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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 1 juillet 2022, n° 20/17774

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Le Relais de la Forme (SAS)

Défendeur :

Mov'in (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Lehmann

Conseillers :

Mme Marcade, Mme Bohee

Avocats :

Me Lallement, Me Hamet, Me Bernabe, Me Gibon

T. com. Paris, 13e ch, du 9 nov. 2020, n…

9 novembre 2020

La société Mov'in a pour activité l'achat, la vente et la fabrication de produits et de matériels de sport esthétique et de loisir et le conseil en gestion d'espaces de loisir. Elle est propriétaire de plusieurs marques de centre de remise en forme et concède à ses adhérents des licences d'exploitation sur le territoire national.

La société Le Relais de la Forme exploite un fonds de commerce de mise en forme à [Localité 4] sous l'enseigne « MOVING » que lui concède en licence la société Mov'in.

En 1993, les parties ont signé un premier contrat de licence de marque conférant à la société Le Relais de la Forme le droit d'exploiter la marque MOVING à titre d'enseigne pour son établissement de [Localité 4]. Le terme du contrat était fixé au 31 mai 1995. Le 28 juin 1995, les parties ont signé un nouveau contrat de licence de marque d'une durée de 3 ans, reconduit en 1998 puis en 2001 par contrats distincts.

Un nouveau contrat de licence a été signé le 22 juillet 2002 entre la société Le Relais de la Forme et la société Mov'in, conférant à la société Le Relais de la Forme un droit d'exploitation exclusif de la marque MOVING à titre d'enseigne au sein des communes d'[Localité 5] et [Localité 4]. Ce contrat est d'une durée initiale de 3 ans, renouvelable par périodes identiques et résiliable à la fin de chaque période triennale moyennant un préavis de 6 mois.

En vertu de l'article 4 dudit contrat, la société Le Relais de la Forme était tenue d'acquitter une redevance de licence égale à 3 % HT de son chiffre d'affaires annuel HT.

Depuis 2009, la société Mov'in propose de nouveaux concepts à bas coût, notamment sous la marque « Fitness Park by Moving » et « Moving Express ».

Un différend est alors né entre les parties, la société Le Relais de la Forme reprochant à la société Mov'in d'avoir accordé à un autre licencié, la société Pdf Def, le droit d'ouvrir un club sur la zone géographique d'[Localité 5] sous enseigne « Fitness Park by Moving ».

La société Le Relais de la Forme a alors fait assigner en référé la société Mov'in devant le président du tribunal de commerce de Paris qui, par ordonnance en date du 1er mars 2016, a dit n'y avoir lieu à référé.

Dans le même temps, à compter du ler juin 2015, la société Le Relais de la Forme a cessé d'acquitter la redevance annuelle de licence de marque. Le 2 juillet 2015, la société Mov'in lui a adressé une facture datée du 30 juin 2015 d'un montant de 38.489,36 euros T.T.C correspondant à la redevance de licence relative à la période du 1er juin 2015 au 31 mai 2016.

Dans ce contexte, et au regard des relations conflictuelles entre les deux sociétés, la société Mov'in a, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 22 juillet 2016, mis un terme au contrat liant les parties avec effet au 31 mai 2017.

La société Le Relais de la Forme a alors fait assigner par acte du 30 mai 2017 la société Mov'in devant le tribunal de commerce de Paris pour obtenir réparation de son préjudice pour inexécutions contractuelles répétées, exécution déloyale du contrat, et caractère brutal de la rupture de leurs relations.

Le jugement du tribunal de commerce de Paris dont appel a :

- Dit non prescrite la demande de la SAS Le Relais de la Forme au titre d'inexécutions contractuelles et d'un comportement déloyal.

- Débouté la SAS Le Relais de la Forme de sa demande au titre d'inexécutions contractuelles et d'un comportement déloyal.

- Débouté la SAS Le Relais de la Forme de sa demande au titre d'une dévalorisation partielle de son fonds de commerce.

- Dit irrecevables les demandes de la SAS Le Relais de la Forme au titre d'une rupture abusive et d'une rupture brutale du contrat de 2002.

- Débouté la SAS Mov'in de sa demande de 38.489,36 euros.

- Débouté la SAS Mov'in de sa demande de 348.522,50 euros.

- Condamné la SAS Le Relais de la Forme au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les dépens.

La société Le Relais de la Forme a interjeté appel dudit jugement et par ses dernières conclusions sollicite de la cour de :

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 9 novembre 2020, sauf en ce qu'il a pris acte de l'abandon de la société Le Relais de la Forme de sa demande formée au titre d'une dénaturation de la marque, et qu'il a dit non prescrite la demande formée par la société Le Relais de la Forme au titre d'inexécutions contractuelles et d'un comportement déloyal de la part de la société Mov'in.

Et statuant à nouveau :

- Juger que la société Mov'in a violé ses obligations en accordant à la société Pdf Def le droit d'exploiter la marque Fitness Park by Moving sur sa zone d'exclusivité géographique contractuelle.

- Juger que la société Mov'in a exécuté de manière fautive et déloyale le contrat du 22 juillet 2002.

En conséquence :

- Condamner la société Mov'in à lui payer la somme de 1.297.764 euros en réparation du préjudice que lui ont causé ses inexécutions contractuelles et son comportement déloyal ;

- Condamner la société Mov'in à lui payer la somme de 324.146 euros en réparation de la perte partielle de la valeur vénale du fonds de son fonds de commerce.

- Juger que la société Mov'in a commis une faute en mettant fin à sa relation commerciale avec elle de manière anticipée.

En conséquence :

A titre principal,

- Juger que le préavis de 10 mois accordé par la société Mov'in est insuffisant au regard des prescriptions de l'article L. 442-6 I 5° du code de commerce.

- Juger que l'insuffisance de ce préavis caractérise une rupture brutale des relations commerciales.

- Juger que le préavis qui devait lui être accordé ne pouvait être inférieur à 24 mois.

- Condamner la société Mov'in à lui payer la somme de 1.523.315 euros pour l'indemniser de l'insuffisance de ce préavis.

A titre subsidiaire,

- Juger que la résiliation anticipée du contrat de licence, en violation des dispositions de l'avenant du 30 mai 2007, engage la responsabilité contractuelle de la société Mov'in à son égard.

- Condamner la société Mov'in à lui payer la somme de 249.169,55 euros en réparation de cette résiliation fautive anticipée.

- Condamner la société Mov'in à lui rembourser le montant des honoraires contractuellement dus à la société Cotranex.

- Ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil sur l'ensemble de ces paiements.

- Condamner la société Mov'in à lui verser la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Ordonner l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir.

- Condamner la société Mov'in aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction pour ceux d'appel, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions, la société Mov'in demande à la cour de :

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce le 9 novembre 2020 en ce qu'il a :

- Dit non prescrite la demande de la SAS Le Relais de la Forme au titre d'inexécutions contractuelles et d'un comportement déloyal.

- Débouté la SAS Mov'in de sa demande de 38.489,36 euros.

- Débouté la SAS Mov'in de sa demande de 348.522,50 euros.

- Confirmer toutes les autres dispositions du jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 9 novembre 2020.

En conséquence et statuant à nouveau :

Sur la prétendue violation de la clause d'exclusivité visée au contrat de licence en date du 22 juillet 2002 :

- Dire et juger qu'elle n'a pas violé la clause d'exclusivité territoriale visée au contrat de licence de marque en date du 22 juillet 2002 en autorisant la société Pdf Def à ouvrir un centre Fitness Park à [Localité 5] ;

- En conséquence, débouter la société Le Relais de la Forme de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

Sur la prétendue exécution déloyale du contrat de licence de marque :

A titre principal :

- Dire et juger irrecevables les demandes de la société Le Relais de la Forme fondées sur l'exécution déloyale du contrat de licence de marque du fait de la prescription ;

A titre subsidiaire :

- Dire et juger que la société Mov'in a exécuté de manière loyale le contrat de licence de marque du 22 juillet 2002 ;

- En conséquence, débouter la société Le Relais de la Forme de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions :

Sur la prétendue rupture fautive du contrat de licence de marque :

A titre principal :

- Dire et juger que l'avenant du 30 mai 2007 est devenu caduc ;

- Dire et juger que la seule date d'échéance du contrat initial de 2002 restait valable à savoir le 31 mai 2017 et non le 30 avril 2018 ;

En conséquence,

- Dire et juger que la résiliation du contrat de licence de marque du 22 juillet 2002 à effet du 31 mai 2017 n'est pas fautive ;

- Débouter la société Le Relais de la Forme de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Sur la prétendue rupture brutale des relations commerciales

A titre principal :

- Dire et juger irrecevables les demandes de la société Le Relais de la Forme fondées sur la rupture brutale des relations commerciales ;

A titre subsidiaire :

- Dire et juger que la résiliation du contrat de licence de marque du 22 juillet 2002 était prévisible ;

- Dire et juger que le préavis de 10 mois accordé par la société Le Relais de la Forme était suffisant ;

En conséquence,

- Dire et juger que la société Mov'in n'a pas rompu brutalement la relation commerciale avec la société Le Relais de la Forme ;

- Débouter la société Le Relais de la Forme de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Sur les prétendus préjudices subis :

- Dire et juger que la société Le Relais de la Forme ne démontre pas l'existence et la réalité de son préjudice ;

- Dire et juger la société Le Relais de la Forme mal fondée en l'ensemble de ses demandes indemnitaires ;

- Débouter la société Le Relais de la Forme de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

Reconventionnellement :

- Condamner la société Le Relais de la Forme à lui verser la somme de 316.522,50 euros ou subsidiairement 189.107,95 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire ;

Subsidiairement, si la cour retenait la rupture brutale des relations commerciales :

- Condamner la société Le Relais de la Forme à lui verser la redevance contractuelle de licence au prorata des mois de préavis supplémentaires qui lui seraient accordés par la cour au titre de la rupture brutale des relations commerciales ;

Très subsidiairement, si la cour retenait la rupture fautive anticipée du contrat de licence de marque :

- Condamner la société Le Relais de la Forme à lui verser la Somme de 38.489,36 euros TTC.

En tout état de cause :

- Ordonner la compensation judiciaire entre les sommes dues par chacune des parties ;

- Condamner la société Le Relais de la Forme à lui verser la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.

Le litige en appel se présente dans les mêmes termes qu'en première instance, les parties ne critiquant pas le chef du jugement prenant acte de l'abandon par la société Le Relais de la Forme de ses demandes au titre de la dénaturation de la marque, sauf pour la société Le Relais de la Forme de former ses prétentions au titre de la rupture fautive du contrat et de la rupture brutale des relations commerciales à titre principal et subsidiaire.

La cour qui ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif, relève à cet égard que contrairement à ce qui est présenté dans le corps de ses écritures, l'appelante forme dans le dispositif de celles-ci, la demande au titre de la rupture brutale des relations commerciales à titre principal et celle au titre de la rupture fautive dudit contrat à titre subsidiaire.

Sur la violation de la clause d'exclusivité territoriale visée au contrat de licence en date du 22 juillet 2002.

Selon l'article 2-1 de la « convention de licence de la marque Moving et d'affiliation au réseau Moving » en date du 2 juillet 2002 liant les parties, « La zone d'exclusivité limitativement définie pour l'application des présentes est fixée, d'accord entre les parties aux secteurs de [Localité 4]-[Localité 5]. Le Concédant s'engage donc à préserver l'intégrité territoriale ci-dessus définie au bénéfice du Licencié et ce pendant toute la durée du contrat, en s'interdisant de créer directement ou indirectement un Club sous enseigne MOVING ou de concéder un autre contrat de licence de la marque MOVING sur ce territoire ».

La société Le Relais de la Forme reproche à la société Mov'in d'avoir autorisé l'installation d'un club affilié au réseau "Fitness Park by Moving" à [Localité 5] et d'avoir ainsi violé la clause d'exclusivité géographique prévue au contrat du 22 juillet 2002 en présentant ce club sous la dénomination "Fitness Park by Moving" sur son site internet.

La société Mov'in conteste avoir autorisé en 2013 la société Pdf Def à ouvrir un centre "Fitness Park by Moving" en violation de la clause d'exclusivité précitée, ce club n'exploitant pas la marque "Fitness Park by Moving" mais la marque "Fitness Park" puis la marque "Fitness Park Le sport pour tous !"

La société Le Relais de la Forme sur qui pèse la charge de la preuve du manquement au contrat qu'elle allègue, n'invoque pas utilement le refus de la société Mov'in de lui fournir la copie du contrat de licence que cette dernière a conclu avec la société Pdf Def pour l'ouverture du centre "Fitness Park" d'[Localité 5].

De même, elle ne peut tirer argument d'une documentation d'information pré contractuelle citant notamment l'enseigne "Fitness Park by Moving" parmi les autres signes distinctifs utilisés par l'intimée, de documents commerciaux, d'un dossier de presse ou d'un contrat type de la marque "Fitness Park by Moving" non renseigné, ces documents en concernant pas une salle de sport sise à [Localité 5], ou encore du contrat de « licence de la marque Fitness Park by Moving et d'affiliation au réseau Fitness Park by Moving » conclu le 30 juin 2010 entre la société Mov'in et la société Pdf Def, cette convention concernant un établissement situé dans le quartier d'affaires de La Défense et non à [Localité 5].

Les déductions faites par l'appelante selon lesquelles il ressort de ces éléments que l'établissement "Fitness Park" ouvert en 2013 à [Localité 5] utilise le signe "Fitness Park by Moving" est en outre démentie par le procès-verbal de constat dressé par huissier de justice le 27 novembre 2015 à la demande de l'intimée (pièce 23 Mov'in) sur le site de l'établissement Fitness Park sis à [Localité 5], l'huissier instrumentaire constatant que seuls les signes "Fitness Park" ou « Fitness Park le sport pour tous » sont utilisés tant comme enseigne que sur les diverses signalétiques ou supports publicitaires au sein du club de sport. L'appelante ne peut être suivie lorsqu'elle affirme que ce club étant alors géré par l'intimée, celle-ci a pu retirer toute mention qui l'incriminerait avant le passage de l'huissier de justice, ces allégations n'étant corroborées par aucun autre élément.

Il n'est en outre nullement démontré par l'appelante qu'antérieurement à l'année 2015 était utilisé le signe "Fitness Park by Moving" notamment sur le site d'[Localité 5], la force probante des copies d'écran de sites Internet qu'elle verse au débat dont la date et les circonstances de fixation ne sont pas connues est à juste titre contestée par l'intimée et ne peuvent être retenues par la cour. L'extrait de la décision du tribunal de grande instance de Paris en date du 17 janvier 2017 fournie par l'appelante et statuant en matière de clauses illicites et abusives n'est pas plus pertinente, le dispositif de ce jugement faisant état du contrat d'adhésion et d'enseigne "Fitness Park by Mov'in" et non "by Moving" et ne vise pas le site d'Issy Les Moulineaux.

Enfin, le procès-verbal de constat dressé à la demande de l'appelante le 30 octobre 2019 (pièce 31 Le relais de la forme) par lequel l'huissier de justice saisi dans le moteur de recherche "Google" la requête "by Moving [Localité 5]", aboutit sur le site actobi.com qui propose une offre de chèque sport et bien-être et qui mentionne que son offre concerne les établissements "Fitness Park groupe Moving" ou utilise le logo "Fitness Park by Moving" en relation notamment avec le site d'[Localité 5], n'est pas opposable à l'intimée, les usages allégués étant le fait d'un tiers, la société Mov'in n'étant pas l'éditrice du site en cause.

Il ressort de ce qui précède que la société Le Relais de la Forme échoue à démontrer que la société Mov'in a violé l'obligation d'exclusivité prévue au contrat du 22 juillet 2002 et doit être déboutée de ses demandes à ce titre.

Le jugement déféré doit en conséquence être confirmé de ce chef.

Sur l'exécution déloyale et fautive du contrat

La société Le Relais de la Forme reproche à la société Mov'in d'avoir développé un nouveau concept "low cost" en utilisant la notoriété de la marque MOVING et d'avoir donné aux clubs exploitant son concept à bas prix Fitness Park les outils leur permettant de capter la clientèle des membres du réseau Moving, ce en contravention avec le contrat de licence du 22 juillet 2002.

La société Mov'in oppose aux demandes de la société Le Relais de la Forme au titre de l'exécution déloyale du contrat en raison de l'exploitation du concept "low cost" de salles de sport lié aux marques "Fitness Park by Moving" ou "Moving express", une fin de non-recevoir fondée sur l'article 2224 du code civil aux motifs que l'appelante avait connaissance depuis plus de cinq ans avant le 30 mai 2017, date de l'assignation devant le tribunal, de ce concept.

Néanmoins, si la société Le relais de la Forme mentionne dans ses écritures que la société Mov'in a lancé son concept "low cost" en 2009 et que l'intimée montre que les marques "Fitness Park by Moving" ou "Moving express" ont été respectivement publiées le 17 mai 2010 et le 15 juillet 2011, ces circonstances sont insuffisantes à montrer que la société Le Relais de la Forme avait connaissance de l'implantation de ces salles "low cost" à ces dates, aucun élément ne venant établir que ces faits ont été portés à sa connaissance antérieurement au 30 mai 2012.

A ce titre, la société Mov'in ne peut invoquer comme point de départ du délai de prescription la date du 17 mai 2010, date de publication de la marque "Fitness Park by Moving", la publication d'une demande d'enregistrement de marque ne pouvant être considérée comme portant à la connaissance de l'appelante de l'existence d'un nouveau concept de salles de sport à bas prix exploitées sous ce signe distinctif.

La fin de non-recevoir de la société Mov'in doit être rejetée et le jugement également confirmé de ce chef.

Sur le fond, la cour relève que les dispositions de la « convention de licence de la marque Moving et d'affiliation au réseau Moving » du 22 juillet 2002 et particulièrement ses articles 1-1, 1-2, 5-4 et 5-5 invoqués par l'appelante, si elles prévoient le droit pour la société Le relais de la Forme d'exploiter la marque MOVING dont est titulaire la société Mov'in notamment à titre d'enseigne dans les secteurs géographiques concédés, et que le licencié s'engage à participer à la promotion de la marque et à utiliser le thème de communication adoptés, n'interdisent pas à la société Mov'in de faire évoluer son concept pour répondre à la demande de la clientèle des salles de sport et de proposer également des abonnements moins chers correspondant à une offre de services réduits, sachant que le concept 'bas coût' ainsi que montré par l'intimée, propose un libre accès des adhérents aux machines mises en place pour pratiquer une activité physique sans accompagnement ni suivi de l'adhérent, à la différence des services offerts sous l'enseigne MOVING qualifiés de concept "High cost" par l'appelante qui propose des cours collectifs ou individuels dispensés par du personnel qualifié.

La société Mov'in pouvait donc sans contrevenir à l'exécution loyale du contrat autoriser une autre société à installer un club « Fitness Park » à [Localité 5].

De même, le contrat de licence précité n'interdit nullement au titulaire de la marque de la décliner en "Fitness club by Moving" pour désigner ce nouveau concept, aucune exécution déloyale du contrat ne pouvant être déduite de cette utilisation, la marque MOVING n'étant pas utilisée seule et la clientèle visée par le concept "low cost" n'étant pas la même que celle fréquentant les salles de sport exploitées par l'appelante à la recherche d'un service plus complet et encadré par des professionnels, ce quand bien même il n'est pas discuté que la marque MOVING et le concept qui y est associé jouissent d'une certaine notoriété.

A cet égard, il n'est pas montré par l'appelante que le concept bas prix Fitness Park a évolué vers un service quasi-identique à celui offert par des licenciés Moving. En effet, le rapport en date du 28 juin 2018 établi par un enquêteur privé qu'elle fournit au débat (pièce 43 Le relais de la Forme), dans lequel ce dernier fait état de constatations non pas depuis la voie publique mais dans l'enceinte même de trois établissements, en se présentant comme un simple client sans révéler sa qualité d'enquêteur privé et le but de sa visite, ne peut être retenu par la cour, les vérifications étant effectuées de manière clandestines et déloyales en ayant recours à un stratagème.

En outre, l'appelante ne prouve pas ses allégations selon lesquelles la société Mov'in a développé une application smart phone pour permettre au consommateur de trouver un club Moving le plus proche et le moins cher pour détourner le public du club Moving pour se diriger vers le club Fitness Park d'[Localité 5], aucun élément ne venant montrer l'existence de cette application, certaines pièces fournies au débat n'étant pas datées et leurs circonstances de fixation inconnues de la cour qui ne peut les retenir faute de caractère probant, et les extraits de presse fournis évoquant dans les grandes lignes cette application ne venant pas corroborer les fonctionnalités de celle-ci qui, selon l'intimée, n'a jamais vu le jour.

L'appelante n'établit pas plus que la société Mov'in n'a pas respecté son engagement de promouvoir les clubs MOVING et la marque éponyme en application de l'article 6-1 de la convention du 22 juillet 2002, les déclarations dans la presse du dirigeant de la société Mov'in pour mettre en valeur le nouveau concept "Fitness Park" sans référence au réseau MOVING n'étant pas suffisantes à montrer la défaillance de l'intimée à respecter son obligation d'exécution loyale du contrat et qu'elle a comme l'allègue à tort l'appelante, utilisé en contravention des dispositions du contrat la notoriété de la marque MOVING pour développer le seul réseau "Fitness Park". La circonstance selon laquelle le nombre de club MOVING est en baisse alors que celui des Fitness Park connaît une hausse ne caractérise pas plus une exécution déloyale du contrat, la société Mov'in n'ayant aucune obligation de maintenir un nombre élevé de clubs MOVING, étant relevé avec l'intimée que celle-ci a ouvert deux nouveaux clubs MOVING en 2017 à [Localité 6] et à [Localité 7] et montre par les éléments qu'elle verse au débat qu'elle n'a pas cessé de faire la promotion de ce concept notamment par la mise en place d'un "CLUBMOVING".

La pratique de prix inférieurs pour la fourniture d'un service différent et beaucoup plus simple ainsi que précédemment relevé ne caractérise pas un défaut d'exécution loyale par la société Mov'in des dispositions de l'article 5 du contrat prévoyant des tarifs conseillés à respecter dans le réseau MOVING.

Le non-respect de la clause d'exclusivité n'ayant pas été retenu, la société Le Relais de la Forme ne peut pas plus invoquer une implantation déloyale et fautive du club Fitness Park à [Localité 5] aux motifs que le contrat n'a pas été exécuté de bonne foi. Il ressort en effet de ce qui précède que l'exploitation par la société Pdf Def, sur autorisation de la société Mov'in, d'un club Fitness Park à proximité du club MOVING de la société Le Relais de la Forme sur sa zone d'exclusivité géographique ne caractérise pas une exécution déloyale du contrat de licence du 22 juillet 2002.

Il convient donc de considérer qu'aucune exécution déloyale du contrat du 22 juillet 2002 ne peut être reprochée à la société Mov'in et de rejeter l'ensemble des demandes de la société Le Relais de la Forme formées à ce titre.

Le jugement sera également confirmé de ce chef.

Sur la rupture brutale des relations commerciales établies.

Aux termes de l'article L. 442-6 I 5° du code de commerce applicable à la présente espèce, la rupture litigieuse ayant été notifiée à la société Le Relais de la Forme antérieurement au 26 avril 2019.

I. Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel personne immatriculée au répertoire des métiers :

5° « De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. ... Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure. »

La société Mov'in ne développe dans ses écritures aucun moyen à l'appui de sa demande tendant à voir déclarer irrecevable la demande de la société Le Relais de la Forme au titre de la rupture brutale de leur relation. Si les motifs retenus par le tribunal pour déclarer irrecevables les demandes de la société Le Relais de la Forme tirés de la règle de non cumul des responsabilités délictuelles et contractuelles peuvent être considérés comme adoptés par la société Mov'in qui sollicite la confirmation du jugement de ce chef, il convient de relever que ces demandes sont désormais présentées à la cour à titre principal pour la rupture brutale et à titre subsidiaire pour la rupture anticipée et abusive et que la fin de non-recevoir tirée du principe de non cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle ne peut pas être retenue étant rappelé que ce principe interdit seulement au créancier d'une obligation contractuelle de se prévaloir, contre le débiteur de cette obligation, des règles de la responsabilité délictuelle et n'interdit pas la présentation d'une demande distincte, fondée sur l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce, qui tend à la réparation d'un préjudice résultant non pas d'un manquement contractuel mais de la rupture brutale d'une relation commerciale établie.

Le caractère établi de la relation commerciale entre les parties n'est pas discuté. Seul est en question le délai de préavis accordé par la société Mov'in auteur de la rupture à la société Le Relais de la Forme.

Par lettre du 22 juillet 2016, la société Mov'in notifiait en effet à la société Le Relais de la Forme la résiliation du contrat de licence les liant avec effet au 31 mai 2017. Un préavis de 10 mois a donc été accordé à la société Le Relais de la Forme.

La société Le Relais de la Forme considère ce préavis comme manifestement insuffisant et réclame l'application d'un préavis d'une durée de 24 mois.

Le délai de préavis doit permettre à la partie qui se voit rompre le contrat de prendre ses dispositions et de donner en temps utile une nouvelle orientation à ses activités, de retrouver d'autres partenaires.

L'appréciation de la durée du préavis se fait au moment où la décision de rupture est signifiée soit en l'espèce le 22 juillet 2016. Le délai du préavis suffisant s'apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances au moment de la notification de la rupture.

Il n'est pas discuté que la relation commerciale entre les parties a duré 24 ans. Il convient également de prendre en considération le fait que la fin des relations commerciales prive la société Le Relais de la Forme de son enseigne qu'elle utilisait depuis plus de deux décennies et qui est un élément de ralliement de la clientèle, étant également relevé que les dispositions de l'article 13 de la convention rappelées dans la lettre de rupture, l'oblige à exploiter son centre sous sa propre enseigne, sous son propre nom et à titre indépendant, la société Le Relais de la Forme s'obligeant pendant une durée de 12 mois à compter de la rupture effective à ne pas adhérer à un réseau concurrent.

Au vu de ce qui précède, la durée de la relation commerciale et les difficultés de réorganisation de la société Le Relais de la Forme liées à la perte d'un des éléments essentiels de son fonds de commerce et à l'impossibilité de rejoindre immédiatement après la rupture un autre réseau, la cour dispose d'éléments suffisants pour fixer à dix-huit mois la durée de préavis, ce quand bien même les relations des parties se sont détériorées antérieurement à la notification de la rupture en date du 22 juillet 2016 en raison de l'assignation en référé délivrée le 23 septembre 2015 par la société Le relais de la Forme ou des retards de cette dernière dans le paiement des redevances dues à la société Mov'in, ces seules circonstances ne pouvant permettre de considérer comme le soutient à tort la société Mov'in que la société Le Relais de la Forme est à l'origine de la rupture de leur relation.

En conséquence, en accordant un préavis insuffisant de 10 mois au lieu de 18 mois, les relations entre les parties s'étant effectivement terminées le 31 mai 2017, la société Mov'in a rompu brutalement les relations commerciales nouées avec la société Le Relais de la forme.

Le jugement entrepris est donc infirmé en ce qu'il a considéré comme non-recevables les demandes au titre de la rupture brutale des relations commerciales par la société Le Relais de la Forme.

Sur le prejudice,

La victime d'une rupture brutale de relations commerciales établies peut demander réparation au titre du gain manqué correspondant à la marge qu'elle pouvait escompter tirer de ses relations commerciales avec le partenaire fautif pendant la durée du préavis qui aurait dû être respecté.

En conséquence, le préjudice de la société Le Relais de la Forme correspond à la marge sur coût variable perdue pendant les huit mois de préavis manquants et non au revenu qu'elle aurait perçu pendant ce préavis.

Il ressort des éléments fournis au débat que la société Le Relais de la Forme a réalisé un chiffre d'affaires HT en 2014 de 1.224.816 euros, en 2015 de 1.075.972 et en 2016 de 1.095.426 euros. Les chiffres du rapport établi par la société Cotranex à la demande de la société Le Relais de la Forme et concernant l'étude des conséquences financières de l'implantation de Fitness Park en 2012 ne peuvent être tenus pour pertinents, ces chiffres prenant en considération un chiffre d'affaires théorique que la société Le Relais de la Forme aurait dû réaliser sans l'implantation du club Fitness Park.

La société Le Relais de la Forme affirme que sa marge brute est de 99,09 %, l'attestation des experts comptables (pièce 42 Le Relais de la Forme) ne corroborant nullement cette marge brute qui est utilement contestée par la société Mov'in, étant relevé que doivent être prises en considération les charges liées au local commercial nécessaire à l'exercice de l'activité ainsi que les charges liées aux salariés.

Il convient d'appliquer en considération de l'activité de club de remise en forme et des éléments dont dispose la cour un taux de marge de 50 % à ce revenu moyen total de1.132.071 euros HT, soit 566.035 euros annuel.

Le préjudice de la société Le Relais de la Forme est en conséquence de 377.356,66 euros (566.035/12x8).

La société Mov'in sera en conséquence condamnée à lui payer cette somme. La capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-1 du code civil sera en outre ordonnée.

La demande de la société Le relais de la Forme au titre de la résiliation anticipée du contrat étant présentée à titre subsidiaire, il n'y a pas lieu à statuer sur ce point.

La demande de la société Le Relais de la Forme tendant au remboursement du montant des honoraires de la société Cotranex n'étant pas justifiée, sera rejetée.

Sur la demande reconventionnelle de la société Mov'in.

L'exercice d'une action en justice constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à des dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, d'erreur grossière équipollente au dol ou de légèreté blâmable.

Outre que la société Mov'in ne rapporte pas la preuve d'une telle faute, les demandes en appel de la société Le Relais de la Forme formées contre la société Mov'in ont partiellement prospéré. En conséquence, la société Mov'in est déboutée de ses prétentions au titre de la procédure abusive et le jugement confirmé de ce chef.

Sur la demande de la société Mov'in au titre du paiement des redevances.

La société Mov'in réclame le paiement du montant de la redevance de marque qui aurait été due pendant le délai de préavis retenu en cas de reconnaissance d'une rupture brutale de la relation commerciale.

Néanmoins, le contrat de licence de marque a été résilié avec effet au 31 mai 2017, et il n'est pas montré ni allégué que la société Le Relais de la Forme a continué à utiliser cette marque après cette date. En conséquence la demande en paiement des redevances n'est pas fondée et sera rejetée.

Le jugement entrepris mérite également confirmation de ce chef.

Sur les autres demandes

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer les dispositions du jugement concernant les dépens et les frais irrépétibles.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles exposés pour le procès, les demandes respectives formées en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sont en conséquence rejetées.

Chacune des parties qui succombe partiellement à la procédure conservera la charge de ses dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'elles déclarent irrecevables les demandes de la société Le Relais de la Forme au titre d'une rupture abusive et d'une rupture brutale du contrat de 2002.

Statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la société Mov'in à payer à la société Le Relais de la Forme la somme de 377.356,66 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à la brutalité de la rupture des relations commerciales établies.

Ordonne la capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-1 du code civil.

Y ajoutant,

Rejette la demande de la société Le Relais de la Forme de remboursement des honoraires de la société Cotranex.

Rejette toute autre demande.

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des frais irrépétibles.

Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel.