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Décisions

Cass. com., 3 mars 2021, n° 19-11.535

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Darbois

Rapporteur :

Mme Lefeuvre

Avocat général :

Mme Beaudonnet

Avocats :

SCP Boullez, SCP Waquet, Farge et Hazan

Douai, du 15 nov. 2018

15 novembre 2018

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 15 novembre 2018), M. et Mme E... ont, par un acte du 3 août 2011, cédé à M. U..., moyennant le prix d'un euro, l'intégralité des titres qu'ils détenaient dans le capital de la société par actions simplifiée CTC.

2. L'article 3 de l'acte de cession stipule que « Mme K... E... et son associé D... E... s'engagent à remettre en compte courant, la somme de 18 500 euros, à la signature de la cession, par la remise de 2 chèques de 9 250 euros. Ces chèques seront remis au cessionnaire qui les encaissera sur la banque de CTC soit HSBC Lille, ou sur toute autre banque nouvelle pour alimenter le compte CTC ».

3. Le 28 janvier 2015, M. et Mme E... ont sollicité le remboursement de leurs comptes courants auprès de la société CTC, devenue Amos Lille. Cette dernière leur ayant opposé un refus, au motif que la somme de 18 500 euros ne constituait pas un apport en compte courant d'associé remboursable à première demande, M. et Mme E... l'ont assignée en paiement.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. M. et Mme E... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande, alors :

« 1°/ que la caractéristique essentielle du compte courant d'associé, en l'absence de convention particulière ou statutaire le régissant, est d'être remboursable à tout moment ; qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que l'article 3 du protocole d'accord de cession de parts sociales signé le 3 août 2011 stipule que "Mme K... E... et son associé D... E... s'engagent à remettre en compte courant la somme de 18 500 euros à la signature de la cession par la remise de 2 chèques de 9 250 euros" ; qu'en rappelant que l'avance en compte courant d'associé est un prêt et que l'associé titulaire d'un tel compte est créancier de la société, après avoir constaté que l'article 3 précité ne mentionne pas explicitement d'avance en compte courant d'associé, quand il est précisé que la somme de 18 500 euros a été remise en compte courant, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil par refus d'application dans sa rédaction applicable en l'espèce ;

2°/ qu'il est interdit aux juges du fond de dénaturer les documents de la cause ; qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que l'article 3 du protocole d'accord de cession de parts sociales signé le 3 août 2011 stipule que "Mme K... E... et son associé D... E... s'engagent à remettre en compte courant la somme de 18 500 euros à la signature de la cession par la remise de 2 chèques de 9 250 euros" ; qu'en rappelant que l'avance en compte courant d'associé est un prêt et que l'associé titulaire d'un tel compte est créancier de la société, après avoir constaté que l'article 3 précité ne mentionnait pas explicitement d'avance en compte courant d'associé, la cour d'appel en a dénaturé les termes, en violation du principe précité et de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en l'espèce. »

Réponse de la Cour

5. Après avoir relevé que l'article 3 de l'acte de cession de parts dénommé « prix » ne mentionne pas explicitement d'avance en compte courant d'associé, l'arrêt retient que, s'il ne ressort pas des courriels échangés entre M. U... et M. E..., avant la signature du contrat de cession, l'existence d'un accord sur le versement d'une avance en compte courant d'associé, il en résulte, en revanche, que les parties ont engagé une négociation sur un apport de la part des cédants au compte courant de la société et que la somme finalement retenue correspond au montant médian entre la somme demandée par M. U..., en raison de l'invocation par celui-ci de l'aggravation d'un déficit qu'il attribuait à la prise en charge de salaires et frais de la gérante, et celle proposée par M. E.... L'arrêt relève ensuite que la déclaration d'impôt sur les sociétés souscrite pour l'exercice du 1er juillet 2013 au 30 juin 2014 et les comptes annuels au 30 juin 2014 déposés au greffe du tribunal de commerce font état d'emprunts et de dettes financières diverses, sans donner aucune précision quant à l'origine de ces éléments de passif ni faire mention d'un compte courant d'associé. Il ajoute qu'aucune partie de l'acte ne stipule que la somme de 18 500 euros constitue une avance en compte courant d'associé.

6. En cet état, c'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, de la commune intention des parties, que l'ambiguïté de leur convention rendait nécessaire, que la cour d'appel a retenu qu'il n'était pas établi que les versements effectués par M. et Mme E... au profit de la société Amos Lille avaient la nature d'avance en compte courant d'associé, ce dont elle a déduit que leur demande de remboursement devait être rejetée.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.