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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 20 mars 2013, n° 11/14436

PARIS

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rajbaut

Conseillers :

Mme Chokron, Mme Gaber

Avocats :

Me Belfayol Broquet, Me Galichet, Me Champagner Katz, Me Grappotte-Benetreau, Me Perez

TGI PARIS, du 10 Juin 2011, n° 10/01437

10 juin 2011

ARRET :

- contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Benjamin RAJBAUT, président, et par Mme Marie-Claude HOUDIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

Vu le jugement rendu contradictoirement le 10 juin 2011 par le tribunal de grande instance de Paris.

Vu l'appel interjeté le 29 juillet 2011 par la SA DEVEAUX.

Vu les dernières conclusions de la SA DEVEAUX, signifiées le 04 décembre 2012.

Vu les dernières conclusions de la société VIJVERMAN, signifiées le 23 décembre 2011.

Vu les dernières conclusions des sociétés C&A France et C&A BUYING GmbH & Co KG, signifiées le 28 novembre 2012.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 15 janvier 2013.

M O T I F S D E L ' A R R Ê T

Considérant que, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties.

Considérant qu'il suffit de rappeler que la SA DEVEAUX a pour activité le tissage mécanique de cotonnade et revendique des droits d'auteur sur un dessin de tissu référencé PZ 8410 4959, créé par sa salariée, Mme Isabelle CORNU-MASSON le 16 octobre 2002 et qui atteste le 17 mars 2008 avoir cédé l'intégralité de ses droits patrimoniaux à la SA DEVEAUX.

Que constatant au mois de février 2007 que la société C&A France proposait à la vente dans son magasin situé [...], un pantalon pour fille référencé 334/91/35285/313, confectionné dans un tissu reproduisant selon elle les caractéristiques du dessin référencé PZ 8410 4959, la SA DEVEAUX a acquis le 27 février 2007 un exemplaire de ce pantalon et, autorisée par ordonnance présidentielle du 28 février 2007, a fait procéder le 02 mars 2007 à une saisie-contrefaçon au sein du service comptabilité de la société C&A France dont il ressort notamment que ces pantalons, fabriqués au Bengladesh, ont été acquis par la société C&A France auprès de la société de droit allemand C&A BUYING GmbH & Co KG, laquelle se fournissait auprès de la société de droit belge VIJVERMAN.

Qu'à la suite de quoi la SA DEVEAUX a fait assigner le 02 avril 2007 les sociétés C&A France, C&A BUYING GmbH & Co KG et VIJVERMAN devant le tribunal de commerce de Paris en contrefaçon.

Que le 04 décembre 2008 le tribunal de commerce de Paris a désigné un médiateur et suite à l'échec de la médiation, a, par jugement du 22 octobre 2009, fait droit à l'exception d'incompétence au profit du tribunal de grande instance de Paris, soulevée par les défendeurs.

Considérant que le jugement entrepris a, en substance déclaré la SA DEVEAUX irrecevable à agir au titre du droit d'auteur pour le tissu référencé PZ 8410 4959 au motif que celle-ci échouait à démontrer une originalité du dessin revendiqué, qui le rendrait éligible au titre du droit d'auteur.

I : SUR LA PROTECTION DU DESSIN REVENDIQUÉ AU TITRE DU DROIT D'AUTEUR :

Considérant que la SA DEVEAUX revendique la titularité de droits d'auteur sur le dessin faisant l'objet du tissu référencé PZ 8410 4959 dont l'originalité réside dans la combinaison entre un dessin à carreaux composé de séries de deux groupes de lignes verticales et horizontales de différentes largeurs et différentes nuances de dessins dits « camouflage », laquelle procède de choix arbitraires et d'agencements reflétant la personnalité de leur auteur et son effort créatif.

Considérant que les sociétés C&A France et C&A BUYING GmbH & Co KG répliquent que le dessin revendiqué n'est que le résultat de la superposition de deux motifs appartenant au domaine public, à savoir le motif dit « Prince de Galles » et le motif dit « camouflage », sans qu'ils aient été retravaillés de façon particulière.

Considérant qu'elles font également valoir que cette 'idée' de superposer un imprimé classique à un imprimé plus moderne a déjà été développée par les créateurs de mode et que plusieurs marques de prêt-à-porter commercialisaient déjà des pantalons et bermudas confectionnés dans des tissus similaires.

Considérant qu'elles en concluent à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la SA DEVEAUX irrecevable à agir en l'absence de toute originalité du dessin revendiqué.

Considérant que la société VIJVERMAN fait également valoir l'absence d'originalité des quadrillages, s'agissant du motif 'Prince de Galles' appartenant au domaine public ainsi que du camouflage, utilisé de longue date dans l'armée et que le dessin revendiqué n'est qu'une association banale d'éléments du domaine public, concluant à la confirmation du jugement entrepris.

Considérant ceci exposé, qu'en l'absence de revendication de la part des auteurs, fussent-ils identifiés, l'exploitation de l'oeuvre par une personne morale sous son nom fait présumer, à l'égard des tiers recherchés pour contrefaçon, que cette personne morale est titulaire sur l'oeuvre, qu'elle soit collective ou non, du droit de propriété incorporelle de l'auteur.

Considérant que la SA DEVEAUX justifie commercialiser le dessin revendiqué référencé PZ 8410 4959, sous la dénomination « Nuage imprimé » (ainsi que cela ressort des procès-verbaux d'inventaire par huissier de justice les 27 janvier et 17 février 2003) depuis l'année 2002 en versant aux débats les factures de commercialisation de ce modèle remontant, pour les plus anciennes, au 31 décembre 2002, leur authenticité n'étant au demeurant pas contestée.

Considérant que les intimées ne justifient pas d'une commercialisation par un tiers qui serait antérieure ; qu'en particulier le fait que la société VIJVERMAN aurait acheté à New-York le 05 avril 2006 un pantalon qui aurait servi, par la suite, de source d'inspiration pour le pantalon argué de contrefaçon, n'est pas pertinent, cette date étant largement postérieure au début de commercialisation du modèle de dessin revendiqué.

Considérant que la SA DEVEAUX peut donc revendiquer la présomption de titularité des droits d'auteur sur le dessin revendiqué depuis le 31 décembre 2002.

Considérant que la SA DEVEAUX revendique les caractéristiques suivantes sur ce modèle de dessin :

- des carreaux constitués de séries de deux groupes de lignes verticales et horizontales de différentes largeurs, le premier groupe étant composé de neuf lignes et le second groupe de 22 lignes, la première séquence étant plus foncée en verticale,

- l'apposition en surimpression sur ces carreaux de motifs appartenant au genre des dessins dits « camouflage » composés de plusieurs taches superposées, plus ou moins étendues dans des tons différents, les plus foncés étant alignés verticalement.

Considérant que l'originalité doit être appréciée en fonction de l'aspect d'ensemble produit par l'agencement des différents éléments propres au modèle en cause et non de l'examen de chacun d'eux pris individuellement.

Considérant que si le motif se composant de carreaux formés par des rayures verticales et horizontales peut s'apparenter au genre de tissu dit « Prince de Galles », il n'en constitue cependant pas la reproduction exacte dans la mesure où, selon le dictionnaire du textile produit aux débats, le « Prince de Galles » est un motif composé de « carreaux faits de jeux de lignes horizontales et verticales qui se croisent à des intervalles réguliers dans des nuances voisines du blanc au gris foncé sur un fond gris clair, coupé d'un mince filet rouge ou bleu » alors qu'en l'espèce l'intervalle entre les lignes n'est pas régulier et les nuances sont de couleur kaki.

Considérant d'autre part que le motif 'camouflage' présente des formes de taches particulières faisant penser pour certaines, à des coraux et pour d'autres, à des feuilles qui se différencient notablement par leur aspect, leur disposition et leurs couleurs des exemples de motifs 'camouflage' produits par les sociétés intimées (bermudas de marques Fabius, BLZJEANS, Erozion, Woodland, Kiabi, modèles de tissus de marque Greyhound).

Considérant enfin que la combinaison de ces deux motifs a priori discordants (un motif élégant de carreaux aux lignes de largeurs différentes sur un fond 'camouflage' a priori destiné à des tenues militaires) et leur agencement donne au dessin un caractère singulier relevant d'un choix esthétique particulier et original, l'ensemble de ces caractéristiques portant l'empreinte de la personnalité de son auteur.

Considérant en effet que les quelques modèles similaires de pantalons ou de bermudas réalisés avec un tissu imprimé « Prince de Galles » sur motif camouflage produits aux débats par les sociétés intimées, outre qu'ils ne présentent pas les mêmes motifs de quadrillage ou de camouflage, sont tous postérieurs à la commercialisation du dessin de tissu revendiqué par la SA DEVEAUX (modèles RWD en avril 2006, Billabong au printemps-été 2007) et ne sauraient donc détruire l'originalité du dessin revendiqué, conçu et commercialisé dès 2002.

Considérant dès lors que le jugement entrepris sera infirmé et que, statuant à nouveau, il sera jugé que le dessin référencé PZ 8410 4959 est original et protégeable par les dispositions des livres I et III du code de la propriété intellectuelle.

II : SUR LA CONTREFAÇON :

Considérant que la SA DEVEAUX fait valoir que le pantalon incriminé reprend les caractéristiques originales du dessin revendiqué et que la bonne foi est inopérante en matière de contrefaçon.

Considérant qu'elle indique que les trois sociétés intimées ont commis des actes de contrefaçon, la société VIJVERMAN ayant fourni la société C&A BUYING GmbH & Co KG, laquelle a fait fabriquer ou a acquis, et exporté les produits en France et la société C&A France ayant commercialisé en France les pantalons confectionnés dans un tissu au dessin contrefaisant.

Considérant que les sociétés C&A France et C&A BUYING GmbH & Co KG d'une part et la société VIJVERMAN d'autre part répliquent que les motifs du camouflage ne sont pas reproduits à l'identique sur le produit incriminé, les éventuelles ressemblances n'étant que le fruit de rencontres purement fortuites ou de réminiscences résultant d'une source d'inspiration commune ; la société VIJVERMAN arguant également de sa bonne foi.

Considérant que le modèle de pantalon pour fille contesté, dont un exemplaire a été acquis le 27 février 2007 par la SA DEVEAUX, présente un dessin à carreaux composé de lignes verticales et horizontales de différentes largeurs et sur lequel est apposé en surimpression un dessin de camouflage ; que la reprise de ces caractéristiques qui ne saurait résulter du simple hasard comme le soutiennent les sociétés intimées, constitue une contrefaçon des droits d'auteur dont la SA DEVEAUX est titulaire, étant rappelé qu'en matière de contrefaçon devant les juridictions civiles, la bonne foi est inopérante.

Considérant en conséquence qu'il sera jugé que la société VIJVERMAN a commis des actes de contrefaçon en fabriquant et/ou en faisant fabriquer, en exportant et en commercialisant un modèle de pantalon confectionné dans un tissu reproduisant les caractéristiques du dessin revendiqué, référencé PZ 8410 4959.

Considérant qu'il sera également jugé que les sociétés C&A France et C&A BUYING GmbH & Co KG ont commis des actes de contrefaçon en important et en commercialisant en France ce modèle de pantalon contrefaisant.

III : SUR LES MESURES RÉPARATRICES :

Considérant que la SA DEVEAUX indique que la masse contrefaisante est d'au moins 477 exemplaires et réclame la somme de 1.511,73 € en réparation de son préjudice commercial et celle de 12.060 € au titre des bénéfices indûment réalisés par les sociétés intimées.

Considérant qu'elle précise les coûts de création engagés par elle ainsi que ses efforts financiers pour promouvoir sa créativité, les actes de contrefaçon ayant nécessairement diminué la portée et l'intérêt de ces investissements, et réclame à ce titre la somme de 20.000 € de dommages et intérêts.

Considérant qu'elle fait également voir l'atteinte portée à son image de marque à l'intérieur du marché professionnel du textile et réclame à ce titre la somme de 40.000 € de dommages et intérêts.

Considérant qu'elle soutient encore que les actes de contrefaçon ont entraîné une banalisation du dessin contrefait et réclame à ce titre la somme de 40.000 € de dommages et intérêts.

Considérant qu'elle présente enfin des demandes d'interdiction de poursuite des actes de contrefaçon sous astreinte définitive de 1.000 € par infraction constatée et par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir ainsi que la destruction de l'ensemble des produits litigieux par huissier et qu'il soit ordonné à la société C&A France de faire établir par huissier un décompte de son stock de pantalons référencés 334/91/35285/313.

Considérant que les sociétés C&A France et C&A BUYING GmbH & Co KG répliquent que ces demandes sont injustifiées dans la mesure où elles ne sont corroborées par aucune pièce probante et que la SA DEVEAUX poursuit manifestement un but spéculatif en souhaitant tirer de la procédure un gain pécuniaire injustifié, se référant à un litige similaire engagé en Belgique où la SA DEVEAUX présentait des demandes six fois moins élevées.

Considérant qu'elles font valoir que sur 233 pantalons mis en vente, 85 seulement ont été vendus entre le 05 janvier et le 02 mars 2007, date à laquelle il a été procédé au retrait des pantalons invendus et que le manque à gagner de la SA DEVEAUX ne saurait excéder 365,55 € ; que les investissements allégués par la SA DEVEAUX portent sur l'intégralité des dessins de tissus figurant dans ses collections, l'investissement moyen par dessin étant de l'ordre de 430 € ; que l'atteinte à l'image de marque de la SA DEVEAUX et la dévalorisation du dessin revendiqués ne sont pas établies.

Considérant qu'elles s'opposent encore aux mesures de publications dont la nécessité doit s'apprécier conformément au principe de proportionnalité, eu égard au très faible nombre d'articles en cause et à l'ancienneté des faits, ainsi qu'aux demandes d'interdiction et de destruction.

Considérant qu'en tout état de cause elles s'opposent à une condamnation solidaire dans la mesure où elles n'ont pas agi de façon intentionnelle et la société C&A BUYING GmbH & Co KG demande à être garantie par la société VIJVERMAN conformément aux termes des conditions générales d'achat.

Considérant que la société VIJVERMAN fait valoir pour sa part que les dispositions de l'article L 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle ne sont pas applicables aux faits survenus antérieurement à son adoption du fait de la loi du 29 octobre 2007 et que la SA DEVEAUX ne justifie pas de son manque à gagner ni de l'atteinte à ses investissements et à son image.

Considérant qu'elle s'oppose également aux demandes de publication judiciaire eu égard au faible nombre de pantalons vendus et à sa bonne foi.

Considérant ceci exposé, qu'en ce qui concerne l'application à l'espèce des dispositions de l'article L 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle pour évaluer le préjudice subi par la SA DEVEAUX du fait des actes de contrefaçon, il convient de rappeler que si le jugement est déclaratif quant au principe du droit à réparation (la loi applicable à ce titre étant celle en vigueur au jour du fait dommageable), en revanche il est attributif quant au quantum, les modalités d'évaluation du dommage relevant de la loi en vigueur au jour où le juge statue.

Considérant dès lors que le préjudice de la SA DEVEAUX sera évalué selon les dispositions de l'article L 331-1-3 en prenant en considération les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices réalisés par les auteurs de l'atteinte aux droits et le préjudice moral causé au titulaire des droits du fait de l'atteinte.

L'atteinte aux investissements :

Considérant que la SA DEVEAUX justifie par des pièces certifiées conformes par son cabinet d'expertise comptable que les coûts de création engagés par elle en 2002, année de création du dessin revendiqué, se montent à 1.082.999 €, étant précisé que son bureau de style diffuse environ 2.000 nouveaux dessins par an, soit une moyenne de 541,50 € par dessin.

Considérant qu'elle justifie également de ses coûts de promotion entre 2002 et 2007 s'élevant en moyenne à 1.112.509 € par an, soit 556,25 € par an et par dessin.

Considérant qu'il ne s'agit cependant que de moyennes alors que seule une certaine proportion des dessins créés est plébiscitée par la clientèle et que compte tenu du succès particulier rencontré par le dessin revendiqué, l'atteinte aux investissements exposés pour ce dessin est supérieure à la simple moyenne des chiffres relevés.

Considérant qu'en l'état de ces éléments la cour évalue le préjudice subi au titre de l'atteinte aux investissements exposés à la somme globale de 10.000 €.

L'atteinte à l'image de marque de la SA DEVEAUX :

Considérant que la SA DEVEAUX justifie par les pièces produites aux débats être l'un des leaders en France du marché du textile, ses collections étant exposées dans divers salons professionnels internationaux.

Considérant qu'elle justifie également, par la production des factures correspondantes, de la commercialisation régulière depuis décembre 2002 du dessin revendiqué.

Considérant que la commercialisation à bas prix de produits confectionnés dans un tissu reproduisant son dessin référencé PZ 8410 4959 porte atteinte, dans le public professionnel du textile, à l'image de marque de la SA DEVEAUX, en laissant notamment croire à un manque de créativité et d'originalité de son dessin ; qu'il s'ensuit une désaffection de la clientèle pour ce type de produit.

Considérant qu'en l'état de ces éléments la cour évalue le préjudice subi à ce titre à la somme de 40.000 €.

La dévalorisation du dessin référencé PZ 8410 4959 :

Considérant que la demande indemnitaire au titre de la dévalorisation du dessin revendiqué est fondée sur la désaffection de la clientèle pour ce type de produit du fait de la banalisation du dessin.

Mais considérant que ce préjudice est déjà réparé au titre de l'atteinte à l'image de marque de la SA DEVEAUX, les arguments avancés pour justifier de ces deux postes de préjudices étant exactement les mêmes ('Les clients de la société DEVEAUX ne peuvent croire qu'au manque de créativité et d'originalité de ses produits' d'une part et 'une banalisation du dessin et une dilution de la créativité qui amènent nécessairement les clients à croire en l'absence de créativité de la société DEVEAUX' d'autre part), qu'en conséquence la SA DEVEAUX sera déboutée de ce chef de demande.

Le manque à gagner de la SA DEVEAUX et les bénéfices indûment réalisés :

Considérant que selon la facture n° 2007 0195 la société VIJVERMAN a vendu à la société C&A BUYING GmbH & Co KG 252 exemplaires du pantalon contrefaisant au prix unitaire de 8,25 € ; que ces pantalons ont été vendu en France par la société C&A France au prix unitaire de 24,99 € TTC (soit 20,89 € HT).

Considérant que si la société de droit allemand C&A BUYING GmbH & Co KG a passé commande auprès de la société VIJVERMAN de 225 autres exemplaires de ce pantalon, il apparaît que ceux-ci n'ont jamais été vendus en France par la société C&A France ; qu'en conséquence la masse contrefaisante est de 252 pantalons.

Considérant que la SA DEVEAUX justifie réaliser une marge de 22,67 % sur la vente de son tissu revendiqué, que deux mètres de tissu sont nécessaires à la confection d'un pantalon et que sur la base de 6,99 € au mètre pour 252 exemplaires, le bénéfice manqué peut être évalué à la somme de 798,66 €

Considérant d'autre part que selon les pièces comptables versées aux débats, 99 exemplaires contrefaisants ont été mis en dépôt et les 153 autres ont été expédiés dans sept magasins de la société C&A France à Paris, Lyon et Strasbourg ; que 85 exemplaires de ce modèle de pantalon ont été effectivement vendus entre leur date de mise en vente du 05 janvier 2007 et la date de leur retrait de la vente le 02 mars 2007 après la saisie-contrefaçon.

Considérant que sur la base d'une marge de 12,64 € par pantalon vendu, le bénéfice réalisé par les sociétés C&A France et C&A BUYING GmbH & Co KG sur le nombre de pantalons effectivement vendus peut être évalué à la somme de 1.074,40 €.

Considérant qu'en l'état de ces constatations la cour évalue le préjudice subi au titre du manque à gagner et des bénéfices indûment réalisés à la somme globale de 1.873,06 €.

Considérant que la condamnation solidaire des trois sociétés intimées est justifiée par le fait qu'elles sont toutes trois intervenues collectivement dans la réalisation des actes de contrefaçon à l'encontre de la SA DEVEAUX.

Considérant en conséquence que les sociétés VIJVERMAN, C&A France et C&A BUYING GmbH & Co KG seront condamnées in solidum à payer à la SA DEVEAUX à titre de dommages et intérêts les sommes de 10.000 € en réparation de l'atteinte à ses investissements, de 40.000 € en réparation de l'atteinte à son image de marque et de 1.873,06 € en réparation du manque à gagner et des bénéfices indûment réalisés ; la SA DEVEAUX étant déboutée du surplus de ses demandes en dommages et intérêts.

Considérant que les conditions générales d'achat de la société C&A BUYING GmbH & Co KG, acceptées par la société VIJVERMAN, stipulent que cette dernière 'garantit que les produits fournis n'enfreignent en aucune façon les droits des tiers, notamment en matière de (...) droit de la personnalité (...), les droits d'auteur' et qu'elle indemnisera sa cliente 'contre toute réclamation de tiers résultant de l'utilisation, de la fabrication, de la vente ultérieure de produits livrés, ou de droits accordés à notre société, y compris les frais résultant de toute action judiciaire'.

Considérant que la société VIJVERMAN ne conteste pas sa garantie, qu'en conséquence elle sera condamnée à garantir la société C&A BUYING GmbH & Co KF de toute condamnation prononcée à son encontre dans le cadre du présent litige, y compris au titre des frais irrépétibles et des dépens.

Considérant que dans la mesure où il apparaît que les actes de contrefaçon ont cessé dès le 02 mars 2007, il n'apparaît pas nécessaire de prononcer une mesure d'interdiction sous astreinte de la poursuite des actes contrefaisants, ni d'ordonner l'établissement du stock de pantalons contrefaisants ainsi que la destruction de l'ensemble des produits litigieux, la SA DEVEAUX étant déboutée de ses demandes à ce titre.

IV : SUR LES AUTRES DEMANDES :

Considérant que la SA DEVEAUX demande à titre de réparation complémentaire la publication de l'arrêt à intervenir dans dix journaux ou publications professionnels (y compris électroniques) à son choix et aux frais avancés des sociétés intimées, sans que le coût de chaque insertion puisse excéder la somme de 8.000 € HT, ainsi que sur la page d'accueil du site Internet <c-et-a.fr> pendant une durée d'un mois, sous astreinte définitive de 500 € par jour de retard.

Mais considérant qu'eu égard au faible nombre de produits contrefaisants mis dans le commerce et effectivement vendus et à l'ancienneté des faits, il n'apparaît pas approprié de prononcer une mesure de publication judiciaire, la SA DEVEAUX étant déboutée de ses demandes à ce titre.

Considérant qu'il est équitable d'allouer à la SA DEVEAUX la somme de 10.000 € au titre des frais par elle exposés tant en première instance qu'en cause d'appel et non compris dans les dépens, lesquels comprendront les frais de saisie-contrefaçon.

Considérant que les sociétés VIJVERMAN, C&A France et C&A BUYING GmbH & Co KG seront condamnées in solidum au paiement des dépens de première instance et d'appel.

Considérant qu'elles seront par ailleurs déboutées de leurs demandes respectives en paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile.