Cass. com., 9 avril 1996, n° 94-12.350
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Nicot
Rapporteur :
M. Canivet
Avocat général :
Mme Piniot
Avocats :
SCP Piwnica et Molinié, SCP de Chaisemartin et Courjon
Sur le premier moyen, pris en ses cinq branches :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt (Toulouse, 16 décembre 1993) de l'avoir condamnée à payer à M. X... une certaine somme alors, selon le pourvoi, d'une part, que la cour d'appel a déduit de la circonstance tirée du défaut de signature de projets de statuts de société en participation que M. X... n'avait pas eu l'intention de s'associer avec elle pour l'exploitation du restaurant Le Capoul; qu'en se fondant ainsi sur une circonstance dont il ne résultait pas que M. X... n'ait pas eu l'intention de s'associer et de participer aux bénéfices et aux pertes de l'entreprise qu'il dirigeait, mais seulement qu'il n'avait pas accepté de signer les statuts d'une société déterminée sans constater que c'est le principe même de l'adhésion au pacte social qui aurait motivé le refus de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1832 et 1984 du Code civil; alors, d'autre part, qu'ayant constaté que M. X... n'avait pas eu l'intention de s'associer avec elle pour l'exploitation du restaurant Le Capoul, qu'il n'avait pas signé quatre projets de statuts de société en participation, sans rechercher si ces projets n'avaient pas été établis à l'initiative conjointe des parties, qui en partageaient les frais et s'ils ne révélaient pas, même si les parties ne s'accordaient pas sur les modalités de la société à constituer, l'existence d'une promesse réciproque de société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1832 et 1984 du Code civil; alors, en outre, qu'elle versait aux débats une délégation de signature bancaire donnée conjointement par M. Y..., son dirigeant et M. X..., en qualité de cogérant de la société restaurant le Capoul"; qu'en déclarant que "l'argument tiré du fait que M. X... avait reçu une délégation de signature bancaire" était inopérant "puisqu'il n'avait pu faire usage faute de signature du projet de statut société, la cour d'appel a dénaturé le document qui constituait une délégation de signature donné par M. X... qui se présentait comme co-gérant d'une société Restaurant La Capoul, en violation de l'article 1134 du Code civil et privé sa décision de base légale en s'abstenant de rechercher si ce document n'était pas de nature à établir que M. X... agissait comme associé d'une société distincte d'elle même et dont il se présentait comme le co-gérant et alors, enfin, qu'elle produisait une déclaration d'exploitation du restaurant Le Capoul, établie par M. X... "en qualité de co-gérant"; qu'en se bornant à affirmer que le fait que M. X... "avait été présenté comme co-gérant dans une déclaration d'exploitation de licence de restaurant" était inopposable "faute de signature du projet de statut social", sans rechercher si cette déclaration ne révélait pas l'intention de M. X... de s'associer à l'entreprise à laquelle il apportait son industrie et dont il se présentait comme le co-gérant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1832 et 1984 du Code civil;
Mais attendu, en premier lieu, qu'en retenant que M. X... avait refusé la signature de quatre projets successifs de statuts d'association en participation, que ce refus traduisait de manière non équivoque la désaccord entre les parties sur la forme juridique de la collaboration jusqu'alors proposée et que donc, pendant cette période, au cours de laquelle était négociée la formule à venir, n'existait pas encore, et n'existerait jamais en définitive, une volonté non équivoque de tous les associés de collaborer ensemble et sur un pied d'égalité à la poursuite de l'oeuvre commune, la cour d'appel a procédé à la recherche prétendument omise;
Attendu, en second lieu, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des conclusions produites, que la société ait soutenu qu'avait été conclu entre les parties une promesse réciproque de société; que la moyen est donc nouveau et mélangé de fait et de droit;
Attendu, enfin, qu'en retenant que l'absence d'affectio societatis rendait inopérant l'argument tiré du fait que M. X... avait reçu une délégation de signature bancaire puisqu'il n'a pu en faire usage faute de signature du projet de statut social et, pour les mêmes motifs, celui du fait qu'il avait été présenté comme "co-gérant" dans une déclaration d'exploitation de licence de restaurant, la cour d'appel, appréciant, hors toute dénaturation, la portée des éléments de preuve produits, a procédé aux recherches prétendument omises;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches;
Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que la société fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. X... une certaine somme et d'avoir rejeté sa demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts alors, selon le pourvoi, d'une part, que le mandataire répond des fautes qu'il commet dans sa gestion, l'inexécution du mandat faisant présumer la faute du mandataire; que la cour d'appel s'est bornée à affirmer, pour rejeter sa demande reconventionnelle en réparation des conséquences de la brusque rupture par M. X... de sa participation à l'exploitation du restaurant Le Capoul, que la rupture était "consécutive au désaccord préexistant entre (les) partenaires sur le choix de la formule juridique de collaboration professionnelle à arrêter", sans préciser en quoi le fait que M. X... ait brutalement cessé de diriger le restaurant le 12 janvier 1991 n'était pas fautif, et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles 1991 et 1992 du Code civil et alors, d'autre part, que la faute du mandataire est de nature à justifier la réduction de son salaire; qu'en s'abstenant de rechercher si la brusque rupture par M. X... de sa participation à la direction du restaurant La Capoul, ne constituait pas une faute justifiant la réduction de la rémunération due à M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles 1991, 1992, 1998 et suivants du Code civil;
Mais attendu que la cour d'appel ayant relevé, d'un côté, que M. X... avait oeuvré du mois de septembre 1989 au mois de janvier 1992 à l'aménagement, au lancement et au début d'exploitation du nouveau restaurant Le Capoul, à la demande de la société, qu'à compter du mois d'août 1990 quatre projets d'association en participation avaient été proposés à la signature de M. X... qui les a refusés, celui-ci soutenant qu'il souhaitait se voir reconnaître un statut de salarié et non d'associé et qu'il avait renouvelé des demandes en ce sens, au cours de réunions de travail qui se sont tenues les 30 novembre 1990, et 14, 15 et 20 décembre 1990, d'un autre côté, que la rupture des relations entre M. X... et la société était consécutive au désaccord préexistant entre les parties sur le choix de la formule juridique de collaboration professionnelle à arrêter, ce dont il résultait que la cessation de l'exécution du mandat n'avait pas été brutale, et qu'elle était, par conséquent, exempte de faute, la cour d'appel a légalement justifié sa décision; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.