Cass. 2e civ., 14 décembre 2006, n° 04-20.673
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Rapporteur :
M. Moussa
Avocat général :
M. Benmakhlouf
Avocats :
SCP Piwnica et Molinié, SCP Célice, Blancpain et Soltner
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a signé le 29 avril 1999 avec la société Gérance Laforêt Desport (la société GLD), exerçant l'activité d'agence immobilière, un contrat par lequel les parties décidaient de mettre en commun le service de gestion immobilière assuré par la société GLD, moyennant, pour M. X..., l'obligation de faire signer à ses clients bailleurs des mandats de gestion au profit de la société GLD ; qu'il était prévu qu'après le centième mandat de gestion confié par M. X..., celui-ci pourrait reprendre lui-même l'exploitation du portefeuille de gérance ainsi constitué, en versant une indemnité à la société GLD ; qu'alléguant l'absence de tout nouveau mandat depuis le mois d'août 2001, tandis que le seuil du centième mandat n'avait pas été atteint, la société GLD a saisi le président d'un tribunal de commerce aux fins d'autoriser un huissier de justice à se rendre dans les locaux de la société CGL, nouvelle dénomination de la société DPI, créée par M. X... et son épouse, afin de se faire remettre copie des mandats confiés depuis le 1er août 2001 ; que par une ordonnance sur requête du 16 juin 2003, le président du tribunal de commerce a accueilli la requête, fixant à deux mois, à compter du jour de l'ordonnance, le délai pendant lequel l'huissier de justice commis devait remplir sa mission; que le 22 juillet 2003, une ordonnance rectificative a précisé qu'il pouvait être recouru à la force publique en cas de difficulté ; que l'huissier de justice a procédé au constat et aux saisies le 11 septembre 2003 ; que sur assignation de la société CGL, le président du tribunal de commerce a constaté la nullité de la requête et de la saisie des documents intervenue hors du délai imparti et a rétracté ses ordonnances des 16 juin et 22 juillet 2003 ; que la société GLD a interjeté appel de cette décision ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société CGL fait grief à l'arrêt d'avoir dit que les ordonnances des 16 juin et 22 juillet 2003 étaient régulières et n'avaient pas à être rétractées alors, selon le moyen :
1°) que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; que la cour d'appel, qui avait constaté que le contrat litigieux avait été conclu entre la société Gérance Laforêt Desport et le seul M. X..., ne pouvait juger qu'il était opposable à la société DPI, devenue CGL, sans relever l'existence d'un mandat, fût-il apparent ; qu'en se bornant à constater que le contrat avait été exécuté temporairement par la société pour juger qu'elle était tenue de respecter les obligations qui y étaient stipulées, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1165 du code civil ;
2°) que la reprise par une société des engagements souscrits par les personnes qui ont agi en son nom lorsqu'elle était en formation, prévue par l'article 1843 du code civil, ne peut résulter, en application de l'article 6 du décret du 3 juillet 1978, que de la signature des statuts lorsque l'état prévu au même article aura été préalablement annexé à ces statuts, ou d'un mandat donné avant l'immatriculation de la société et déterminant dans leur nature ainsi que dans leurs modalités les engagements à prendre, ou, après l'immatriculation, d'une décision prise à la majorité des associés ; que la cour d'appel ne pouvait donc considérer que le contrat conclu par M. X... avant la constitution de la société DPI devait être exécuté par celle-ci sans constater que l'une de ces formalités avait été accomplie ; qu'en jugeant néanmoins que ce contrat avait été repris par la société du seul fait de son exécution, la cour d'appel a violé les articles 1843 du code civil et 6 du décret du 3 juillet 1978 ;
Mais attendu que l'arrêt retient que, par la convention du 29 avril 1999, M. X... ne s'est pas engagé au nom de la société DPI et que cette dernière a accompli des actes d'exécution de ce contrat en adressant à la société GLD des factures, portant la signature de M. X... en sa qualité de directeur, et divers courriers relatifs à des mandats de gestion; qu'il résulte de ces constatations que la cour d'appel, qui n'avait pas à faire application des dispositions de l'article 1843 du code civil et de l'article 6 du décret du 3 juillet 1978, a ainsi fait ressortir la volonté des parties de substituer la société DPI à M. X... dans l'exécution du contrat conclu entre ce dernier et la société GLD et a pu statuer comme elle a fait ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles 493 et 495 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu que, pour dire régulières les opérations de constat et de saisie du 11 septembre 2003, l'arrêt retient que le délai imparti pour réaliser ces opérations n'était pas prescrit à peine de caducité ou de nullité ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que lesdites opérations avaient été réalisées après l'expiration du délai imparti par le juge, de sorte que l'autorisation donnée par ce dernier était devenue caduque et que les opérations n'avaient plus de fondement juridique, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627 du nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que les ordonnances sur requête des 16 juin et 22 juillet 2003 produiront leur plein effet, l'arrêt rendu le 13 octobre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit nulles et de nul effet les opérations réalisées sur le fondement desdites ordonnances.