Cass. com., 12 mars 1991, n° 88-17.181
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Defontaine
Rapporteur :
M. Bézard
Avocat général :
M. Raynaud
Avocats :
SCP Boré et Xavier, SCP de Chaisemartin
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 18 mai 1988), que la chambre de commerce et d'industrie de Brest, (la chambre de commerce) qui gère les installations du port de commerce de cette ville, a fourni diverses prestations à la société des Ateliers français de l'Ouest (société AFO) cependant que celle-ci, en exécution d'un contrat qu'elle avait conclu avec la société Mac Dermott, réparait dans un bassin du port une plate-forme pétrolière appartenant à cette dernière ; que la société AFO a fait l'objet d'une procédure de suspension provisoire des poursuites, M. X... étant désigné comme curateur, puis de liquidation des biens avec M. Y... comme syndic ; que la chambre de commerce, se prévalant de la qualité de sous-traitant de la société AFO, a exercé une action directe contre la société Mac Dermott en paiement des prestations qu'elle avait fournies pour le chantier ;
Attendu que la chambre de commerce reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors que, selon le pourvoi, la qualité d'usager d'un service public industriel et commercial n'est pas subordonnée à l'existence d'un contrat, mais doit être reconnue à celui qui bénéficie des prestations du service en cause et qui est par conséquent débiteur des redevances correspondantes ; qu'il résulte des termes de l'arrêt que la société Mac Dermott, en sa qualité de propriétaire d'une plate-forme pétrolière, a bénéficié des prestations de la chambre de commerce pour les travaux de réparation effectués grâce aux installations portuaires et à la fourniture de courant et de fluide, qu'en rejetant la demande en paiement des prestations fournies par la chambre de commerce au motif pris de ce qu'elle n'était pas sous-traitante, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 12 de la loi du 31 décembre 1975 ;
Mais attendu que l'action directe prévue à l'article 12 de la loi du 31 décembre 1975 n'est ouverte qu'au sous-traitant au sens de l'article 1er de cette loi, et non en l'absence de sous-traitance, à un prestataire de services du seul fait de la fourniture de ses prestations ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen pris en ses deux branches :
Attendu que la chambre de commerce reproche encore à l'arrêt de l'avoir déboutée alors que, selon le pourvoi, d'une part, l'arrêt attaqué a relevé que la société Mac Dermott, maître de l'ouvrage, avait " accepté la chambre de commerce et d'industrie de Brest comme subcontractor... et qu'il ne saurait être sérieusement soutenu qu'elle a pu se méprendre sur la portée de cette indication " ; que la cour d'appel, qui constatait ainsi que la qualité de sous-traitant de la chambre de commerce et d'industrie de Brest résultait de la commune intention des parties ne pouvait dès lors exclure l'action directe de cette dernière contre le maître de l'ouvrage sans violer les articles 1134 du Code civil et 12 de la loi du 31 décembre 1975 ; et alors que, d'autre part, dans ses conclusions d'appel, la chambre de commerce a soutenu qu'elle avait personnellement participé à l'exécution de l'ouvrage avec son propre personnel ; qu'en se bornant à faire état de la mise à disposition de fluides, de quais d'amarrage et d'engins de levage et de manutention, sans rechercher si l'intervention du personnel de la chambre de commerce pour l'exécution du marché ne lui conférait pas la qualité de sous-traitant, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, qu'après avoir relevé que, si la société Mac Dermott avait effectivement accepté la chambre de commerce comme subcontractor, elle avait néanmoins expressément exclu la possibilité d'un paiement direct au sous-traitant ainsi accepté, l'arrêt en a exactement déduit qu'en l'absence d'un accord entre les parties, un droit d'action directe ne pouvait être reconnu à la chambre de commerce que pour autant qu'elle possédât la qualité de sous-traitant au sens de la loi du 31 décembre 1975 ;
Attendu, d'autre part, que l'arrêt a constaté que les prestations de la chambre de commerce ont consisté en la mise à disposition d'un poste à quai et d'un collecteur d'incendie, en la fourniture d'eau et d'électricité et en la location de compresseurs et d'une grue avec son conducteur, simples services fournis à la société AFO, entrepreneur principal, qui ne lui avait pas confié l'exécution de travaux pour le maître de l'ouvrage ; que la cour d'appel, répondant aux conclusions invoquées, a exactement décidé que la chambre de commerce ne possédait pas la qualité de sous-traitant de la société AFO qui lui aurait permis d'exercer une action directe contre la société Mac Dermott ;
Que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.