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Décisions

Cass. com., 1 mars 1994, n° 92-13.726

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Gomez

Avocat général :

M. de Gouttes

Avocats :

SCP Boré et Xavier, SCP Ancel et Couturier-Heller

Cass. com. n° 92-13.726

28 février 1994

Sur le moyen unique :

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 9 janvier 1992), que la société Etablissements Y, ayant pour directeur M. Pierre Y, a assigné le ministre de la Défense en paiement d'une indemnité en réparation du préjudice résultant du défaut d'exploitation par l'Etat français d'un brevet d'invention déposé le 3 juin 1970 enregistré sous le numéro 70-20.326 et des certificats d'addition numéros 72-25.699 et 73-395.12 s'y rattachant, ayant pour objet un dispositif électronique avertisseur de signalisation routière et ayant fait l'objet d'un règlement de copropriété entre M. X et l'Etat français ; que l'agent judiciaire du Trésor public est intervenu à l'instance ;

Attendu que M. Y fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le pourvoi, qu'il est constant qu'au nom de l'intérêt public, l'Etat s'était vivement intéressé à l'invention de M. Y qui permettait de sauver la vie à des milliers de personnes circulant sur les routes ; que l'Etat a fait procéder à diverses expérimentations qui se sont révélées, sur le plan technique, très satisfaisantes ; que l'Etat a alors signé avec M. Y un contrat de copropriété fixant la part inventive de ce dernier à 75 % dans la création dudit brevet et mettant à sa charge les frais d'entretien du brevet en France et à l'étranger, ce qui s'éleva à plus d'un million de francs en 1977 ; que ce brevet ne permettait pas à M. Y de l'exploiter seul puisque l'aménagement du réseau routier et l'équipement des véhicules qu'il nécessitait relevaient de l'Etat ; que M. Y avait accepté ces charges en croyant légitimement que l'Etat exploiterait l'invention, ce qui était évident au vu des contacts pris avec les constructeurs automobiles, des diverses expériences sur circuit et sur route effectuées et des plus vifs encouragements à poursuivre qui lui étaient prodigués ;

qu'en 1983, l'Etat rompit les pourparlers en vue de la création

d'une licence d'exploitation du brevet ; qu'en déboutant M. Y de sa demande en paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice financier considérable qu'il avait subi et en paiement de taxes et droits de maintenance du fait de la négligence de l'Etat qui s'était abstenu d'exploiter le brevet à des fins civiles et qui avait, par là même, empêché toute exploitation aux motifs erronés et inopérants que l'Etat aurait agi en partenaire loyal, soucieux de "l'intérêt public" -apprécié au plan financier- et que M. Y aurait pu exploiter ses autres brevets -bien qu'ils fussent liés à celui ayant fait l'objet du contrat de copropriété-, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1383 du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt relève que les conventions conclues entre M. Y et l'Etat français et contenues dans le règlement de copropriété signé le 11 mars 1975, complétant les dispositions de l'article 42 de la loi du 2 janvier 1968 dans sa rédaction applicable à l'espèce, prévoyaient la mise à la charge de M. Y des frais de dépôt et des taxes de maintien en vigueur des brevets français et étrangers et l'obligation pour l'Etat d'assurer ces frais en cas d'abandon par M. Y, la possibilité pour ce dernier de devenir propriétaire du brevet en cas d'abandon de sa part par l'Etat, le bénéfice de l'exploitation aux concessionnaires de la licence et le droit exclusif d'exploitation à l'Etat à titre militaire sans redevance et le partage de la part inventive pour chacun des copropriétaires ; que la cour d'appel a également relevé qu'à plusieurs reprises, M. Y a été informé des difficultés que soulevait le coût très élevé de la mise en application de l'invention ; qu'elle a pu déduire de ces constatations et appréciations que l'Etat n'avait conclu aucune obligation d'exploitation de l'invention, que l'échec des pourparlers ne résultait que de l'existence des facteurs de coût trop importants et qu'ainsi, l'Etat n'avait commis aucune faute ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor public français sollicite l'allocation d'une somme de dix mille francs en application de ce texte ;

Mais attendu qu'il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.