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Décisions

Cass. crim., 11 octobre 2011, n° 10-86.834

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Louvel

Avocats :

SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge et Hazan

Chambre de l'instruction de la cour d'ap…

7 septembre 2010

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 226-15, 311-1 du code pénal, 177, 181, 184, 198, 591 et 593 du code de procédure pénale, d'un défaut de motif et d'un manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a prononcé un non lieu ;

"aux motifs que sur le vol et l'atteinte au secret des correspondances, la Cour de cassation admet qu'est exonératoire de responsabilité pénale le fait pour un salarié de photocopier un document appartenant à son employeur, dont il a eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions si cette reproduction est strictement nécessaire à l'exercice des droits de sa défense dans le litige l'opposant à son employeur ; qu'en l'occurrence, si les courriers émanant des cabinets d'avocats dont la photocopie a été produite devant le conseil de prud'hommes sont étrangers au litige entre Mme Y... et son employeur quant au contenu, en revanche les mentions manuscrites qui y sont apposées sont susceptibles d'établir la nature des relations de travail ; que s'agissant du courrier des ASSEDIC, concernant Mme X..., Mme Y... considère que c'est à partir de l'embauche de Mme X... que sa situation s'est détériorée et qu'elle a été mise de côté ; que le problème n'est pas de savoir si ce moyen est fondé ou non mais à partir du moment où la question était invoquée dans le débat judiciaire, cette attestation établissant l'embauche d'une autre secrétaire, était susceptible d'être produite comme moyen de preuve à l'appui de l'allégation de la dégradation des conditions de travail ; qu'il s'en suit que Mme Y... a pu considérer que ces pièces pouvaient être utiles à sa défense de sorte que l'infraction de vol n'est pas constituée dans son élément intentionnel ; que de même, ces pièces n'ayant été communiquées que dans le cadre strictement procédural et n'ayant jamais été portées à la connaissance de tiers, l'atteinte au secret des correspondances n'est pas non plus établie ;

"et aux motifs adoptés que les délits de vol et d'atteinte au secret des correspondances ne peuvent pas non plus être retenus, eu égard à l'utilisation dans le seul cadre de la procédure prud'homale des courriers conservés par Mme Y... (cas de la lettre des ASSEDIC) ou photocopiés par elle (cas des cinq lettres émanant des cabinets d'avocats), dont il n'est pas établi qu'ils n'étaient pas strictement nécessaires à l'exercice de ses droits ;

"1°) alors que se rend coupable de vol un préposé qui, détenant matériellement certains documents appartenant à son employeur, les conserve ou en prend, à des fins personnelles, a l'insu et contre le gré de son propriétaire, des photocopies et qui les appréhende ainsi frauduleusement durant le temps nécessaire à leur reproduction ; que le vol n'est susceptible d'être excusé que si les courriers en cause sont strictement nécessaires à la défense du salarié dans une instance prud'homale qui l'oppose à son employeur ; qu'en énonçant, pour exonérer Mme Y... de sa responsabilité pénale, qu'elle avait pu considérer que les courriers adressés à son employeur, qu'elle lui avait soustraits à son insu, pouvaient être utiles à sa défense, sans constater qu'ils étaient strictement nécessaires à cette dernière, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés ;

"2°) alors que constitue le délit d'atteinte au secret des correspondances le fait de détourner des courriers adressées à un tiers aux fins de les conserver ou de les photocopier ; que le détournement de correspondances effectué par un salarié au détriment de son employeur n'est susceptible d'être excusé que lorsque les courriers en cause sont strictement nécessaires à sa défense lors d'une instance prud'homale qui les oppose ; qu'en jugeant, pour exonérer Mme Y... de sa responsabilité pénale, que la salariée avait pu considérer que les courriers adressés à son employeur, qu'elle avait détournés, pouvaient être utiles à sa défense, sans constater qu'ils étaient strictement nécessaires à cette dernière, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés ;

"3°) alors que constitue le délit d'atteinte au secret des correspondances le fait de détourner des courriers adressées à un tiers aux fins de les conserver ou de les photocopier ; que la circonstance que les courriers en cause n'aient été montrés qu'à des juges prud'homaux ne constitue pas un fait justificatif de cette infraction ; qu'en énonçant, pour exonérer Mme Y... de sa responsabilité pénale, que les courriers adressés à son employeur qu'elle avait détournés, avaient été communiqués dans un cadre strictement procédural, sans avoir été portés à la connaissance de tiers, la chambre de l'instruction s'est fondée sur des motifs impropres à caractériser l'excuse qu'elle a retenue en cause et a ainsi méconnu les textes susvisés ;

"4°) alors que se rend coupable de vol un préposé qui, détenant matériellement des documents appartenant à son employeur, soit les conserve soit en prend des photocopies, à des fins personnelles, a l'insu et contre le gré de son propriétaire ; que l'utilisation des choses volées ne peut ni exclure la caractérisation de l'infraction ni l'excuser ; qu'en énonçant, pour exclure la responsabilité pénale de Mme Y..., que les courriers qu'elle avait soustraits à son employeur avaient été communiqués dans un cadre strictement procédural, la chambre de l'instruction s'est fondée sur des motifs inopérants à exclure la caractérisation d'un vol ou à le justifier et a ainsi méconnu les textes susvisés ;

"5°) alors qu'il appartient à la personne mise en examen d'établir l'existence d'un fait justificatif de nature à l'exonérer de sa responsabilité pénale ; qu'il lui incombe notamment de démontrer que des documents adressés à son employeur qu'elle a détournés aux fins de les photocopier étaient strictement nécessaires à sa défense lors d'une instance prud'homale qui les oppose ; que, pour prononcer un non-lieu, la chambre de l'instruction a énoncé qu'il n'était pas établi que les courriers soustraits et détournés par la salariée n'étaient pas strictement nécessaires à l'exercice des droits de la défense de cette dernière ; que ce faisant, la chambre de l'instruction qui a inversé la charge de la preuve et a méconnu les textes susvisés ;

"6°) alors que la chambre de l'instruction doit répondre aux articulations essentielles développées par les mémoires des parties ; que dans son mémoire, M. X... soutenait que les courriers qui lui étaient adressés et que sa salariée lui a subtilisés n'étaient pas strictement nécessaires à sa défense au cours de l'instance prud'homales qui les opposait, dès lors qu'ils n'avaient pas été produits devant la cour d'appel ou n'avaient pas fondé de véritables moyens de la salariée ; qu'en s'abstenant de répondre à cette articulation essentielle du mémoire de M. X..., la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte, et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les délits reprochés, ni toute autre infraction ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Divialle conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;