CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 5 mars 2021, n° 19/17254
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
M. Michaël A.
Défendeur :
S.A.S. COMPTOIR DES COTONNIERS
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Brigitte CHOKRON
Conseillers :
Laurence LEHMANN, Agnès MARCADE
Avocats :
Me Aude V.-A., Me Jean-Didier M., Me Philippe B.
Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
Signé par Mme Brigitte CHOKRON, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
Vu le jugement contradictoire rendu le 28 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :
-dit que M. A. n'établit pas être titulaire des droits d'auteur qu'il revendique au titre de la basket Slash, de son sac d'emballage et de sa semelle léopard,
-déclaré irrecevable l'action de M. A. en contrefaçon de droits d'auteur et en ses prétentions accessoires,
-débouté M. A. de sa demande de nullité pour dépôt frauduleux des dessins et modèles français n°20151225, n°20163219 et n°20165151 dont la société Comptoir des Cotonniers est titulaire, et de ses prétentions accessoires,
-condamné M. A. aux dépens dont distraction et à payer à la société Comptoir des Cotonniers la somme de 4.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Vu l'appel de ce jugement interjeté par M. Michael A. suivant déclaration d'appel remise au greffe de la cour le 6 septembre 2019.
Vu les dernières conclusions (n°3) remises au greffe et notifiées par voie électronique le 19 octobre 2020 par M. A., appelant, qui demande à la cour, au fondement des articles L. 111-1, L. 112-2, L. 131-3, L. 131-4, L. 121-1, L.122-4, L.331-1-3, L. 331-1-4, L.335-2, L.335-3, L.551-9, L.511-10 du code de la propriété intellectuelle, 32, 138 à 142 du code de procédure civile, d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
- dit que M. A. n'é'tablit pas être titulaire des droits d'auteur qu'il revendique sur la basket SLASH, de son sac d'emballage et de sa semelle léopard, déclaré irrecevable l'action de M. A. en contrefaçon de droit d'auteur et en ses prétentions qui y sont accessoires, débouté M. A. de sa demande de nullité pour dépôt frauduleux des dessins et modèles français, condamné aux dépens et a' payer a' la société Comptoir des Cotonniers la somme de 4.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Et statuant à nouveau,
- rejeter l'appel incident de la société Comptoir des Cotonniers et la débouter de ses demandes, fins et conclusions,
- déclarer M. A. titulaire exclusif des droits d'auteur sur le modèle de basket, ses dérivés, son packaging et sa semelle léopard,
- déclarer que le modèle de basket, ses dé'rivé's, son packaging et sa semelle lé'opard sont originaux,
- dire qu'en reproduisant, représentant, communiquant au public et commercialisant le modèle de basket, ses dérivés, le packaging afférent, sans autorisation, la société Comptoir des Cotonniers a porté' atteinte aux droits patrimoniaux de M. A.,
- dire qu'en ne citant pas M. A. en tant que titulaire des droits d'auteur et en désignant un tiers en ses lieu et place, la société Comptoir des Cotonniers a porté atteinte aux droits moraux de M. A.,
- déclarer que la société Comptoir des Cotonniers a déposé et enregistré les dessins et modèles français n°20151225, 20163219, 20165151 en fraude des droits de M. A.,
En conséquence,
- ordonner le transfert de la propriété des dessins et modèles français n°20151225, 20163219 et 20165151 déposés par la société Comptoir des Cotonniers à M. A.,
- ordonner l'inscription de l'arrêt au Registre national des dessins et modèles,
- ordonner à la société Comptoir des Cotonniers de cesser toute fabrication, reproduction, représentation, exploitation, communication au public du modèle de basket, de ses dérivés et de son packaging sur quelque support que ce soit et a' quelque titre que ce soit, dès la signification du jugement (sic) sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard,
- interdire à' la société Comptoir des Cotonniers de faire usage, déposer et/ou enregistrer un droit ou titre de propriété intellectuelle contenant ou imitant le modèle de basket de M. A., ses dérivés, sa semelle et/ou son packaging,
- ordonner la publication d'un extrait reprenant les termes de la décision sur le site de la société Comptoir des Cotonniers avec une traduction pour l'ensemble des noms de domaine ou sous noms de domaine ayant distribué le modèle de basket de M. A. ainsi que dans cinq (5) journaux ou magazines au choix de M. A. et aux entiers frais de la société Comptoir des Cotonniers pour un montant maximum de 2.000 euros maximum par insertion,
- juger que la société Comptoir des Cotonniers a, par ses atteintes aux droits patrimoniaux et moraux, causé des préjudices matériels, financiers et moral a' M. A.,
- condamner la société Comptoir des Cotonniers à payer à M. A. la somme de 1 (un) euro symbolique au titre du préjudice économique et 50.000 euros au titre de ses préjudices moraux,
- condamner la société Comptoir des Cotonniers a' payer à M. A. , sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 25.000 euros, sauf a' parfaire, et aux entiers dépens dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions (n°2) remises au greffe et notifiées par voie électronique le 7 octobre 2020 par la société Comptoir des Cotonniers (SA), intimée et appelante incidente, qui demande à la cour, au fondement des articles L.111-1, L. 112-2, L. 113-3, L.551-9, L.511-10 du code de la propriété intellectuelle, 32, 699, 700, 954 du code de procédure civile, de :
- dire que la cour n'est pas saisie par les conclusions de M. A. du 18 septembre 2020, par application de l'article 954 du code de procédure civile et de la jurisprudence,
-juger irrecevables et infondées les différentes demandes formulées par M. A. par les différents « dire et juger' et leurs conséquences,
A titre subsidiaire, au cas ou' la cour s'estimerait valablement saisie,
Confirmer par substitution de motifs le jugement déféré en ce qu'il a :
- jugé que M. A. n'établissait pas être titulaire des droits d'auteur qu'il revendique au titre de la basket « Slash », de son sac d'emballage et de la semelle de style léopard,
- jugé irrecevable l'action de M. A. en contrefaçon de droits d'auteur et en ses prétentions qui en sont accessoires,
- débouté M. A. de sa demande de nullité pour dépôt frauduleux des dessins et modèles francais n° 20151225, 20163219, et 20165151 dont la société Comptoir des Cotonniers est titulaire, et de ses prétentions accessoires,
- condamné M. A. à ' payer a' la société Comptoir des Cotonniers la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. A. aux dépens par application de l'article 699 du code de procédure civile,
Pour le surplus, il est demandé àla cour de compléter le jugement attaqué en statuant ainsi :
- juger que M. A. n'est titulaire d'aucun droit d'auteur sur la basket Slash laquelle est en tout état de cause dépourvue de toute originalité,
A titre encore plus subsidiaire,
- si la cour estimait que la basket Slash est protégeable au titre du droit d'auteur, juger que compte tenu des circonstances de l'espèce, il existe une cession implicite des droits d'auteur de M. A. au profit de son employeur, la société Comptoir des Cotonniers, en 2014,
Plus subsidiairement encore,
- si la cour estimait que la basket Slash est protégeable au titre du droit d'auteur et qu'il n'existe pas de cession implicite, juger que la basket Slash est une œuvre de collaboration et que M. A. ne saurait revendiquer seul des droits d'auteur et qu'en l'absence d'une action de l'ensemble des co-auteurs, son action est irrecevable par application de l'article L.113-3 du code de la propriété intellectuelle,
En tout état de cause,
- juger recevable et bien fondée la société Comptoir des Cotonniers en son appel incident et condamner M. A. àune somme de 15.000 euros àtitre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- condamner M. A. à payer à la société Comptoir des Cotonniers la somme de 25.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile devant la cour ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 22 octobre 2020.
SUR CE, LA COUR :
Il est expressément référé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures, précédemment visées, des parties.
Il suffit de rappeler que la société Créations Nelson, devenue Comptoir des Cotonniers, spécialisée dans le prêt-à-porter et les accessoires de mode, a engagé suivant contrat de travail du 15 mai 2013 M. Michael A. en qualité de styliste rattaché à la direction du style pour les accessoires (maroquinerie, chaussures, divers),moyennant une rémunération annuelle forfaitaire brute de 30.000 euros outre un bonus annuel comme précisé au contrat.
M. A., qui soutient être depuis son recrutement le seul styliste pour les accessoires, revendique la création, en septembre 2014, d'une paire de baskets vintage, évoquant la chaussure de tennis des années 80 qu'il indique avoir réinterprétée en la dé'structurant totalement pour parvenir à une forme innovante et originale. Il ajoute avoir créé des variantes de cette chaussure, comportant toutes une semelle d'inspiration léopard, et avoir conçu, pour l'emballage de ces baskets, une boite/sac sur laquelle est représenté un croquis du modèle et d'où sortent des lacets. Il précise enfin que sa création, successivement dénommée, Virgule, Vorgule, Tirgule puis Slash, a été présentée dans la collection Printemps-Eté 2015 de la société Comptoir des Cotonniers et mise en production à la fin du mois de mars 2015.
M. A. l'ayant mise en demeure le 22 mars 2017 de lui reconnaître ses droits d'auteur, la société Comptoir des Cotonniers s'y est refusée, faisant valoir que la qualité d'auteur de la basket Slash appartient à Mme Anne -Valérie H., qui l'a créée alors qu'elle occupait le poste de directrice du style au sein de la société.
Dans ce contexte, M. A. a fait assigner, suivant acte d'huissier de justice du 9 août 2017, la société Comptoir des Cotonniers devant le tribunal de grande instance de Paris pour violation des droits patrimoniaux et moraux attachés à sa qualité d'auteur de la paire de basket Slash, sa semelle léopard, sa boîte/sac d'emballage.
Le tribunal l'ayant déclaré irrecevable à agir au titre du droit d'auteur faute de justifier de la création de la basket Slash, de son sac d'emballage et de sa semelle léopard, M. A. a relevé appel de cette décision et maintient devant la cour toutes ses prétentions telles que soutenues en première instance.
La société intimée, invoquant les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, fait valoir in limine litis que les conclusions de l'appelant du 18 septembre 2020 ne saisissent pas la cour, se bornant à énoncer, en leur dispositif, des 'dire et juger' et non pas des prétentions sur lesquelles la cour doit statuer.
L'article 954 du code de procédure civile dispose que 'la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées'. Ce même article impose aux parties de récapituler leurs prétentions dans le dispositif de leurs conclusions et prévoit que 'la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif'.
En la cause, les dernières conclusions de l'appelant sont celles, ci-dessus visées, remises au greffe et notifiées par voie électronique le 19 octobre 2020. Elles présentent un dispositif qui est rédigé dans les mêmes termes que celui énoncé dans les conclusions précédemment notifiées par l'appelant le 18 septembre 2020.
Au sens de l'article 4 du code de procédure civile une prétention définit une demande en justice tendant à voir trancher un point litigieux.
Par voie de conséquence, la société intimée observe à juste titre que les 'dire et juger' énoncés au dispositif des conclusions de l'appelant ne constituent pas des prétentions, mais en réalité des moyens qui ont leur place non pas dans le dispositif mais dans le corps des écritures, plus précisément dans la partie consacrée aux chefs de jugement critiqués ainsi qu'à la discussion des prétentions et des moyens qui soutiennent ces prétentions.
Cependant, si le dispositif critiqué comprend des demandes de 'dire et juger', il formule aussi des demandes tendant à voir la cour 'ordonner', 'interdire', 'condamner' qui constituent des prétentions sur lesquelles il doit être statué.
Il s'ensuit que c'est à tort que la société intimée soutient que les conclusions de l'appelant ne saisiraient la cour d'aucune prétention.
En conséquence, la cour répondra aux 'dire et juger' mais seulement dans la mesure où ils viennent au soutien des prétentions formulées par l'appelant dans le dispositif de ses conclusions et, en tout état de cause, non pas dans le dispositif de son arrêt, mais dans ses motifs.
Sur la titularité des droits d'auteur,
M. A. maintient devant la cour qu'il est l'auteur de la basket 'Slash', sa semelle, sa boîte/sac d'emballage, et conteste que cette qualité appartienne à Mme H. ainsi qu'il lui est opposé par la société intimée. Il reprend dans ses écritures d'appel l'ensemble des moyens de fait et de droit développés devant le tribunal qui les a amplement et précisément exposés dans son jugement auquel il est expressément renvoyé.
Ceci posé, il importe de rappeler que le droit d'auteur, revendiqué en la cause par M. A., est gouverné par le principe de la protection d'une oeuvre, sans formalité, du seul fait de la création d'une forme originale . Il incombe toutefois, à celui qui entend se prévaloir du droit d'auteur et des attributs qui lui sont attachés, de rapporter la preuve d'une création déterminée à une date certaine et de caractériser l'originalité de cette création.
Il doit être à cet égard précisé que l'existence d'un contrat de travail n'est pas exclusive de la protection par le droit d'auteur et le salarié est investi des droits de propriété incorporelle institués au bénéfice de l'auteur pour peu qu'il ait fait oeuvre de création en conservant sa liberté et sans que les choix esthétiques opérés ne lui aient été imposés par l'employeur.
M. A., qui indique être diplômé de l'Ecole supérieure des arts techniques de la mode, est salarié de la société intimée en vertu d'un contrat de travail du 15 mai 2013 aux termes duquel il se voit attribuer, en qualité de 'styliste accessoires (maroquinerie, chaussures, divers)', 'rattaché à la directrice du style' , la mission de 'rechercher les thèmes et les idées pour la collection ; concevoir , dessiner et développer les lignes de sacs, de souliers ; nourrir une vision du style Comptoir des Cotonniers construite en équipe ; (...) valider la mise au point finale des prototypes pour le lancement de fabrication chez les fabricants, être un élément fort et une source d'inspiration pour l'équipe créative'.
S'il prétend être depuis son recrutement ' le seul styliste de la société en charge des accessoires', force est de constater qu'une telle allégation n'est pas corroborée par son contrat de travail qui le rattache à une 'directrice du style', laquelle ne saurait être dépourvue de tout rôle et de toute compétence en matière de style. Il est constant que les fonctions de directrice du style étaient, à la naissance du litige, occupées par Mme Anne-Valérie H. en vertu d'un contrat de service signé le 2 juin 2014 entre la société AVH représentée par Mme Anne-Valérie H. et la société Créations Nelson devenue Comptoir des Cotonniers. Ce contrat confie à Mme H. 'la responsabilité stylistique pour le prêt-à-porter et les accessoires', 'la responsabilité du management de l'équipe de style', 'la responsabilité de la sélection des croquis proposés en lancement'.
Il s'infère de ces éléments, que si M. A. est chargé d'insuffler une 'inspiration', de 'nourrir une vision' , de 'concevoir, dessiner et développer les lignes de sacs, de souliers', c'est, ainsi qu'il est précisé dans son contrat de travail, au sein d'une 'équipe créative' appelée à 'construire' le style Comptoir des Cotonniers, et sous la direction et le contrôle de la 'directrice du style', à laquelle 'il est rattaché' et qui assume la responsabilité du management de l'équipe de style ainsi que la responsabilité stylistique pour le prêt-à-porter et les accessoires.
L'attestation de Mme H. confirme à cet égard que 'cela se passe toujours ainsi dans l'industrie de la mode: le directeur artistique est là pour impulser les collections avec son ADN et la mise en valeur de son style, les équipes de désigners sont là pour exécuter les modèles dans le respect du style du DA (directeur artistique) et de ses instructions créatives'.
Concernant la basket Slash en particulier, Mme H. précise dans son attestation 'il y a eu pour cette basket des échanges verbaux entre Michael et moi, des réunions de travail, pour ensuite passer à la fabrication du prototype. Une fois que j'ai donné mon feu vert pour lancer cette fabrication, les équipes de production se sont mises à travailler sur le patronage de ce qui allait devenir la Slash', ajoutant pour conclure, 'je peux dire en toute conscience que Michael A. a dessiné cette basket sous ma direction artistique et mes indications propres, reflet de mon travail depuis plus de 10 années. Si je n'avais pas occupé ces fonctions là, il me semble en toute honnêteté que la Slash n'aurait sans doute pas existé'.
Il ressort de cette attestation circonstanciée que si M. A. a dessiné le croquis de la basket, ce qui n'est pas contesté, c'est sous le contrôle à tout le moins la supervision de Mme H., en charge de définir et de mettre en oeuvre la ligne stylistique pour le prêt-à-porter et les accessoires et, à ce titre, de donner au styliste une direction dans le cadre d'échanges verbaux et de réunions de travail.
Un tel processus de création est confirmé par Mme R. qui atteste que 'le travail s'organise en deux étapes : d'abord un premier rendez-vous de partage d'inspirations (idées, matières, formes) entre Anne-Valérie et le styliste ; puis un second rendez-vous où le styliste présentait des croquis détaillés qu'Anne-Valérie validait ou non, en vue du lancement en résine'.
Dans le même sens, Mme V., dans une attestation produite par M. A., indique que celui-ci a présenté , pour la basket Slash, des 'propositions dessinées' puis a travaillé sur les détails de la chaussure 'une fois la forme globale validée'.
Encore dans des attestations produites par M. A., Mme A. et Mme B. précisent que 'plusieurs réunions importantes ont eu lieu', que 'M. A. a d'ailleurs proposé plusieurs versions de la basket Slash', que le modèle retenu en dernier lieu par Mme H. a 'ensuite été montré au service juridique afin que celui-ci l'examine afin de le valider'.
Il est à cet égard reconnu par M. A. et établi par sa pièce 7d) qu'il a été demandé par l'employeur, dans un courriel destiné tant à lui-même qu'à Mme H., après consultation du service juridique, de modifier le haut du contrefort de la chaussure.
Le processus de création de la boîte/sac paraît être le même que celui suivi pour l'élaboration de la basket ainsi que le montre le courriel produit par M. A. en pièce 7-e, qu'il a adressé à Mme H. dans les termes suivants : 'J'ai absolument besoin d'avoir votre ok au sujet de la boîte. Pour infos, Marianne and co ont souhaité revoir les couleurs du lacet etc... elles se sont finalement mises d'accord sur la version ci-jointe. L'intérieur sera en navy. Etes-vous également ok ou préférez-vous rester sur la version toute bordeaux' Merci'.
Il en ressort que l'autonomie créatrice de M. A. est restreinte et que le styliste en réfère, pour obtenir leur approbation, non seulement à Mme H. mais aussi, en amont, à l'ensemble de l'équipe de style ( Marianne and co).
La procédure n'apporte en revanche aucun élément d'information concernant la semelle léopard, si ce n'est, les dessins produits par M. A. ( pièce 4- a à 4- d), qui ne sont ni signés, ni datés. Il n'est en rien permis, dans ces conditions, de lui en attribuer la paternité.
Il découle en définitive de l'ensemble des observations qui précèdent que M. A., qui travaillait en collaboration avec l'équipe de style de la société et sous la subordination de sa directrice de style, n'établit pas la titularité des droits d'auteur sur la basket Slash, la boîte/sac d'emballage, et la semelle léopard créées pour la collection Comptoir des Cotonniers de printemps-été 2015.
A cet égard , force est de relever que la basket Slash ayant été commercialisée en France à compter du mois d'avril 2015, a été présentée dans la presse comme une création de Mme H. dotée, avec un laçage sur le côté de la chaussure, du style décalé et 'twisté' affectionné par cette styliste, sans que M. A. n'invoque, avant février 2017, une 'usurpation' de sa qualité d'auteur.
M. A. n'a pas davantage soulevé de réclamation à l'occasion de la demande formée par son employeur auprès de l'Institut national de la propriété industrielle, dont il a été parfaitement informé et à laquelle il a été associé, ainsi qu'il résulte des courriels qui lui ont été adressés en décembre 2014 ( sa pièce 7-g), de dépôt de la basket pour bénéficier d'une protection au titre de dessins et modèles.
Il suit de cette dernière circonstance, ajoutée à l'ensemble des observations qui précèdent, que M. A. est mal fondé à voir déclarer que les dépôts de dessins et modèles effectués au nom de son employeur, le 9 mars 2015 pour le modèle de chaussure 'Virgule', les 17 juin 2016 et 10 octobre 2016 pour de nombreux modèles de baskets basses et montantes, l'ont été en fraude de ses droits et se trouvent, par voie de conséquence, affectés de nullité.
Le jugement est dès lors confirmé en ses dispositions déclarant M. A. irrecevable en son action en contrefaçon de droits d'auteur et en ses prétentions accessoires et le déboutant de sa demande de nullité pour dépôt frauduleux des dessins et modèles français n°20151225, n°20163219 et n°20165151 dont la société Comptoir des Cotonniers est titulaire ainsi que de ses prétentions accessoires.
Sur les autres demandes,
La société Comptoir des Cotonniers maintient sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive. Or, force est de rappeler que le droit d'ester en justice, qui comprend le droit d'interjeter appel, ne dégénère en abus susceptible d'ouvrir droit à l'allocation de dommages-intérêts que s'il est exercé par volonté de nuire ou par légèreté blâmable équipollente au dol, tous griefs qui ne sont pas établis à la charge de M. A. qui a pu, sans mauvaise foi, se méprendre sur l'étendue de ses droits. La demande de dommages-intérêts doit être en conséquence rejetée comme mal fondée.
Le sens de l'arrêt conduit à confirmer les dispositions du jugement condamnant M. A. à régler à la société Comptoir des Cotonniers la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens.
L'équité ne commande pas de prononcer à l'encontre de M. A. une condamnation complémentaire au titre des frais irrépétibles.
En revanche, M. A., qui succombe à l'appel, en supportera les dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,
Ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à condamnation complémentaire au titre des frais irrépétibles,
Condamne M. A. aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile