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Décisions

CA Pau, 2e ch. sect. 1, 21 janvier 2021, n° 20/00898

PAU

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Les Eaux Vives (SAS

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Alzeari

Conseiller :

M. Darracq

Avocats :

Me Piault, Me Cohen, Me Gallardo

CA Pau n° 20/00898

20 janvier 2021

FAITS, PROCEDURE, PRTENTIONS DES PARTIES

La SAS LES EAUX VIVES est une SAS au capital de 40 000 €, exerçant une activité de société de holding financière détenant des titres de participation. Son président en était M. X.

Le bilan de la société clos au 30 septembre 2014 laissait apparaître que le capital social de 40 000 € n'avait été libéré que de la moitié soit, 20 000 €.

Par jugement en date du 31 mai 2016, le tribunal de commerce de Pau a prononcé la liquidation judiciaire de la SAS LES EAUX VIVES et a désigné Y en qualité de liquidateur.

Y a mis en demeure M. X, associé de la SAS LES EAUX VIVES, afin de procéder à la libération du capital restant.

Estimant que les éléments comptables fournis par M. X n'étaient pas probants, Y a fait assigner ce dernier devant le tribunal de commerce de Pau.

Par jugement en date du 21 janvier 2020, le tribunal de commerce de Pau a condamné M. X à payer à Y en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SAS LES EAUX VIVES la somme de 20 000 € outre les intérêts au taux légal à compter du 27 octobre 2016, la somme de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, débouté les parties du surplus de leurs demandes et condamné M. X aux dépens.

Selon déclaration du 17 mars 2020, M. X a interjeté appel à l'encontre de cette décision.

Par dernières conclusions du 5 juin 2020, il prétend à la réformation du jugement déféré.

Il demande que soit constatée la compensation légale intervenue avant l'ouverture de la procédure collective et prétend au rejet de l'ensemble des demandes du liquidateur.

Il réclame le paiement de la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon dernières écritures du 8 juin 2020, Y conclut à la confirmation du jugement entrepris et y ajoutant, sollicite la capitalisation des intérêts outre le paiement de la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est en date du 4 novembre 2020.

MOTIFS,

Au soutien de son appel, M. X demande que la compensation légale entre le solde du capital social avec sa créance en compte courant d'associé soit constatée.

Il invoque le caractère automatique de la compensation légale et les dispositions de l'article 1347-1 du Code civil.

Il estime que le caractère automatique de la compensation peut être invoqué même après le jugement d'ouverture d'une procédure collective pourvu que les conditions de la compensation aient été réunies avant la survenance de cet événement.

La SAS LES EAUX VIVES a été placée en liquidation judiciaire le 31 mai 2016.

Son capital social était fixé à la somme de 40 000 €.

Il résulte des comptes sociaux que le capital social n'a été libéré qu'à hauteur de 20 000 € par M. X en sa qualité d'associé.

Ainsi, en application des dispositions de l'article R. 624-17 du code de commerce, le liquidateur judiciaire a mis en demeure cet associé de procéder à la libération du capital.

Par courrier du 27 octobre 2016, ce dernier a répondu que le capital social avait été libéré dans les trois mois de la constitution de la société. Il a toutefois ajouté que le comptable de l'époque « l'avait constaté au crédit de son compte courant ».

Il précisait qu'à la date de la liquidation, il disposait d'un compte courant créditeur suffisant pour s'acquitter de cette libération.

Le liquidateur judiciaire, constatant une réponse qui n'était pas conforme aux comptes sociaux, a réitéré ses mises en demeure.

En application de l'article L. 624-20 du code de commerce, le jugement d'ouverture rend immédiatement exigible le montant non libéré du capital social.

En l'espèce, il est constant et non contesté que la créance de la société sur les associés au titre de la libération du capital et la dette que la société a pu contracter à l'égard des associés au regard des comptes courants ne sont pas des dettes connexes.

Sur la compensation légale et son automaticité, il doit être considéré que le compte courant d'associé ne constitue pas, en soi, une créance exigible à l'encontre de la société.

Il appartient à l'associé de demander le remboursement de cette dette afin que celle-ci devienne exigible.

Sur ce point, l'appelant invoque les dispositions de l'article L. 225-128 du code de commerce qui permet une augmentation du capital d'une société par compensation.

Néanmoins, l'intimée fait justement valoir qu'il appartient à l'associé d'apporter la preuve de la réalisation d'une compensation entre les deux dettes réciproques.

Or, au cas d'espèce, les comptes sociaux qui ont été validés n'apportent nullement cette démonstration.

Il est versé aux débats un courriel de l'expert-comptable dans lequel ce dernier indique qu'il y aurait eu une erreur d'affectation puisque la somme de 20 000 €, apportée durant la période, a été comptabilisée en compte courant, par erreur, selon l'expert-comptable.

Ce courrier, produit par l'appelant, ne fait que conforter l'examen des comptes sociaux en ce qu'il permet d'établir qu'aucune compensation n'a été décidée avant l'ouverture de la procédure collective.

En effet, les documents juridiques qui auraient été préparés à cet effet ne sont nullement produits et n'ont pas été transmis au liquidateur judiciaire.

Au demeurant, l'intimée verse aux débat un courriel du commissaire aux comptes qui indique ne pas avoir en sa possession de documents juridiques permettant d'effectuer une compensation entre le compte d'associé créditeur et le solde du sur le capital social.

Il ajoute qu'aucune écriture de compensation ne figure dans la comptabilité.

Ainsi, l'intimée fait valoir, à bon droit, que la comptabilité tenue par la SAS LES EAUX VIVES établit que la compensation n'est pas intervenue avant l'ouverture de la procédure collective.

C'est donc par une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties que le tribunal a condamné M. X à payer à Y ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS LES EAUX VIVES la somme de 20 000 € outre les intérêts au taux légal à compter du 27 octobre 2016.

Il convient d'y ajouter en faisant application de l'article 1343-2 du Code civil.

M. X, qui succombe, doit être condamné aux dépens et débouté en sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

À l'opposé, il sera fait application de cet article au profit de Y ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS LES EAUX VIVES.

PAR CES MOTIFS,

La cour après en avoir délibéré, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Pau en date du 21 janvier 2020 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Dit que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêts,

Condamne M. X aux dépens d'appel,

Condamne M. X à payer à Y ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS LES EAUX VIVES la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.