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Décisions

CA Metz, 3e ch., 14 novembre 2019, n° 17/01695

METZ

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Carmat (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Guiot-Mlynarczyk

Conseillers :

M. Lambert, M. Michel

TI Metz, du 1 juin 2017, n° 16/01107

1 juin 2017

EXPOSE DU LITIGE :

Par ordonnance sur requête du 20 octobre 2014 signifiée le 19 novembre 2014 à personne, le juge de l'exécution a ordonné à M. Jean-Marc J. de restituer à la SAS Carmat'un receveur Parcelanosa référence « Spirit P. Doucha A-Cero Dark » L173300292 170x80x5 d'une valeur de 1.600,21 euros HT et un lavabo Parcelanosa référence « Spirit A-Cero Dark » L171301224 d'une valeur de 1.886,46 euros HT.

Un certificat de non-opposition a été délivré le 23 janvier 2015.

Par acte d'huissier du 15 avril 2016, la SAS Carmat a assigné M. J. devant le tribunal d'instance de Metz aux fins d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 4.883,77 euros correspondant au prix des marchandises vendues non restituées, outre 139,57 euros correspondant aux frais d'huissier engagés dans la procédure d'injonction de restituer et une indemnité au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. J. s'est opposé à ces demandes.

Par jugement du 1er juin 2017, le juge d'instance de Metz a':

- constaté que la SAS Carmat bénéficie d'un titre exécutoire à l'encontre de M. J. portant sur la restitution en nature de marchandises livrées et que M. J. n'a pas restitué les marchandises litigieuses

- condamné en conséquence M. J. à payer à la SAS Carmat la somme de 4.184 euros à titre de dommages et intérêts résultant de l'inexécution de l'obligation de faire

- condamné M. J. à payer à la SAS Carmat la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens en ce compris les frais de signification de l'ordonnance du 20 octobre 2014 d'un montant de 139,57 euros.

Le tribunal a constaté que l'obligation de faire de M. J. résultait d'un titre exécutoire, qu'il ne rapportait pas la preuve de ce que les marchandises avaient été récupérées par la SAS Carmat, que la couleur du receveur est sans importance et que M. J. ne démontrant pas avoir exécuté l'obligation mise à sa charge, il devait être condamné au versement de dommages et intérêts d'un montant équivalent à la valeur des biens non restitués.

Par déclaration déposée au greffe de la cour le 19 juin 2017, M. J. a interjeté appel total de cette décision.

Il conclut à l'infirmation du jugement déféré et demande à la cour de débouter la SAS Carmat de sa demande en paiement de la somme de 4.883,77 euros et de sa demande au titre des frais irrépétibles et de la condamner à lui verser 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'appelant expose qu'il souhaitait former opposition à l'encontre de l'ordonnance rendue sur requête, mais qu'il a mal dirigé son recours et que l'ordonnance d'injonction a été rendue de façon non contradictoire au vu des seuls arguments de la SAS Carmat. Il précise que celle-ci ne conteste pas que les matériaux installés dans sa salle de bains ont été refusés comme n'étant pas conformes à la commande, qu'elle a reconnu dans la cadre de la première instance avoir établi un avoir à son profit, ce qui a eu pour effet d'annuler la vente et de lui redonner la qualité de propriétaire des biens. Il soutient que les risques de la chose pèsent sur la SAS Carmat, qu'il lui appartenait de venir récupérer son matériel, que la preuve de cette reprise résulte de l'établissement d'un avoir de 4.883,77 euros le 26 mars 2014 et ajoute ne pas pouvoir exécuter l'injonction de faire dans la mesure où le matériel n'est plus en sa possession.

La SAS Carmat conclut à la confirmation du jugement et demande à la cour de déclarer M. J. irrecevable et subsidiairement mal fondé en l'ensemble de ses demandes et de le condamner à lui verser les sommes de 500 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et 1.200 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.

Elle expose avoir émis un avoir au profit de M. J. lorsqu'il a refusé le matériel livré, ce qui constitue une résolution amiable de la vente et emporte obligation pour l'acquéreur de restituer les marchandises. Elle conteste avoir repris le matériel, ce qui ne résulte d'aucune pièce, et fait observer que l'appelant reconnaît que le chantier de la maison était ouvert toute la journée à toutes les entreprises qui y travaillaient, en déduisant qu'il n'a pas assumé la garde et la conservation de la marchandise qui a pu être volée. Elle précise que l'existence de l'obligation de restitution incombant à M. J. n'est pas contestable puisqu'elle résulte d'une décision définitive et qu'en l'absence d'exécution, la cour doit confirmer les dommages et intérêts alloués par le tribunal. Sur la règle res perit domino, elle expose que M. J. ne peut s'exonérer de sa propre négligence pour ne pas restituer les biens, et rappelle que s'agissant de l'exécution d'une obligation de restitution suite à la résolution amiable de la vente, il doit assumer les risques de pertes, de détérioration ou de vol, y compris s'il est de bonne foi, sur le fondement de l'article 1379 du code civil. L'intimée conclut en conséquence à la confirmation du jugement outre l'allocation de dommages et intérêts pour procédure abusive, M. J. ayant agi avec légèreté sans argument sérieux.

MOTIFS DE LA DECISION :

Vu les écritures déposées le 19 septembre 2017 par M. J. et le 31 octobre 2017 par la SAS Carmat, auxquelles la Cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens ;

Vu l'ordonnance de clôture du 9 mai 2019 ;

Sur la recevabilité des demandes

Si, au dispositif de ses conclusions d'appel, la SAS Carmat demande à la cour de déclarer irrecevables les demandes de M. J., il est constaté qu'elle ne fait valoir aucun moyen à l'appui de cette demande, qui ne peut qu'être rejetée.

Sur la demande de dommages et intérêts résultant de l'inexécution de l'obligation de faire

Par ordonnance sur requête du 20 octobre 2014, le tribunal d'instance de Metz a ordonné à M. J. de restituer à la SAS Carmat un receveur Parcelanosa référence « Spirit P. Doucha A-Cero Dark » L173300292 170x80x5 d'une valeur de 1.600,21 euros HT ainsi qu'un lavabo Parcelanosa référence « Spirit A-Cero Dark » L171301224 d'une valeur de 1.886,46 euros HT. Il est constant qu'aucune opposition n'a été régulièrement formée à l'encontre de cette décision, de sorte que l'ordonnance étant devenue définitive, elle bénéfice de l'autorité de la chose jugée. Il s'ensuit que M. J. ne peut plus contester l'obligation de restitution des biens litigieux à la SAS Carmat et c'est à juste titre que le premier juge a constaté que l'obligation de faire de M. J. résultait d'un titre exécutoire.

La charge de la preuve de l'exécution d'une obligation de faire pèse sur le débiteur de l'obligation, en l'occurrence M. J..

C'est à juste titre et par des motifs pertinents que la cour adopte, que le tribunal a relevé que M. J. ne justifiait par aucune pièce de la restitution effective du matériel à l'intimée, alors qu'il admet avoir été livré de ces matériels et qu'il ne démontre pas plus qu'un préposé de la SAS Carmat serait venu récupérer les marchandises à son domicile. C'est à bon droit que le premier juge a relevé qu'il importait peu que le receveur installé dans son actuelle salle de bains soit d'une couleur différente de celle commandée auprès de la SAS Carmat, cet élément étant insuffisant à établir la réalité de la restitution. Enfin, la simple émission par la société intimée d'un avoir de la valeur de la marchandise ne peut valoir reconnaissance implicite de restitution des meubles, cet avoir étant seulement la preuve que la SAS Carmat a accepté la résolution amiable de la vente et restitué sous forme d'avoir le prix d'achat. Il appartenait à M. J. qui avait la garde des biens livrés d'assurer la restitution de ces biens auprès du vendeur et d'en justifier.

Il s'ensuit que M. J. ne démontrant pas avoir exécuté l'obligation de faire mise à sa charge et l'exécution en nature étant impossible puisqu'il admet que les biens ne sont plus en sa possession, le tribunal a exactement dit qu'en application de l'article 1142 du code civil, il devait indemniser la SAS Carmat en lui réglant la valeur marchande des biens litigieux, soit la somme de 4.184 euros. En conséquence, il convient de confirmer le jugement ayant condamné M. J. à verser à la SAS Carmat la somme de 4.184 euros à titre de dommages et intérêts résultant de l'inexécution de son obligation de faire.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

L'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit qui ne dégénère en abus pouvant donner lieu à des dommages et intérêts que s'il caractérise un acte de mauvaise foi ou de malice ou une erreur grossière équipollente au dol.

En l'espèce, il est constaté que la SAS Carmat ne démontre ni l'existence d'une telle attitude de la part de M. J. rendant abusive l'action ni même l'existence d'un dommage. Il convient en conséquence de la débouter de sa demande de dommages et intérêts.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

M. J., partie perdante, devra supporter les dépens et il est équitable qu'il soit condamné à verser à la SAS Carmat la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme déjà allouée en première instance. Il convient en outre de le débouter de sa propre demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

DEBOUTE la SAS Carmat de sa demande tendant à l'irrecevabilité des demandes de M. Jean-Marc J. ;

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :

- constaté que la SAS Carmat bénéficie d'un titre exécutoire à l'encontre de M. Jean-Marc J. portant sur la restitution en nature de marchandises livrées et que M. Jean-Marc J. n'a pas restitué les marchandises litigieuses

- condamné M. Jean-Marc J. à payer à la SAS Carmat la somme de 4.184 euros à titre de dommages et intérêts résultant de l'inexécution de l'obligation de faire

- condamné M. Jean-Marc J. à payer à la SAS Carmat la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens, en ce compris les frais de signification de l'ordonnance du 20 octobre 2014 d'un montant de 139,57 euros ;

Y ajoutant,

DEBOUTE la SAS Carmat de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif ;

CONDAMNE M. Jean-Marc J. à verser à la SAS Carmat une somme de 1.200 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE M. Jean-Marc J. de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE M. Jean-Marc J. aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de chambre à la Cour d'Appel de METZ et par Madame TRAD-KHODJA, Greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.