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Décisions

Cass. com., 9 juin 2022, n° 21-10.309

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rémery

Rapporteur :

Mme Vallansan

Avocat général :

Mme Henry

Avocats :

SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SAS Hannotin Avocats

Pau, du 5 nov. 2020

5 novembre 2020

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 5 novembre 2020), la société Les Pitchounes a conclu avec la société Jill un contrat d'affiliation pour la distribution de vêtements d'enfants, selon lequel elle avait le droit d'utiliser la marque, propriété de la société Jill (Marèse) à titre d'enseigne et de disposer d'un stock de marchandises laissées en dépôt jusqu'à ce qu'elles soient vendues et payées par les clients, la société Les Pitchounes devant alors en régler le prix à la société Jill sous déduction d'une commission. La société Jill avait également donné en dépôt du matériel et du mobilier. Constatant le non-paiement de factures, la société Jill a, le 17 novembre 2016, assigné la société Les Pitchounes en paiement et en restitution des marchandises, du matériel et du mobilier.

2. La société Les Pitchounes a été mise en liquidation judiciaire le 17 janvier 2017, la société François Legrand, devenue la société Ekip', étant désignée en qualité de liquidateur. Après la déclaration de sa créance par la société Jill, le liquidateur est intervenu à l'instance.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

3. La société Jill fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de restitution, alors « que la demande en restitution de biens meubles présentée avant la mise en liquidation judiciaire de leur détenteur par le propriétaire mobilier non titulaire d'un contrat publié n'est pas soumise aux dispositions des articles L. 624-9 et L. 624-10 du code de commerce et se poursuit selon les dispositions de l'article L. 622-23 du même code ; qu'en retenant que la société Jill ne pouvait "valablement soutenir qu'elle était dispensée de l'action en revendication en raison d'une instance en cours au moment du placement en liquidation judiciaire", aux motifs que "seul l'article L. 624-10 prévoit l'absence de nécessité d'une revendication lorsque le contrat porte sur un bien ayant fait l'objet d'une publicité avant le jugement d'ouverture" et qu'il était constant que le contrat d'affiliation n'avait "pas fait l'objet d'une publicité", quand l'action en restitution introduite par la société Jill l'avait été avant la mise en liquidation du dépositaire, et que les articles L. 624-9 et L. 624-10 du code de commerce ne lui étaient dès lors pas applicables, la cour d'appel les a violé par fausse application. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 624-9 et L. 622-23 du code de commerce :

4. Il résulte de la combinaison de ces textes que la demande de restitution de meubles présentée avant l'ouverture de la procédure collective de leur détenteur précaire n'est pas soumise aux dispositions du premier et se poursuit selon celles du second.

5. Pour rejeter la demande de restitution de la société Jill, l'arrêt retient qu'en l'absence de dispositions légales à cet égard, celle-ci ne peut valablement soutenir qu'elle est dispensée de l'action en revendication alors que seul l'article L. 624-10 du code de commerce prévoit l'absence de nécessité d'une revendication lorsque le contrat porte sur un bien ayant fait l'objet d'une publicité avant le jugement d'ouverture, ce qui n'est pas le cas du contrat d'affiliation.

6. En statuant ainsi, après avoir constaté que l'assignation en paiement des factures et restitution des biens mis en dépôt était antérieure à l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Les Pitchounes, la cour d'appel a violé les textes susvisés, le premier par fausse application, le second par refus d'application.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse.