CJUE, 9e ch., 7 juillet 2022, n° C-261/21
COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
F. Hoffmann-La Roche Ltd, Novartis AG, Novartis Farma SpA, Roche SpA
Défendeur :
Autorità Garante della Concorrenza e del Mercato, Società Oftalmologica Italiana (SOI) – Associazione Medici Oculisti Italiani (AMOI), Regione Emilia-Romagna, Regione Lombardia, Altroconsumo, Associazione Italiana delle Unità Dedicate Autonome Private di Day Surgery e dei Centri di Chirurgia Ambulatoriale (Aiudapds), Coordinamento delle associazioni per la tutela dell’ambiente e dei diritti degli utenti e consumatori (Codacons), Ministero della Salute – Agenzia Italiana del Farmaco
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
M. Rodin
Juges :
M. Lycourgos (rapporteur), Mme. Spineanu-Matei
Avocat général :
M. Collins
Avocats :
Me Merlino, Me Siragusa, Me Zotta, Me Bertolini, Me D’Amario, Me Villani, Me Elefante, Me Raffaelli, Me Galluzzo, Me Gentili, Me La Placa, Me Bonatti, Me Russo Valentini, Me Tamborino, Me Colelli, Me Russo
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 4, paragraphe 3, et de l’article 19, paragraphe 1, TUE, ainsi que de l’article 2, paragraphes 1 et 2, et de l’article 267 TFUE, lus à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre de quatre litiges opposant, respectivement, F. Hoffmann-La Roche Ltd, Roche SpA (ci-après, ensemble, le « groupe Roche »), Novartis AG et Novartis Farma SpA (ci-après, ensemble, le « groupe Novartis ») à l’Autorità Garante della Concorrenza e del Mercato (Autorité garante du respect de la concurrence et des règles du marché, Italie) (ci‑après l’« AGCM ») au sujet de la demande des groupes Roche et Novartis tendant à la révision d’un arrêt du Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie) au motif que cet arrêt ne serait pas conforme à l’interprétation du droit de l’Union fournie par la Cour dans un arrêt rendu à la suite d’un renvoi préjudiciel émanant de cette juridiction.
Le cadre juridique
3 L’article 6, paragraphe 1, du codice del processo amministrativo (code de procédure administrative) dispose :
« Le [Consiglio di Stato (Conseil d’État)] est l’organe de dernière instance de la justice administrative. »
4 L’article 91 de ce code prévoit :
« Les voies de recours contre les arrêts [des juges administratifs] sont l’appel, la révision, l’opposition d’un tiers et le pourvoi en cassation pour les seuls moyens tenant à la compétence. »
5 Aux termes de l’article 106, paragraphe 1, dudit code :
« [...] les arrêts [...] du Consiglio di Stato [(Conseil d’État)] peuvent être attaqués par voie de révision dans les cas et suivant les modalités prévus aux articles 395 et 396 du [codice di procedura civile (code de procédure civile)]. »
6 L’article 395 du code de procédure civile dispose :
« Les arrêts rendus en degré d’appel ou en premier et dernier degré de juridiction peuvent être attaqués par voie de révision :
1) s’ils résultent de la faute intentionnelle d’une des parties au détriment de l’autre ;
2) s’ils ont été rendus sur le fondement d’éléments de preuve reconnus comme faux ou même déclarés faux après l’arrêt ou dont la partie qui a succombé ignorait qu’ils avaient été reconnus ou jugés comme tels avant le prononcé de l’arrêt ;
3) s’il apparaît, après le prononcé de l’arrêt, une ou plusieurs pièces décisives que la partie n’avait pu verser au dossier pour cause de force majeure ou du fait de son adversaire ;
4) si l’arrêt est l’effet d’une erreur de fait résultant des pièces ou des documents versés à la procédure. Une telle erreur existe lorsque la décision est fondée sur la supposition d’un fait dont la réalité est incontestablement exclue, ou bien lorsqu’a été supposée l’inexistence d’un fait dont la réalité est positivement établie, et, dans un cas comme dans l’autre, du moment que ce fait n’a pas constitué un point litigieux sur lequel l’arrêt a eu à trancher ;
5) si l’arrêt est contraire à un autre arrêt précédent ayant acquis force de chose jugée, à moins qu’il n’ait statué sur l’exception y afférente ;
6) si l’arrêt est l’effet de la faute intentionnelle du juge, constatée par un arrêt ayant acquis force de chose jugée. »
7 Aux termes de l’article 396 du code de procédure civile :
« Les arrêts dont le délai d’appel a expiré peuvent être attaqués par voie de révision dans les cas visés aux points 1, 2, 3 et 6 de l’article précédent, à condition que la découverte de la faute intentionnelle ou de la fausseté ou la récupération des documents ou le prononcé de l’arrêt visé au point 6 soient intervenus après l’expiration de ce délai.
Si les faits visés à l’alinéa précédent se produisent pendant le délai d’appel, ce délai est prolongé de trente jours à compter du jour où le fait en cause s’est produit. »
Le litige au principal et les questions préjudicielles
8 L’AGCM, par décision du 27 février 2014 (ci-après la « décision de l’AGCM »), a infligé deux amendes, l’une au groupe Roche, d’un montant d’environ 90,6 millions d’euros, et l’autre au groupe Novartis, d’un montant d’environ 92 millions d’euros, au motif que ces entreprises avaient conclu une entente contraire à l’article 101 TFUE, visant à obtenir une différenciation artificielle des médicaments Avastin et Lucentis, en manipulant la perception des risques de l’usage de l’Avastin en ophtalmologie.
9 Ces médicaments ont tous deux été développés par une société établie aux États-Unis d’Amérique, dont l’activité est limitée au territoire de ce pays tiers. Cette société a confié l’exploitation commerciale de l’Avastin en dehors de ce territoire au groupe Roche et celle du Lucentis au groupe Novartis.
10 Le 12 janvier 2005, une autorisation de mise sur le marché (ci-après l’« AMM ») pour l’Union européenne a été délivrée pour l’Avastin, aux fins du traitement de certaines pathologies tumorales. Le 22 janvier 2007, une AMM a été délivrée pour le Lucentis, aux fins du traitement de pathologies oculaires.
11 Avant la mise sur le marché du Lucentis, certains médecins avaient commencé à prescrire l’Avastin à leurs patients atteints de maladies oculaires, soit pour des indications qui ne correspondaient pas à celles mentionnées dans l’AMM de celui-ci (ci-après l’« utilisation hors AMM »). Cette pratique s’est poursuivie après la mise sur le marché du Lucentis, plus coûteux.
12 Selon la décision de l’AGCM, les groupes Roche et Novartis ont conclu un accord de répartition de marché, constitutif d’une restriction de la concurrence par objet. L’Avastin et le Lucentis seraient deux médicaments équivalents pour le traitement de pathologies oculaires. L’Avastin aurait été, en raison de son utilisation hors AMM largement répandue pour le traitement de ce type de pathologies, le principal produit concurrent du Lucentis. L’entente entre les groupes Roche et Novartis aurait consisté à diffuser des avis de nature à susciter des inquiétudes dans le public quant à la sécurité de l’usage de l’Avastin en ophtalmologie. Il en serait découlé une baisse des ventes de l’Avastin et un déplacement de la demande vers le Lucentis.
13 Après le rejet par le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional pour le Latium, Italie) de leurs recours introduits contre cette décision, les groupes Roche et Novartis ont interjeté appel devant la juridiction de renvoi, le Consiglio di Stato (Conseil d’État), qui a adressé à la Cour plusieurs questions préjudicielles relatives à l’interprétation de l’article 101 TFUE.
14 En réponse à ces questions, la Cour a, au point 67 de l’arrêt du 23 janvier 2018, F. Hoffmann-La Roche e.a. (C‑179/16, ci-après l’« arrêt Hoffmann-La Roche », EU:C:2018:25), jugé que, aux fins de l’application de l’article 101 TFUE, une autorité nationale de la concurrence peut inclure dans le marché pertinent, outre les médicaments autorisés pour le traitement des pathologies concernées, un autre médicament dont l’AMM ne couvre pas ce traitement, mais qui est utilisé à cette fin et présente un rapport concret de substituabilité avec les premiers. Pour déterminer si un tel rapport de substituabilité existe, cette autorité doit, pour autant qu’un examen de la conformité du produit en cause aux dispositions applicables régissant sa fabrication ou sa commercialisation a été effectué par les autorités ou les juridictions compétentes pour ce faire, tenir compte du résultat de cet examen, en évaluant ses éventuels effets sur la structure de la demande et de l’offre.
15 La Cour a également précisé, au point 95 de l’arrêt Hoffmann-La Roche, que constitue une restriction de la concurrence « par objet », interdite par l’article 101 TFUE, une entente entre des entreprises commercialisant des médicaments concurrents qui porte, dans un contexte marqué par une incertitude scientifique, sur la diffusion, auprès de l’Agence européenne des médicaments (EMA), des professionnels de la santé et du grand public, d’informations trompeuses sur les effets indésirables de l’utilisation hors AMM de l’un de ces médicaments, aux fins de réduire la pression concurrentielle résultant de cette utilisation sur celle de l’autre médicament.
16 À la suite de cette décision préjudicielle, la juridiction de renvoi a, par un arrêt portant le no 4990/2019, rejeté les appels (ci-après l’« arrêt no 4990/2019 »).
17 Les groupes Roche et Novartis demandent à la juridiction de renvoi, en vertu de l’article 106 du code de procédure administrative, la révision de cet arrêt, en faisant valoir qu’il est entaché d’une erreur de fait, au sens de l’article 395, point 4, du code de procédure civile.
18 Ces groupes font notamment valoir que la motivation de l’arrêt no 4990/2019 selon laquelle, « en l’espèce, lors de l’application de l’article 101 TFUE par l’AGCM, l’éventuel caractère illicite des conditions de reconditionnement et de prescription de l’Avastin destiné à être utilisé hors AMM n’avait pas été constaté par les autorités ayant compétence pour contrôler le respect de la réglementation pharmaceutique ou par les juridictions nationales », est factuellement erronée, le caractère illicite de l’offre de l’Avastin pour des indications qui ne correspondaient pas à celles mentionnées dans l’AMM de celui‑ci ayant été constaté, selon elles, dans de nombreuses prises de position officielles d’autorités et de juridictions compétentes. En ne prenant pas en compte les examens de conformité ainsi effectués, l’arrêt no 4990/2019 méconnaîtrait l’interprétation, fournie par la Cour dans l’arrêt Hoffmann-La Roche, selon laquelle il y a lieu de tenir compte du résultat de tels examens.
19 Lesdits groupes observent également que l’arrêt no 4990/2019 ne comporte aucune appréciation sur le caractère trompeur des informations diffusées par les entreprises concernées. Or, il ressortirait de l’arrêt Hoffmann-La Roche qu’il est nécessaire d’effectuer une telle appréciation. L’interprétation fournie par la Cour impliquerait que, dans une situation telle que celle en cause au principal, une restriction de la concurrence par objet ne peut exister qu’à la condition que les informations diffusées par les entreprises concernées ont été trompeuses. La Cour aurait précisé qu’il incombait à la juridiction de renvoi d’examiner cet aspect.
20 Le groupe Roche fait valoir, en outre, que le régime de contrôle juridictionnel institué par l’article 106 du code de procédure administrative, lu conjointement avec les articles 395 et 396 du code de procédure civile, est lacunaire, puisqu’il ne prévoit pas la possibilité de demander la révision d’un arrêt d’une juridiction administrative nationale lorsque celui-ci comporte une violation manifeste des principes de droit établis par la Cour dans le cadre d’un renvoi préjudiciel. Cette lacune aurait pour conséquence que des décisions juridictionnelles contraires au droit de l’Union peuvent acquérir force de chose jugée. Une telle situation porterait atteinte au caractère contraignant et à l’effet erga omnes des décisions préjudicielles de la Cour et risquerait de conduire à l’introduction, par la Commission européenne, de recours en manquement contre la République italienne.
21 La juridiction de renvoi expose qu’il n’existe, en droit italien, aucune voie de droit qui permette de vérifier qu’une décision rendue par une juridiction nationale statuant en dernier ressort n’est pas contraire au droit de l’Union et, en particulier, à la jurisprudence de la Cour.
22 Elle se demande si une telle situation est compatible avec l’article 4, paragraphe 3, et l’article 19, paragraphe 1, TUE ainsi qu’avec l’article 2, paragraphes 1 et 2, et l’article 267 TFUE, lus notamment à la lumière de l’article 47 de la Charte.
23 La Cour aurait, certes, jugé, notamment aux points 22 à 24 de l’arrêt du 3 septembre 2009, Fallimento Olimpiclub (C‑2/08, EU:C:2009:506), que les modalités de mise en œuvre du principe de l’autorité de la chose jugée relèvent de l’ordre juridique interne des États membres en vertu du principe de l’autonomie procédurale de ces derniers, et cela sous la seule réserve du respect des principes d’équivalence et d’effectivité, le droit de l’Union n’imposant pas à une juridiction nationale d’écarter l’application des règles de procédure internes conférant l’autorité de la chose jugée à une décision juridictionnelle, même si cela permettrait de remédier à une violation du droit de l’Union.
24 La juridiction de renvoi nourrit cependant des doutes quant à la pertinence de cette jurisprudence dans la situation où un justiciable fait valoir que la juridiction nationale ayant rendu une décision en dernier ressort a méconnu la décision préjudicielle rendue par la Cour dans l’affaire ayant donné lieu à cette décision nationale qui n’est plus susceptible de recours.
25 À cet égard, la juridiction de renvoi considère que la possibilité d’influencer la décision avant qu’elle n’acquière force de chose jugée, afin d’éviter la concrétisation de la violation du droit de l’Union, paraît préférable au remède a posteriori consistant, conformément à la jurisprudence issue de l’arrêt du 30 septembre 2003, Köbler (C‑224/01, EU:C:2003:513), à ce que la personne qui, de ce fait, a subi un préjudice puisse obtenir la réparation de ce dernier. En effet, ce remède a posteriori contraindrait cette personne d’engager une nouvelle procédure dans le cadre de laquelle elle devrait prouver non seulement l’existence de la violation du droit de l’Union, mais également le caractère manifeste de celle-ci.
26 Cela étant, cette juridiction estime que, en l’occurrence, l’arrêt no 4990/2019 respecte l’interprétation du droit de l’Union issue de l’arrêt Hoffmann-La Roche. Il n’existerait ainsi, selon elle, aucun conflit entre l’arrêt no 4990/2019 et le droit de l’Union. Tout au plus pourrait-il être reproché au Consiglio di Stato (Conseil d’État) d’avoir erronément appliqué ce droit aux faits de l’affaire au principal. Or, une telle erreur, à la supposer établie, ne constituerait pas une violation du caractère contraignant de l’arrêt Hoffmann-La Roche. Le mécanisme prévu à l’article 267 TFUE laisserait intacte la fonction juridictionnelle, réservée au juge national, d’appliquer l’interprétation du droit de l’Union fournie par la Cour aux faits de l’affaire au principal.
27 Toutefois, la juridiction de renvoi estime qu’il ne saurait être exclu que ce soit non pas à elle, mais à la Cour qu’il appartienne de se prononcer sur la compatibilité de l’arrêt no 4990/2019 avec l’arrêt Hoffmann-La Roche. À cet égard, cette juridiction rappelle que l’article 267 TFUE rend la Cour compétente pour statuer à titre préjudiciel sur la validité et l’interprétation des « actes pris par les institutions, organes ou organismes de l’Union ». Il serait possible que les décisions de la Cour figurent parmi ces actes et il n’existerait donc pas, à ce stade, de certitude définitive sur la compatibilité de l’arrêt no 4990/2019 avec l’arrêt Hoffmann-La Roche.
28 Dans ces conditions, le Consiglio di Stato (Conseil d’État) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) Le juge national, dont les décisions ne peuvent pas faire l’objet d’un recours juridictionnel de droit interne, dans une affaire dans laquelle la demande de la partie requérante vise directement à faire valoir la violation des principes exprimés par la [Cour] dans la même affaire afin d’obtenir l’annulation de l’arrêt attaqué, peut‑il vérifier l’application correcte, dans le cas concret, des principes exprimés par la [Cour] dans l’affaire en question, ou bien cet examen incombe-t-il à la [Cour] ?
2) L’arrêt du Consiglio di Stato [(Conseil d’État)] no 4990/2019 a-t-il violé, dans le sens indiqué par les parties, les principes exprimés par la [Cour] dans l’arrêt [Hoffmann-La Roche], en ce qui concerne a) l’inclusion, dans le même marché pertinent, des deux médicaments, sans tenir compte des prises de position d’autorités qui auraient constaté l’illicéité de la demande et de l’offre de l’Avastin hors AMM et b) l’omission de vérifier le caractère prétendument trompeur des informations diffusées par les sociétés ?
3) L’article 4, paragraphe 3, et l’article 19, paragraphe 1, TUE ainsi que l’article 2, paragraphes 1 et 2, et l’article 267 TFUE, lus notamment à la lumière de l’article 47 de la [Charte], s’opposent‑ils à un système comme celui de l’article 106 du code de procédure administrative et des articles 395 et 396 du code de procédure civile, dans la mesure où il n’ouvre pas la voie de recours de la révision contre les arrêts du Consiglio di Stato (Conseil d’État) contraires à des arrêts de la [Cour], et, en particulier, aux principes juridiques affirmés par cette dernière dans le cadre d’un renvoi préjudiciel ? »
Sur les demandes d’ouverture de la procédure orale
29 Par demandes présentées les 16 et 17 mars 2022, le groupe Roche a sollicité l’ouverture de la phase orale au titre de l’article 83 du règlement de procédure de la Cour, en faisant valoir l’existence d’un fait nouveau qui serait de nature à exercer une influence décisive sur la décision de la Cour.
30 Ce fait nouveau consisterait en l’adoption définitive, le 24 février 2022, par l’EMA d’un avis négatif sur l’usage de la substance « bevacizumab » pour le traitement d’une pathologie oculaire, au motif que les risques liés à un tel usage seraient supérieurs aux bénéfices thérapeutiques.
31 Le groupe Roche observe que le bevacizumab correspond au principe actif de l’Avastin. L’avis négatif de l’EMA sur l’usage du bevacizumab pour le traitement d’une pathologie oculaire démontre, selon ce groupe, que l’Avastin ne saurait se substituer au Lucentis et que ces deux médicaments ne relèvent donc pas du même marché. Cet avis de l’EMA corroborerait, en outre, le fait que les informations diffusées par les groupes Roche et Novartis, à propos des risques de l’usage de l’Avastin en ophtalmologie, n’étaient pas trompeuses.
32 La décision de l’AGCM serait, par conséquent, entachée d’erreurs. Selon le groupe Roche, la juridiction de renvoi aurait constaté ces erreurs si elle avait, conformément aux enseignements découlant de l’arrêt Hoffmann-La Roche, examiné les données disponibles au sujet des risques associés à l’usage de l’Avastin en ophtalmologie. Selon ce groupe, cette juridiction aurait notamment dû constater que la prétendue équivalence thérapeutique entre l’Avastin et le Lucentis, sur laquelle l’AGCM s’est fondée, n’avait jamais été établie par une quelconque autorité compétente en la matière. La juridiction de renvoi aurait ainsi dû conclure que l’AGCM n’avait pas dûment établi l’existence d’un comportement anticoncurrentiel.
33 L’avis négatif de l’EMA serait déterminant, en particulier, pour la réponse à la deuxième question, qui vise à savoir si l’arrêt no 4990/2019 méconnaît les principes exprimés par la Cour dans l’arrêt Hoffmann‑La Roche.
34 À cet égard, il convient de relever que, conformément à l’article 83 de son règlement de procédure, la Cour peut, l’avocat général entendu, ordonner à tout moment l’ouverture ou la réouverture de la phase orale de la procédure, notamment si elle considère qu’elle est insuffisamment éclairée, ou lorsqu’une partie a soumis, après la clôture de cette phase, un fait nouveau de nature à exercer une influence décisive sur la décision de la Cour, ou encore lorsque l’affaire doit être tranchée sur la base d’un argument qui n’a pas encore été débattu.
35 Or, le fait invoqué par le groupe Roche à l’appui des demandes d’ouverture de la procédure orale, consistant en l’avis négatif émis par l’EMA le 24 février 2022 à propos de l’usage de la substance bevacizumab pour le traitement de la pathologie oculaire décrite dans cet avis, n’est pas de nature à exercer une influence décisive sur la décision de la Cour à intervenir dans la présente affaire.
36 Il n’appartient, en effet, pas à la Cour d’apprécier si le contenu de cet avis émis par l’EMA démontre la présence d’erreurs dans la décision de l’AGCM que la juridiction de renvoi aurait dû constater dans son arrêt no 4990/2019. Il suffit de rappeler, à cet égard, que seul le juge national est compétent pour constater et apprécier les faits du litige au principal (arrêt du 6 octobre 2021, Consorzio Italian Management et Catania Multiservizi, C‑561/19, EU:C:2021:799, point 35 et jurisprudence citée).
37 En l’occurrence, la Cour, l’avocat général entendu, estime, sur la base de la demande de décision préjudicielle et des pièces de la procédure écrite, qu’elle dispose de tous les éléments nécessaires pour traiter le présent renvoi préjudiciel. Partant, il n’y a pas lieu d’ordonner l’ouverture de la phase orale de la procédure.
Sur les questions préjudicielles
Sur la troisième question
38 À titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, dans le cadre de la procédure de coopération entre les juridictions nationales et la Cour, instituée par l’article 267 TFUE, il appartient à celle-ci de donner au juge national une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, il incombe, le cas échéant, à la Cour de reformuler les questions qui lui sont soumises (arrêt du 15 juillet 2021, The Department for Communities in Northern Ireland, C‑709/20, EU:C:2021:602, point 61 et jurisprudence citée).
39 La troisième question, qu’il convient d’examiner en premier lieu, vise, notamment, l’article 2, paragraphes 1 et 2, TFUE. Or, ces dispositions sont sans pertinence pour répondre à cette question.
40 En effet, l’article 2 TFUE concerne la répartition, entre l’Union et ses États membres, de la compétence pour légiférer et adopter des actes juridiquement contraignants. Les règles qui sont énoncées, à ce sujet, aux paragraphes 1 et 2 de cet article sont étrangères à la question relative à l’existence de voies de droit au sein d’un État membre soulevée par la juridiction de renvoi (voir, par analogie, arrêt du 21 décembre 2021, Randstad Italia, C‑497/20, EU:C:2021:1037, point 45).
41 Partant, la troisième question doit être reformulée en écartant de son objet l’article 2, paragraphes 1 et 2, TFUE.
42 Cette question vise, en substance, à savoir si l’article 4, paragraphe 3, et l’article 19, paragraphe 1, TUE ainsi que l’article 267 TFUE, lus à la lumière de l’article 47 de la Charte, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à des dispositions de droit procédural d’un État membre qui ont pour effet que, lorsque la juridiction suprême de l’ordre administratif de cet État membre rend une décision réglant un litige dans le cadre duquel elle avait saisi la Cour d’une demande de décision préjudicielle au titre de cet article 267, les parties à ce litige ne peuvent solliciter la révision de cette décision de la juridiction nationale au motif que celle-ci aurait méconnu l’interprétation du droit de l’Union fournie par la Cour en réponse à cette demande.
43 À cet égard, il y a lieu de rappeler d’emblée que l’article 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE oblige les États membres à établir les voies de recours nécessaires pour assurer aux justiciables, dans les domaines couverts par le droit de l’Union, le respect de leur droit à une protection juridictionnelle effective (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Miasto Łowicz et Prokurator Generalny, C‑558/18 et C‑563/18, EU:C:2020:234, point 32 ainsi que jurisprudence citée).
44 Sous réserve de l’existence de règles de l’Union en la matière, il appartient, en vertu du principe de l’autonomie procédurale, à l’ordre juridique interne de chaque État membre de régler les modalités procédurales de ces voies de recours, à condition, toutefois, que ces modalités ne soient pas, dans les situations relevant du droit de l’Union, moins favorables que dans des situations similaires soumises au droit interne (principe d’équivalence) et qu’elles ne rendent pas impossible en pratique ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par le droit de l’Union (principe d’effectivité) (arrêt du 21 décembre 2021, Randstad Italia, C‑497/20, EU:C:2021:1037, point 58).
45 S’agissant du respect du principe d’équivalence, il apparaît, à l’aune des renseignements fournis dans la demande de décision préjudicielle et sous réserve d’une vérification par la juridiction de renvoi, que l’article 106, paragraphe 1, du code de procédure administrative, lu conjointement avec les articles 395 et 396 du code de procédure civile, limite selon les mêmes modalités la possibilité pour les justiciables de solliciter une révision d’un arrêt du Consiglio di Stato (Conseil d’État), que la demande de révision trouve son fondement dans des dispositions de droit national ou dans des dispositions de droit de l’Union.
46 Dans ces conditions, il doit être considéré que les règles procédurales de droit interne ne méconnaissent pas le principe d’équivalence.
47 Pour ce qui concerne le principe d’effectivité, il importe de rappeler que le droit de l’Union n’a pas pour effet de contraindre les États membres à instituer des voies de droit autres que celles établies par le droit interne, à moins, toutefois, qu’il ne ressorte de l’économie de l’ordre juridique national en cause qu’il n’existe aucune voie de recours juridictionnelle permettant, fût-ce de manière incidente, d’assurer le respect des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union, ou que la seule voie d’accès à un juge revient à contraindre les justiciables d’enfreindre le droit (voir, notamment, arrêts du 14 mai 2020, Országos Idegenrendészeti Főigazgatóság Dél-alföldi Regionális Igazgatóság, C‑924/19 PPU et C‑925/19 PPU, EU:C:2020:367, point 143, et du 21 décembre 2021, Randstad Italia, C‑497/20, EU:C:2021:1037, point 62).
48 En l’occurrence, aucun élément mentionné dans la demande de décision préjudicielle ou dans les observations déposées devant la Cour ne donne à penser que le droit procédural italien a, en soi, pour effet de rendre impossible ou excessivement difficile l’exercice, dans le domaine du droit de la concurrence, des droits conférés aux particuliers par le droit de l’Union. Dans ces conditions, une disposition telle que l’article 106, paragraphe 1, du code de procédure administrative, lu conjointement avec les articles 395 et 396 du code de procédure civile, ne porte pas non plus atteinte au principe d’effectivité et n’apparaît, partant, pas contraire à l’article 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE.
49 Dans une situation caractérisée par l’existence d’une voie de recours juridictionnelle permettant d’assurer le respect des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union, il est, ainsi qu’il découle de la jurisprudence rappelée au point 47 du présent arrêt, parfaitement loisible, au regard du droit de l’Union, à l’État membre concerné d’investir la juridiction suprême de son ordre administratif de la compétence de statuer en dernier ressort, en fait comme en droit, sur le litige en cause (arrêt du 21 décembre 2021, Randstad Italia, C‑497/20, EU:C:2021:1037, point 64).
50 Lorsque, comme en l’occurrence, des dispositions de droit de l’Union sont invoquées devant une juridiction nationale, laquelle rend sa décision après avoir reçu la réponse aux questions qu’elle avait adressées à la Cour au sujet de l’interprétation de ces dispositions, la condition relative à l’existence d’une voie de droit, au sein de l’État membre concerné, qui permette d’assurer le respect des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union, est nécessairement remplie. Cet État membre peut, en conséquence, restreindre la possibilité de solliciter la révision d’un arrêt de sa juridiction administrative suprême à des situations exceptionnelles et strictement encadrées, qui n’incluent pas l’hypothèse où, selon le justiciable ayant succombé devant ladite juridiction, celle-ci aurait méconnu l’interprétation du droit de l’Union fournie par la Cour en réponse à sa demande de décision préjudicielle.
51 Il découle de ce qui précède que l’article 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE n’oblige pas les États membres à permettre aux justiciables de solliciter la révision d’une décision juridictionnelle rendue en dernier ressort au motif que celle-ci méconnaîtrait l’interprétation du droit de l’Union fournie par la Cour en réponse à une demande de décision préjudicielle qui avait été formulée dans la même affaire.
52 Cette conclusion ne saurait être remise en cause à l’aune de l’article 4, paragraphe 3, TUE, qui oblige les États membres à prendre toute mesure générale ou particulière propre à assurer l’exécution des obligations découlant des traités ou résultant des actes des institutions de l’Union. En effet, s’agissant du système des voies de recours nécessaires pour assurer, dans les domaines couverts par le droit de l’Union, un contrôle juridictionnel effectif, l’article 4, paragraphe 3, TUE ne saurait être interprété en ce sens qu’il exige de la part des États membres l’établissement de nouvelles voies de droit, qui ne leur est pourtant pas imposé en vertu de l’article 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE (arrêt du 21 décembre 2021, Randstad Italia, C‑497/20, EU:C:2021:1037, point 66).
53 Ladite conclusion ne peut pas non plus être remise en cause au regard de l’article 267 TFUE.
54 Cette disposition exige, certes, d’une juridiction de renvoi qu’elle confère un plein effet à l’interprétation du droit de l’Union donnée par la Cour dans l’arrêt rendu à titre préjudiciel (arrêt du 12 février 2020, Kolev e.a., C‑704/18, EU:C:2020:92, point 37 et jurisprudence citée). Partant, lorsqu’il a rendu l’arrêt no 4990/2019, le Consiglio di Stato (Conseil d’État) était tenu de s’assurer que celui-ci soit conforme à l’interprétation de l’article 101 TFUE que la Cour venait de donner, à la demande de cette juridiction nationale, dans l’arrêt Hoffmann-La Roche.
55 Toutefois, ainsi qu’il a été rappelé au point 36 du présent arrêt, il incombe au seul juge national de constater et d’apprécier les faits du litige au principal. Il s’ensuit qu’il n’appartient pas à la Cour d’exercer, dans le cadre d’un nouveau renvoi préjudiciel, un contrôle qui serait destiné à s’assurer que ce juge, après qu’il ait saisi la Cour d’une demande de décision préjudicielle portant sur l’interprétation de dispositions de droit de l’Union applicables au litige qui lui est soumis, a appliqué ces dispositions de manière conforme à l’interprétation de celles-ci livrée par la Cour. Si, au titre de la coopération entre les juridictions nationales et la Cour instituée à l’article 267 TFUE, il est loisible aux juridictions nationales de saisir de nouveau la Cour avant de trancher le litige dont elles sont saisies afin d’obtenir des précisions supplémentaires sur l’interprétation du droit de l’Union fournie par la Cour (voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2021, Consorzio Italian Management et Catania Multiservizi, C‑561/19, EU:C:2021:799, point 38 et jurisprudence citée), cette disposition ne saurait, en revanche, être interprétée en ce sens qu’une juridiction nationale pourrait saisir la Cour d’une demande de décision préjudicielle portant sur la question de savoir si cette juridiction nationale a correctement appliqué, à l’affaire au principal, l’interprétation fournie par la Cour en réponse à une demande de décision préjudicielle dont elle l’avait précédemment saisie dans la même affaire.
56 Partant, le mécanisme de coopération entre les juridictions nationales et la Cour, institué par cette disposition du traité FUE, n’exige nullement que les États membres prévoient une voie de droit qui permette aux justiciables d’introduire des recours en révision d’une décision juridictionnelle rendue en dernier ressort par une juridiction nationale dans un litige donné, aux fins de contraindre cette dernière de saisir la Cour d’une demande tendant à vérifier si cette décision est conforme à l’interprétation fournie par la Cour en réponse à une demande de décision préjudicielle dont ladite juridiction nationale l’avait précédemment saisie dans la même affaire.
57 La conclusion tirée au point 51 du présent arrêt ne saurait pas non plus être remise en cause au regard de l’article 47 de la Charte. À cet égard, il suffit d’observer que, lorsque les justiciables ont, dans le domaine du droit de l’Union concerné, accès à un tribunal indépendant et impartial établi préalablement par la loi, ce qui paraît être le cas, sous réserve d’une vérification par la juridiction de renvoi, dans l’ordre juridique italien, le droit d’accéder à un tel tribunal, consacré par la Charte, est respecté, sans que la règle de droit national qui restreint la possibilité de solliciter la révision des arrêts de la juridiction suprême de l’ordre administratif à des situations exceptionnelles et strictement encadrées, puisse être analysée comme une limitation, au sens de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, de ce droit énoncé à l’article 47 de celle-ci (voir, par analogie, arrêt du 21 décembre 2021, Randstad Italia, C‑497/20, EU:C:2021:1037, point 69).
58 Nonobstant ce qui précède, il importe de rappeler que les particuliers qui ont, le cas échéant, subi un dommage en raison de la violation de droits qui leur sont conférés par le droit de l’Union du fait d’une décision d’une juridiction statuant en dernier ressort peuvent engager la responsabilité dudit État membre, pourvu que les conditions tenant au caractère suffisamment caractérisé de la violation et à l’existence d’un lien de causalité direct entre cette violation et le préjudice subi par ces particuliers soient remplies (voir en ce sens, notamment, arrêts du 30 septembre 2003, Köbler, C‑224/01, EU:C:2003:513, point 59, et du 21 décembre 2021, Randstad Italia, C‑497/20, EU:C:2021:1037, point 80).
59 En effet, le principe de la responsabilité d’un État membre pour des dommages causés aux particuliers par des violations du droit de l’Union qui lui sont imputables est inhérent au système du traité, que l’origine du préjudice soit imputable au pouvoir législatif, judiciaire ou exécutif. Eu égard au rôle essentiel joué par le pouvoir judiciaire dans la protection des droits que les particuliers tirent des règles de l’Union, la pleine efficacité de celles-ci serait remise en cause et la protection des droits qu’elles reconnaissent serait affaiblie s’il était exclu que les particuliers puissent, sous certaines conditions, obtenir réparation lorsque leurs droits sont lésés par une violation du droit de l’Union imputable à une décision d’une juridiction d’un État membre statuant en dernier ressort (arrêt du 4 mars 2020, Telecom Italia, C‑34/19, EU:C:2020:148, points 67 et 68).
60 Au regard de tout ce qui précède, il y a lieu de répondre à la troisième question que l’article 4, paragraphe 3, et l’article 19, paragraphe 1, TUE ainsi que l’article 267 TFUE, lus à la lumière de l’article 47 de la Charte, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à des dispositions de droit procédural d’un État membre qui, tout en respectant le principe d’équivalence, ont pour effet que, lorsque la juridiction suprême de l’ordre administratif de cet État membre rend une décision réglant un litige dans le cadre duquel elle avait saisi la Cour d’une demande de décision préjudicielle au titre de cet article 267, les parties à ce litige ne peuvent solliciter la révision de cette décision de la juridiction nationale au motif que celle-ci aurait méconnu l’interprétation du droit de l’Union fournie par la Cour en réponse à cette demande.
Sur les première et deuxième questions
61 Compte tenu de la réponse apportée à la troisième question, il n’y a pas lieu de répondre aux première et deuxième questions.
Sur les dépens
62 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) dit pour droit :
L’article 4, paragraphe 3, et l’article 19, paragraphe 1, TUE ainsi que l’article 267 TFUE, lus à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à des dispositions de droit procédural d’un État membre qui, tout en respectant le principe d’équivalence, ont pour effet que, lorsque la juridiction suprême de l’ordre administratif de cet État membre rend une décision réglant un litige dans le cadre duquel elle avait saisi la Cour d’une demande de décision préjudicielle au titre de cet article 267, les parties à ce litige ne peuvent solliciter la révision de cette décision de la juridiction nationale au motif que celle-ci aurait méconnu l’interprétation du droit de l’Union fournie par la Cour en réponse à cette demande.