CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 26 novembre 2019, n° 17/19538
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
ARTEXTYL (SARL)
Défendeur :
Société NEBULUS GmbH
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
David PEYRON
Conseillers :
Isabelle DOUILLET, François THOMAS
Avocats :
Me Annette S. , Me Christian R., Me Pierre F.
La société ARTEXTYL, créée le 9 septembre 2002, est spécialisée dans la création d'articles de prêt à porter.
Elle indique qu'elle commercialise ses articles sous la marque semi-figurative de l'Union européenne 'GEOGRAPHICAL NORWAY EXPEDITION'n°9860834.
La société ARTEXTYL a créé trois modèles de vêtements de type blouson sous les noms de BILLAL, AYER et FLYER.
Le modèle dénommé BILLAL a été créé dans le cadre de sa collection automne-hiver 2010/2011 et déposé le 21 juillet 2011 à l'INPI sous le n°2011 3638 avec la description suivante : ' Parka à capuche avec poche ventrale - Broderie sur poche ventrale et sur la manche gauche au portée. Stoppeur sur coté gauche et droite de la parka'.
Le modèle AYER a été créé dans le cadre de sa collection printemps-été 2014 et déposé le 10 juillet 2014 à l'INPI sous le n°2014 3155.
Le modèle FLYER a été créé dans le cadre de sa collection automne-hiver 2012/ 2013 et déposé le 2 septembre 2013 à l'INPI sous le n°2013 3802.
La société NEBULUS est une société de droit allemand, enregistrée au registre du commerce du land allemand de Bavière en date du 14 août 2013. Elle exerce son activité dans le domaine vestimentaire et commercialise de nombreux articles, notamment des vêtements d'hiver.
Elle exploite les marques allemandes et de l'Union européenne 'NEBULUS' enregistrées au registre allemand des marques sous le numéro 302008009212 et au registre des marques de l'Office de1'Union Européenne pour la Propriété Intellectuelle sous le numéro 010759777. Elle exploite la marque par le biais de ses boutiques en ligne, accessibles via le site nebulus.biz, mais également via les sites Amazon et eBay.
La société ARTEXTYL indique avoir constaté, à l'occasion d'une vente de la société SHOWROOMPRIVE.COM, l'existence de produits de la société NEBULUS reprenant les caractéristiques de ses modèles BILLAL, AYER et FLYER.
Autorisée par une ordonnance aux fins de saisie-contrefaçon en date du 4 janvier 2016, la société ARTEXTYL a fait procéder à une saisie-contrefaçon au siège de la société SHOWROOMPRIVE.COM qui a été effectuée le 7 janvier 2016 et n'a pas permis de révéler d'informations dans l'immédiat, la société SHOWROOMPRIVE.COM s'engageant à transmettre les pièces comptables et les différents documents en sa possession.
Le 11 janvier 2016, la société SHOWROOMPRIVE.COM a adressé divers documents à l'huissier de justice, notamment sur les quantités de produits litigieux fournis par la société NEBULUS.
C'est dans ces conditions que, par acte du 17 février 2016, la société ARTEXTYL a fait assigner la société NEBULUS devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de ses droits d'auteur et de modèles français, ainsi qu'en concurrence déloyale et parasitaire.
Dans un jugement du 7 septembre 2017, le tribunal de grande instance de Paris a :
- dit que le modèle BILLALn°20113638 est nul pour défaut de caractère propre,
- déclaré, en conséquence, la société ARTEXTYL irrecevable à agir en contrefaçon du modèle BILLAL à l'encontre de la société NEBULUS sur le fondement de l'article L. 513-4 du code de la propriété intellectuelle,
- dit que le jugement une fois devenu définitif sera transmis à la requête de la partie la plus diligente à l'INPI en vue de son inscription au registre national des dessins et modèles,
- débouté la société NEBULUS de sa demande de nullité du modèle AYERn°20143155 et du modèle FLYER n°20133802,
- déclaré la société ARTEXTYL irrecevable en ses demandes fondées sur le droit d'auteur,
- débouté la société ARTEXTYL de l'ensemble de ses demandes en contrefaçon fondées sur les modèles FLYER et AYER,
- débouté la société ARTEXTYL de l'ensemble de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et parasitaire,
- condamné la société ARTEXTYL aux dépens et au paiement à la société NEBULUS de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Le 23 octobre 2017, la société ARTEXTYL a interjeté appel de ce jugement.
Dans ses dernières conclusions numérotées 2 transmises le 16 juillet 2018, la société ARTEXTYL demande à la cour :
- de réformer le jugement en ce qu'il :
- l'a déclarée irrecevable à agir en contrefaçon du modèle BILLAL,
- dit que le jugement une fois définitif sera transmis à la requête de la partie la plus diligente à l'INPI en vue de son inscription au registre national des dessins et modèles,
- l'a déclarée irrecevable en ses demandes fondées sur le droit d'auteur,
- l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes en contrefaçon fondées sur les modèles FLYER et AYER,
- l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et parasitaire,
- l'a condamnée à payer à la société NEBULUS la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- en conséquence,
- de juger qu'elle détient un droit au titre des dessins et modèles sur le modèle AYER n°20143155 déposé le 10 juillet 2014 et sur le modèle FLYER n°20133802 déposé le 13 septembre 2013,
- de juger qu'elle détient des droits d'auteur sur le blouson référencé BILLAL, sur le blouson référencé AYER et sur le sweat-shirt référencé FLYER,
- de juger qu'en fabricant et en commercialisant le sweat-shirt NAPA, la société NEBULUS s'est rendue coupable de contrefaçon du modèle FLYER n°20133802 et de contrefaçon de ses droits d'auteur sur le sweat-shirt référencé FLYER,
- de juger qu'en fabricant et en commercialisant la veste PORTICO, la société NEBULUS s'est rendue coupable de contrefaçon de son modèle AYER n°20143155 et de contrefaçon de ses droits d'auteur sur sa parka référencée AYER,
- de juger qu'en fabricant et en commercialisant la parka STOCKHOLM, la société NEBULUS s'est rendue coupable de contrefaçon de ses droits d'auteur sur la parka référencée BILLAL,
- de juger que la société NEBULUS s'est rendue coupable à son préjudice d'actes de concurrence déloyale et de parasitisme,
- de débouter la société NEBULUS de l'ensemble de ses demandes,
- d'interdire à la société NEBULUS :
- la fabrication et la commercialisation des vêtements contrefaisants, sous astreinte définitive de 1 000€ par infraction constatée et par jour de retard à compter de la signification du 'jugement' à intervenir,
- la poursuite de la commercialisation de tout vêtement reprenant les caractéristiques propres aux vêtements commercialisés par la société ARTEXTYL,
- de condamner la société NEBULUS à lui payer :
- la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon,
- la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et de parasitisme,
- d'autoriser la société ARTEXTYL à faire procéder à la publication du 'jugement' à intervenir dans 5 journaux ou revues de son choix, aux frais de la société NEBULUS, le coût global des publications ne pouvant excéder la somme de 20 000 € (H.T.),
- de condamner la société NEBULUS à lui verser la somme de 25 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions transmises le 11 juin 2019, la société NEBULUS demande à la cour :
- de débouter la société ARTEXTYL de toutes ses demandes,
- de confirmer le jugement, sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité du modèle AYERn°20143155,
- statuant à nouveau, de prononcer la nullité du modèle français AYERn°20143155 déposé le 10 juillet 2014,
- de condamner la société ARTEXTYL à lui payer une somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est du 10 septembre 2019.
MOTIFS DE L'ARRÊT
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.
Sur les chefs du jugement non critiqués
Le jugement déféré n'est pas critiqué en ce qu'il a débouté la société NEBULUS de sa demande de nullité du modèle FLYER n°20133802 de la société ARTEXTYL.
Par ailleurs, la société appelante ARTEXTYL indique dans le dispositif de ses conclusions qu'elle sollicite la réformation du jugement en ce qu'il l'a déclarée irrecevable à agir en contrefaçon du modèle BILLALn°20113638 et en ce qu'il a ordonné la transmission de la décision à l'INPI mais elle ne consacre aucun développement à la validité de ce modèle BILLAL ni ne forme aucune demande au titre de la contrefaçon de ce modèle sur le fondement des articles L. 511-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle. Elle ne demande pas non plus l'infirmation du jugement en ce qu'il a prononcé la nullité de son modèle BILLALn°20113638 pour défaut de caractère propre.
Dès lors, en l'absence de toute critique, le jugement entrepris sera confirmé, par adoption de ses motifs pertinents et exacts, tant en fait qu'en droit, en ce qu'il a :
- débouté la société NEBULUS de sa demande de nullité du modèle FLYER n°20133802,
- dit que le modèle BILLALn°20113638 est nul pour défaut de caractère propre,
- déclaré, en conséquence, la société ARTEXTYL irrecevable à agir en contrefaçon du modèle BILLAL à l'encontre de la société NEBULUS sur le fondement de l'article L. 513-4 du code de la propriété intellectuelle,
- dit que le jugement une fois devenu définitif sera transmis à la requête de la partie la plus diligente à l'INPI en vue de son inscription au registre national des dessins et modèles.
Sur les demandes de la société ARTEXTYL en contrefaçon de dessins et modèles français et de droits d'auteur
Sur les droits de dessins et modèles et les droits d'auteur détenus par la société ARTEXTYL
La société NEBULUS ne contestant pas le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité du modèle FLYERn°n°20133802 et la société ARTEXTYL ne le critiquant pas en ce qu'il a dit que son modèle BILLALn°20113638 était nul pour défaut de caractère propre, seule la validité du modèle AYERn°20143155 est en débat devant la cour.
Sur la validité du modèle AYERn°20143155
La société NEBULUS conteste la validité du modèle AYER, arguant qu'il est dépourvu de nouveauté et de caractère propre. Elle fait valoir que la forme du blouson est totalement antériorisée par le modèle antérieur CYCLOPE (déposé le 7 décembre 2012) de la société ARTEXTYL, que l'emplacement des décorations est antériorisé par d'autres modèles antérieurs ARTEXTYL (DORON, CATAWA, CAPACITY, UCASH), qu'une grande partie des décorations (notamment l'inscription '1953", la marque semi-figurative 'GEOGRAPHICAL NORWAY'...) se retrouve sur le modèle CATAWA et que tous ces modèles antérieurs ne se différencient du modèle invoqué que par des détails insignifiants qui ne permettent pas de produire une impression globale différente sur l'utilisateur averti.
La société ARTEXTYL soutient qu'aucun des modèles antérieurs opposés (CYCLOPE, DORON, CATAWA, UCASH, CAPACITY de ARTEXTYL ; KLAMI de NAPAPIJRI ; HORIZON de NEBULUS) ne permet de contester la validité de son modèle AYER qui se singularise par les éléments de décoration qu'il comporte ainsi que par l'emplacement de ces éléments.
L'article L. 511-2 du code de la propriété intellectuelle dispose que 'Seul peut être protégé le dessin ou modèle qui est nouveau et présente un caractère propre'. Selon l'article L. 511-3 du même code, 'Un dessin ou modèle est regardé comme nouveau si, à la date de dépôt de la demande d'enregistrement ou à la date de la priorité revendiquée, aucun dessin ou modèle identique n'a été divulgué. Des dessins ou modèles sont considérés comme identiques lorsque leurs caractéristiques ne diffèrent que par des détails insignifiants', l'article L. 511-4 prévoyant qu''Un dessin ou modèle a un caractère propre lorsque l'impression visuelle d'ensemble qu'il suscite chez l'observateur averti diffère de celle produite par tout dessin ou modèle divulgué avant la date de dépôt de la demande d'enregistrement ou avant la date de priorité revendiquée.
Pour l'appréciation du caractère propre, il est tenu compte de la liberté laissée au créateur dans la réalisation du dessin ou modèle'. L'article L. 512-4 dispose : 'L'enregistrement d'un dessin ou modèle est déclaré nul par décision de justice : a)S'il n'est pas conforme aux dispositions des articles L 511-1 à L 511-8".
La société NEBULUS rappelle à juste raison que la validité d'un modèle s'apprécie au regard du dépôt et non du produit commercialisé selon le modèle.
La société ARTEXTYL expose que son modèle AYER se caractérise par la combinaison des caractéristiques suivantes :
'- une veste de type blouson comprenant un zip central
- un col montant
- des manches et un bas de veste élastiqués
- deux poches latérales
- une poche sur le bras
- un écusson représentant le drapeau norvégien recouvrant toute la partie supérieure gauche, sur lequel ont été superposés divers drapeaux et des inscriptions
- l'inscription « GEOGRAPHICAL NORWAY » sur deux lignes, au niveau de la poitrine, dans un cartouche rectangulaire
- un écusson rond représentant l'Australie et le drapeau norvégien sur la partie supérieure droite
- des mentions diverses sur la partie supérieure de la manche droite de la veste
- la marque « GEOGRAPHICAL NORWAY » inscrite verticalement dans une police évoquant l'écriture manuscrite, sur la partie inférieure de la manche droite'.
Comme le tribunal l'a retenu, la forme du modèle AYER est totalement antériorisée par le modèle CYCLOPEn°920851, déposé le 7 décembre 2012, de la société ARTEXTYL et l'emplacement des éléments décoratifs (inscriptions, écussons, drapeaux) est déjà connu et utilisé par la société ARTEXTYL sur ses autres modèles DORON, CATAWA (déposés le 7 décembre 2012), CAPACITY (déposé le 9 mars 2012). Il en est de même pour le modèle UCASH (déposé le 9 mars 2012) de la société ARTEXTYL.
Cependant, aucun des modèles opposés par la société NEBULUS ne présente, à l'instar du modèle AYER, un drapeau norvégien recouvert de mini drapeaux sur la partie supérieure gauche (poitrine), un écusson rond comportant la carte de l'Australie sur la partie supérieure droite, l'inscription 'GEOGRAPHICAL NORWAY' dans un cartouche rectangulaire en travers de la poitrine, l'inscription 'Royal Norway 1953 Exploration Artic Established' en bas de la manche droite. Si la date '1953", l'inscription 'GEOGRAPHICAL NORWAY' et le mot 'Royal' se retrouvent également dans les éléments décorant le modèle CATAWA, comme l'observe la société NEBULUS, ce n'est pas dans la même configuration et ce modèle, en raison notamment de l'absence de drapeau norvégien sur la partie gauche de la poitrine, produit une impression d'ensemble très différente de celle produite par le modèle AYER.
Pour ces raisons, le modèle AYER diffère des modèles antérieurs opposés par la société NEBULUS par des caractéristiques qui ne sont pas des détails insignifiants et il produit sur l'utilisateur averti, justement défini par les premiers juges comme l'utilisateur doté d'une vigilance particulière en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré des vêtements, une impression visuelle d'ensemble différente de celle générée par ces modèles antérieurs.
Le modèle n'est donc dépourvu ni de nouveauté ni de caractère propre.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté la société NEBULUS de sa demande de nullité du modèle AYERn°20143155 de la société ARTEXTYL.
Sur la protection des blousons BILLAL, AYER et FLYER par le droit d'auteur
La société ARTEXTYL soutient que les blousons BILLAL, AYER et FLYER sont originaux, explicitant comme ci-après, pour chacun d'eux, l'originalité de la combinaison revendiquée.
La société NEBULUS conteste cette originalité, avançant que la société ARTEXTYL se singularise depuis sa création par l'imitation servile de nombreuses marques ou dessins et modèles de concurrents. Selon l'intimée, tous les articles proposés par la société ARTEXTYL n'ont pas d'identité propre et se contentent de reprendre les éléments caractéristiques de vêtements offerts à la vente par des sociétés connaissant un fort succès commercial.
En vertu de l'article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle, l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous ; l'article L.112-1 du même code protège par le droit d'auteur toutes les œuvres de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination, pourvu qu'elles soient des créations originales. Il se déduit de ces dispositions, le principe de la protection d'une oeuvre sans formalité et du seul fait de la création d'une forme originale.
Selon l'article L.112-2, 14° du même code, sont considérées comme œuvres de l'esprit les créations des industries saisonnières de l'habillement et de la parure.
Lorsque la protection est contestée en défense, l'originalité doit être explicitée et démontrée par celui qui se prétend auteur.
Si la notion d'antériorité est indifférente en droit d'auteur, l'originalité doit être appréciée au regard d'oeuvres déjà connues afin de déterminer si la création revendiquée s'en dégage d'une manière suffisamment nette et significative, et si ces différences résultent d'un effort de création, marquant l'objet de l'empreinte de la personnalité de son auteur.
La société ARTEXTYL soutient que l'originalité de son blouson BILLAL réside 'dans le fait d'avoir opté pour une veste type parka de forme assez classique, à enfiler, avec une capuche à bord en fourrure, une grande poche à rabat sur la poitrine et deux poches plaquées, sur laquelle ont été apposés des éléments décoratifs originaux avec :
- la marque « GEOGRAPHICAL NORWAY » sur deux lignes apposée dans un rectangle sur le rabat de la poche centrale,
- le drapeau norvégien apposé au centre de la poche,
- ces caractéristiques présentes sur l'avant de la parka étant associées à un aspect asymétrique des décorations figurant sur les bras, qui révèlent la personnalité de l'auteur.
En effet, le bras gauche présente deux drapeaux norvégiens inversés, avec au-dessus un écusson évoquant une banderole, et au-dessous des inscriptions présentées sur différentes lignes, de différentes tailles, donnant un aspect géométrique à l'ensemble des inscriptions.
Par opposition, la manche droite ne présente aucune inscription, mais une simple poche.
Il résulte de cette combinaison de caractéristiques une physionomie propre traduisant un véritable parti pris esthétique reflétant l'empreinte de la personnalité de son auteur'.
Au vu des pièces 23 et 24 produites par la société NEBULUS, la cour constate que le blouson revendiqué - qui est en réalité plutôt une veste, descendant clairement en dessous des hanches de l'utilisateur, au vu de la photographie insérée page 17 des conclusions de l'appelante - est très proche de la veste SKIDOO de la société NAPAPIJRI dont l'existence est avérée depuis 1990 (pièce 23, page 5, de l'intimée). Cette veste de sportwear est en effet, tout comme la veste BILLAL, un vêtement pouvant recevoir l'appellation de parka, à enfiler, avec une capuche, laquelle peut être à bord en fourrure (cf. pièce 24, page 2), une grande poche à rabat sur la poitrine et deux poches en biais sous la poche poitrine, des manches pouvant être revêtues de décorations (écussons, inscriptions dans des rectangles) ; sur le rabat de la poche poitrine figure la marque 'NAPAPIJRI' ('GEOGRAPHICAL NORWAY' sur la veste BILLAL) et sur la poche poitrine elle-même est apposée, au centre, le même drapeau norvégien que sur la veste BILLAL. On observe encore un cordon de re-serrage élastique en dessous de la poche centrale, comme sur la veste BILLAL.
Dès lors, les éléments propres à la veste BILLAL, à savoir la marque 'GEOGRAPHICAL NORWAY' sur la poche centrale (au lieu de 'NAPAPIJRI' sur la veste opposée), les décorations apposées sur la manche gauche (deux drapeaux norvégiens inversés, avec au-dessus un écusson évoquant une banderole avec l'inscription 'GEOGRAPHICAL 19 NORWAY 53', et au-dessous des inscriptions présentées sur différentes lignes, de différentes tailles) - étant observé que le drapeau norvégien est déjà présent sur la veste NAPAPIJRI - et l'asymétrie entre la manche gauche décorée et la manche droite recouverte d'une simple poche, ne peuvent suffire à caractériser l'effort créatif de l'auteur, l'empreinte de sa personnalité et partant l'originalité alléguée, l'élément essentiel de la veste SKIDOO que constitue sa grande poche centrale de poitrine revêtue de la marque (sur le rabat de ladite poche) et du drapeau norvégien, étant repris à l'identique par la veste BILLAL, et de nombreux autres éléments étant banals pour une parka destinée aux sports de montagne et d'hiver (capuche bordée de fourrure, lien de resserrage, poche sur une manche...).
La société ARTEXTYL soutient que l'originalité du blouson AYER réside dans 'le fait d'avoir associé différents éléments de décoration dans une configuration particulière et d'abord, un large écusson représentant le drapeau norvégien recouvrant toute la partie supérieure gauche sur lequel figurent divers éléments : des drapeaux, des petites croix alignées et une coupe de la Terre. Le fait de superposer sur un drapeau d'autres écussons drapeaux, ainsi que des croix et des inscriptions, présentent incontestablement une originalité, due au fait de surcharger un drapeau avec d'autres drapeaux, apposés les uns sur les autres. La face supérieure du blouson présente une asymétrie, puisqu'au drapeau norvégien, de forme rectangulaire, recouvrant toute la partie supérieure gauche du blouson, s'oppose, sur la partie droite, un écusson rond, petit, reproduisant l'Australie, pays totalement opposé à la Norvège, que ce soit géographiquement ou d'un point de vue climatique, sur lequel a été superposé un drapeau norvégien et des inscriptions contenant « GEOGRAPHICAL NORWAY ». Le fait d'associer à une parka, qui présente tous les attraits des vêtements de sport de montagne, une carte de l'Australie, présente d'ailleurs incontestablement une originalité. A cela est associée la marque « GEOGRAPHICAL NORWAY » inscrite dans de nombreuses polices différentes : dans un cartouche rectangulaire, sur deux lignes, sur la face avant ; sur l'écusson rond, ainsi que la mention « ROYAL NORWAY - 1953 » inscrite de manière très originale, verticalement, sur la manche droite, dans une police cursive. L'asymétrie voulue pour donner des caractéristiques esthétiques très particulières au blouson figure également sur les manches, puisque la manche gauche présente, elle, des inscriptions horizontales, sur la partie haute de la manche, créant une forme géométrique particulière'.
Cependant, la reproduction du drapeau norvégien - au demeurant déjà présent sur la parka SKIDOO de la société NAPAPIJRI - pour la décoration d'un vêtement destiné aux sports d'hiver revêt une certaine banalité, malgré l'adjonction d'un petit écusson représentant l'Australie, et le fait de recouvrir ce drapeau norvégien d'autres drapeaux ou inscriptions (en grande partie illisibles pour la cour) ne peut conférer au blouson revendiqué l'originalité alléguée. De plus, la société NEBULUS, en invoquant une veste BEBIBA de la société NAPAPIJRI et une veste matelassée commercialisée par la société MARITIMI, qui présentent tous les deux un drapeau norvégien en partie gauche de la poitrine, recouvert pour l'un de drapeaux plus petits, le modèle MARITIMI affichant en outre une nette asymétrie (contraste entre le grand drapeau norvégien à gauche et le petit écusson à droite) alors que le modèle BEBIBA arbore d'autres drapeaux recouverts d'inscriptions dans diverses polices, justifie, quand bien même ces deux modèles de vêtements n'auraient pas date certaine, que ce type de décorations relève d'un fonds commun dans le domaine de la mode pour des vêtements de sports d'hiver.
La société ARTEXTYL soutient que l'originalité du blouson FLYER réside dans 'le fait d'avoir apposé, sur un modèle de sweat-shirt à capuche, différents éléments dans une configuration très particulière, à savoir :
- le drapeau norvégien recouvrant toute la partie supérieure gauche sur lequel ont été superposés divers éléments : des drapeaux, des petites croix alignées et une coupe de la Terre, sur la partie supérieure droite,
- un badge contenant une carte de l'Australie ainsi que le drapeau norvégien,
- au centre un large bandeau de couleur contrastante au sein de laquelle figure l'inscription « GEOGRAPHICAL NORWAY », sur deux lignes,
- à l'extrémité supérieure des poches centrales, des coutures en forme de « z » de couleur orangée,
- en bas à gauche, une inscription en écriture cursive, et un écusson carré à droite,
- au dos, différentes inscriptions et motifs, dont notamment la marque « GEOGRAPHICAL NORWAY » ainsi qu'un même écusson contenant la carte de l'Australie et le drapeau norvégien,
- la mention « ROYAL NORWAY 1953 » apposée verticalement sur la manche gauche, inscrite en écriture cursive.
(...) la combinaison de ces caractéristiques confère au sweat-shirt « FLYER » une physionomie propre traduisant un véritable parti pris esthétique reflétant la personnalité de son auteur, qui réside dans cette superposition de drapeaux et d'inscriptions, et une décoration asymétrique, donnant une caractéristique très originale au sweat-shirt FLYER'.
Cependant, les cinq blousons sweat-shirt opposés par la société NEBULUS, qu'elle présente, sans être contestée, comme étant tous des vêtements commercialisés par la société NAPAPIJRI, démontrent, même non datés, que les choix de décoration adoptés par la société ARTEXTYL ressortissent à un fonds commun dans le domaine de la mode pour des vêtements de sports d'hiver, consistant à apposer sur les vêtements des drapeaux - notamment le drapeau norvégien qui apparaît sur les cinq sweats NAPAPIJRI, comme il apparaît sur la veste SKIDOO précitée de la société NAPAPIJRI divulguée depuis 1990 -, des badges, des inscriptions, pouvant être superposés (modèle 1 et 5) et/ou apposés de façon asymétrique (modèles 1, 3 et 5). L'originalité du sweat FLYER, reflet de l'empreinte de la personnalité de son auteur, ne peut résider dans la seule disposition particulière de ces éléments décoratifs sur le blouson, laquelle, comme le souligne pertinemment la société NEBULUS, est classique, les éléments décoratifs étant placés au centre (poitrine), sur le côté et au dos du vêtement. La présence d'une capuche et de surpiqûres contrastées sur les poches, qui sont des éléments banals, ne peut conférer au vêtement l'originalité revendiquée.
Il résulte de tout ce qui précède, que les trois blousons BILLAL, AYER et FLYER ne peuvent prétendre, faute d'originalité, à la protection du droit d'auteur.
Le jugement doit donc être confirmé sur ce point, sauf à préciser que l'originalité constitue une condition de fond de la protection au titre du droit d'auteur d'une oeuvre de l'esprit et non une condition de recevabilité.
Sur les actes de contrefaçon
Le modèle BILLALn°2011 3638 étant annulé et les blousons BILLAL, AYER et FLYER n'étant pas protégeables par le droit d'auteur, seule doit être examinée l'éventuelle contrefaçon des modèles déposés FLYER n°2013 3802 et AYERn°2014 3155 de la société ARTEXTYL.
La société ARTEXTYL soutient que le sweat-shirt NAPA et la veste PORTICO de la société NEBULUS constituent les contrefaçons, respectivement, de son modèle FLYER et de son modèle AYER.
La société NEBULUS conteste toute contrefaçon, arguant que les vêtements NAPA et PORTICO qu'elle commercialise se distinguent incontestablement des modèles de la société ARTEXTYL et que le caractère contrefaisant doit s'apprécier au regard de la marge limitée de liberté laissée à l'apport créatif dans le domaine des vêtements d'hiver et en écartant les similitudes liées aux nécessités fonctionnelles de ce type de vêtements.
L'article L. 513-4 du code de la propriété intellectuelle dispose : 'Sont interdits, à défaut du consentement du propriétaire du dessin ou modèle, la fabrication, l'offre, la mise sur le marché, l'importation, l'exportation, le transbordement, l'utilisation, ou la détention à ces fins, d'un produit incorporant le dessin ou modèle', l'article L. 513-5 prévoyant que 'La protection conférée par l'enregistrement d'un dessin ou modèle s'étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l'observateur averti une impression visuelle d'ensemble différente'.
Sur la contrefaçon du modèle FLYER n°2013 3802 par le sweat-shirt NAPA
Il sera rappelé que le tribunal, faisant application de l'alinéa 2 de l'article L. 521-1 code de la propriété intellectuelle ('Les faits postérieurs au dépôt, mais antérieurs à la publication de l'enregistrement du dessin ou modèle, ne peuvent être considérés comme ayant porté atteinte aux droits qui y sont attachés'), a rejeté la demande en contrefaçon du modèle FLYER au motif que le dépôt de ce modèle, en date du 2 septembre 2013, a fait l'objet d'une demande d'ajournement et n'a été publié que le 7 (et non le 13) octobre 2016, soit postérieurement aux faits reprochés, constatés par un procès-verbal de constat d'huissier sur le site internet de la société SHOWROOMPRIVE.COM du 9 décembre 2015, sans que la société ARTEXTYL ait notifié à la société NEBULUS une copie de sa demande d'enregistrement du modèle, faculté prévue par l'alinéa 3 de l'article précité.
Toutefois, la société ARTEXTYL justifie que le vêtement NAPA de la société NEBULUS a pu être commandé sur le site internet de la société AMAZON à la date du 18 décembre 2016, soit postérieurement à la publication du dépôt, de sorte que l'existence de la contrefaçon alléguée peut être examinée.
La comparaison à laquelle la cour a procédé entre le modèle FLYER de la société ARTEXTYL et le vêtement NAPA de la société NEBULUS fait apparaître plusieurs ressemblances, autres que celles induites par des nécessités fonctionnelles (cordon de serrage autour de la capuche, fermeture éclair centrale, bas du vêtement et des manches resserrés) ou concernant des éléments banals pour le type de produit concerné (capuche, deux poches en biais) : contraste entre la couleur dominante du vêtement et celle de son bas resserré et de ses poignets ; intérieur de la capuche de la même couleur contrastante que celle du bas du vêtement et de ses poignets ; apposition d'un drapeau norvégien recouvrant toute la partie supérieure gauche, avec une superposition de minis drapeaux ; apposition sur la partie supérieure droite du vêtement d'un écusson de forme ronde ; apposition en travers de la poitrine d'une dénomination dans un cartouche rectangulaire ('GEOGRAPHICAL NORWAY' sur le modèle FLYER / 'NEBULUS' sur le vêtement NAPA) ; présence d'un écusson rectangulaire sur la partie inférieure droite du vêtement ; surpiqûre de couleur contrastante sur le bord des poches.
Ces ressemblances ne l'emportent toutefois pas sur les différences, soulignées par la société NEBULUS, qui résident dans le contenu des écussons et des inscriptions, et surtout, pour ces dernières, dans les dénominations centrales apposées sur toute la largeur du modèle et du vêtement au niveau de la poitrine - et donc très apparentes pour l'utilisateur averti qui est aussi très sensible aux marques - : 'GEOGRAPHICAL NORWAY' sur un fond sombre (sur le modèle FLYER) et 'NEBULUS' sur fond blanc (sur le vêtement NAPA).
Du fait de ces différences très évidentes et immédiatement perceptibles, le sweat-shirt NAPA ne produit pas sur l'observateur averti la même impression visuelle d'ensemble que celle dégagée par le modèle FLYER revendiqué.
La contrefaçon n'étant pas établie, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société ARTEXTYL de sa demande en contrefaçon de son modèle FLYER n°2013 3802.
Sur la contrefaçon du modèle AYERn°2014 3155 par la veste PORTICO
La comparaison à laquelle la cour a procédé entre le modèle AYER de la société ARTEXTYL et le vêtement PORTICO de la société NEBULUS fait apparaître plusieurs ressemblances, autres que celles induites par des nécessités fonctionnelles (col montant, fermeture éclair centrale, bas du vêtement et des manches resserrés) : même apposition d'un drapeau norvégien recouvrant toute la partie supérieure gauche ; même apposition sur la partie supérieure droite du vêtement d'un écusson de forme ronde ; même apposition en bas de la manche droite d'une dénomination ; même apposition en travers de la poitrine d'une dénomination dans un cartouche rectangulaire ('GEOGRAPHICAL NORWAY' sur le modèle AYER et 'CHALLENGE NEBULUS' sur la veste PORTICO) ; même apposition d'inscriptions en haut de la manche gauche (dont le contenu n'est pas visible).
Cependant, comme précédemment, ces ressemblances cèdent devant les différences dans le contenu des inscriptions, notamment dans les dénominations centrales apposées sur toute la largeur du modèle et du vêtement au niveau de la poitrine - et donc très apparentes pour l'utilisateur averti qui est aussi très sensible aux marques - : 'GEOGRAPHICAL NORWAY'sur le modèle AYER et 'CHALLENGE NEBULUS' (ce dernier terme 'NEBULUS' en surimpression et débordant du cartouche rectangulaire, ce qui le rend particulièrement visible) sur le vêtement NAPA. Les mentions sur le bas de la manche sont également différentes ('Royal Norway' sur le modèle AYER et 'Nebulus' sur le vêtement PORTICO).
Du fait de ces différences très évidentes et immédiatement perceptibles, la veste PORTICO ne produit pas sur l'observateur averti la même impression visuelle d'ensemble que celle dégagée par le modèle AYER revendiqué.
La contrefaçon n'étant pas établie, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société ARTEXTYL de sa demande en contrefaçon de son modèle FLYER n°2013 3802.
Sur les demandes en concurrence déloyale et en parasitisme
La société ARTEXTYL soutient qu'indépendamment des faits de contrefaçon, la société NEBULUS a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire à son préjudice. Elle argue que la gamme de la société NEBULUS est en concurrence directe avec les produits qu'elle commercialise, que le risque de confusion est incontestable du fait de la reprise de la quasi-totalité des caractéristiques de ses modèles, que la reproduction par la société NEBULUS de plusieurs modèles d'une même collection constitue la création d'un effet de gamme, source de risque de confusion sur l'origine des produits, cet effet de gamme étant renforcé par la reproduction, sur pas moins de sept modèles (ROLF, KARTEN, BELFORT, HAWK, FLORENZ, LATHAM, ALPIN), de la broderie constituée de deux drapeaux inversés et de diverses mentions figurant au-dessous de celle-ci appartenant au modèle BILLAL, et qui constitue une valeur économique permettant à la clientèle de rattacher ce modèle à la société ARTEXTYL ; elle fait aussi état de la reprise sur trois modèles du badge arrondi comprenant une broderie sur laquelle sont superposées des inscriptions et un drapeau norvégien appartenant aux modèles AYER et FLYER. Elle ajoute qu'en reprenant les caractéristiques des collections 'GEOGRAPHICAL NORWAY', la société NEBULUS s'est placée dans son sillage.
La société NEBULUS conteste tout acte de concurrence déloyale et parasitaire, faisant en particulier valoir que la société ARTEXTYL ne peut se constituer un monopole sur le drapeau norvégien sur le terrain de la concurrence déloyale, d'autant que ce drapeau est utilisé par de nombreux concurrents, dont la société NAPAPIJRI, que les modèles de la société appelante sont banals et qu'il ne peut exister d'effet de gamme puisque la déclinaison de plusieurs modèles de vêtements est classique en matière de vêtements de sports d'hiver.
La concurrence déloyale et le parasitisme sont pareillement fondés sur l'article 1240 du code civil mais sont caractérisés par application de critères distincts, la concurrence déloyale l'étant au regard du risque de confusion, considération étrangère au parasitisme qui requiert la circonstance selon laquelle, à titre lucratif et de façon injustifiée, une personne morale ou physique copie une valeur économique d'autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissements.
Ces deux notions doivent être appréciées au regard du principe de la liberté du commerce et de l'industrie qui implique qu'un produit qui ne fait pas l'objet d'un droit de propriété intellectuelle, puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit ou par l'existence d'une captation parasitaire, circonstances attentatoires à l'exercice paisible et loyal du commerce.
C'est à juste raison que la société ARTEXTYL reproche au jugement d'avoir écarté toute reprise de sa gamme de vêtements au motif, notamment, qu'aucun acte de contrefaçon n'avait été retenu. En effet, l'action en concurrence déloyale est ouverte à celui dont l'action en contrefaçon a été rejetée pour défaut de droits privatifs et peut être alors fondée sur les mêmes faits que ceux allégués au soutien de l'action en contrefaçon ; elle est aussi ouverte à celui dont les droits privatifs ont été reconnus mais dont l'action en contrefaçon a été rejetée faute de démonstration de l'existence d'actes de contrefaçon, dès lors qu'il invoque des faits distincts de ceux allégués au soutien de l'action en contrefaçon.
Pour les raisons qui ont été exposées supra, les vêtements commercialisés par la société NEBULUS ne peuvent être confondus avec ceux de la société ARTEXTYL dans la mesure où, malgré des ressemblances dans le choix des décorations apposées sur ces produits, tenant essentiellement à l'appartenance de ces éléments décoratifs à un fond commun dans le domaine concerné des vêtements de sports d'hiver, les dénominations et marques apposées sur les produits respectifs des parties sont très visibles et sont de nature à exclure tout doute dans l'esprit du consommateur quant à leur origine.
Comme le souligne la société NEBULUS, la société ARTEXTYL ne peut tenter de s'approprier le drapeau norvégien, au demeurant utilisé avant elle par la société NAPAPIJRI (parka SKIDOO), serait-il utilisé dans une certaine configuration (deux drapeaux croisés ou dans un badge arrondi) et assorti de mentions inscrites au-dessous ou en dedans (en partie illisibles pour la cour mais dont il n'est pas soutenu qu'elles seraient identiques à celles utilisées par la société NEBULUS), étant de plus observé que sur les vêtements NEBULUS invoqués, les drapeaux croisés ne sont pas placés en haut de la manche gauche comme sur les vêtements ARTEXTYL, mais le plus souvent sur la poitrine (modèles ROLF, KARTEN, FLORENZ, LATHAM, ALPIN).
La concurrence parasitaire n'est pas plus établie, la société ARTEXTYL, qui n'apporte aucun élément quant à ses éventuels investissements relatifs au éléments de décoration qu'elle invoque, ne pouvant arguer de la reprise par un concurrent d'éléments banals ou non appropriables ni d'un effet gamme, la déclinaison de différents modèles de vêtements (parkas, sweat-shirts, blousons...) étant tout à fait classique en matière de vêtements de sports d'hiver afin de répondre aux attentes des consommateurs.
Pour ces motifs, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société ARTEXTYL de sa demande en concurrence déloyale et parasitaire.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
La société ARTEXTYL qui succombe sera condamné aux dépens d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées.
La somme qui doit être mise à la charge de la société ARTEXTYL au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la société NEBULUS peut être équitablement fixée à 6 000 €, cette somme complétant celle allouée en première instance.
PAR CES MOTIFS ,
LA COUR,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf à préciser que la société ARTEXTYL doit être déboutée de ses demandes en contrefaçon fondées sur le droit d'auteur, et non pas déclarée irrecevable,
Condamne la société ARTEXTYL aux dépens d'appel et au paiement à la société NEBULUS de la somme de 6 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.