Cass. com., 14 septembre 2010, n° 09-69.862
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Avocats :
SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Masse-Dessen et Thouvenin
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 29 juin 2009) que se prévalant de ses droits sur un brevet européen n° 0300945B2 délivré le 2 décembre 1992 et portant sur un appareil automatique pour le nettoyage de une ou plusieurs pièces à main de dentisterie ou de turbines, la société Micro mega après avoir fait pratiquer saisie-contrefaçon le 20 mars 2000 chez un chirurgien dentiste, a assigné la société W & H France en contrefaçon de plusieurs des revendications de la partie française de son brevet ; que ce brevet a été cédé à la société Micro mega international manufactures, la société Micro mega en devenant licenciée ;
Attendu que la société Micro mega et la société Micro mega international manufactures (les sociétés Micro mega) font grief à l'arrêt d'avoir annulé un procès-verbal de saisie contrefaçon établi à leur requête et, en conséquence, de les avoir déboutées de leurs demandes tendant à voir déclarer la société W & H France coupable de contrefaçon du brevet européen dont elles sont titulaires, à lui voir interdire la poursuite des agissements contrefaisants, et à voir ordonner la confiscation en vue de leur destruction de l'intégralité des produits contrefaisants , alors, selon le moyen :
1°/ que dans le cas où l'huissier de justice omet de remettre à la partie saisie les documents dont elle doit recevoir copie préalablement à la saisie-contrefaçon, notamment celle de l'acte constatant le dépôt de cautionnement, cette omission constitue une nullité de forme qui doit être soulevée avant toute défense au fond ; qu'en retenant cependant que, après avoir défendu au fond, la partie saisie pouvait valablement poursuivre la nullité de la saisie-contrefaçon litigieuse, invoquée au titre de l'omission par l'huissier de la formalité de remise préalable du récépissé de cautionnement, la cour d'appel a violé l'article R. 615-2 du code de la propriété "industrielle" (intellectuelle) dans sa rédaction applicable à l'espèce ;
2°/ qu'en toute hypothèse, le défaut de remise à la partie saisie des documents dont elle doit recevoir copie préalablement à la saisie-contrefaçon n'entraîne la nullité qu'à charge pour cette partie d'établir un grief; qu'en l'espèce, l'huissier de justice chargé de procéder à la saisie-contrefaçon litigieuse ayant omis de remettre la copie du récépissé de cautionnement à la partie saisie, l'omission de cette formalité n'entraînait la nullité de la saisie qu'à charge pour cette partie d'établir un grief ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 114 du code de procédure civile et l'article R. 615-2 du code de la propriété "industrielle" dans sa rédaction applicable à l'espèce ;
Mais attendu, d'une part, qu'un acte de saisie-contrefaçon étant un simple acte probatoire antérieur à la procédure de contrefaçon qui n'est introduite que par la demande en contrefaçon, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que sa nullité, qui constitue un moyen de défense au fond, pouvait être invoquée à tout moment de la procédure ;
Attendu, d'autre part, que l'arrêt relève que l'ordonnance autorisant la saisie-contrefaçon avait expressément fixé à 10 000 francs "le montant du cautionnement tel que visé par les dispositions de l'article L. 521-1 du code de la propriété intellectuelle" et dit qu'elle ne serait exécutoire qu'après réception par la requérante du récépissé dudit cautionnement et la remise d'une copie par l'huissier à la partie saisie ; qu'il constate que cette copie n'a pas été remise ; qu'il résulte de ces énonciations et constatations qu'en procédant aux opérations de saisie-contrefaçon, alors que l'ordonnance n'était pas exécutoire, l'huissier de justice a commis un excès de pouvoir ; qu'une telle violation des termes de l'ordonnance ayant pour effet d'affecter la validité de la saisie-contrefaçon au fond, c'est à bon droit que la cour d'appel en a prononcé la nullité sans que les sociétés Micro mega aient à justifier d'un grief ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.