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Décisions

CA Agen, 1re ch. civ., 6 juillet 2022, n° 21/00348

AGEN

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

La Pizzeria (SAS)

Défendeur :

Compagnie des Arceaux (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Gaté

Conseillers :

M. Benon, M. Vidalie

Avocats :

ME Vimont, Me Sabin, Me Guilhot

TJ com. Dax, du 24 Juin 2020, n° 16/0002

24 juin 2020

FAITS :

Par acte sous seing privé du 30 juin 2000, [S] [A]-[P] a donné à bail commercial à la SAS La Pizzeria, pour une durée de 9 ans, des locaux dépendant d'un immeuble situé à [Adresse 5], comprenant un magasin avec premier étage et sous-sol, constitué de 9 lots de copropriété.

Le bail a pris effet le 1er janvier 2000 pour prendre fin le 31 décembre 2008.

Les parties ont stipulé les clauses suivantes :

'Le preneur pourra exercer tous commerces dans les lieux loués, notamment l'activité exercée actuellement de restaurant-bar-pizzeria, produits italiens à emporter, et ce à l'exception des activités malodorantes et polluantes.'

'En cas de cession de son fonds de commerce ou de son droit au bail par le preneur, tous cessionnaires pourront exercer de la même façon que le cédant toute activité de leur choix, sauf la restriction citée dans la rubrique destination du présent bail (et ce à l'exception des activités malodorantes et polluantes) et ce sans autorisation préalable du bailleur.'.

Le prix annuel du bail a été fixé à 240 000 F (soit 36 587,76 Euros) HT, avec révisions triennales.

A compter du 1er janvier 2006, suite à une révision triennale, le prix annuel du bail a été porté à 43469,26 Euros HT.

Suite à une lettre du 27 juin 2008 émanant du bailleur donnant congé à effet du 31 décembre2008, après off re d'une indemnité d'éviction, les parties se sont opposées en justice.

Cett e procédure a pris fin avec un arrêt rendu le 15 octobre 2018, rectifié le 12 novembre 2018, qui a, essentiellement :

- constaté que M. [A]-[P] a exercé son droit de repentir,

- fixé le montant de l'indemnité d'occupation due par la SAS La Pizzeria à M. [A]-[P] à la somme de66 889,81 Euros par an pour la période du 1er janvier 2009 au 30 juin 2014, ce qui représente la somme de 367 893,95 Euros.

Entre-temps, par signification de mémoire du 4 mai 2016, M. [A]-[P] a entamé la procédure de saisine du juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Dax, afin de voir déplafonner le prix du bail et de le voir fixer à une somme annuelle de 102 600 Euros HT.

Par jugement rendu le 13 septembre 2017, le juge des loyers commerciaux a ordonné une ; expertise confiée à [C] [Y], afin de rechercher les éléments permettant la détermination de la valeur locative des locaux au 1er juillet 2014, et notamment de dire s'il existait une évolution notable des facteurs locaux de commercialité.

M. [Y] a déposé son

rapport le 19 mars 2018

.

Il a calculé une valeur locative moyenne de 270 Euros/m², soit un prix annuel du bail à 66 732Euros HT et expliqué que les locaux donnés à bail, en centre-ville de [Localité 6], constituent un emplacement exceptionnel caractérisé la pérennité des enseignes qui y sont implantées, sans toutefois retenir de modification notable des facteurs de commercialité.

L'instance s'est poursuivie et les parties se sont opposées sur l'évolution des facteurs locaux de commercialité.

M. [A]-[P] a sollicité la fixation du prix annuel du bail à la somme de 102 600 Euros HT en invoquant une évolution des facteurs locaux de commercialité, et la SAS La Pizzeria un plafonnement à 54 966,45 Euros.

Par jugement rendu le 24 juin 2020, le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Dax a :

- constaté l'existence d'une modification notable des facteurs locaux de commercialité ayant une incidence réelle sur le commerce exploité par la SAS La Pizzeria au sein de l'immeuble situé [Adresse 1]) et justifiant le déplafonnement du prix du bail renouvelé au 1er juillet 2014,

- fixé le montant du loyer annuel applicable à compter de cette date à la valeur locative de 78 000Euros HT,

- dit que la SAS La Pizzeria doit les intérêts au taux légal sur la différence entre les loyers versés et les loyers renouvelés dus depuis cette date à compter de chacune de leur date d'exigibilité mensuelle,

- ordonné la capitalisation desdits intérêts en application de l'ancien article 1154 du code civil

,

- dit que les dépens, comprenant les frais de l'expertise réalisée par M. [C] [Y] seront partagés par moitié entre les parties,

- dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile

,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision en toutes ses dispositions.

Le juge des loyers commerciaux a retenu une évolution notable des facteurs locaux de commercialité justifiant le déplafonnement du loyer renouvelé au 1er juillet 2014 et sa fixation à la valeur locative, compte tenu des éléments suivants :

- création d'une médiathèque en décembre 2004,

- réfection de la place Clémenceau achevée en janvier 2007 avec création d'un parking sous-terrain,

- construction d'un spa à l'Hôtel du Palais achevé en 2007,

- édification de l'Hôtel Président,

- création de terrasses et de bars sur l'avenue [Adresse 5],

- sols refaits,

- création d'une navette gratuite de centre-ville, et de la navette '[Localité 6]-Océan' en juillet 2014.

Par acte du 21 juillet 2020, la SAS La Pizzeria a régulièrement déclaré former appel du jugement devant la cour d'appel de Pau en indiquant que l'appel porte sur la totalité du dispositif du jugement.

Par ordonnance du 10 mars 2021, l'affaire a été renvoyée à cette Cour compte tenu de la qualité d’avocat au barreau de Bayonne de M. [A]-[P].

Le 30 juin 2021, M. [A]-[P] vendu le bien donné à bail à la SCI Compagnie des Arceaux.

La clôture a été prononcée le 9 février 2022 et l'affaire fixée à l'audience de la Cour du 7 mars2022.

PRETENTIONS ET MOYENS :

Par dernières conclusions notifiées le 3 février 2022, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, la SAS La Pizzeria présente l'argumentation suivante :

- Il n'existe aucun motif de déplafonnement :

* l'analyse des critères 1

à 4 de l'article L. 145-33 du code de commerce

doit se faire sur la période du 1er janvier 2000 au 30 juin 2014, le bail s'étant prolongé depuis le congé sans renouvellement, avec l'exercice du droit de repenti r.

* les caractéristiques des locaux et la situation juridique des parties n'ont pas été modifiées.

* l'expert a été catégorique sur l'absence de modification notable des facteurs locaux de commercialité : population en baisse de 15 %, contrairement aux autres communes, vieillissement de la population, ce qui rend inopérant les arguments sur l'évolution des équipements urbains, absence d'incidence des résidences secondaires, clientèle haut de gamme en diminution, grande concurrence des établissements de restauration, fermeture de 9 locaux sur l'avenue.

* son chiffre d'affaires a augmenté car sa nouvelle direction a augmenté les plages horaires d’ouverture, comme en atteste son expert-comptable.

* le bailleur se réfère à d'autres quartiers, comme celui de la Halle, non comparables, et à certains aménagements postérieurs à la prise d'effet du bail (tram-bus, plateau sportif).

* la jurisprudence dominante entérine cette absence d'évolution, à l'exception d'une décision concernant une marque Hifi très haut de gamme.

- Subsidiairement :

* il n'existe pas de locaux similaires et, selon les critères traditionnels, l'expert a calculé une surface pondérée de 249,45 m² sur 4 zones.

* le bailleur propose des coefficients déterminés en 2017, soit après le renouvellement, mais, alors qu'il est propriétaire de nombreux locaux dans cette zone, s'est abstenu de fournir l'ensemble des loyers commerciaux.

* l'expert a travaillé sur la charte de l'expertise de 2012, que le juge des loyers n'a pas suivie dans les coefficients proposés, pour une raison inexpliquée.

* l'expert a également pris des références qui ne correspondent pas exactement à sa situation et sont un peu excessives.

Au terme de ses conclusions, elle demande à la Cour de :

- réformer le jugement en toutes ses dispositions,

- juger que le loyer du bail renouvelé à effet du 1er juillet 2014 est plafonné dans les conditions de l'article L. 145-34 du code de commerce

à la somme de 54 966,45 Euros, soit 4 580,53 Euros mensuels,

- subsidiairement, si la Cour venait à confirmer le principe du déplafonnement,

- le fixer à 31 390 Euros HT/an, soit 2 615,84 Euros/mois,

- très subsidiairement, le fixer à 66 732 Euros HT/an.

- condamner M. [A]-[P] au paiement de la somme de 4 000 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et à supporter les dépens incluant le coût de l'expertise d'un montant de 3 441,63 Euros.

*

**

Par dernières conclusions notifiées le 7 février 2022, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, [S] [A]-[P] et la SCI Compagnie des Arceaux (qui intervient volontairement) présentent l'argumentation suivante, basée sur l'application des critères des articles R. 145-2 et R.145-8 du code de commerce

:

- L'immeuble est situé sur un emplacement de premier ordre, comme l'a reconnu le preneur au cours de la première procédure, lequel réclame pourtant une baisse de 15 % du prix initialement fixé.

- Le contrat est particulièrement avantageux pour le preneur, les clauses d'entretien étant celles du droit commun.

- Le tribunal a listé les éléments qui attestent d'une évolution des facteurs locaux de commercialité, contenus dans une lettre du maire du 13 novembre 2014, qui ont eu une répercussion positive sur l'attractivité et le commerce, comme deux décisions rendues en 2014 l'ont reconnu, la taxe de séjour, augmentée de façon significative, devant être prise en compte.

- M. [B], expert nommé lors de la première procédure, avait identifié un local donné à bail par la société Geca strictement identique qui doit servir de base au nouveau loyer.

- Les références pertinentes permettent d'arrêter un prix annuel d'au moins 325 Euros/m² sur la base de locaux équivalents, ce qui aboutit à un prix annuel de 102 600 Euros.

- A défaut d'équivalence, et sur la base de la surface pondérée de 332 m², en prenant en compte le fait que les zonages des locaux des boutiques ne peuvent être appliqués à un restaurant, qu'une mezzanine peut être complètement exploitée, et également, par exemple, de l'autorisation municipale d'exploiter une terrasse en sus de la terrasse habituelle, sa proposition subsidiaire doit être entérinée.

- La charte de l'expertise sur laquelle l'expert s'est basé, qui donne lieu régulièrement à de nouvelles éditions, doit être actualisée, et il faut prendre en compte l'ensemble de commerces et pas seulement les restaurants, soit les locaux Toledo, La Poste, Banque Courtois, Comptoirs des Cotonniers.

- L'expert a, en réalité, indirectement tenu compte d'une valeur à la date de son expertise et non en2014.

Au terme de leurs conclusions, ils demandent à la Cour de :

- confirmer le jugement sur le principe du déplafonnement, mais l'infirmer sur le quantum alloué,

- à titre principal :

- déplafonner le loyer des lieux loués à 102 600 Euros HT/an depuis le 1er juillet 2014,

- à titre subsidiaire :

- fixer le loyer annuel du bail renouvelé à 90 000 Euros HT qui est le montant de celui du local équivalent contigu,

- à titre très subsidiaire :

- confirmer le chiffre de 78 000 Euros fixé par le premier juge,

- dans tous les cas :

- confirmer les autres dispositions du jugement,

- rejeter les demandes présentées par l'appelante.

-------------------

MOTIFS :

Selon le premier alinéa de l'article L. 145-34 du code de commerce

, à moins d'une modification notable des caractéristiques du local considéré, de la destination des lieux, des obligations respectives des parties, et des facteurs locaux de commercialité, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler, si sa durée n'est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l'indice trimestriel des loyers des activités tertiaires mentionnés au

premier et deuxième alinéas de l'article L.112-2 du code monétaire et fi nancier

,publié par l'Insti tut National de la Stati sti que et des Etudes Economiques.

Selon l'article R. 145-6 du même code, les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l'intérêt que présentent, pour le commerce considéré, l'importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l'att rait particulier ou des sujétions que peut présenter l'emplacement pour l'activité considérée et des modifications que ces éléments subissent d'une manière durable ou provisoire.

En l'espèce, en premier lieu, il est constant qu'en vertu de la règle du plafonnement, et en vertu de la variation de l'indice contractuel, le prix annuel du bail au 1er juillet 2014 est de 54 966,45 Euros.

En second lieu, l'expert judiciaire a situé et décrit ainsi les locaux donnés à bail commercial à la SAS La Pizzeria :

- l'immeuble '[Adresse 5]' dans lequel est situé le local en litige, constitué de 9 lots, a été créé par l'architecte [K] vers 1910 selon le principe de la 'galerie couverte' et comporte 23 arceaux à usage de commerces surplombés de deux immeubles édifiés dans les années 1960 sur 8 étages.

- le local donné à bail occupe trois arceaux sur une surface linéaire de 13,20 m, de très bonne visibilité, dispose d'un raccordement au réseau collectif d'assainissement et est raccordé aux réseaux électrique et téléphonique.

- il est constitué d'une surface totale de 542 m², composée des éléments suivants :

* en rez-de-chaussée : d'une salle de restaurant, d'une cuisine et d'un local cuisine,

* d'une mezzanine aménagée en seconde salle de restaurant,

* au 1er étage : d'un dégagement, d'un bureau, d'une salle de lavage, d'une salle des machines, d’une pièce, de toilettes,

* au sous-sol : d'un dégagement, d'une chaufferie, d'un laboratoire, d'un dégagement, de locaux sociaux et de réserves.

- la répartition des surfaces est la suivante : 231 m² de surface commerciale, 186 m² de surface utile, 64 m² de bureaux et locaux sociaux, 60 m² de réserves.

- les locaux sont en bon état et sont bien adaptés à l'activité de pizzeria.

Il a ensuite décrit l'environnement des locaux comme suit :

- la ville de [Localité 6] compte 25 480 habitants réparti s sur une surface de 11,66 km², est une  station balnéaire prestigieuse de la côte atlantique et est desservie par l'autoroute [Localité7]/Espagne, la RD 810, une gare SNCF et un aéroport à 6 km.

- il existe trois types de transports en commun urbains : une ligne Chronobus qui dessert toute la côte, une ligne interurbaine qui dessert l'agglomération et des navettes gratuites.

- le quartier où se trouve le local donné à bail est situé au centre-ville à proximité de l'hôtel de ville et de la plage, mais ne donne pas directement sur le front de mer, et est à caractère résidentiel avec immeubles anciens comprenant des appartements dans les étages et des commerces en rez-de-chaussée.

- la zone recouvre les parties agglomérées les plus denses du centre-ville, et est essentiellement destinée à la construction de logements, commerces et bureaux et peut être qualifiée de très commerçante.

- le patrimoine architectural est exceptionnel et constitue un bâti typique des sites urbains basques et balnéaires, les constructions étant limitées à certaines hauteurs pour le préserver.

- le local est accessible par l'avenue Edouard VII, artère très fréquentée par les automobilistes et les piétons, et il existe des emplacements de stationnement en surface et dans 2 parkings souterrains.

L'expert judiciaire a noté les facteurs locaux de commercialité suivants (peu important le bref avis du maire dans une lettre du 13 novembre 2014) :

- la ville de [Localité 6], créée il y a plus de 6 siècles et initialement constituée d'un village d’agriculteurs et de pêcheurs, a vu se développer une vocation balnéaire au 18ème siècle avec création de maisons bourgeoises, d'hôtels, casinos et salles de spectacles, puis avec la construction de villas et de lotissements.

- la population a connu une croissance régulière depuis le début des années 1900 jusqu'à l'année1999, où elle a commencé à baisser, l'âge moyen des habitants s'élevant, et jusqu'à 40 % de la population étant composée de personnes de plus de 60 ans.

- la population permanente, constituée des résidences principales et secondaires et des visiteurs, permet d'occuper 60 % des hôtels en permanence.

- le tourisme génère une activité toute l'année grâce à une grande diversification des produits touristiques et culturels, avec des périodes de pointe pendant les vacances scolaires.

- l'activité se concentre en centre-ville où se trouvent les bâtiments administratifs, les centres de congrès, les salles de spectacles, une médiathèque, la majorité des commerces et desifttéifi (id[10]Médl[9]Citédl'[11]) infrastructures spécifiques (ancienne gare du [10], Musée de la [9], Cité de l'[11]).

- la ville a attiré une clientèle aux revenus importants.

- le peu d'espace disponible restreint désormais les constructions.

- la ville comporte 274 établissements de restauration principalement implantés en centre-ville.

- les locaux en litige bénéficient d'une forte fréquentation.

Il a relevé que l'avenue Edouard VII 'est riche en enseignes prestigieuses de bijouteries et prêt-à-porter, de banques, restaurants, hôtels' et que 'si le centre-ville de [Localité 6] a fait l'objet de nombreux travaux depuis 2011 qui ont pour but de favoriser l'accès piétonnier de [Localité 6]'ayant pour effet de rendre inaccessibles certaines rues aux véhicules, 'on ne peut considérer que ces travaux ont impacté les activités commerciales de l'avenue Edouard VII'.

L'expert a expressément conclu 'nous considérons qu'il n'y a pas eu de modifications notables des facteurs locaux de commercialité' du fait que l'avenue Edouard VII a toujours conservé 'une qualité commerciale exceptionnelle caractérisée par la pérennité des enseignes qui y sont implantées depuis de nombreuses années.'

Par conséquent, les éléments relevés par le premier juge (création d'une médiathèque achevée en1984, d'un parking souterrain, d'un spa à l'Hôtel du Palais en 2007, édification de l'Hôtel Président, création de terrasses et d'une navette gratuite et augmentation des ressources de la ville) ne suffisent pas à caractériser une modification notable des facteurs locaux de commercialité pour un emplacement déjà exceptionnellement situé ayant fait le plein de ses capacités, confronté à une baisse de la population de la ville.

D'ailleurs, le cabinet Sogeca, expert-comptable du preneur, a établi une attestation datée du 7 mars2019 indiquant que, pour la période courant entre 2009 et 2018, l'augmentation du chiffre d'affaires de la SAS La Pizzeria est lié à une augmentation des jours d'ouverture et de l'amplitude horaire et qu'elle est par conséquent sans lien avec une amélioration des facteurs locaux de commercialité.

Les expertises réalisées dans un autre cadre que le bailleur dépose aux débats ne contredisent pas ces éléments.

En effet, elles ne contiennent aucune analyse de l'évolution des facteurs locaux de commercialité :

- l'expertise réalisée par Mme [B] le 11 mai 2011 ne porte que sur le chiffrage de l'indemnité d'éviction, laquelle est liée au préjudice causé au preneur, et sur l'indemnité d'occupation.

- l'expertise réalisée par M. [M] le 10 septembre 2009 décrit les locaux, estime la valeur locative et les indemnités d'éviction et d'occupation.

- l'expertise réalisée par Mme [V] le 14 août 2013 concerne en outre un litige sur un magasin opposant d'autres parties que celles du présent litige.

Si l'expertise réalisée par M. [R] le 15 décembre 2016 liste des travaux effectués dans le centre de[Localité 6], cet expert note qu'ils n'ont pas apporté de clientèle supplémentaire et se limite à indiquer que les facteurs de commercialité 'sont notables' sans argumenter sur leur évolution.

Le prix annuel du bail renouvelé est par conséquent fixé à son plafond de 54 966,45 Euros, ce qui rend sans objet les explications des intimés qui tendent à le faire fixer à une valeur locative comprise entre 102 600 Euros et 78 000 Euros, non susceptible d'être retenue compte tenu de l’application de la règle du plafonnement.

Le jugement sera infirmé et le prix annuel du bail renouvelé fixé à son plafond, soit 54 966,45 Euros.

Enfin, l'équité nécessite d'allouer à l'appelante la somme de 4 000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

.

Partie succombante, M. [A]-[P] sera condamné aux entiers dépens qui incluent de plein droit le cout de l'expertise judiciaire, en application de l'article 695-4° du code de procédure civile

.

PAR CES MOTIFS :

- la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

- INFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;

- STATUANT à nouveau,

- REJETTE la demande de déplafonnement présentée par le bailleur ;

- FIXE le prix annuel hors taxes du bail du 30 juin 2000 renouvelé à compter du 1er juillet 2014 à54 966,45 Euros ;

- CONDAMNE [S] [A]-[P] à payer à la SAS La Pizzeria la somme de 4 000 Euros en application del'

article 700 du code de procédure civile

;

- CONDAMNE la SCI Compagnie des Arceaux aux dépens de première instance et d'appel.

Vu l'

article 456 du code de procédure civile

, le présent arrêt a été signé par Dominique BENON, Conseiller ayant participé au délibéré en l'absence de Mme la présidente de chambre empêchée, et par Charlotte ROSA, adjoint administratif faisant fonction de greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.