée en vigueur et restera en vigueur jusqu’à l’issue des Négociations. Les stipulations de cet Accord de confidentialité resterànt en vigueur après son tei-rne en ce qui concerne les Informations Confidentielles qui seraient divulguées avant son terme.

b. Sauf accord écrit contraire des parties, l’obligation de la Partie bénéficiaire de protéger les Informations Confidentielles expire cinq ans après leur divulgation.

4. Recours. Les pal-tics conviennent que la violation du présent Accord de confidentialité par la Partie bénéficiaire peut causei- à la Partie divulgatrice un préjudice substantiel et irréparable, et reconnaissent qu’une réparation pécuniaire peut être insuffisante en cas de divulgation ou d’utilisation non autorisée d’informations Confidentielles. Sans renoncer à aucun droit ou recoums et outre tout autre recours dont une partie peut bénéficier en vertu du droit applicable, une partie peut demander une exécution forcée ou toute autre mesure d’injonction.

5. Défense et Indemnisation.

a. Obligations. Sous réserve de la Sous-section 5(c) (Conditions), chaque partie indemnisera l’autre partie et ses sociétés Affiliées contre (a) tout montant transactionnel à la charge de la partie indemnisée approuvé par la partie qui indemnise, et (b) tous dommages et intérêts accordés par un jugement définitif conti-e la partie indemnisée pal- un tribunal compétent, dans le cadi-e de toute procédure judiciaire initiée par un tiei-s du fait de la violation, par la partie qui indemnise, de cet Accord de confidentialité.

b. Exclusions. La présente Section 5 ne s’appliquera pas si l’allégation sous-jacente découle de la violation du présent Accord de confidentialité pai- la pal-tic indemnisée.

c. Conditions. La Section 5(a) (Obligations) s’applique sous réserve que la partie indemnisée (a) informe rapidement et pal- écrit la partie qui indemnise de toute allégation ayant précédé la procédure judiciaire, et (b) confère à la partie qui indemnise le contrôle exclusif de la portion indemnisée de la procédure judiciaire, sous réserve du droit, pour la partie indemnisée, d’approuver l’avocat de la défense, cette approbation ne pouvant pas être refusée sans l-aison (mais pouvant être refusée ou retirée en cas de conflit d’intérêts).

6. Général.

a. Le présent Accord de confidentialité n’impose aucune obligation de conclure un accord commercial.

b. Aucune des parties n’acquière de droit de propriété intellectuelle en vertu du présent Accord de confidentialité, à l’exception des droits limités nécessaires à l’utilisation des Informations confidentielles afin d’atteindre l’Objectif.

c. Le présent Accord de confidentialité ne crée aucune relation de mandant à mandataire ni partenariat. Aucune partie ne peut céder ni transférer le présent Accord de confidentialité sans l’accord préalable écrit de l’autre partie.

d. Le présent Accord de confidentialité constitue l’intégralité de l’accord des parties sur ce sujet, et remplace tout autre accord antérieur ou contemporain. Toute modification doit être faite par écrit. Les parties peuvent signer cet Accord de confidentialité en plusieurs exemplaires qui, pris ensemble, constitueront un seul instrument. Le fait de ne pas appliquer l’une des stipulations du présent Accord de confidentialité ne constitue pas une renonciation.

e. Le présent Accord de confidentialité est régi par le droit fi’ançais, à l’exclusion des règles de conflit de loi. Les tribunaux de Paris, France, seront exclusivement compétents pour connaître de tout différend relatif à cet Accord de confidentialité.

NOTES DE BAS DE PAGE DES ANNEXES :

1 Google pourra être amenée àadapter le point de départ du délai de douze mois l)OU s’aligner sur scs communications financières trimestrielles.

 2 Google pourra être amenée adapter le point de départ du délai de douze mois pour s’aligner sur ses communications financières trimestrielles.

3 Google ne partagera qu’avec le Mandataire le calcul d’extrapolation détaillé, dans la mesure où celui-ci contient des informations confidentielles et commercialement sensibles concernant les revenus publicitaires que Google génère dans d’autres juridictions.