Cass. com., 25 octobre 2011, n° 10-25.607
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Avocats :
SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 26 août 2010), que le 20 février 2001, la société MB Finance (la société) a souscrit auprès de la Société générale (la banque) un prêt de 1 500 000 francs (228 673,52 euros) ; que M. et Mme X..., associés de la société, ont signé un "engagement des associés de combler les déficits de trésorerie"; qu'après avoir constaté l'exigibilité anticipée du prêt, la banque a assigné ces derniers en exécution de leur engagement ;
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de les avoir condamnés à payer à la banque la somme de 158 015,50 euros, augmentée des intérêts au taux de 10,60 % l'an à compter du 14 octobre 2003, date de l'arrêté de compte, jusqu'au prononcé du jugement, puis, à compter de ce prononcé, des intérêts au taux légal, alors, selon le moyen :
1°/ que l'acte juridique par lequel une seule partie s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent, fût-elle indéterminée, doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement, ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres ; qu'à défaut, cet acte ne peut établir à lui seul la preuve de l'engagement ; qu'en affirmant que l'engagement souscrit par M. et Mme X..., le 20 février 2001, ne portait pas sur une somme d'argent déterminée et ne s'exprimait pas par un prix, pour en déduire qu'il constituait une obligation de faire non soumise au formalisme du cautionnement, quand il ressortait de ses propres constatations que M. et Mme X... s'étaient engagés à fournir un apport en trésorerie spécifiquement dédié au remboursement du prêt contracté par la société auprès de la banque, ce dont il résultait que cet engagement portait sur une somme d'argent, la cour d'appel a violé l'article 1326 du code civil ;
2°/ que constitue un cautionnement le contrat par lequel une personne s'engage envers un créancier à payer la dette de son débiteur au cas de défaillance de celle-ci ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. et Mme X... s'étaient engagés à apporter "les sommes nécessaires au remboursement" du prêt litigieux afin de "garantir le remboursement du prêt en cas de défaillance du débiteur" ; qu'il en résultait que l'acte du 20 février 2001 devait s'analyser comme l'engagement de se substituer à la société en cas de défaillance dans le remboursement du prêt, c'est à dire comme un cautionnement ; qu'en affirmant que l'acte du 20 février 2001 constituait une simple lettre d'intention pour en déduire qu'il n'avait pas à obéir au formalisme du cautionnement, la cour d'appel a violé les articles 1326 et 2015 du code civil ;
3°/ qu'en toute hypothèse, lorsqu'un associé s'engage à apporter, en compte courant, les sommes nécessaires pour combler les déficits en trésorerie éventuels de la société de façon à ce que cette dernière puisse faire face aux échéances d'un prêt, le préjudice réparable consécutif à un éventuel manquement à cet engagement ne peut correspondre au solde restant dû qu'à la condition qu'il ait été relevé que, sans ce manquement, le prêt aurait été remboursé avec une totale certitude ; qu'en l'espèce, M. et Mme X... faisaient valoir dans leurs écritures qu'à supposer même qu'ils aient été tenus d'une obligation de faire, son éventuelle inexécution ne pouvait se résoudre qu'en dommages-intérêts, ce dont il résultait que l'indemnité due ne pouvait être équivalente au solde restant dû au titre du prêt ; qu'en condamnant M. et Mme X... à payer à la banque les sommes restant dues au titre du prêt, sans constater que le préjudice subi, qu'elle a fixé à l'entier montant du solde restant dû, n'avait été grevé d'aucun aléa, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1142 du code civil ;
4°/ que nul ne peut être obligé au-delà de son engagement ; que l'acte du 20 février 2001 prévoyait l'engagement de M. et Mme X... de réaliser des apports en compte courant d'associé à la société afin de lui permettre de faire face aux échéances d'un prêt de 1 500 000 francs (228 673,52 euros) en principal amortissable en 48 mensualités et au taux d'intérêt de 6,60 % l'an ; qu'en décidant néanmoins de condamner M. et Mme X... à payer à la banque la somme de 158 015,50 euros en principal, augmentée des intérêts au taux de 10,60 %, c'est à dire du taux conventionnel de 6,60% majoré de 4 points à titre de pénalité, quand l'engagement de M. et Mme X... ne s'étendait pas à la prise en charge d'éventuelles pénalités de retard, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir constaté que le document signé par M. et Mme X... précise qu'ils s'engageaient à apporter en compte courant d'associés les sommes nécessaires à l'effet de combler les déficits de trésorerie de la société de façon à ce que cette dernière puisse faire face aux échéances du prêt et relevé qu'ils se sont ainsi engagés à effectuer des apports de trésorerie à la société, la cour d'appel en a déduit à bon droit que cet acte contient un engagement contractuel de faire et non de payer, auquel ne sont pas applicables les dispositions de l'article 1326 du code civil ;
Attendu, en second lieu, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des productions que M. et Mme X... avaient soutenu que l'indemnité ne pouvait être équivalente au solde restant dû au titre du prêt en raison de l'existence d'un aléa et que leur engagement ne s'étendait pas à la prise en charge d'éventuelles pénalités de retard ; que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en ses troisième et quatrième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.