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Décisions

Cass. mixte, 30 novembre 2007, n° 06-14.006

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lamanda

Rapporteur :

Mme Monéger

Avocat général :

M. Guérin

Avocats :

SCP Baraduc et Duhamel, SCP Thomas-Raquin et Bénabent

Versailles, du 16 janv. 2006

16 janvier 2006

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ la société Agintis, société anonyme, dont le siège est 211 avenue Francis de Pressensé, 69200 Vénissieux,

2°/ M. Eric X..., agissant en qualité d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Agintis, domicilié ...,

contre l'arrêt rendu le 16 janvier 2006 par la cour d'appel de Versailles (4e chambre), dans le litige les opposant à la société Basell production France, société par actions simplifiée, dont le siège est 81 avenue Arago, 92000 Nanterre,

défenderesse à la cassation ;

Par arrêt du 31 mai 2007, la troisième chambre civile a renvoyé le pourvoi devant une chambre mixte. Le premier président a, par ordonnance du 14 novembre 2007, indiqué que cette chambre mixte serait composée des première et troisième chambres civiles, de la chambre commerciale, financière et économique et de la chambre sociale ;

Les demandeurs invoquent, devant la chambre mixte, les moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Ces moyens ont été formulés dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat de la société Agintis et de M. X..., ès qualités ;

Un mémoire en défense, des observations complémentaires et des observations additionnelles ont été déposés au greffe de la Cour de cassation par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat de la société Basell production France ;

La SCP Thomas-Raquin et Bénabent a également déposé au greffe de la Cour de cassation des observations en réplique ;

Le rapport écrit de Mme Monéger, conseiller, et l'avis écrit de M. Guérin, avocat général, ont été mis à la disposition des parties ;

Attendu que, selon l'arrêt attaqué, la société de droit français Basell production France (société Basell), maître de l'ouvrage, a confié à la société de droit allemand Salzgitter Anlagenbau GmbH (société SAB) la réalisation d'un immeuble à usage industriel en France ; que cette dernière a sous-traité le lot "tuyauterie" à la société française Agintis par deux contrats des 22 mars 1999 et 14 mars 2000 ; que les parties avaient convenu que les contrats étaient soumis à la loi allemande ; qu'après achèvement du chantier en septembre 2002, une sentence, rendue le 23 mars 2003 par la Cour internationale d'arbitrage, a condamné la société SAB à payer à la société Agintis diverses sommes dont le solde des prestations sous-traitées avec intérêts au taux légal allemand ; que la société SAB ayant, le 1er septembre 2002, fait l'objet d'une procédure collective régie par le droit allemand, à laquelle la société Agentis a produit sa créance et le maître de l'ouvrage ayant, par lettre du 18 juin 2003, refusé tout paiement à cette société aux motifs que le marché principal et les sous-traités étaient régis par la loi allemande et qu'elle ne l'avait pas accepté en qualité de sous-traitant, cette société, a, le 16 juillet 2003, assigné le maître de l'ouvrage en indemnisation sur le fondement des articles 12 et 14-1 de la loi du 31 décembre 1975, et a recherché sa responsabilité quasi délictuelle pour l'avoir privée de la possibilité de sauvegarder ses droits par voie de saisie conservatoire avant règlement intégral intervenu en mai 2002 de la société SAB ; que, dans le cours de la procédure, la société Agintis, mise en redressement judiciaire, a bénéficié d'un plan de cession, M. X..., étant désigné en qualité d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution de ce plan ;

Sur la loi applicable :

Attendu que l'arrêt a décidé à bon droit que, s'agissant de la construction d'un immeuble en France, la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, en ses dispositions protectrices du sous-traitant, est une loi de police au sens des dispositions combinées de l'article 3 du code civil et des articles 3 et 7 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles 12, alinéa 1, et 13, alinéa 2, de la loi du 31 décembre 1975 ;

Attendu que, selon le premier texte, le sous-traitant a une action directe contre le maître de l'ouvrage si l'entrepreneur principal ne paie pas, un mois après en avoir été mis en demeure, les sommes qui sont dues en vertu du contrat de sous-traitance et que copie de cette mise en demeure est adressée au maître de l'ouvrage ; que, selon le second, les obligations du maître de l'ouvrage sont limitées à ce qu'il doit encore à l'entrepreneur principal à la date de la réception de la copie de la mise en demeure prévue à l'article précédant ;

Attendu que pour débouter la société Agintis de ses demandes, l'arrêt retient qu'en l'absence d'engagement de toute procédure à l'encontre de la société Basell avant l'assignation introductive de la présente instance le 16 juillet 2003, la société Agintis ne peut sérieusement prétendre avoir antérieurement exercé l'action directe prévue par la loi du 31 décembre 1975 et qu'elle ne peut dès lors lui imputer à faute le règlement intervenu en mai 2002 ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la notification au maître de l'ouvrage par lettre recommandée avec demande d'avis de réception des mises en demeure adressées à l'entrepreneur principal était intervenue les 27 mars et 3 mai 2001 et que la société Basell n'avait réglé qu'en mai 2002 la somme qu'elle restait devoir à la société SAB, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 janvier 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée.