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Décisions

Cass. com., 9 mars 2022, n° 19-25.704

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Mollard

Rapporteur :

Mme de Cabarrus

Avocats :

SCP Boullez, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Aix-en-Provence, du 17 oct. 2019

17 octobre 2019

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 octobre 2019), par acte du 13 septembre 2013, la société Océanis promotion a signé une promesse unilatérale de vente portant sur plusieurs parcelles de terrain en vue de la construction de logements, la société à responsabilité limitée Cofimo étant intervenue dans cette opération en qualité d'apporteur d'affaires. Un riverain ayant menacé de déposer un recours contre le permis de construire qui avait été accordé, la société Océanis promotion a signé avec lui un protocole d'accord prévoyant le versement d'une indemnité transactionnelle de 60 000 euros. Prétendant que la société Cofimo s'était engagée à prendre en charge la moitié de cette somme, la société Océanis promotion l'a assignée en paiement.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. La société Cofimo fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Océanis promotion la somme de 30 000 euros avec intérêts légaux, alors :

« 1°/ que seul le gérant de la SARL est investi du pouvoir d'agir au nom de la personne morale à l'égard des tiers ; que sa nomination et la cessation de ses fonctions sont soumises à des règles de publicité qui tiennent en échec la théorie du mandat apparent ; qu'en décidant, en application de la théorie du mandat apparent, que la société Océanis promotion avait pu légitimement croire que M. [P] avait le pouvoir de prendre la décision de réduire les honoraires d'apporteur d'affaires d'une petite société comme la société Cofimo, dont il n'était pourtant que le salarié, du seul fait qu'il était son unique interlocuteur concernant la question de la rémunération dans trois mails, qu'il a déclaré intervenir pour le compte de cette société en terminant ses messages par "pour Cofimo", en employant le terme "nous" pour désigner la société Cofimo, et qu'elle envoyait tous ses courriels à l'adresse mail de la société Cofimo, et non à l'adresse mail personnelle de M. [P], la cour d'appel a violé les articles 1984 et 1998 du code civil, ensemble l'article L. 223-18, alinéa 5, du code de commerce ;

2°/ que si le mandant peut être engagé sur le fondement d'un mandat apparent, même en l'absence d'une faute susceptible de lui être reprochée, ce n'est qu'à la condition que la croyance du tiers à l'étendue des pouvoirs du mandataire soit légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisaient le tiers à ne pas vérifier les limites exactes de ces pouvoirs ; qu'en décidant, en application de la théorie du mandat apparent, que la société Océanis promotion avait pu légitimement croire que M. [P] avait le pouvoir de prendre la décision de réduire les honoraires d'apporteur d'affaires d'une petite société comme la société Cofimo, dont il n'était pourtant que le salarié, du seul fait qu'il était son unique interlocuteur concernant la question de la rémunération dans trois mails, qu'il a déclaré intervenir pour le compte de cette société en terminant ses messages par "pour Cofimo", en employant le terme "nous" pour désigner la société Cofimo, et qu'elle envoyait tous ses courriels à l'adresse mail de la société Cofimo, et non à l'adresse mail personnelle de M. [P], la cour d'appel s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser les circonstances l'autorisant à ne pas vérifier les pouvoirs du préposé de la société Cofimo ; qu'ainsi, elle a privé sa décision de base légale au regard des articles 1984 et 1998 du code civil, ensemble l'article L. 223-18, alinéa 5, du code de commerce. »

Réponse de la Cour

3. D'une part, le seul fait que la nomination et la cessation des fonctions de gérant de société à responsabilité limitée soient soumises à des règles de publicité légale ne suffit pas à exclure qu'une telle société puisse être engagée sur le fondement d'un mandat apparent. Le grief de la première branche, qui postule le contraire, manque en droit.

4. D'autre part, il résulte des articles 1985 et 1998 du code civil qu'une personne peut être engagée sur le fondement d'un mandat apparent lorsque la croyance du tiers aux pouvoirs du prétendu mandataire a été légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisaient ce tiers à ne pas vérifier lesdits pouvoirs.

5. L'arrêt constate que, s'agissant de la rémunération de la société Cofimo, la société Oceanis promotion avait pour seul interlocuteur M. [P], salarié de cette petite société, que ce dernier a déclaré, dans trois courriels adressés à la société Océanis promotion, qu'il intervenait pour le compte de la société Cofimo, en employant le terme « nous » pour la désigner et en terminant ses messages par les mots « Pour Cofimo », et que la société Océanis promotion envoyait ses propres courriels à l'adresse mail de la société Cofimo et non à l'adresse mail personnelle de M. [P]. Il en déduit que la société Océanis promotion a pu légitimement croire que M. [P], qui a confirmé par écrit l'engagement de la société Cofimo concernant la rétrocession d'honoraires, avait le pouvoir de prendre la décision de réduire les honoraires d'apporteur d'affaires de cette société. En l'état de ces constatations et appréciations, caractérisant les circonstances autorisant la société Océanis promotion à ne pas vérifier les pouvoirs de M. [P], la cour d'appel a légalement justifié sa décision.

6. Par conséquent, le moyen n'est pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.