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Décisions

Cass. soc., 7 juillet 2021, n° 18-18.943

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Leprieur

Rapporteur :

M. Pietton

Avocats :

SCP Piwnica et Molinié, SCP Boutet et Hourdeaux

Bordeaux, du 25 avr. 2018

25 avril 2018

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 25 avril 2018) et les productions, M. [W] a été engagé à compter du 1er octobre 1989 par la société Esprit club communication (la société) en qualité de rédacteur en chef pour l'édition de la revue de l'association les Girondins de Bordeaux football club (l'association).

2. La société a été placée en redressement judiciaire par jugement du 16 avril 1991 du tribunal de grande instance, déjà saisi de la procédure collective ouverte à l'égard de l'association. Après la cession des éléments d'actif, la procédure collective de la société a été clôturée par jugement du 16 mai 2001.

3. Le salarié a été licencié pour motif économique le 17 mai 1991. Le représentant des créanciers a établi un relevé des créances salariales pour un montant total de 487 177 francs. L'AGS, faisant application du plafond 4 de garantie, a limité son avance à la somme de 181 440 francs.

4. L'AGS ayant rejeté la demande du salarié faite le 4 mars 2013 d'appliquer le plafond 13 de garantie pour la prise en charge de l'indemnité contractuelle de licenciement, ce dernier a saisi la juridiction prud'homale le 13 juin 2013.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deux premières branches

Enoncé du moyen

5. L'AGS et l'UNEDIC font grief à l'arrêt de déclarer régulière la procédure et recevable l'action du salarié en contestation du refus de garantie de l'AGS, de mettre hors de cause le représentant des créanciers, de dire l'AGS tenue à garantie et la condamner à verser entre les mains du greffier du tribunal de grande instance une certaine somme pour le compte de M. [W] sur présentation d'un relevé complémentaire de créance établi par le greffier à charge pour celui-ci de reverser la somme au salarié, alors :

« 1°/ qu'en application de l'article 125 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, le contentieux relatif au refus de garantie de l'AGS et justifiant la saisine de la juridiction prud'homale doit intervenir en présence des organes de la procédure collective et du débiteur appelé dans la cause ; que la clôture de la procédure collective mettant fin aux missions de ses organes, la procédure prud'homale introduite pour contester le refus de garantie de l'AGS, postérieurement à la clôture de la procédure collective, est irrecevable ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 125 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, devenu l'article L. 625-4 du code de commerce ;

2°/ que seul le mandataire judiciaire, organe de la procédure collective, est habilité à recevoir les sommes destinée au salarié figurant sur un relevé de créance et relevant de la garantie de l'AGS ; qu'en condamnant l'AGS CGEA de Bordeaux à verser entre les mains du greffier du tribunal de grande instance de Bordeaux et pour le compte de M. [W] la somme de 46 609 euros, précisant que le greffier du tribunal de grande instance de Bordeaux adressera un relevé de créances complémentaire au CGEA de Bordeaux et reversera ladite somme à M. [W], la cour d'appel a violé les articles L. 3253-19 et L. 3253-21 du code du travail. »

Réponse de la Cour

6. Aucune forclusion n'est opposable à l'exercice de l'action prévue à l'article 125 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 625-4 du code de commerce, et tendant à contester le refus de l'AGS de régler tout ou partie d'une créance figurant sur un relevé des créances résultant d'un contrat de travail.

7. La cour d'appel a justement décidé que l'action du salarié était recevable malgré la clôture de la procédure collective et que l'AGS, condamnée à garantir la créance salariale litigieuse, devait, en raison de la cessation des fonctions des organes de la procédure collective, et en application de l'article L. 3253-15 du code du travail, en verser le montant entre les mains du greffier du tribunal de grande instance.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

9. L'AGS et l'UNEDIC font le même grief à l'arrêt, alors « que, subsidiairement, le relevé des créances salariales non contesté est porté sur l'état des créances déposé au greffe du tribunal de commerce, cette admission au passif du redressement judiciaire revêtant un caractère irrévocable ; que la limite de garantie opposée par l'AGS à la date de l'établissement du relevé des créances est irrévocable par voie de conséquence ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 625-1 et L. 625-4 du code de commerce, ensemble l'article L. 3253-19 du code du travail. »

Réponse de la Cour

10. Il résulte de l'article 123 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, alors applicable, que le représentant des créanciers n'a pas à se prononcer sur la garantie de l'AGS lors de l'établissement du relevé des créances résultant d'un contrat de travail, l'article 77 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 ne prévoyant pas la mention de la garantie de l'AGS sur ce relevé.

11. Il ne peut en conséquence exister d'indivisibilité entre l'état des créances déposé au greffe du tribunal de la procédure collective, comportant les relevés des créances résultant d'un contrat de travail, et une décision de justice déterminant l'étendue de la garantie de l'AGS.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.