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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-4, 9 juin 2022, n° 19/06814

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Madame [T] [X]

Défendeur :

Madame [J] [K] épouse [W], ROMACADI (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Laure BOURREL

Conseiller :

Françoise FILLIOUX

Avocats :

Me Jean-pierre RAYNE de l'ASSOCIATION RAYNE / SALOMEZ, Me Ollivier PARRACONE de la SELARL PARRACONE AVOCATS PROVENCE, Me Michel GOUGOT

Tribunal de Grande Instance d'Aix-en-Pro…

28 mars 2019

Par acte du 2 avril 2009, la SCI Romacadi a donné à bail commercial à la SARL en cours de constuon GIMI, un local situé [Adresse 4] consistant en le lot n°15 du centre commercial Champion Carrefour pour une durée de 9 ans à compter du 15 avril 2009 .

Le même jour, Mesdames [J] [K] épouse [W] et [T] [X], cogérantes de cee société, se sont portés cauon solidaire du paiement du loyer pendant toute la durée du bail.

Par jugement du 16 juin 2016, le tribunal de commerce d'Aix en Provence a prononcé la liquidaon judiciaire de la SARL GIMI, celle ci étant alors débitrice de la somme de 14 694,93euros au tre des loyers échus.

Le 20 juin 2016, la bailleresse a régulièrement déclaré sa créance entre les mains de Maître [H], liquidateur judiciaire nommé par la juridicon, pour une somme de 14 694,93euros au tre de l'arriéré locaf.

Après les avoir vainement mises en demeure d'exécuter leur engagement par courrier recommandé du 20 juin 2016, la bailleresse a assigné en paiement d'une somme de 11 351,40eurs après déducon du dépôt de garane et des provisions sur charges, Mesdames [J] [K] épouse [W] et [T] [X] en leur qualité de cauon devant le tribunal de grande instance d'Aix en Provence par acte du 7 décembre 2016.

Par jugement du 28 mars 2019, ce tribunal a condamné solidairement Mesdames [J] [K] épouse [W] et [T] [X] au paiement d'une somme de 11 351,40euros avec intérêts au taux légal à compter du 21 juin 2016, a condamné Madame [T] [X] à relever et garanr Madame [J] [W] et a condamné

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Madame [T] [X] à payer à la SCI Romacadi 1 000euros au tre de l'arcle 700 du code de procédure civile et aux eners dépens.

La juridicon a esmé que les disposions de l'arcle L341-2 à L314-14 du code de la consommaon n'étaient pas applicables à la SCI Romacadi qui n'est pas un créancier professionnel, que les cauons se sont engagées pour le paiement des loyers et charge et toutes dépenses d'entreen du centre commercial et que lors de la cession des parts de Madame [W] à la société GIMI, Madame [X] s'était engagée à lever l'acte de cauonnement ce qu'elle n'a pas fait.

Le 23 avril 2019, Madame [X] a interjeté appel de ce jugement en inmant la SCI Romacadi et a inmé le 4 juin 2019 Madame [W].

Une ordonnance de joncon a été rendue le 22avril 2021.

Par ordonnance du 6 décembre 2019,le conseiller chargé de la mise en état a prononcé l'irrecevabilité des conclusions déposées par la Selarl Parracone, conseil de madame [W].

Dans ses dernières conclusions déposées et nofiées le 25 juin 2019 et tenues pour intégralement reprises, madame [X] [T] demande à la Cour de :

Déclarer Madame [X] recevable et bien-fondée en son appel.

Réformer le jugement rendu le 28 mars 2019 par le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence et statuant à nouveau.

Dire et juger que l'acte de cauonnement argué est entaché de nullité rée du défaut de menon de l'étendue de l'engagement du montant et de sa durée et ce, au visa des arcles 1326 et 2015 du Code Civil.

Prononcer également la nullité en tant que de besoin de l'acte au visa de l'arcle L. 341-2 du Code de la Consommaon et L. 341-4, l'engagement étant manifestement disproporonné.

Très subsidiairement, déduire du décompte : Le dépôt de garane,

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Les échéances locaves de 2.750,85 €,

Le paiement des travaux de reprise,

Le décompte des charges, lesquelles ne sont point jusfiées.

Imputer également dans la limite de la prescripon quinquennale le montant des provisions sur charges dont il n'a pas été jusfié.

Constater qu'après déducon de ces opéraons qu'il n'existe aucune créance au profit de la S.C.I. ROMACADI.

Condamner la S.C.I. ROMACADI au paiement de la somme de 1.500,00 € sur le fondement de l'arcle 700 du Code de Procédure Civile.

Sur la nullité de l'acte, elle souent que l'acte se borne à indiquer : « pendant toute la durée du bail' alors que précisément la durée de ce bail n'est point menonnée que l'acte ne porte nullement menon du montant du loyer mensuel, ni a forori du montant total qui pourrait être cauonné pendant toute la durée du bail, que ce défaut de cee menon entache de nullité l'acte car il est manifeste que l'aenon de la cauon n'a pas été arée sur l'importance potenelle du montant à cauonner, le montant total des loyers sur la période de neuf années s'établissant à 178.200,00 €.

Elle souent également qu'au regard de l'arcle L. 341-2 du code de commerce, il y a lieu de retenir la nullité laquelle était également encourue du seul fait que la menon manuscrite portée

sur l'engagement de cauon n'est pas idenque aux menons prescrites par les arcles L. 341-2 et L. 341-3 du Code de la Consommaon.

Enfin, elle fait valoir que l'engagement est disproporonné par rapport à la situaon financière de l'intéressée dépourvue de ressource et de patrimoine.

A tre subsidiaire, elle conteste le décompte au mof que le dépôt de garane n'a pas été déduit

que les échéances locaves, selon le bail, étaient de 1.650,00 €, et que le décompte inclut des échéances de 2.750,85 €, lesquelles ne correspondent à aucune échéance locave connue que

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seul le loyer apparaissant comme suscepble d'être cauonné et que le décompte intègre le paiement de travaux de reprise alors que l'acte de cauon ne porte que sur le paiement du loyer

que de même a été intégré au décompte présenté les charges lesquelles ne sont point menonnées dans l'engagement de cauon.

Elle souent que dans la limite de la prescripon quinquennale le montant des sommes versées au tre des provisions de charges dont il n'est pas jusfié du bien-fondé doivent être remboursées lesdites sommes devant venir en compensaon des sommes réclamées au tre de l'engagement de cauon pour les loyers.

Dans ses dernières écritures déposées et nofiées le 21 octobre 2021 et tenues pour intégralement reprises, la SCI Romacadi demande à la Cour de :

Débouter Madame [X] des fins de son appel,
Débouter en conséquence Madame [X] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Madame [T] [X], solidairement avec Madame [J] [W], à payer à la SCI ROMACADI la somme de

11.351,40 €, conformément à son engagement de cauon solidaire en date du 02 avril 2009, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 21 juin 2016, date de la mise en demeure, Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Madame [T] [X] à payer
à la SCI ROMACADI une somme de 1.200 € sur le fondement de l'arcle 700 C.P.C.,

Y ajoutant :
Condamner Madame [T] [X] à payer à la SCI ROMACADI une somme de 4.000€ sur le fondement

de l'arcle 700 C.P.C. en cause d'appel,
La condamner aux eners dépens, ceux d'appel distraits à la Société d'Avocats soussignée.

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Elle fait valoir que Madame [X] s'est portée cauon solidaire de l'intégralité des clauses du bail, clauses dont elle connaissait d'autant mieux la portée qu'elle était cogérante de la Société GIMI, que la menon « pendant toute la durée du bail » est dépourvue de toute ambiguïté et s'entend jusqu'au 14 avril 2018 s'agissant d'un bail commercial de 9 ans ainsi que cela est précisé dans l'acte de bail, que Madame [X] avait une parfaite connaissance de la portée de son engagement et du montant des sommes cauonnées, et qu'elle ne peut raisonnablement soutenir le contraire que l'acte d'engagement est parfaitement clair sur le montant des sommes cauonnées puisqu'il porte sur « toutes sommes dues par la Société GIMI en exécuon du bail qui lui a été consen », qu'il ne résulte d'aucune disposion légale applicable en l'espèce qu'il devait être fait menon, dans l'acte de cauonnement, d'une somme précisément chiffrée, que l'engagement doit exprimer de façon explicite et non équivoque la conscience qu'a la cauon de la nature et de l'étendue de son engagement, compte tenu, outre des termes employés, de la qualité, des foncons et des connaissances de la cauon.

Elle souent que les disposions de l'arcle L 341-2 et L341-3 du code de la consommaon ne s'applique qu'aux créanciers professionnels que la SCI ROMACADI est une société civile immobilière familiale et ne peut être considérée comme un créancier professionnel au sens des arcles précités.

Sur la créance, elle fait valoir que le montant recfié de la créance de la Société ROMACADI s'élève à la somme de 11.351,40 € après déducon du dépôt de garane et régularisaon des charges pour les années 2015 et 2016 que l'engagement garant le paiement « de toutes sommes dues par la Société GIMI en exécuon du bail qui lui a été consen », ce qui couvre nécessairement le loyer ainsi que ses charges et accessoires que le bail commercial met à la charge du preneur « la quote- part des charges et prestaons de toute nature afférentes tant aux locaux loués qu'aux pares communes de l'ensemble immobilier ».

L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 avril 2022. Mofs

Madame [X] est en l'état d'un engagement de cauon souscrit le 2 avril 2009 au profit de la SCI Romacadi.

Elle s'oppose à la mise à exécuon de cee garane en arguant de sa nullité résultant du défaut de menon de la durée et du montant du son engagement et donc de son étendue.

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L'acte de cauon souscrit menonne que l'intéressée 'se porte cauon auprès du bailleur pour le compte de la société GIMI....du paiement du loyer pendant toute la durée du bail ' et 'à verser au bailleur... toutes les sommes dues par la société GIMI en exécuon du bail qui lui a été consen '.

En applicaon des disposions de l'arcle 1326 ancien du code civil applicable au présent lige, ' l'acte juridique par lequel une pare s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent ou à lui livrer un bien fongible doit être constaté dans un tre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la menon écrite par lui-même de la somme ou de la quanté en toutes leres et en chiffre'.

Il résulte de cee disposion légale que l'acte juridique doit comporter l'apposion par la cauon elle-même sur l'acte d'une menon exprimant la pleine conscience de la nature et de l'étendue de son engagement exprimé de manière telle qu'il ne laisse subsister aucun doute sur la volonté de s'obliger en cee qualité. Cee exigence ne fait cependant pas du cauonnement un contrat formaliste et figure au chapitre du code civil relaf aux règles de preuves des obligaons, le défaut de menon manuscrite suffisante ne rend pas l'engagement nul mais oblige à écarter l'acte des débats.

Il est constant qu'en l'espèce l'acte ne comporte pas de durée précise en chiffre de l'engagement qui est lié à la durée du bail et pas de montant déterminé de l'engagement en chiffre et en lere qui correspond au montant du loyer.

Toutefois, pour l'appréciaon le caractère explicite et non équivoque de l'engagement, il doit être tenu compte, non seulement des termes employés, mais également de la qualité, des foncons et des connaissances de la cauon, de ses relaons avec le créancier et le débiteur de l'obligaon, ainsi que de la nature et des caractérisques de cee dernière, les insuffisances, que présente la menon de la garane, pouvant être complétées par les menons intrinsèques de l'acte et les éléments intrinsèques de la cauon .

Or en l'espèce, l'engagement souscrit menonne que Madame [X] s'oblige pendant la durée du bail, au paiement du loyer et renvoie expressément au bail commercial signé le même jour par Madame [X] en sa qualité de cogérance de la société GIMI, locataire, et le dit bail menonne une durée de 9 ans à compter du 15 avril 2009 et un loyer annuel de 13 200euros de sorte que la caution avait lors de la signature de son engagement une parfaite connaissance de la nature et l'étendue de son obligation.

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Madame [X] sollicite l'applicaon à son profit des disposions de l'arcle L 341-2 et L341-3 du code de la consommaon en indiquant que la formulaon de son engagement ne correspond pas à celle exigée par ces textes et que de surcroît son engagement est disproporonné par rapport à ses revenus et son patrimoine.

Toutefois ces règles ne reçoivent applicaon que pour les cauonnements donnés à des créanciers professionnels et que doivent être considérés comme créanciers professionnels, les établissements de crédit et tous les professionnels dont la créance garane est en rapport avec leur acvité professionnelle.

Or tel n'est pas le cas en l'espèce, la SCI Romacadi est constuée de Monsieur [D] [Y], son épouse Madame [U] [V] et Mademoiselle [P] [D] et a pour objet 'l'acquision, la vente, l'exploitaon par bail de tous domaines, patrimoines immobilier et toutes opéraons se rapportant à l'objet social... '. Il s'agit d'une SCI constuée dans le but d'assurer la geson d'un patrimoine familial constué d'un local commercial, et non d'un créancier professionnel au sens des arcles du code de la consommaon sus visés qui ne sont pas applicables en l'espèce.

Enfin, Madame [X] conteste le décompte produit au mof que la bailleresse a inclus dans le décompte des charges indues et n'opère pas de régularisaon annuelle des provisions payées.

Toutefois il convient de constater que la bailleresse produit un décompte établi pour la période du 1er juillet 2012 au 1er janvier 2016 d'où il résulte que les charges ont bien fait l'objet de régularisaon annuelle et la somme versée au tre du dépôt de garane a été déduite du solde sollicité.

L'engagement de cauon de Madame [X] porte sur le paiement de toutes sommes dues par la société GIMI en exécuon du bail qui lui a été consen. Dés lors c'est à bon droit que la bailleresse a inclus les charges de copropriété relaves à l'entreen du centre commercial puisque le bail en son arcle 7 précise que 'le preneur doit supporter la quote part des charges et prestaons de toute nature afférentes tant aux locaux loués qu'aux pares communes de l'ensemble immobilier '.

Il convient de confirmer la décision de première instance et de condamner Madame [X] au paiement d'une somme de 1 500euros au tre de l'arcle 700 du code de procédure civile pour la présente procédure d'appel.

Par ces mots

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Par ces mofs

La Cour statuant par arrêt contradictoire :

Confirme le jugement de première instance rendu le 28 mars 2019 par le tribunal de grande instance d'Aix en Provence,

Y ajoutant :

Condamne Madame [T] [X] à payer à la SCI Romacadi la somme de 1 500euros au tre de l'arcle 700 du code de procédure civile et aux eners dépens avec distracon au profit de la SCP Troegeler Gougot Bredeau Troegeler et Monchauzou.